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EAN : 9782883870161
Plaisir de lire (30/11/-1)
4.12/5   12 notes
Résumé :
C’est pendant l’hiver 1797-1798 que les Vaudois se libérèrent des Bernois.
Les troupes françaises traversèrent le lac Léman et marchèrent vers la capitale.
Au milieu de la tourmente de la grande Histoire, la vie quotidienne des habitants d’un village montagnard se trouve soudain bouleversée.
Si les idées révolutionnaires se sont déjà infiltrées dans la vallée, la fidélité au régime bernois reste ancrée dans les esprits.

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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Une fois de plus CF Ramuz situe son intrigue à la montagne, dans un de ces petits villages qu'il sait merveilleusement dépeindre et dont il se plaît à raconter la vie.
Un village charmant et paisible dont la quiétude va être chamboulée par les soubresauts de l'Histoire.

Nous sommes à la fin du XVIIIème siècle et les idées révolutionnaires venues de France séduisent une partie de la Suisse.
Une partie seulement, et dans le village, les habitants décident de prendre les armes... enfin, certains d'entre eux : les villageois sont divisés, des familles sont écartelées, des amoureux se retrouvent dans des camps opposés.
C'en est fini de la merveilleuse tranquillité qui régnait jusque-là !

Avec son habituel sens de l'intrigue, Ramuz fait évoluer des personnages terriblement attachants et le lecteur assiste impuissant à tout le gâchis qui se déroule sous ses yeux.
Contrairement à d'autres de ses romans, l'auteur s'attache plus à dépeindre les hommes que la nature qui apparaît comme pétrifiée devant la folie qui s'empare de tous.

Absurdité de la guerre, sagesse de la nature : la vie paisible reprendra son cours dans le village, car "rien n'a jamais terni la pureté du bleu de la gentiane, qui vient de s'ouvrir comme un petit oeil".

C'est beau. C'est du Ramuz.
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Pour un Ramuz, voici un livre étonnamment accessible ! D'ordinaire, il ne s'y passe rien ; et quand il s'y passe quelque chose, on ne comprend pas quoi. Ici il se passe beaucoup de choses, et même sans connaître le contexte géopolitique de la Suisse du XVIIIème siècle, on arrive à comprendre quoi. Même son style, si particulier et si typique, semble s'être un peu discipliné et assagi. Et pourtant, il garde toute sa beauté.

Un village dans les montagnes de la Suisse romande. Les idées venues de France se répandent et divisent. En bas, près du lac, on attend avec impatience que les révolutionnaires viennent apporter la liberté et la fraternité. Mais en haut, dans les hameaux des hauteurs, on reste fidèle à l'alliance ancestrale avec les messieurs de Berne. La division gagne les foyers. le jeune Lucien, postier du village, est écartelé entre ses idéaux, son père chef de file des ultraconservateurs, et sa fiancée qui essaye de le convaincre de se tenir tranquille jusqu'à ce qu'ils aient pu se marier…

D'habitude, Ramuz aime à peindre avant tout les paysages, et leurs habitants en font comme partie. Cette fois, les éléments sont les témoins muets et sereins des rages qui habitent les hommes, et c'est eux qu'il a minutieusement peints. Avec l'indifférence la plus totale pour leurs convictions. le vieux paysan austère, rigide luthérien prêt à sacrifier sa vie sans un soupir ; l'ancien soldat goguenard, ayant roulé sa bosse par tous les chemins ; la jeune fille tentant désespérément d'arracher l'homme qu'elle aime à l'histoire en marche…

Peut-être la meilleure porte d'entrée pour pénétrer dans l'oeuvre protéiforme et complexe du plus grand des écrivains suisses. Avis aux amateurs…
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1915 : une guerre "mondiale" fait rage aux frontières de la traditionnelle (et sécurisante) "neutralité" helvétique : Ramuz, rentré de son "exil" parisien, est de retour à Lausanne en mars 1914 : retour "aux sources" de son pays Vaudois (où il fondera d'ailleurs bientôt la revue "Les cahiers vaudois" avec quelques autres écrivains helvètes francophones, dits "romands" : revue collégiale qui aura pour objet de publier et aider à faire connaître leurs textes... ).
Temps de crises où l'écrivain se penche sur la chronique révolutionnaire "à hauteur de village" : "La guerre dans le haut Pays" est une chronique emplie de personnages attachants, déroutants, contrastés et tourmentés, "ordinaires" (comme on le dit des personnages des "romans durs" de Georges Simenon - ce qui ne veut certes pas dire "banaux" !)...

