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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Les recueils de nouvelles n'ont pas ma prédilection, car il me semble n'y faire qu'entrer et sortir de leurs histoires, sans jamais avoir le temps de m'y installer. C'était avant de découvrir celui-ci…


Pris individuellement, chacun des treize récits qui composent cet ouvrage est déjà fascinant. Tous animés par des protagonistes froids et amoraux qui commettent le mal de manière tout à fait banale, comme s'il s'agissait de gestes ordinaires destinés à régler un quelconque souci du quotidien, ils impressionnent par l'originalité de leur angle de narration, par la maîtrise de leur construction, par l'inattendu de leur développement, et par le cynisme et l'humour dont ils sont pétris.


Mais ce qui parachève la singularité de ce recueil est son unité et la manière dont l'auteur s'est ingénié à lier chaque nouvelle l'une à l'autre, transformant l'ensemble en un exercice de virtuosité où la thématique centrale se décline au gré d'incessants changements de perspectives. Mises en abyme, ruptures et reprises n'en finissent pas de surprendre le lecteur, ravi de ce jeu qui rebondit sans cesse et suscite un sentiment de connivence amusée et admirative.


Finalement, de toutes ces histoires où se révèle une nature humaine désespérément engluée dans la noirceur de ses bas instincts, émerge pourtant un miracle : l'art, indifférent au bien et au mal, comme une fenêtre vers un absolu inexplicable, un idéal capable d'absorber la plus irrécupérable des âmes, à l'image de ce tableau de Millet qui revient en leitmotiv du recueil.


C'est avec une curiosité croissante et le sourire aux lèvres que je me suis laissée bluffer par le talent de Jaume Cabré, au fur et à mesure que se précisait le motif général dessiné par cette mosaïque de nouvelles. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Il faut aimer le jeu du chat et de la souris pour entrer dans un récit de Jaume Cabré... C'est déjà ce que je m'étais dit après avoir lu Confiteor. C'est toujours ce que je pense en refermant son recueil de nouvelles : Quand la pénombre arrive.
Son style s'est épuré : plus de rupture brutale au niveau spatio-temporel au milieu d'une phrase, plus de phrases inachevées... Il joue moins avec nos nerfs et notre patience ! Son jeu diabolique avec la construction du récit demeure mais dans ce recueil les codes de la nouvelle l'oblige à plus de sobriété, même si chaque récit s'ouvre sur un contexte qui nous plonge d'emblée dans l'incertitude : où est-on ? Qui parle ? On ne sait pas encore. Il faut accepter d'être déstabilisé et jouer la carte du suspense et du dévoilement progressif qui nous conduira vers un dénouement surprenant comme dans Pandore ou nous laissera dans le brouillard comme dans Buttubatta. C'est le côté facétieux de l'auteur !
Autre caractéristique de son écriture et de son univers : son art de jouer avec les limites. Celles de la technique narrative avec cet étourdissant va et vient dans l'espace et le temps où des fils d'intrigue se croisent, s'entrelacent pour se rejoindre dans un dénouement qui nous donne enfin la clé de ce dédale narratif dans lequel nous étions enfermés. Dans Points de fuite, par exemple, le retournement final nous renvoie de façon très peu conventionnelle vers une réalité bien plus folle que ce que nous proposait la fiction.
Jouer avec les limites, l'auteur le fait aussi avec les personnages de ses nouvelles. C'est en effet une belle galerie de meurtriers en tous genres qui défilent sous nos yeux. Qu'il s'agisse de tueurs professionnels traitant un meurtre comme s'il était question d'une banale affaire commerciale ou d'un tueur de petites filles qui nous fait entrer dans sa logique délirante, à aucun moment - du moins à mes yeux - l'auteur ne tombe dans le scabreux ou le voyeurisme. L'humour noir très présent dans ses nouvelles est sans doute l'une des clés de ce tour de force car il fait de cette plongée dans les noirceurs de l'âme humaine une source de questionnements et non de rejet.
Ce que j'ai aussi aimé dans ce recueil c'est le jeu de piste auquel nous invite l'auteur en développant une thématique cachée ou plutôt masquée. En effet, ce n'est pas un hasard s'il est beaucoup question de peinture dans ces nouvelles notamment avec un tableau de Millet La Fermière. Autour de cette oeuvre vont évoluer de façon itérative,dans des récits qui se font écho, plusieurs personnages masculins, , tous amoureux fous de cette paysanne vue de dos qui les nargue... Qu'a voulu nous murmurer à l'oreille Jaume Cabré en nous entraînant dans ce jeu de piste ? J'ai bien sûr une réponse personnelle que je me garderais bien de vous dévoiler. Mais j'ai beaucoup aimé cette façon ludique qu'avait l'auteur pour aborder une thématique très présente aussi dans Confiteor et qui semble l'obséder.
Certes, Jaume Cabré n'est sans doute pas un auteur consensuel mais quel plaisir de le lire quand on accroche à son style et son univers romanesque !
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Nouvelles catalanes, des nouvelles envahies par la noirceur, avec des gens qui tuent ou qui meurent.

La pénombre, c'est le voile qui tombe sur la vie des victimes et des tueurs sans remords.

La pénombre, c'est aussi le clair-obscur, la puissance de l'art, cette peinture qui accroche le regard et qui peut absorber celui qui la contemple trop longtemps.

La pénombre ce sont des silhouettes dessinées par la magie des mots, des personnages esquissés dans des nouvelles, sur lesquels on ne fera pas toute la lumière,

Un livre bien différent de Confiteor, le grand succès de l'auteur. On y retrouve la même qualité de plume, mais des atmosphères bien différentes, frôlant le fantastique. Une note de l'auteur en fin de volume explique son processus d'écriture et le choix des nouvelles qui ont composé son tapuscrit.

