Notes à la pièce Créon :
Il n'est pas, je crois, sans intérêt de remarquer que plusieurs siècles avant l'avènement du christianisme, la malédiction céleste qui va peser sur Laïos, sur ses descendants et sur ceux-là mêmes qui leur seront alliés par le hasard de l'union conjugale, a pour origine une faute charnelle ; puisqu'on ne saurait déjà la qualifier de péché, bien que l'interdit de l'Oracle ait, en définitive, le même sens que nous, chrétiens, lui attribuerions.
[...]
Ce perpétuel combat en soi, issu d'une exaspération des nerfs, et aussi la provoquant, ne va pas sans un certain éveil de l'intelligence, ce dont il faut se souvenir pour la compréhension du personnage de Créon.
(pp. 123-124)
BRUSCHETTI :
J'ai peu de mérite. Mon naturel penche à conspirer. Au reste, l'embarras est moins d'agiter que de désigner à l'agitation son objet, afin qu'elle puisse mettre un nom, un visage même à son échéance. Malaise, puis colère, doivent maintenant prendre pour cible la personne du Prince. […] Le peuple a en commun avec les enfants ceci, qu'il ne se représente bien que ce qui lui est à satiété démontré. Il ne s'émeut qu'à proportion de ce qui passe son intelligence, pourvu qu'on le maintienne en sa conviction.
(p. 13)
Virginie Despentes accompagnée par le groupe Zëro : Éric Aldea (guitare), Ivan Chiossone (claviers), Frank Laurino (batterie)
Son : Wilo
Depuis Baise-moi en 1994, Virginie Despentes s'est imposée comme une écrivaine majeure avec notamment Les Jolies Choses (prix Flore 1998), Teen Spirit, Apocalypse bébé (prix Renaudot 2010) ou encore son essai King Kong Théorie. C'est qu'il y a chez elle une énergie d'écriture salutaire et sans concession, mais aussi une intelligence rare. L'acuité de son regard sur le monde contemporain (tantôt hilarant, tantôt glaçant de vérité), on la retrouve dans la « série » Vernon Subutex, fresque incroyable en trois tomes. Personne n'échappe à Virginie Despentes et, en même temps, elle sait très bien qu'il est jouissif de canarder à tous crins. Elle s'efforce donc de prendre à bras-le-corps, et d'aimer aussi, cette galerie de personnages ultramodernes qu'elle met en scène.
Ce soir elle vient accompagnée du groupe de rock Zëro pour payer une dette littéraire : celle qu'elle doit au mythique Requiem des innocents de Louis Calaferte.
À lire – Virginie Despentes, Vernon Subutex 3, Grasset, 2020.
À écouter – Zëro, « Requiem des Innocents » (avec Virginie Despentes), 2LP Ici d'Ailleurs, 2020.
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