Le judaïsme français n'a pas connu de schisme entre la Réforme et l'Orthodoxie (...) et pourtant il a connu cette recherche d'une fusion des différents religions historiques. [...] Joseph Salvador, l'auteur de l'Histoire des institutions de Moïse et du peuple hébreu[,] vient de publier un ouvrage intitulé "Paris, Rome, Jérusalem". [...] Si j'ai bien compris l'auteur, sa nouvelle Jérusalem doit devenir capitale mondiale des "Fusionnistes" –. Salvador semble d'autre part caresser l'idée saugrenue d'une conversion des Juifs au Christianisme, qui permettrait ensuite une conversion des Chrétiens au Judaïsme. Cet effort a commencé il y a mille huit cent ans, il n'est donc pas aussi original que Salvador semble le croire. [...]
Certains "Fusionnistes", (...) voudraient utiliser la Franc-Maçonnerie pour fondre les différentes religions ; de telles recherches me semblent plus intéressantes. Le Rabbin de Luxembourg [Samson R. Hirsch...] a prononcé dans sa loge de Luxembourg des conférences remarquables qu'il a publiées sous le titre "Die Humanität als Religion". Il y a développe de manière exhaustive la thèse de la fusion et on peut considérer que son travail a épuisé le sujet. Les autorités religieuses juives n'ont plus qu'à fermer leurs temples réformés et qu'à leurs ouailles au temple franc-maçon. [...]
Nos rationalistes juifs n'ont plus de raisons de rester dans le Judaïsme, tout comme les rationalistes chrétiens n'ont plus de raison de rester dans le Christianisme. [Huitième lettre, pp. 138-139]
Nous autres, Juifs, nous avons, dès le commencement de l'Histoire, porté l'espérance d'une ère messianique. C'est, dans notre religion de l'Histoire, le sens de la fête du sabbat. Le sabbat exprime la conviction qui fut toujours la nôtre, que l'avenir nous prépare un sabbat de l'Histoire semblable au sabbat de la nature dans le passé : l'Histoire s'achemine vers la perfection et l'harmonie que connaît déjà la nature. [La Bible] dit : lorsque la création du monde s'acheva avec la création de l'homme, l'être vivant le plus parfait, le Créateur, fêta le sabbat de la nature. C'est alors que débuta le travail de l'Histoire, le processus d'élaboration du monde social ; l'Histoire fêtera son sabbat lorsqu'elle aura achevé son œuvre : ce sera l'ère messianique. [10ème lettre, p. 155]