Issu de petite noblesse, Théodore de Bèze est avant tout un humaniste, poète considéré comme doué par ses contemporains, mais qui sensible à l'esprit du temps va se tourner vers le protestantisme, et poussant jusqu'au bout sa conversion, partir s'établir en Suisse, devenir très proche de Calvin, puis prendre sa suite à Genève. Théologien, homme politique, il n'aura plus vraiment de temps à consacrer aux Muses.
Les emblèmes (Emblemata dans l'original) sont des courts textes écrits en vers et en latin (langue que Théodore de Bèze maîtrisait particulièrement bien) pour illustrer des gravures faites par Pierre Eskrich, dessinateur et graveur. le texte et les images sont complémentaires, le texte explique le dessin, lui donne un sens, mais se comprend moins bien sans lui. Ces textes et images, en dehors de l'aspect artistique, ont une visée morale, une sorte de leçon réformée du monde. La « vraie » religion doit mener l'homme de bien, lui fournir les clés pour conduire sa vie, de distinguer l'essentiel de l'accessoire. Publié en 1580, c'est à dire à moment où Théodore de Bèze préside la communauté réformée de Genève depuis une quinzaine d'année, c'est l'expression d'une sorte de conception du monde, sans doute bien plus simplifiée que les textes théologiques, mais qui dessine le même univers.
Les gravures sont plutôt réussies, et l'ouvrage proposé par les Editions du Cosmogone est un bel objet, offrant le texte latin et sa traduction française. Aujourd'hui ces textes peuvent sembler un brin didactiques, même si le talent de poète est incontestable. Une curiosité.
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Comme un saphir serti dan une bague d'or
Voit son éclat cent mille fois multiplié,
Ainsi, quand la vertu dans un beau corps se loge,
Plus vifs cent mille fois sont les feux qu'elle lance.
Nous rions des enfants que leurs jeux accaparent,
Des huttes, des pantins qu'en paille ils confectionnent.
Mais que faites-vous de mieux, vous qu'on voit dévorés
Par les frivoles soins de la vie d'ici-bas ?