Il y avait longtemps que je n'avais pas lu une série fantastique consacrée à la jeunesse ( bien que cela me plaît toujours autant aujourd'hui ! ). Cela me rappelait inévitablement les romans arrosés de fantasy que je lisais plus jeune. Ainsi, il n'est pas incroyable que j'ai immédiatement accroché à ce premier tome qui offrait, malgré une intrigue concoctée à partir des mêmes ingrédients que les autres de son genre, une liaison entre les mythiques créatures des grimoires et les problèmes réguliers qui découlent de l'adolescence. Un mélange magnifique, car le récit aborde avec humour et goétie le racisme quant aux différentes races et la façon de s'accepter tel que l'on est. Une idée adéquate pour que les jeunes lecteurs s'identifient à cette adolescente en quête d'identité tout en se familiarisant avec les effluves illustres des légendes fantastiques entourant les êtres imaginés et les dieux du temple grec. Bien évidemment, l'écriture n'est pas incomparable et les rebondissements se prévoient à l'avance, mais ces détails ne sont que poussière lorsqu'on se régale de l'odyssée de Théodora, cette gorgone néophyte dont l'identité se voit basculer alors que son existence s'écroule à cause de la jalousie de la déesse Aphrodite. Et deux mille ans plus tard, elle ouvre les yeux sur un univers qui n'est pas le sien, sur des individus dissemblables, lesquels elle devra aider pour les sauver d'une vie sans amour et s'aider soi-même par la même occasion. Cependant, un petit point à surveiller : j'ai retenu quelques erreurs dans la construction de l'histoire. Primo, comment la déesse de l'amour peut-elle être farouchement jalouse d'une jeune grecque à la beauté singulière ? Car Aphrodite, si on en croit son statut, ne devrait en aucun cas ressentir de la jalousie puisque l'amour n'est pas envieux, il est d'une pureté inconditionnelle. Oui, elle est peut-être également la déesse de la beauté pour les Grecs, mais si son royaume est l'amour, alors son comportement ne peut être le sien. À moins qu'elle est la déesse d'une sous-catégorie de l'amour, ce qui est fort possible… Secundo, comment Théodora, malgré son statut nouveau de gorgone, peut sommeillé pendant deux mille ans sans en ressentir les secousses dévastatrices ? Sans mourir de faim, de soif ou de vieillesse ? Une erreur plutôt percutante, mais qui se pardonne facilement, croyez-moi !
Jusqu'à un certain point, je me suis retrouvée dans le personnage de Théodora, car nous avons un caractère similaire, une carapace aussi étrange que futile. Nous avons une impatience exagérée et une « tête de cochon » qui, excluant un objectif à atteindre, ne peut qu'apporter de mauvaises choses lorsqu'on l'utilise à un moment non propice. Et la carapace nous sert à nous protéger des autres, peu importe leur personnalité. Mais la similarité s'arrête à cet endroit puisqu'elle a son individualité propre. Sa témérité égale son courage et peu importe les circonstances de la vie, elle est prête à se donner corps et âme lorsque son choix est réalisé. Malheureusement, sa transformation et l'expulsion de sa famille qui en est résulté a fait d'elle une personne qui n'accepte pas la main des autres et préfère demeurer dans la solitude avec son meilleur ami, qui est nulle autre qu'une souris à la conscience culturelle chevronnée ( une souris amoureuse des livres, en plus ! ). Toute confiance s'est volatilisée et lors de ses aventures, elle la recouvra petit à petit, de même qu'elle acceptera de s'aimer comme elle est et de ne point s'haïr à cause de son apparence trompeuse. C'est grâce à Catherine, Casey, mais surtout à Solan, qu'elle retrouvera son identité. Ce dernier est un chaman exemplaire, à l'écoute des besoins des autres et doté d'un humour généreux et d'un courage qui lui vient de sa difficile existence dans un monde engloutit par l'hypocrisie. Bref, c'est un jeune homme charmant ! Cependant, il a une tête aussi têtue que Théodora, ce qui provoque des disputes assez tumultueuses et ils ont tous les deux besoin de faire confiance à leur coeur, surtout Solan qui n'en est pas moins confus de ses sentiments que son amie. Casey et Catherine, quant à eux, sont frère et soeur, mais qui ont été séparés lors de l'enfance à cause de leur statut différent. le jeune homme, brave et solitaire, a dû combattre les impuretés des camps pendant de nombreuses années tandis que sa soeur a baigné dans un narcissisme sans amour, ce qui lui vaut un caractère égocentrique cachant un manque flagrant de tendresse. Je me suis trompée au début sur leur compte, notamment Catherine, et après coup, ce sont des adolescents admirables aux qualités étonnantes et j'ai été émue de les voir recouvrer un puissant lien fraternel après bien de placidité. Et comment ne pas passer à côté des humains, nous-mêmes, tapis dans une ville déformée par l'égoïsme et le pouvoir ? N'est-ce pas une brève vision de notre société moderne qui pas à pas frôle l'hypocrisie ? Il est difficile de croire que nous égalons à peu près cette terre balayée par l'ego et la peur. Les romans, même jeunesse, nous montre souvent une part de véracité : il en est de même pour celui-ci, bien que cette part demeure dans les coulisses.
En outre, vous avez compris, j'ai été emballée par ce premier tome et que je ne passerai pas à côté des prochains volumes qui relatent le chemin de vie de quelques personnages mentionnés dans ce récit. Lorsqu'un livre touche un sujet aussi profond que la quête de soi, je suis irrémédiablement captivée. N'est-ce pas l'un de nos buts, trouver notre identité personnelle dans un monde aussi instable que le nôtre ? Les jeunes adoreront, les adultes également, et je dois avouer que beaucoup d'adolescents s'y retrouveront puisque ce fut moi-même mon cas. L'écriture de l'auteure se marie bien à sa catégorie : simple, douce, qui va droit au but sans tomber dans des détails métaphoriques ou des descriptions volumineuses auxquels les jeunes n'auraient pas accroché. En bref, une délicieuse série qui feront sentir à ses lecteurs que le monstre que nous croyons être n'est qu'un léger masque cachant notre humanité et notre vraie individualité.
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