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C'est "une terre de démons et de sorcières", le royaume des divinités champêtres dans une Italie inaccessible aux profanes.
Ici s'unissent les histoires des Dieux et des hommes, dans un même chant du silence à la gloire d'une terre nourricière, mère de toute vie.

C'est le territoire du loup et de l'agneau dans une fable de la quête de sens.
L'un est si fort que l'autre est faible, pourtant unis par les liens du sang versé de toutes les larmes.
Quand l'un repousse les limites dans une éternelle danse de l'affrontement, porteur d'un prénom de l'espoir, l'autre glisse dans l'ombre, presque transparent , porteur de tous les désespoirs.
Quand l'agneau pourchasse son passé, enfant des contes en quête de récit, le loup questionne la foi ancienne qu'il menace tant il provoque le destin, ancrant son histoire dans une mythologie de la destruction, à l'apogée d'une nouvelle religion des laissés-pour-compte. Dont les cultes sont les révoltes sociales, dont les prières sont les slogans, quand voici venu le temps des mots pour rompre les non-dits.
La semaine de la Création se teinte du rouge du socialisme, en une anarchie dévastant les fondements de l'ordre vertical d'un monde qui les écrase de toute sa hauteur, pour un Paradis à la terre, pour tous et à tous.
Que la vengeance divine viendra frapper de tout le fracas des canons, de toute la fureur des obus.
"Un jour viendra" le temps de la guerre qui ébranlera les secrets les plus enfouis, quand chacun devra mener un combat contre lui-même pour qui le loup et l'agneau survivent à la terre.
Ensembles, d'existences intimement liées.
Giulia Caminito signe un roman d'une incandescente intensité. L'incipit plonge d'emblée le lecteur dans la chaleur étouffante des Marchés Italiennes plombées par le soleil brûlant, au coeur d'un drame familial à l'histoire obscurcie par les secrets et les non-dits, dans une atmosphère de chaos portée par le souffle d'une Histoire dévastatrice.
Le récit, à forte dimension mythologique, prend des allures de légende, dont les personnages fiévreux, écrasés par le poids d'un passé secret, embrassent leur destin avec abnégation et courage, couvés par l'universalité du lien fraternel.
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« On l'appelait l'enfant mie de pain parce qu'il était le fils du boulanger et qu'il était faible ». Malgré sa fragilité, Nicola tire, à sa demande, sur son frère aîné Lupo.
Cette scène d'une violente âpreté inaugure le premier roman traduit en français de Giulia Caminito.
Nous sommes à Serra de' Conti, village perché des Marches, à la veille de la Grande Guerre.
La famille Ceresa cumule les malheurs. On disait même que « les corbeaux mangeaient à leur table ».
Le pater familias Luigi, la « bedaine gonflée (…) de vin », n'est pas doué pour le commerce et pour les relations humaines. A fortiori avec son épouse Violante qui perd la vue et dont le quotidien est rythmé par les accouchements et la mort de nombreux enfants. Elle qui avait rêvé d'une autre vie. Ceux qui ont survécu, elles les détestent. Surtout Nicola, effrayant avec ses silences, ses peurs, son altérité, son inaptitude au labeur et son goût pour les mots.
Que faire de ce rejeton asexué et névrosé ? Un curé propose la mère. « Personne ne donnera Nini au prêtre » s'emporte l'intransigeant Lupo qui n'aura de cesse de protéger son petit frère. Ces deux inséparables-là incarnent la pureté dans un monde laid, sale et mensonger.
Non loin du taudis familial miné par la misère, les superstitions et la fatalité, un couvent domine le bourg. Il est dirigé par Soeur Clara, une ancienne esclave née au Soudan qui se bat pour sa communauté ce qui n'a pas l'heur de plaire à sa hiérarchie et à une société revancharde. Ces nonnes trop indépendantes doivent être anéanties.
Ancré dans une réalité historique qui est celle du début du vingtième siècle avec la confrontation entre une religion dévoyée par un clergé tout-puissant et hypocrite et l'émergence d'une radicalité politique incarnée par le mouvement anarchiste, « Un jour viendra » est le magnifique récit d'un amour fraternel augmenté du portrait d'une femme qui refuse toutes les concessions.
L'écriture est puissante, lyrique, théâtrale et visuelle. C'est une ode à la liberté et à l'ailleurs et une très belle lecture aux allures de conte inspirée de la famille de l'autrice et du personnage de l'abbesse qui a réellement existé.