Mais en voici la présentation , "l'argument"... soit le texte éditorial figurant en page IV de couverture de cette toute récente et belle rrésurgence ramuzienne ("Plaisir de lire") :

" C'est pendant l'hiver 1797-1798 que les Vaudois se libérèrent des Bernois.
Les troupes françaises traversèrent le lac Léman et marchèrent vers la capitale.
Au milieu de la tourmente de la grande Histoire, la vie quotidienne des habitants d'un village montagnard se trouve soudain bouleversée.
Si les idées révolutionnaires se sont déjà infiltrées dans la vallée, la fidélité au régime bernois reste ancrée dans les esprits.
Par son récit de ces événements, C.-F. Ramuz nous rapproche de 1798.
L'enthousiasme de l'instituteur Devenoge pour les idées de Rousseau, l'amour de Félicie et de David, l'opposition du fils à son père conservateur, les prophéties du mystique Isaïe, sont autant d'éléments modernes qui nous donnent à penser que nous sommes, nous aussi, des acteurs de l'actualité. "

Félicie et David : Roméo et Juliette au village... Les parents de Félicie, aimants, inquiets puis accablés... Des forces - extérieures puis intériorisées - qui menacent tout bonnement ce qu'on nommerait aujourd'hui le "vivre-ensemble", cette cohésion secrète des esprits et des coeurs... Une histoire éternelle... Viendront quelques morts dans la neige, la glace et la nuit, hélas... Sous le feu des absurdes mousquets...

"Ramuz et le Destin en marche", comme l'écrivait si joliment Julien GRACQ dans une correspondance privée (2004, je crois) - faisant suite à sa "bonne" réception (amusée) d'un exemplaire d' "Aline" - en "Cahiers Rouges" Grasset -, cette toute première fiction ramuzienne ...

Un très très beau livre ! Et sixième roman de "notre" grand Vaudois immortel ! (Bonne foi d' "Ariégeois parisien" !! :-)
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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Un roman aux allures de tragédie grecque ou shakespearienne.
Une guerre sur fond d'un destin implacable, un amour dans l'esprit de Roméo et Juliette.

Mais avec toujours cette façon de raconter, cette écriture ramuzienne que j'aime tant, écriture donnant à voir, beauté des paysages et rudesse de la vie, où la nature omniprésente est un des acteurs du drame, écriture dont le rythme change suivant les événements, j'en suis une fois de plus absolument émerveillé.
Encore un auteur exceptionnel qui mérite vraiment d'être lu.

L'histoire se situe en Suisse durant la période de la fin de la révolution française, quand celle-ci s'étend aux pays voisins.
Il y a la population du Pays d'En-Bas, ouverte aux idées nouvelles, et dans la montagne, ceux du Haut-Pays, protestants rigoristes, attachés à la tradition, aux idées obscurantistes, et croyant les prophéties mystiques d'un certain Isaïe; et qui plus est, pour certains, exerçant un patriarcat dur et autoritaire. Tel cet horrible Josias-Emmanuel Aviolat, homme d'une piété fanatique, qui refuse que son fils David se fiance avec la belle Félicie, au motif que le père de celle-ci, Jean Bonzon, est un homme « tiède ». Comme il lui impose d'arrêter le travail de la Poste, qui amène David à prendre le courrier dans une ville du Pays d'En-Bas, et donc, selon le père, à y être contaminé par les idées nouvelles.

Sur un malentendu, David croit que Félicie ne veut plus de lui, se refuse à prendre les armes à la demande de son père, s'enfuit dans le Pays d'En-Bas, et s'y engage dans l'armée révolutionnaire.

La suite, c'est le désespoir de Félicie, la guerre qui éclate, le combat dans la neige, et le dénouement affreux, inhumain et tragique. Je n'en dis pas plus, à vous de découvrir ce très beau roman.

