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Julia Bettinotti (Éditeur scientifique)Pascale Noizet (Éditeur scientifique)Denis Saint-Jacques (Préfacier, etc.)
EAN : 9782921053327
201 pages
Nuit Blanche (20/09/2005)
4/5   1 notes
Résumé :

Que vous ne connaissiez Delly que de nom ou que vous ayez lu l'ensemble de sa production, que vous sachiez ou non que les romans de Delly sont précurseurs des Harlequin, « ce livre est pour vous », comme l'affirme Denis Saint-Jacques dans son avant-propos. Grâce à Madeleine Chambaud et à Richard Saint-Germain, vous pourrez disserter tant sur le personnage de Delly que sur les multiples éditions de son oeuvre. Grâce ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Méprisé, regardé comme une sous-littérature mais comptant dans ses rangs des auteurs dont les tirages feront toujours rêver, le roman sentimental, dit aussi "à l'eau de rose", a longtemps été écarté des ouvrages de référence sur la littérature. Cet ostracisme est aussi stupide que misogyne puisque, faut-il le préciser, le roman sentimental attire - en tous cas officiellement - une clientèle essentiellement féminine. Or, c'est bien connu, ce qui plaît aux têtes féminines ne saurait être digne d'intérêt.

Il est vrai que, pendant près de deux siècles, le roman sentimental non seulement était réservé aux femmes mais était aussi écrit par des femmes - les pseudonymes masculins pris dans le catalogue de la célèbre "Bibliothèque de ma fille", tels "Emmanuel Soy" ou "Max du Veuzit", ne sauraient abuser. Il faudra attendre la toute fin du XXème siècle pour que certains lecteurs de sexe mâle avouent sans détour se délasser de temps à autre avec un volume Harlequin. Mais ces valeureux, dont il faut ici saluer la remarquable intégrité intellectuelle, sont bien peu nombreux à oser ...

Depuis la "Pamela" de Richardson (oeuvre d'un homme, soulignons-le, d'où le petit parfum sadien du livre) jusqu'au dernier sorti de Cabrera Infante, auteur espagnole très prisée que Vargas Llosa qualifie même de "phénomène socio-culturel" - excusez du peu - le roman sentimental n'a cessé de reprendre les canevas des contes de fées de notre enfance en les mettant au goût du jour. Bref, comme tout genre littéraire digne de ce nom, le roman sentimental apporte à son lecteur du rêve, et encore du rêve. Simplement, il le fait de manière plus excessive que la moyenne. Les "Bons" y sont terriblement bons et les "Méchants", affreusement méchants. du premier jusqu'à l'avant-dernier chapitre, s'ouvrent et se referment des chausse-trappes et des pièges plus sournois et cruels les uns que les autres. Enfin, au chapitre ultime, tout rentre dans l'ordre, le "Méchant" est puni (voire assassiné, c'est bien fait, tiens ! ) et le "Bon" récompensé : l'histoire se termine bien et les héros partent vivre ensemble, dans la perspective d'avoir beaucoup d'enfants.

Dans le genre, nul n'a jamais pu faire mieux que Delly et l'originalité de "Guimauve et Fleur d'Oranger" est de rendre enfin un hommage - hélas ! trop bref - à l'oeuvre de cet auteur bicéphale puisque, on ne le répètera jamais assez pour les néophytes qui le découvrent tous les jours, se dissimulaient sous ce pseudonyme sibyllin une soeur et un frère, Marie et Frédéric Petitjean de la Rosière.

L'analyse du "schéma Delly" est finement menée et, pour une fois, on ne fait pas l'impasse sur le côté le plus intéressant de l'oeuvre : son érotisme diffus et pourtant puissant. Seule une candeur abyssale peut expliquer le nihil obstat accordé régulièrement par la sacro-sainte "Bonne Presse", d'obédience strictement catholique, aux romans de Delly. A moins qu'il ne s'agisse d'un mépris absolu exercé à l'encontre de l'intelligence des lectrices de cet auteur, trop sottes et trop naïves pour comprendre des sous-entendus pourtant très clairs. La sexualité des personnages masculins est on ne peut plus active et on ne saurait nier que les jeunes vierges qui leur sont opposées s'en rendent compte très vite et font tout pour l'attiser. (Rarissimes sont, chez Delly, les jeunes filles vraiment "nunuches.")

Ceci dit, faut-il vraiment s'étonner ? Delly ne nous raconte-elle pas, à sa façon, ce que Zola décrit dans "Pot-Bouille", lorsqu'il nous montre les avances de Berthe Josserand à son futur époux, Auguste Vabre ? Bien qu'aux antipodes l'un de l'autre, ces deux auteurs, la petite souris versaillaise et le fils d'immigré italien reposant au Panthéon, ne rapportent-ils pas la schizophrénie d'une société pour qui la femme ne pouvait être que mère, jeune fille ou putain ?