EXTRAITS
- En ces lieux les hommes n'importaient pas, c'était la terre qui gouvernait, car la terre restait alors que les hommes partaient.
- Il n'était pas dans la nature de Nicola d'être au monde comme les autres.
- A la guerre, un âne vivant vaut plus qu'un soldat mort, disait-on.


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Nous sommes dans l'Italie du début du XX° siècle, dans les Marches, région agricole, pauvre, coincée entre les Apennins et l'Adriatique que la plupart des habitants de Serra de' Conti n'ont jamais vue.
Deux histoires se croisent. Celle de la famille Ceresa, famille de boulangers de père en fils, enfin ceux qui restent en vie car les enfants meurent au fur et à mesure que les naissances s'enchainent, et celle de Zari, devenue soeur Clara, arrachée à son Soudan natal.

La misère, les non-dits et une malédiction « On racontait que les corbeaux mangeaient à leur table » caractérisent la famille Ceresa d'où deux des principaux personnages sont issus. Deux frères, Lupo et Nicola, aussi soudés qu'ils sont différents : l'un est grand, costaud, débrouillard, l'autre est craintif, chétif et dépendant en tout de son grand frère.
Soeur Clara, soeur puis abbesse du monastère du petit village, règne en maîtresse-femme sur ce couvent fermé. On ne parle pas encore de sororité à cette époque, mais c'est bien de cela dont il s'agit pour faire face à un clergé masculin tout puissant qui s'inquiète de l'influence qu'elle prend dans la région.

Voilà pour les trois principaux personnages. Mais le roman fourmille de figurants « secondaires », car oui on se fait rapidement un film de ces lignes qui racontent l'Italie du début du XX° siècle. Tous ont leur place, leur consistance pour illustrer les conditions de vie, la paysannerie, la montée de l'anarchisme, la piété religieuse et le début de la désaffection de l'Eglise. Les destins se croisent, les histoires longtemps tues se dénouent, l'Histoire est omniprésente pour expliquer les engagements des uns et des autres. C'est dur et tendre à la fois, servi par une langue à la fois pleine d'emphase (quand il s'agit d'évoquer l'engagement anarchiste de Lupo) et de retenue (lorsque soeur Clara s'exprime).

Une très jolie façon de découvrir l'histoire de l'Italie à travers ce roman largement inspiré par la famille de l'autrice.
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L'Italie du début du XXe siècle, son soleil écrasant, ses crises anarchistes, sa pauvreté et la dureté de la vie. Ce roman est éclairé par deux personnages très attachants. L'un, sauvage comme le loup dont il porte le nom et l'autre son exact opposé, le protégé du premier. Deux frères d'une famille très complexe qui cache de lourds secrets.

J'ai bien aimé suivre cette famille et découvrir peu à peu la vie de tous les protagonistes, certains inattendus. C'est souvent sombre mais le récit de la relation d'amour/haine entre les deux frères est intrigant et m'a émue.

Mais c'est une lecture exigeante à cause de la chronologie complètement éclatée du roman. Tous les évènements sont « mélangés » et plus de clarté ne m'aurait pas dérangée.
Cela reste un très bon moment de lecture.

Vous aimez découvrir l'Italie à travers sa littérature ?

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Quelle histoire poétique et fraternelle, forte. Lupo et Nicola vivent dans une famille misérable et dure. Deux faces d'une même pièce, leurs caractères et leurs attributs naturels sont aux antipodes. Ainsi, Lupo protège Nicolas du monde. du monde intrafamilial, mais aussi extérieur. À ce duo, s'unit une tout autre vie, celle de Soeur Clara, intimement liée par le passé à ses deux frères… C'est un récit qui questionne et qui explore des thématiques lourdes et complexes, dans une simplicité et une légèreté appréciable et géniale. C'est un vrai conte novateur, révolutionnaire, politique. À lire.
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Un voyage en Italie où l'on fait connaissance avec la famille de Luigi, boulanger et de ses deux frères si unis.
J'ai trouvé l'écriture très belle. de la douceur dans beaucoup de noirceur, l'auteure aime ses personnages et cela se ressent.
C'est une très belle histoire de frères dans une vie difficile, sombre avec la guerre en fond qui finira par se rapprocher de très près.
C'est aussi l'histoire de leur soeur, des secrets qui se cachent dans les murs de cette maison.
Je me suis attachée à Nini et Lupo, des caractères différents mais finalement pas tant que cela.
Un coup de coeur pour ce roman
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Un énorme coup de coeur. Je découvre Giulia Caminito à travers ce roman infiniment beau.

