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Edmond Raillard (Traducteur)
EAN : 9782330183165
160 pages
Actes Sud (04/10/2023)
3.54/5   48 notes
Résumé :
Deux rencontres bouleversent durablement la vie d'Ismaël : Leo, son amour de jeunesse, qu'il retrouve quelque 15 ans plus tard dans une mercerie et le concierge du collège où il a enseigné la littérature qui l'embarque dans un road trip déjanté qui le voit soigné dans un hôpital fantôme par le Dr Jivago, séduit par Marlene Dietrich et analysé par Emma Bovary. Rien de moins ...

Un ton facétieux, un tourbillon d'extravagances, des personnages faits de c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Complètement loufoque…

Quelle n'a pas été ma surprise à la lecture du dernier Jaume Cabré ayant en souvenir le magistral et impressionnant Confitéor. L'auteur catalan s'essaie ici au format court, nous pouvons même parler de novella, et le résultat est pour le moins surprenant. Drôle, loufoque pour ne pas dire totalement absurde par moment. Tellement étonnée, surtout eu égard à la superbe couverture signée Magdalena Wasiczek, promesse de poésie et de rêveries, je ne sais pas au final si j'ai aimé ce texte. Inventif, il sort des sentiers battus, c'est évident, je m'en souviendrai longtemps, ma lecture alternant entre éclats de rire et froncements de sourcils. Impossible d'être indifférent en tout cas à cet étonnant exercice de style auquel s'est essayé l'auteur.

Ismaël, un jeune professeur de littérature et polyglotte notoire, orphelin, mène une existence solitaire et triste. La vie du vieux garçon va bousculer une première fois lorsqu'il tombe amoureux de Leo, une jeune femme qui travaille dans une mercerie puis une seconde fois lorsqu'il accepte de monter dans une voiture conduit par un étrange individu, une vague connaissance, alors qu'il allait tranquillement chercher du pain. Il se réveille ensuite totalement amnésique mais comprend peu à peu qu'on lui reproche d'avoir tué une riche octogénaire. A partir de cette trame, Jaume Cabré tire plein de fils, chaque fil étant une trouvaille à part entière. Marlène Diétrich, Madame Bovary et le docteur Jivago seront de la partie en de troublants jeux de miroirs, ainsi que Godallet, un marcassin lui aussi orphelin comme Ismaël. de fréquentes allusions à Moby Dick font penser qu'Ismaël est lui aussi dans une sorte de ventre, le ventre mou des rêves. Et ces protagonistes, faisant sans doute partie de l'univers de l'auteur, déambulent dans une ambiance à la fois angoissante, oppressante et teintée d'absurdité.

« Devant lui, il y avait un immense entrepôt dans la pénombre. Il avança pieds nus, avec cette espèce de chemise ridicule qui le couvrait devant mais pas derrière, la poche de sérum à la main, dans ce hangar rempli de caisses, des quantités de caisses. Et au fond, une lumière allumée. Comme le bourdon est attirée par la flamme de la bougie jusqu'à être carbonisé, Ismaël se dirigea vers la faible lueur sans vouloir se demander si c'était prudent ou pas. A la différence d'un quelconque phalène suicidaire, il voulut fuir ».

Si j'ai aimé l'ambiance de ce roman à l'allure de fable, je n'ai cependant pas été entièrement convaincue et ai vu davantage un exercice de style facétieux dont j'ai observé les ficelles avec plaisir tout en restant légèrement au bord. Ceci étant, ce fut un agréable moment de lecture qui a le mérite de l'originalité, de la liberté et de l'audace ! Un vrai derviche-tourneur qui donne quelque peu le tournis…

« Nous tournons dans la nuit et nous serons consumés par le feu. Même si nous ne voulions pas ».