Amour, folie et fanatisme, absurdité de la guerre, tels sont les ingrédients de cette histoire pessimiste, comme le sont souvent celles des récits de Ramuz.
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" (...) et rien n'a jamais terni la pureté du bleu de la gentiane, qui vient de s'ouvrir comme un petit oeil."

Roméo et Juliette dans les alpages.

Ni historique -si ce n'est par son contexte-, ni régionaliste -sa portée est universelle- ce très remarquable roman est un chef d'oeuvre qui mériterait une plus large audience. Ramuz, avec sa parcimonie habituelle, y raconte une tragédie villageoise toute de fureurs rentrées et de passions réprimées.

1797. le vent de liberté qui souffle sur la France révolutionnaire fraîchit le pays vaudois. Si dans la vallée, la bise républicaine est accueillie par des vivats, dans l'isolement de la montagne, elle est rejetée avec force. Ce monde reculé porte en effet sur ses épaules enneigées, le poids d'un puissant conservatisme idéologique et religieux. Ses villageois décident de résister par les armes à la subversion venue d'en bas.

Dans ce Haut-Pays, David, légèrement enivré par les idées nouvelles qui agitent la Suisse, aime Félicie. Seulement si la famille de la jeune fille est politiquement modérée, Josias-Emmanuel, le père de David, est un inflexible obscurantiste qui interdit à son fils d'aimer selon son coeur et de penser selon sa conscience.

Dans cette symphonie de neige et de sang, Ramuz manie les silences de son peuple de taiseux avec force. Qu'il décrive une explication avortée entre un père et son fils, un rendez-vous amoureux ou une cohabitation taciturne, l'écrivain hérisse ses mots de blancs et de vides assourdissants, donnant à entendre avec génie la compacité des non-dits.

La folie des hommes, en leitmotiv pathétique -celle douce d'un idiot ou d'un rimailleur, celle fatale d'un prédicateur, d'un puritain aveuglé ou d'une amoureuse hallucinée-, s'ajoute à la frénésie d'un monde qui bascule (La Guerre dans le Haut-Pays a été rédigé en 1915).

Mêlant à son habitude le passé de l'immédiat à un présent intemporel, Ramuz envisage son bouleversant roman selon différentes perspectives : soit il se place en témoin omniscient, soit, voussoyant le lecteur, il s'intègre dans la communauté des montagnards dont il nous dépeint la rudesse. Notre sensibilité s'appointe à cette proximité avec le narrateur.

Dans ce récit mâtiné d'archaïsmes et de brusqueries, la poésie subjugue, âpre et brûlante et transforme une romance paysanne en tragédie grecque.

Un miracle.
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Alors viennent des histoires qui datent des très anciens temps, mais dont on ne s'est jamais fatigué et qui semblent toujours nouvelles, où on voit les fées du lac bleu faire des repas de pierres précieuses dans une maison de cristal et des tout petits hommes bossus viennent la nuit voler la crème avec des cuillères de bois qu'ils portent pendues à leurs ceintures. Il y a aussi les âmes qui sont condamnées à errer éternellement sur les glaciers, et quand surviennent les grands froids, on les entend au loin, raconte-t-on, se lamenter. On voit les noyés des torrents, quand Jean Verro frappa son frère et le jeta dans le torrent [...]

