Cool parano : Un testament graffiti

Mon fils, fan de street art, me fait lire quantité d'ouvrages sur le sujet. Dernier en date, "Cool parano", livre classé comme BD mais qui tient aussi de la biographie (probablement romancée) et du documentaire.

J'ai apprécié cet aspect documentaire justement. L'univers du tag est tellement spécifique, il utilise un vocabulaire qui m'est étranger, et Benoît Carbonnel prend son lecteur par la main pour lui expliquer gentiment les codes, le matériel et les noms des types de graffs. Sympa de sa part.

Je suis moins fan du graphisme, qui ne manque pas de personnalité mais dont le style ne m'attire pas.
Reste le fond, et je dois dire que la mise en avant de la figure du vandale-voleur-fumeur de shit est un peu lourde. Il est ici acquis que les graffeurs volent leurs bombes de peinture, enchaînent les bières en attendant l'heure des rendez-vous nocturnes et fument des pétards en rentrant chez eux. Tous ?

Arrivé à ce stade, il est d'autant plus appréciable que Benoît Carbonnel ne contente pas du côté "cool" et qu'il explicite l'aspect "parano". Les heures d'attente du bon moment pour passer à l'action, le risque de plus en plus grand de se faire prendre, les tensions entre crews... Cela met un peu de temps à émerger mais on ne peut pas dire que l'auteur embellisse le tableau. Il propose aussi une réflexion sur les raisons qui poussent à passer à l'acte... et d'arrêter, se demande si le graff est de l'art et raconte les conséquences de cette activité sur le quotidien.

Cette dernière partie m'a semblé être la plus intéressante car elle sort de l'image cool et rebelle du graffeur. Et montre que d'autres voies sont envisageables, y compris pour gagner sa vie dans ce domaine.
Un bon point pour lui dans ma perspective de lectrice, mais qui aurait gagné à êtreplus exploité.

Alors, en lisant cet ouvrage–il s'est passé un phénomène tout à fait surprenant : je me suis fait complètement prendre en otage par l'auteur.

Petit préambule : je suis, mais alors, complètement indifférent face à la culture du graffiti et ses myriades de règles bizarres. Non pas que je sois volontairement hermétique à son impact, loin de là–mais il m'a toujours semblé que c'était... un peu idiot.

Et bien, Coin-Coin le protagoniste et son approche objective mais intégrale du graffiti m'a étrangement donné envie de me faufiler hors de mon doux logis à la nuit tombée et d'aller m'attaquer à d'innocents murs et wagons en tous genres. Tout ça pour le seul but de concilier ce qui me semble être la même poussée d'adrénaline qui pousse les gens à passer à quelques centimètres de la quadraplégie en faisant du cliff jumping leur hobby, et le plaisir de créer quelque chose, n'importe quoi. Laisser sa marque quelque part, dans un style semi-nihiliste–un peu pour rien.

Les histoires sentent le vécu et le vrai, sans gloire ni glamour mais toujours avec humour–et les parenthèses "éducatives" se jouent des codes avec une tendresse que seul un vétéran des bombes peut se permettre.

Et tout ça c'est à peine brosser les multiples facettes de cet ouvrage, de ses dessins ultra-détaillés à la patte propre à cette façon quasiment naturelle de transformer le béton en véritable poésie visuelle et narrative.

Donc voilà, un passe gratuit pour tout un pan de culture, et ça a l'avantage de se lire tout seul grâce à l'écriture honnête et hilarante de Benoît Carbonnel.

Benoit Carbonnel évoque dans cette Bande Dessinée un amour de jeunesse, taguer les murs des villes et des banlieues, les immeubles abandonnés, les gares les métros, les tunnels enfin tous ce qui peut supporter le spray des bombes de peinture.
Coin Coin est un jeune artiste vivant intensément sa passion du graffiti, une discipline qu'il nous fait découvrir à travers cette biographie tumultueuse dans le monde du graff, Benoît Carbonnel nous offre un joyau insolite très réussi.
"Cool Parano" est un livre très intéressant, tant les tags et autres graffitis font parti de nôtre quotidien, à telle point que l'on arrive à même plus y prêter attention tellement ils ont intégrés notre inconscient.
Pourtant tout ce petit monde reste très hermétiquement fermé à toute notoriété, et ont peut comprendre pourquoi. Benoît Carbonnel décortique minutieusement l'univers de la rue, la cour de récréation du taggeur se déroulant essentiellement en extérieur. Il nous raconte ce besoin addictif qu'ils ont de colorer le monde urbain, la recherche d'adrénaline que procure cet art, se pratiquant dans l'urgence, parfois en groupe souvent en duo. Etant sans cesse dans l'angoisse, de se faire prendre, car les risques sont innombrables, et pas seulement au niveau de la justice...
Le dessin est de très bonne qualité, en noir & blanc hachurés, se prêtant vraiment bien à l'ambiance du livre, les personnages animaliers sont réalisés à la perfection, ont reconnait chacun d'eux et les expressions sont extrêmement parlantes, les décors très urbains sont dans la même inspiration.
Une belle découverte que je ne peux que conseiller.

Ce « testament graffiti » c'est trop de la bombe !
Ce volume de 140 pages dit tout sur les pratiques, le vocabulaire des « gueurstas » sans ignorer les oppositions qu'ils suscitent et rappelle en avant propos le montant des amendes : 3750 €.
Les motivations des vandales : égo, adrénaline, appropriation de la ville, sont exposées à travers une présentation pédagogique illustrée par des récits personnels teintés d'autodérision au moment où l'auteur est en âge de dresser un bilan de son parcours par la BD, idéale pour informer sur ce genre d'expression envahissante.
A travers leur jargon initiatique marquant la jouissance d'appartenir à un ensemble clandestin fermé, où tous les mots viennent de l'empire U.S. : « writer », « wild style », « hall of fame » …s'effaçant au moment du « buff » (nettoyage), nous assistons à la concurrence féroce des « crews »( groupes).
L'auteur qui sévissait sous le pseudo de « Coin-coin » se représente en canard au milieu de troupes aux têtes d'animaux dans une représentation du monde liée à l'enfance, totalement dans la mode régressive actuelle où l'affirmation de soi tonitruante et persistante, méprise le passé tout en l'utilisant comme support.

Lien : https://blog-de-guy.blogspot..