Quoi qu'il en soit, tous les admirateurs de Delly trouveront ici quelques réponses à leurs propres interrogations sur l'inaltérable succès de son oeuvre - ainsi qu'une bibliographie quasi complète. A compléter peut-être par des ouvrages comme "Ouvrières des Lettres", d'Ellen Constans, et quelques autres ouvrages édités dans la même collection, aux Editions Nuit Blanche. Ajoutons qu'on souhaiterait voir un ouvrage similaire consacré à l'univers de Max du Veuzit. ;o)
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
[...] ... Les histoires de Delly se déroulent presque toujours dans la "bonne société", comme on disait au XIXème siècle ; le B.C.-B.G. des protagonistes est donc d'abord décliné par leur nom : patronyme aristocratique, souvent précédé d'un titre de noblesse. Sur les 20 histoires des 20 romans qui constituent notre corpus ( 1 ), 13 ont des héros au nom aristocratique. Sur les 7 noms plébéiens, un pseudonyme cache un lord anglais de vieille souche ( 2 ) et trois patronymes commencent significativement par un "D", ce qui veut donner à croire que les ancêtres de ces héros appartenaient à la noblesse.

Les jeunes premières appartiennent plus souvent à la noblesse que leurs futurs époux ; 10 portent un patronyme noble : le récit révèlera que 2, d'abord crues plébéiennes, sont en fait des aristocrates ; 3 autres, en dépit de leur nom, sont d'une race aristocratique , 1 encore a pour mère une aristocrate hongroise et un père grec qui fut un peintre de génie ; 4 appartiennent à des familles bourgeoises et, dans ce cas, le narrateur prend toujours soin de souligner qu'elles-mêmes et leurs familles pratiquent les vertus chrétiennes qui valent bien un patronyme noble. A notre avis, cette supériorité numérique a un sens idéologique clair : la femme doit compenser son infériorité d'individu par son inclusion dans une race supérieure ; son ascendance et son appartenance aristocratiques se manifesteront toujours, d'ailleurs, par sa "distinction" et son "instinct patricien." Ainsi, le choix du héros et le mariage seront justifiés : point de mésalliance mais une égalité des rangs sociaux fondée sur des apports différents selon les sexes. On reste entre B.C.-B.G.

La désignation récurrente des héros par leurs titres (princes, comtes ou ... rois et rajahs de pays lointains) accentue leur noblesse. Ici apparaît une nouvelle dissymétrie sexuelle : les héroïnes sont rarement désignées par ce titre qui, pour l'homme, représente à la fois une position sociale et une fonction ; les jeunes filles et les jeunes femmes obtiennent un rang, par mâle interposé, lors du mariage seulement.


( 1 ) : des 23 volumes que nous avons lus, 6 comportent des histoires en deux parties dont la deuxième est bien la suite, même si elle porte un titre propre. Ces 23 romans constituent environ 25% de la production de Delly.

( 2 ) : Dans "Le Feu sous la Glace", le Dr Alwyn Clenmare est en réalité lord Rusfolk, qui recouvrera sa position sociale dans la gentry au cours du roman.

( 3 ) : Norbert Defrennes ("Cité des Anges"), Régis Dorians ("Rue des Trois Grâces") et Lorenzo Damplesmes ("Un Marquis de Carabas"). Le procédé apparaît de façon récurrente dans les romans de Paul de Kock et chez bien d'autres romanciers français du XIXème siècle. ... [...]
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[...] ... Raymond de Faligny se souvient : quelques mois plus tôt, lui-même et la jeune Elfrida Norsten, que séparent la haine ancestrale de leurs familles et un crime récent, se sont trouvés seuls dans la jungle. Tremblement de terre, ouragan et tonnerre : la jeune fille s'évanouit dans les bras de Raymond et l'amour éclate dans ce coeur fier qui croyait haïr et être haï. Cri du coeur, cri du corps, du désir, dont les traces sont désormais inscrites dans un souvenir obsédant.

On dit les romans de Delly chastes et puritains ; seuls y dialogueraient des coeurs et des âmes qu'un "amour permis" ( 1 ) unira au dénouement par le lien d'un mariage chrétien. Ces oeuvres se réclament d'une morale catholique, selon laquelle l'amour ne peut devenir une valeur positive que s'il repose sur la reconnaissance mutuelle de la qualité de deux âmes ; ce sont des romans d'amour chrétiens.

Pourtant, leur sens n'est peut-être pas aussi limpide ni aussi univoque qu'il y paraît de prime abord. Henry de Gesvres, le héros de "La Chatte Blanche", jeune, beau, d'excellente famille et d'une valeur morale si haute qu'il en impose à tous, déclare à son père, qui fut un viveur et le pousse à un mariage d'argent, qu'il aspire à "une complète union d'âmes ( 2 ), à l'ombre du foyer." (Delly - 1928 : 59). Mais, au même moment :

"[...] il revit en esprit le délicieux visage de Yolaine de Rambuges et ses yeux, où il avait cru saisir le reflet d'une âme très pure. Il pensa, avec un petit frisson d'émoi : "Oui, c'est mon rêve, physiquement. Mais sais-je ce qu'elle est au fond ? ( 2 )" (P. 60)

L'amour est bien aussi désir du corps féminin, au moins trouble, émoi devant la beauté, même s'il est postulé qu'elle est le reflet de l'âme ; l'attirance physique précède la reconnaissance morale. ...

( 1 ) : c'est le héros de "La Chatte Blanche" (Delly - 1928 : 125) qui oppose l'"amour permis" aux liaisons irrégulières et passagères qui n'engagent que les sens et qu'il condamne au nom de la morale.

( 2 ) : c'est nous qui soulignons.

( 3 ) : c'est nous qui soulignons. ...[...]
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