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In girum imus nocte et consumimur igni.*

Dans l'incipit du roman de Jaume Cabré (2021), le narrateur s'adresse au lecteur en utilisant une métaphore filée.“Vous avez certainement vu, la nuit, voler une phalène, grande ou petite, maladroite, attirée par la lumière d'une lampe” et, de deux choses l'une : soit le papillon s'éloigne parce qu'un mouvement le distrait, soit il s'approche de l'ampoule et finit carbonisé. L'éloignement peut sauver le papillon à moins qu'il ne se fasse avaler par un gecko.
Le roman est astucieux et brillant mais quelque peu déroutant et dolipranesque. Il développe les deux scénarios qui convergent à la fin.
Nous avons d'abord l'histoire d'Ismaël. Il a le même prénom que le personnage avalé par la baleine dans Moby Dick. C'est un petit gars très attachant. Dès son enfance, son père un flûtiste qui s'est coupé le doigt, lui a mis dans la tête qu'il était responsable de la mort de sa mère. Après l'internement du père qui a failli le brûler vif avec une pompe à essence, Ismaël rencontre à l'orphelinat Simo qui lit beaucoup beaucoup, notamment Moby Dick. Ismaël s'en sort, fait des études de lettres classiques et germaniques, devient polyglotte et fréquente Leo une copine d'enfance qu'il a retrouvée dans une mercerie. Au moment où il pourrait être heureux. PAF. Il rencontre Tomeu un ancien de l'orphelinat qui l'embarque dans sa grande voiture noire. Et il se réveille dans ce qui semble être un hôpital, deux personnages inquiétants l'interrogent, il semble ne se souvenir de rien. Et il a peur.
L'autre histoire c'est celle de Godallet, le plus petit d'une famille de sangliers, dirigée par Lotta, la mère. Les sangliers parlent, rêvent, pensent , mémorisent et s'égarent comme des humains. Et on s'inquiète beaucoup pour eux quand on voit surgir des phares dans la nuit. Il s'intéresse beaucoup à la flèche du temps : quelle direction elle prend, par exemple, si elle est toujours en avant, si elle peut prendre la direction opposée. le marcassin s'amuse aussi de tout cela : "Quand je commence à ruminer en me promenant en forêt, il m'arrive de finir par découvrir des endroits inconnus et il me manque Dieu et l'aide pour m'orienter."
Moi aussi j'ai tournoyé longtemps dans ce livre et j'aurais bien aimé qu'il me guide un peu l'ami Jaume. J'ai bien failli m'éloigner définitivement quand la première histoire a tourné au thriller. La fin m'a achevée. Et j'ai éteint la lampe.

* « Nous tournoyons dans la nuit et sommes consumés par le feu ». C'est un palindrome. La phrase peut se lire dans les deux sens.
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Pour qui n'est pas familier de l'écriture de Jaume Cabré, il y a de quoi être dérouté par « Consumés par le feu ». Si vous n'avez pas lu le fameux « Confiteor », vous aurez du mal à comprendre comment, dans un même chapitre, on peut passer de la voix du protagoniste – un jeune professeur plutôt mal en point, qui a la très mauvaise idée de suivre un malfrat dans un coup tordu – à la voix d'autres personnages, y compris celle d'un marcassin, épargné par l'accident de voiture qui se produira une fois le forfait perpétré, et qui fera perdre la mémoire à notre héros.

C'est pourtant bien ce qui va se passer dans « Consumés par le feu » : Ismaël (c'est son nom) a une amour de jeunesse, Leo, qu'il va retrouver en allant par hasard dans la mercerie de son quartier, et son cerveau va en être chamboulé. Et ensuite Ismaël, alors qu'il allait chercher du pain, se retrouve embringuer dans une salle affaire, où il sera question du meurtre d'une nonagénaire qui recèle un secret, subira un accident de voiture avec une bande de sangliers, deviendra amnésique suite au susdit accident, sera emporté dans un pseudo hôpital (rêve ? cauchemar ? ou réalité ?) dont il s'enfuira, et sera recueillie par une femme de bonne volonté qui va l'aider à recoller les morceaux de sa mémoire.

Entre temps on aura aussi parlé de Marlène Dietrich, et il sera aussi question d'Emma Bovary et de Moby Dick.

Qui aime les récits linéaires où le futur succède gentiment au présent et au passé en toute logique devrait plutôt passer son chemin.
Ici le loufoque règne en maître. On risque fort d'être déconcerté si on n'admet pas qu'un marcassin (il s'appelle même Jabatin) puisse ressentir des émotions, une fois devenu orphelin, et parvenu au milieu d'un terrain de golf qu'il va forcément ravager (on imagine l'humour ravageur de son auteur).