[C.-F. RAMUZ, "La Guerre dans le Haut-Pays", 1915, IIème partie, chapitre IV]
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Mais David leva tout à coup ses yeux qu'il avait tenus jusqu'alors à terre, il les tourna vers son père, il vit que son père lui aussi le regardait. Et parce que son père le regardait ainsi, quelque chose remuait en lui, il sentit un picotement lui venir sous les paupières, il pensa : "Si le lui parlais de nouveau. L'autre jour déjà et au plus mauvais moment, je lui ai parlé. Il ne m'a pas compris. Pourtant, il y a quelque chose en lui qui me dit qu'il pourrait comprendre. J'ai vu ses yeux et je me laisserais aller avec des paroles de fils, non les mots durs et secs peut-être que j'ai eus, parce que voilà on est dressés comme des ennemis en face l'un de l'autre, mais peut-être qu'au fond on s'aime, seulement on a peur de cet amour… Père, je dirais, laissez-moi vous amener celle que j'aime ; tous les malentendus s'en iront du même coup. Qu'elle entre seulement par la porte que vous lui aurez vous-même ouverte ; vous serez là, vous lui direz : "Entre, car tu es ma fille et il y a longtemps qu'il n'y a pas eu de femme dans la maison…" Que vous lui disiez seulement cela, et toutes les autres pensées seront effacées, parce que, si on s'aimait, je n'en aurais plus besoin"
C'était ce qu'il se disait et il y avait le silence, et il y avait les yeux de son père qui se tenaient posés sur les siens, comme si Josias y eût lu tout cela, pourtant David ne parlait point encore, parce qu'il attendait que quelque chose vînt, mais pareillement le père attendait.
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Ils étaient assis l'un à côté de l'autre dans le bois du Tabousset ; il faisait dimanche ; il faisait silence ; des nuages comme des navires se balançaient dans le grand bleu du ciel. Il tenait cette main ; il sentait, lui aussi, qu'il n'avait plus qu'à se taire. Les mots qu'ils avaient laissés échapper s'étaient fondus dans le silence : le silence parlait pour eux, le silence disait mieux qu'eux tout se qu'ils avaient à se dire.
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Il avait devant lui une feuille de papier, une vieille écritoire ébréchée en faïence blanche ; et il mordillait les barbes de sa plume, parce que la rime ne venait pas. Il n'y avait encore que le titre d'écrit : "Bouquet de Sylvie" et deux vers, et c'est tout, car le difficile était de passer au troisième qui devait, comme on a vu, apporter la rime ; alors il se mit à regarder autour de lui comme s'il espérait la voir se poser sur le mur. C'était une grande chambre de chalet, c'est-à-dire toute en bois, très basse, avec trois petites fenêtres si rapprochées l'une de l'autre qu'elles se touchaient.

[C.-F. RAMUZ, "La Guerre dans le Haut-Pays", 1915, chapitre I – incipit]
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Il se raconte énormément d'histoires à ces veillées. C'est quand la flamme d'une souche mise debout éclaire seule, et brusquement la leur monte, envahissant jusqu'aux moindres recoins, mais déjà elle est retombée ; alors il semble que l'esprit se libère, il voit que tout est permis. Il n'y a plus de réalité ou bien tout est réalité. Tout est possible n'est-ce pas ?

[C.-F. RAMUZ, "La Guerre dans le Haut-Pays", 1915, IIème partie, chapitre IV]
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Soirée rencontre à l'espace Guerin à Chamonix autour du livre : Farinet ou la fausse monnaie de Charles Ferdinand Ramuz enregistré le 20 juillet 2023 en présence de Gérard Comby (membre de l'Office tourisme de Saillon & de la Commission du Patrimoine)
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Farinet, c'est un fameux faux-monnayeur, roi de l'évasion et Robin des bois qui vécut entre Val d'Aoste, Savoie et Valais au XIXe siècle. Arrêté pour avoir fabriqué de fausses pièces qu'il distribuait généreusement dans les villages de montagne, il s'évade à de nombreuses reprises. Ce héros populaire à la vie romanesque et rocambolesque meurt à 35 ans, en 1880. Cinquante ans plus tard, Ramuz s'empare du personnage et en fait le héros d'un récit classique, haletant comme un roman d'aventure, mais porté par son style unique : irruption du présent au milieu d'une phrase, mélange des temps qui rend le présent dense et incandescent, langue vaudoise aux accents paysans transfigurée par une écriture singulière, moderniste, au confluent des révolutions artistiques du XXe siècle (il est passionné par Cézanne et Stravinsky). Farinet se serait caché un temps au fond de la vallée de Chamonix, dans une grotte au-dessus de Vallorcine. Un petit mémorial y est installé. Ce roman est paru pour la première fois en 1932.
Bio de l'auteur :
Ed Douglas, journaliste et écrivain passionné par l'Himalaya, a publié une douzaine de livres, dont plusieurs ont reçu des prix. Deux ont été traduits en français : de l'autre côté du miroir (Éditions du Mont-Blanc, 2018), Himalaya, une histoire humaine (Nevicata, 2022). Il publie des articles de référence dans The Observer et The Guardian. Il est rédacteur en chef de l'Alpine Journal et vit à Sheffield, en Angleterre.

#paulsen #guerin #livres #farinet #ramuz #saillon
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