Ce roman publié en 2019 nous fait penser à un classique des 18e et 19e siècles par l'écriture et l'atmosphère qui règne tout le long de l'intrigue.
L'histoire se déroule dans la région des Marches en Italie durant les années 1900. Une Italie où règnent la monarchie, l'église, le métayage et la misère.

Dans le village de Serra de' Conti, Luigi CERESA est un boulanger raté, un personnage acariâtre. Sa femme, aveugle, est recluse dans sa chambre à égrener son chapelet de prières. Les enfants qui survivent essayent de se frayer un chemin dans la vie.

Lupo ‘le loup' est un enfant rude, dur, séditieux, blasphémateur. Très tôt, il a fait sienne une règle ‘face à une injustice, il faut répondre par des actes, les mots sont inutiles'. Mais Lupo a aussi un coeur, il aime plus que tout, son jeune frère Nicola dont il se sent responsable et protecteur.

Nicola ‘l'enfant mie de pain' est un enfant fragile, sensible, silencieux, qui aime lire et écrire. Un enfant ‘faible et inutile' comme aime à le répéter le père.
Lupo a conclu un pacte avec son père : Nicola peut étudier car c'est lui qui payera avec l'argent qu'il mettra de côté, en se privant de tout.
Deux personnages sont intimement liés au destin des deux frères : le prêtre Don Agostino et Soeur Clara.
Don Agostino est un prêtre ‘lisse', monarchiquement correct, distant du petit peuple. Il a toujours eu quelque chose à voir avec les CERESA avec beaucoup de non-dits, de faits passés sous silence.
Soeur Clara, une ancienne esclave ramenée du Soudan, est une femme mystérieuse, forte de caractère, qui n'hésite pas à défier l'autorité de sa hiérarchie masculine. Elle cache un terrible secret derrière les murs de son monastère.

Ce roman est plein d'histoire : anarchisme de Malatesta, antimilitarisme de Masetti, première guerre mondiale, grippe espagnole, montée du fascisme qui permettra l'arrivée au pouvoir de Mussolini.

Un roman qu'il faut absolument lire.
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Luigi Ceresa règne en tyran sur sa famille. A la tête d'une boulangerie nichée dans le village de Serra de' Conti, dans les Marches italiennes, il fait vivre un enfer à chacun. Les uns après les autres, les enfants partent ou meurent. Seuls restent Lupo, garçon ténébreux et violent, et Nicola, son frère auquel il est très attaché ; Nicola, cet enfant différent au visage blanc, nulle part à sa place, toujours à pleurnicher et refuser de sortir de sa chambre ; Nicola qu'il s'est promis de protéger. La religion, dont le poids faiblit pourtant en cette fin de XIXe siècle et début de XXe siècle, n'est pas en reste au village : le curé, Don Agostino, homme rigide et peureux, veille sur ses ouailles ; et puis le couvent n'est pas loin, dirigé par soeur Clara, l'abbesse. Alors que le village est en proie aux soubresauts de l'Histoire, la famille Ceresa va se fissurer sous le poids des secrets qu'elle porte.

« Un jour viendra » est un superbe roman porté par la voix puissante de Giulia Caminito jeune écrivaine italienne. Elle entremêle la grande et la petite histoire dans une alchimie singulière.

L'intrigue est découpée en plusieurs chapitres assez courts et porteurs de titres bien pensés. Elle s'étale sur plusieurs années, à la charnière du XIXe et du XXe siècle et englobe la période de la première guerre mondiale. D'emblée, le lecteur est saisi par la qualité de la plume : incisive, brutale mais aussi poétique. Ce faisant, le propos est empli d'émotions contrastées et l'on ne s'ennuie pas. Les personnages sont décrits d'une façon réaliste et l'on s'y attache. Au fil du temps, on les voit grandir, apprendre, traversant les épreuves que l'Histoire leur réserve. L'auteur en dresse un portrait sans concession, les rendant ainsi intenses, tels Lupo et Nicola.

