Il y a des lectures pour lequel chaque page compte au moins triple, tant elles semblent vides…
Les heures défuntes ont été de celles-là pour moi, et les malheureuses 120 petites pages m'ont semblé un véritable pavé tant je n'ai pas réussi à y trouver un point d'accroche.
Il me serait difficile de dire de quoi parle ce livre. Il est composé de XIV sections, indépendantes les unes des autres.
Alice Butterlin y évoque quelques souvenirs d'enfance ou d'adolescence, en les liant la plupart du temps à la musique, à la musique qu'elle aime, et qui m'est totalement inconnue. Cela n'a sans doute pas facilité mon entrée dans son livre. Il y a aussi au centre (section VIII) quelque chose qui ressemble à un récit fantastique, avec trois personnages distincts, dans trois parties, qui semblent quelque peu se rejoindre dans la dernière partie.
J'ai été quelque peu effarée par le contenu de ces textes.
Alice Butterlin nous confie par exemple, qu'elle est arrivée à trouver les Sims d'une certaine vacuité :
« Simuler la vie était amusant pendant un temps, mais très vite, la monotonie d'actions répétées à l'infini commençait à m'ennuyer. Regarder les avatars prendre leur douche ou manger de faux raviolis n'était plus aussi grisant ».
Sacrée découverte, et grand merci à elle de communiquer une vérité aussi insaisissable à ses lecteurs.
Elle partage avec nous quelque chose qui semble une véritable révélation : les oeuvres d'art en vrai, c'est quand même autre chose que sur Instagram :
« Et là, les paumes vides et le corps redressé, j'ai recollé tous les morceaux de l'image qui flottait jusqu'alors dans mon cerveau en pièces détachées. J'étais émue, enfin, parce que j'avais le temps de l'être ».
J'imagine que dans sa génération (elle est née en 1995) prendre du recul par rapport aux jeux vidéo et aux réseaux sociaux est une grande étape, qui marque une forme de sortie de l'adolescence. Mais c'est un peu maigre pour un(e) lecteur (trice).
Quoique… Je viens de finir il n'y a pas longtemps
le roman lumineux de
Mario Levrero, dans lequel l'auteur n'arrive pas à se détacher de tout ça. Et les jeux auxquels il joue sont encore plus mécaniques, comme par exemple des réussites. Mais voilà, il y a un vrai projet derrière, et surtout des moyens, c'est à dire une écriture. Et celle d'
Alice Butterlin, malgré l'ambition affichée (« une langue riche et symboliste » dit la quatrième de couverture) m'a paru indigente. J'ai déjà été très agacée par des nombreuses expressions anglaises insérées dans son texte. Je sais bien que les jeunes de maintenant parlent comme ça, mais dans un texte qui a des ambitions littéraires, c'est pénible. Ensuite, incontestablement, elle tente d'utiliser des mots et des tournures de phrases qui « font littéraire ». Mais c'est à mon sens très artificiel, maladroit, plein de clichés et de facilités. Un peu comme dans une copie de lycéen ou d'étudiant qui s'applique à rendre un bon devoir, un peu léché, qu'il pense correspondre à ce que son professeur attend. Qui sort quelques belles formules qui lui paraissent résumer les grandes vérités de la vie, mais qui sont des banalités un peu creuses.
Quelques exemples :
« On se demande s'il faut s'être retiré du monde pour le voir plus clairement ».
« La musique semble toujours vaciller entre la vie et la mort. »
Dans la dernière section elle nous sort même Kierkegaard...
Je vais m'arrêter là, j'ai déjà été très dure avec ce premier livre. Et il y a quelques petites choses qui pourraient peut-être, à condition d'être reprises autrement (et surtout écrites autrement) donner quelque chose. Je pense par exemple à une section dans laquelle elle commence à décrire un séjour aux USA, où un séjour sur la côte atlantique. Mais ce ne sont que de tous petits moments, très vite gâchés.