Il y aura néanmoins, pour son public de lecteurs, une énigme à déchiffrer (qui donnera son titre au récit), il sera question de bibliothèques et de littérature, et des thèmes qu'affectionne Jaume Cabré, comme celui de la mémoire. Ici défaillante, mais est-ce que cela n'est pas mieux parfois ainsi, plutôt que de se souvenir des actes immoraux qu'on a commis ?

L'amour triomphera, même si les retrouvailles de Leo et d'Ismaël seront de courte durée. Mais qu'importe. On aura eu l'impression de lire un roman cubique où rien n'est vraiment normal et carrément loufoque, mais n'est-ce pas salutaire aujourd'hui ?
A défaut, on aura au moins passé un bon moment.
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Très tôt, Ismaël se retrouve livré à lui-même. Pour son père, il est fautif de tout. Alors qu'un jour ce dernier agresse son fils, Ismaël comprend alors que plus rien ne pourra être pareil désormais. Son père sera enfermé, et quant à lui, il devra rejoindre un foyer d'accueil. Grâce à un bon ami, mais surtout à Leo, une voisine dont il est amoureux depuis toujours, il va pouvoir se reconstruire peu à peu, jusqu'au terrible drame qui va le bousculer.

En voilà un roman aux allures de fable très original. Je n'avais pas encore lu de roman de cet auteur, mais suite à cette découverte, je serais très curieuse de découvrir l'un de ses précédents récits.

Je ne peux vraiment pas en dire trop, le roman étant vraiment très court, mais je peux vous garantir que j'y ai retrouvé une belle ingéniosité et une verve vive et riche, très plaisante à lire.

J'ai suivi avec un grand intérêt le parcours d'Ismaël. Quelques digressions viennent ponctuer le récit, mais elles seront nécessaires afin de recréer ce puzzle littéraire.

La plume m'a totalement conquise. Avec un style des plus originaux, vif et fluide, les pages défilent à toute vitesse. Ici, pas de chapitres, mais ne vous inquiétez pas, cela se lit vraiment très bien.

Un roman original, qui sort des sentiers battus, aux allures de fable. Une excellente découverte littéraire que je ne peux que vous recommander.
Lien : https://mavoixauchapitre.hom..
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In girum imus nocte ecce et consumimur igni se traduit par « Nous tournoyons dans la nuit, et nous voilà consumés par le feu ».

Connaissez vous ce vers latin qui traverse les traditions philosophiques, la musique et la littérature romantique allemande de Rilke à Goethe en passant par la paternité de Virgile qui relève du mythe poétique plus que de la réalité ?

Ce vers magique qui se lit exactement dans un sens comme dans l'autre, est le principe unificateur qui rend unique dans la matière d'un seul livre, à travers la plume de Jaume Cabré différentes histoires, de différents personnages et de différents narrateurs qui ne semblent pas avoir grand chose à voir ensemble. Comment Godallet ( petit démiurge, le nom comme un indice de lecture ?) le sanglier, Marlène Dietrich se retrouvent être les instigateurs de la tourmente d'Ismaël – oui comme dans Moby Dick ?! Comment le docteur Jivago et Madame Bovary se retrouvent à discuter dans la même pièce de ce même Ismaël ?...

Ce qui peut apparaître comme une histoire de laissés-pour-compte de la vie dans une Barcelone de la frange de la seconde zone à la manière d'un film d' Iñárritu — Je pense à Biutiful tout au long du livre… — épouse à nouveau et petit à petit, la spirale de Confiteor ; la somme des chapitres en moins. Moins épais, il peut séduire ceux qui veulent découvrir le talent de Jaume Cabré sans passer par Confiteor.

D'ailleurs Consumés par le feu n'est pas à comparer à Confiteor, véritable chef-d'oeuvre. Cabré pour autant ne se renie pas dans ce roman. Sous l'apparente simplicité des dialogues, apparaît une maîtrise virtuose de l' art de narrer, car ils créent la tension dramatique et nous mènent exactement au point de rupture. Nous retrouvons dans ces quelques pages tous les thèmes chers à Cabré, les livres et la littérature, l'érudition et le latin, l'homme déchu, des histoires d'amour tragiques et... la mémoire.