On est pris dans ce tourbillon d'émotions que la plume habile de l'auteur sait rendre et l'on vibre aux côtés de Lupo, ténébreux, révolté et viscéralement attaché à Nicola, ce frère qu'il s'est donné pour mission de protéger. On tremble et on pleure également avec Nella, enfant des Ceresa arrachée à la vie civile et placée au couvent. Et puis, on comprend que si la famille Ceresa s'effrite c'est à cause de secrets et non-dits dont la révélation fera office de bombe en cette période de première guerre mondiale.

« Un jour viendra » est un roman noir, bouleversant, mais toujours traversé par une lumière, celle du soleil qui continue à percer les nuages, à balayer les champs d'une lueur dorée, celle des humains qui, malgré toutes les douleurs du quotidien, s'efforcent de tenir debout, se relever. Vivre, en somme.
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J'ai hésité à y aller de mon petit commentaire sur ce très bon roman de Giulia Caminito, auteur que je ne connaissais pas, et dont j'ai acheté le livre car il se démarquait des autres sur la table du libraire. Ses couleurs d'automne, peut-être.
J'ai hésité car je savais que je ne serai pas impartial dans mon jugement après lecture, et que mes quelques lignes résulteraient bien plus de mon ressenti, d'une humeur du moment, que de la reconnaissance de la qualité intrinsèque de ce roman, dur, âpre, sans concession.
J'y ai retrouvé "l'esprit et l'àme" d'un "Sous le soleil des Scorta" de Laurent Gaudé, d'un "Padre padrone" de Gavino Leda (même si dans cette oeuvre on parle de l'éductation d'un berger sarde), ou d'un "cristo si è fermato a Eboli" de Carlo Levi.
Une ambiance lourde, des personnages forts et rangés dans et derrière leurs convictions, pas de gris, que du noir et/ou du blanc.
Une écriture belle et riche, des personnages attachants tels ces deux frères, Lupo et Nicola, cette religieuse de couleur qui est prête à accueillir tout le monde...tous ces secrets de famille, comme il en existe beaucoup, partout, chez moi comme chez vous ( je sais de quoi je parle, je suis d'origine corse) oui mais voilà, l'ambiance est tellement lourde, chargée d'electricité, qu'on se dit qu'à une mauvaise nouvelle , un chapitre dur, ne peut que succéder une nouvelle encore plus mauvaise et impactante pour les personnages.
En fait, j'ai eu le même ressenti qu'en lisant "Né d'aucune femme" de Franck Bouysse, je n'étais peut-être pas dans "l'état" propice à une telle lecture. Envie de quelque chose de plus "léger" en cette période un peu compliquée, où malheureusement, la seule lecture ne peut gurérir de tous les maux.
Mais je lirai un autre des romans de cette auteur.
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J'ai d'abord été déstabilisé par le côté décousu du récit, sur l'échelle du temps et par la manière de sauter d'un personnage à l'autre. Je me demandais même quel était exactement le sujet du livre. Juste une chronique sur la pauvreté de la paysannerie italienne du début du vingtième siècle?
Ensuite j'ai commencé à comprendre, le mouvement anarchiste, les luttes sociales, le pouvoir des puissants et de l'église qui les rend intouchables, la domination des femmes par les hommes, tout cela est mis en évidence par l'histoire de la famille Ceresa. Et notamment celle de Lupo et Nicola, les deux frères très différents et celle de Nella la jolie adolescente forcée de rentrer au couvent.
J'ai aussi eu le bonheur de retrouver la Moretta, née au Soudan, enlevée et vendue comme esclave, qui trouvera refuge dans la religion jusqu'à devenir abbesse de son couvent. J'avais aimé lire Bakhita de Véronique Olmi qui raconte sa vie de façon romancée.
Giulia Caminito nous propose un roman qui a du souffle, du fond, des tripes, la note de l'autrice qui explique la genèse de cette histoire m'a beaucoup touché.
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