Une bien belle lecture!
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D'une page à l'autre, vous trouverez :
Un homme toujours abandonné par tous, La confession d'un tueur à gages, L'hommage posthume rendu à un voleur d'agneaux, Un futur assassiné qui sait se défendre, le choix entre un divorce et un meurtre, Un homme qui entre dans les tableaux et voyage bien au-delà des toiles, Un tueur de petites filles, Un chef d'État mégalomane, L'assassinat d'un collectionneur d'art, Un auteur prêt à tout pour se faire éditer, Des hommes qui ne pleurent pas.

Il y a des liens entre les textes, des fils rouges à suivre : un tableau célèbre ou encore un stylo en argent. C'est finalement un gigantesque puzzle qui ne demande qu'à être assemblé par le lecteur attentif et joueur. Ce dernier doit accepter que rien ne lui est donné dans l'ordre : ni les faits, ni les conséquences, ni les mobiles. Il doit aussi prendre du recul devant l'oeuvre qu'il a recomposée. Et ne pas s'effrayer des monstres qui se révèlent à lui. Ici, le mal n'est pas affreux : le meurtre est banal, le crime est hygiénique, l'assassinat est pratique. Face au fameux défilé de gredins et de gibiers de potence que nous dépeint Jaume Cabré, il faut sourire. Mais se méfier un peu aussi... Parce que l'auteur semble être au nombre des vauriens à qui il tire le portrait. « Il décida qu'il faudrait faire preuve d'un peu plus de prudence et laisser passer plus de temps entre une victime et la suivante. Plus de temps pour écrire et lire, [...] Et plus de temps pour choisir une victime vraiment chouette. Être le destin de quelqu'un, ce n'était pas un truc à prendre à la rigolade. » (p. 235)
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S'il est surtout connu pour la démesure et la virtuosité de son roman Confiteor, Jaume Cabré est également un remarquable nouvelliste.

J'ai choisi de vous parler de ce second recueil - Quan arriba la penombra - car c'est je pense une très bonne porte d'entrée pour qui s'intéresserait à l'écrivain ou à l'écriture catalane.

Véritables constantes de son oeuvre, on retrouve ici la fascination esthétique et métaphysique de l'écrivain pour l'art (la peinture surtout) et son rôle d'échappatoire à la réalité ; son obsession pour le Mal, la recherche d'une hypothétique origine universelle, l'étude de ses déclinaisons, son inéluctabilité dans l'Histoire déjà écrite et à venir.

Ainsi, Jaume Cabré convoque les particules les plus sombres de l'âme humaine, avec la particularité qu'aucune femme, ici, ne se fera l'instrument du mal. Son génie consiste à rendre l'exercice du mal banal, obligatoire, et en mettant tout sens dessus dessous, presque salvateur en définitive.

Enfin, lire Jaume Cabré c'est avant tout faire l'expérience du vertige. On le comprendra à la lecture de « Les hommes ne pleurent pas » qui ouvre ce recueil, que l'écrivain est un géant des lettres. Jaume Cabré orchestre son propre univers, télescope sa trame narrative par l'arrivée brutale d'un nouveau narrateur, manipule le temps comme un enfant jouerait avec de la pâte à modeler. Avec toujours une simplicité et une élégance proprement déconcertantes.

En fin connaisseur de son pays catalan, de son histoire, son parler, ses saveurs et couleurs, il pose de vibrants décors pittoresques à ses histoires. L'arène n'attend plus que ses combattants ! Mais preparez-vous à applaudir avec un plaisir coupable les mauvaises graines, truands et autres brutes qui invariablement, l'emporteront.
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Treize nouvelles sur des meurtriers qui exécutent froidement leurs victimes sans remords ni questions existentielles, parce que c'est comme ça, gratuitement ou sur commande ou par accident malencontreux.
Beaucoup d'humour noir dans ces récits et un petit jeu de piste car si ces nouvelles sont indépendantes les unes des autres au niveau des intrigues, on retrouve parfois un personnage antérieur qui s'y est égaré ou un tableau mystérieux qui aspire celui qui le regarde d'un peu trop prés.
Excellent
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Je ne suis pas fan de nouvelles, je regrette à chaque fois que l'une d'entre elles me plaît de ne pouvoir poursuivre ma lecture dans un texte plus épanoui. Mais ici, retrouver le style du magnifique CONFITEOR a été pour moi un petit bonheur même si le sujet - la mort - n'était pas vraiment ce qu'il y a de plus joyeux. Jaume Cabré est sans aucun doute un écrivain majeur aujourd'hui et j'attends avec impatience de lire un nouvel ouvrage bientôt.
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Jaume Cabré a inspecté s besace de nouvelles pour en extraire les treize qui composent ce recueil. Il faut en lire plusieurs pour sentir se dégager ce qui les rassemble: l'atmosphère, le caractère des personnages la noirceur humaine.
En plus, certaines se répondent, se complètent, pas seulement par la thématique, mais par la présence d'un personnage, d'un objet ou d'un acte. Et au final, Jaume Cabré nous emmène en immersion ''dans l'exercice du mal''.

Une quinzaine de jours après avoir lu ce recueil, j'ai abordé une nouvelle de Marguerite Yourcenar, Comment Wang Fo fut sauvé, in Contes Oriental. Et j'ai aussitôt repensé à certaines nouvelles de ce recueil tournant autour du tableau. L'écriture de Jaume Cabré a donc laissé des traces.
Et vous, si vous deviez entrer dans un tableau pour mieux voir un personnage qui vous intrigue ou qui vous fascine, lequel serait-ce?
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