Lire est déambuler avec Ismaël dans cette Barcelone fantomatique à la recherche de ses souvenirs qui se cristallisent en ces quelques mots In girum imus nocte ecce et consumimur igni comme une formule tragique.
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critiques presse (2)
LaTribuneDeGeneve
20 novembre 2023
Avec «Consumés par le feu», l’écrivain catalan démontre sa maîtrise de formes plus courtes mais non dénuées de savoureuses complications.
Lire la critique sur le site : LaTribuneDeGeneve
LeMonde
27 octobre 2023
Cabré crée une communauté de protagonistes entraînés dans un étourdissant jeu de miroirs. Une drôle d’aventure, menée avec toupet.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Vous avez certainement vu, la nuit, voler une phalène, grande ou petite, maladroite, attirée par la lumière d'une lampe. Il peut arriver deux choses à ce pauvre papillon de nuit : soit il s'éloigne parce qu'un mouvement le distrait et il a la vie sauve, soit il s'approche de la lumière et commence à tourner, pris de frénésie, en une trajectoire hélicoïdale qui s'accélère au fur et à mesure qu'il s'approche de l'ampoule ou de la flamme, et quand il la touche, il est immédiatement carbonisé. Une sorte d'autosacrifice au dieu de la flamme.
(Incipit)
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Sans rencontrer aucun obstacle, Godallet, et ce n’était pas la première fois, piétina le gazon très chic du golf de la Rabassa. Il regarda en l’air. Une lune décroissante, mais lumineuse et silencieuse, comme une menace. Têtu, il répéta maman, Godina, Godall Deux ? Il voulait dire regardez cette belle herbe bien soignée. Vous m’entendez ? Hé ho ! Malgré son désarroi, il trouva que c’était Magnifique de marcher sur ce gazon si bien tondu. Et il fait une approche sur le trou numéro 5, un par 3, attiré par le petit drapeau qui était né pour signaler les trous les plus intéressants. Une fois sur le green, il fila vers le trou. Devant le drapeau, il examina les alentours pour éviter toute surprise désagréable et douilla dans le trou avec son groin. Et il y avait une récompense !
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- Alors, insista la docteure.
- Qu’est-ce que vous dîtes ?
- Pourquoi m’avez-vous appelée docteure Bovary ?
Silence … La docteure … oui.
- Vous ne vous appelez pas comme ça ?
- Non. Docteure Rius.
- Ouh là, c’est un nom très difficile à retenir. Vous êtes très jolie.
Silence de la docteure.
- Vraiment très jolie.
- Très bien. D’accord.
Youri et Bovary échangèrent des regards. Elle lui fit signe de sortir de la pièce et ils sortirent tous les deux en silence. Cinquante-sept resta à regarder le vide sans savoir ce qu’il devait faire et pensant dans quel merdier je me suis fichu ? Et il ne voulait pas penser à d’autres choses : ça lui faisait trop peur. Et il pensa aussi comment je peux être aussi crétin, à faire mon numéro devant la police ?
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Tu n'es jamais obligé de finir un livre. Finis seulement ceux qui le méritent.
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Il ne put s'empêcher de regarder les phalènes qui tournaient autour du réverbère, assoiffées de lumière, capables de se laisser griller pour embrasser cette lumière, comme ceux qui embrassent des amours impossibles qui font mal et détruisent.
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Vidéo de Jaume Cabré
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Les mille MERCIS du libraire de caractère : "À l'équipe de la Grande Librairie au nom tous les libraires indépendants, à Virginie, ma chérie qui m'a suivi dans cette folie et qui déchire tout dans l'ombre depuis plus de 10 ans, à Audrey et Rémy, qui reviennent chaque matin avec leurs lectures, leurs conseils et leurs blagues irremplaçables et à tous les clients qui font partie de cette famille qui s'agrandit et qui nous donnent une force incroyable ! Vive les livres !"
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