Nova est prête. Formation exigeante, entrainement intensif. La voilà à deux doigts d'accéder à ce qu'elle désirait absolument : partir pour les étoiles. Mais une formalité légale se dresse entre elle et son but : une fête d'adieu. Car il faut savoir que ce voyage dans l'espace est à sens unique. Vu la durée du vol, Nova ne reviendra jamais sur Terre. Mais cela semble moins la déranger que la perspective de cette soirée festive…
La première page nous plonge directement et efficacement dans un monde futuriste : un long couloir aux couleurs métalliques, avec de possibles hublots et des éclairages blanc froid donne sur un siège, minuscule, dans le lointain. du type siège de pilote. On devine une tête, sorte de boule blanche, posée au sommet du dossier. La page suivante est une sorte de zoom avant qui va nous faire découvrir Nova dans sa tenue de spationaute. Elle ne la quittera jamais, même si elle portera une version plus courte lors de la fête.
Dès la première image, dès les premiers mots, on est dans un univers de SF. Tant dans les objets que dans les costumes. Et les personnages qui apparaissent ensuite, des scientifiques à l'allure stéréotypique (chauves, lunettes blanches aveugles – comme Nova, d'ailleurs –, blouse blanche), ne font rien pour changer l'atmosphère, au contraire. Tout comme l'évocation du voyage avec ses galaxies qui s'affichent en grand sur les pages. On est donc bien dans un récit de SF.
Mais tout bascule quand Nova accepte, contrainte et forcée, l'organisation de cette fête d'adieu qu'elle semblait vouloir éviter à tout prix. Elle a d'ailleurs « introduit une demande d'exemption » refusée pour des questions juridiques (Ah ! Les craintes des procès sont décidément partout !). Comme rien n'y fait, elle va devoir supporter cela. Et on sent que cela lui pèse : il suffit de voir sa position abattue, transpirant à grosses gouttes à la page 18.
On en est qu'au début de l'histoire et l'espace est relégué au second plan Il réapparaîtra surtout sur la fin. Place aux amis venus de l'a jeunesse de Nova. Et à la difficulté d'être dans notre monde. Où l'on comprend mieux pourquoi la jeune fille a tant travaillé pour obtenir ce poste et est prête à tout quitter pour une mission, sinon suicide, du moins exigeante. Nova va donc retrouver trois anciens amis : Ulysse, Iseult et Alan. Je pourrais vous les décrire, mais ce serait vous gâcher la surprise. Car chacun a son bagage, plus ou moins lourd, plus ou moins évident à gérer. Mais dans tous les cas, difficile à supporter au quotidien. D'où la force de ces retrouvailles qui sont comme une coupure dans le quotidien. Et donc une façon, involontaire, de faire le point sur les existences. Et les écarts fabuleux qui existent entre les espérances de jeunesse, les passions, les moitiés, les amours, les désirs et la réalité du jour le jour. Avec la violence de la différence et de sa réception par les autres. Avec les claques subies, qui vous font baisser les bras.
Les histoires des quatre anciens amis sont belles en elles-mêmes. Mais les dessins au feutre à alcool leur apportent une beauté singulière. Tout comme la mise en page, avec des procédés efficaces, éclairants (comme la multiplication de petites cases qui permettent de décrire de façon rapide une action, en la découpant en mini-séquences). Tout simplement beaux parfois : les silhouettes en ombre à travers les vitres de la page 99, Nova sur le lac où l'eau et l'espace se mêlent page 149.
Vive Noël et ses cadeaux surprises ! Je ne l'avais pas vu venir celui-là et c'est l'un de ceux qui m'a le plus plu. Je comprends tout à fait pourquoi il a obtenu le prix des Utopiales BD en 2023. La finesse d'analyse des caractères et la justesse de leurs interactions m'a laissé ému parfois, réjoui à d'autres moments. Et le dessin, qui ne m'avait pas attiré au premier abord, m'a complètement happé jusqu'à la dernière vignette. Merci.
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