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Les trois roses jaunes, R. Carver, nouvelles, trad. François Lasquin, éd. Rivages

J'ai repris la lecture de Carver. J'ai du mal avec lui. Et ça me fait de la peine. Je sais que c'est un grand nouvelliste, et O. Adam, dont j'apprécie beaucoup les livres, le revendique comme modèle d'écriture acérée.
Carver a des obsessions : l'alcool, le travail (ou pas) les relations de couple très instables, le besoin d'aimer et d'être aimé, la vie difficile des petites gens alourdies d'un horrible héritage, ou « une vie machinale. Sans objet. La vie de tout le monde. » la solitude, le difficile métier de vivre. Car l'homme n'a qu'une vie et il ne peut ni la comparer à des vies antérieures ni la rectifier dans des vies ultérieures, lit-on en exergue, sous la plume de M. Kundera.
Je regarde de près ses nouvelles, sept dans ce recueil, pour sûr elles sont construites. Et les titres sont choisis. La vie est subtilement rendue. L'angoisse monte. Les fins laissent planer le doute, ou le mystère. Elles laissent l'esprit pensif, par exemple le bout des doigts qui fait allusion à la mémoire phénoménale du narrateur, qui ne veut pas voir ce qui est sous ses yeux, et quand sa femme s'en va, prend conscience qu'il perd son histoire et va devoir vivre sans elle. Est-ce à dire que l'homme ne vaut pas tout seul? Ou L'éléphant, qui met en scène un narrateur exténué par le travail pour subvenir aux besoins de ses proches, parasites qui savent pouvoir se reposer sur lui en jouant sur ses sentiments . A la fin de la nouvelle, le narrateur laisse tout derrière lui, et monte par pur hasard dans la voiture au moteur neuf d'un collègue de travail. Où cette voiture le conduira-t-elle ? Y trouvera-t-il enfin le repos ? Pour avoir autre chose devant lui que le néant, comme le personnage principal de Menudo, à qui un ami prépare un menudo, plat de tripes qui va le remettre en forme, mais il s'endort et d'autres que lui goûteront ce plat réconfortant.
Mais elles ne m'émeuvent pas. Bien qu'elles disent les incidents et accidents de la vie.
Ainsi, la nouvelle qui donne son titre au recueil, parle de la mort de Tchekhov. L'écrivain qui vit bourgeoisement : il a ses habitudes dans un grand restaurant. La tuberculose l'achève. En sa qualité de médecin, il doit le savoir, mais fait comme si le traitement qu'il suit améliore son état. Tolstoï lui rend visite à l'hôpital. Tolstoï n'aime pas le dramaturge, mais goûte fort le nouvelliste, et surtout apprécie énormément la personne. Dans les dernières heures de l'agonie, le médecin appelé à son chevet se rend compte qu'il n'y a plus rien à tenter, et fait monter du champagne dans la chambre. L'attention du lecteur se déporte alors vers le jeune chasseur, sorti du sommeil subitement pour accomplir son service. le chasseur est mal réveillé, son uniforme est défraîchi et plissé de partout ; il ne voit pas s'il y a quelqu'un dans la chambre. le médecin le gratifie d'un énorme pourboire. le lendemain, il revient dans cette même chambre, porteur d'un vase dans lequel se trouvent trois roses jaunes. Qui les offre ?Pourquoi jaunes ? Pourquoi trois ? Il est bien éveillé, son uniforme est impeccable. Il voit qu'une des coupes est dans la chambre. Il constate aussi que le bouchon de la bouteille est à terre. Comment faire pour le ramasser ? La femme de Tchekhov l'informe que son mari est mort et qu'il doit aller chercher personnellement l'ordonnateur des pompes funèbres. Elle n'en finit plus de donner des précisions. Elle sort une liasse de billets. Reste totalement et constamment aveugle aux roses. A la fin, le chasseur, vase à la main, se baisse et ramasse le bouchon qu'il garde dans sa main.
Tout aussi bien , la nouvelle aurait pu s'intituler le bouchon. La mort de Tchekhov, content d'avoir bu du champagne, est paisible, reposant dans les bulles et les fleurs solaires. On retrouve le Tchekhov du début de la nouvelle, d'avant le rude assaut de la maladie. le chasseur, dans sa jeunesse et la force du matin, relève le bouchon, symbole de fête. Mais aussi, un sentiment de vide que veut remplir l'épouse avec sa couverture de mots, et que souligne la vanité des roses.
Toute l'histoire est contée avec simplicité, dans une attention constante aux détails. Et avec humanité : l'hommage rendu par Tolstoï à un homme, et l'embarras du chasseur, aux prises avec les choix de la vie, la proximité du grand et du petit.
Il faudra que je relise Carver. Je dois sûrement rater quelque chose. Car si l'homme ne peut jamais savoir ce qu'il faut vouloir, dixit Kundera, je veux, moi, savoir la force de Carver.
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Raymond Carver est un spécialiste des nouvelles. Dans ce livre il y en a 7 de 20 à 30 pages pour la plupart ancrées dans la vie quotidienne à l'exception de la dernière qui concerne la mort de Tchekhov. Ce sont des petits bijoux dans une écriture simple et fluide. Un régal.
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Raymond Carver, c'est la mise en abîme de la profondeur du vide!
Je suis toujours surpris de voir comment, en quelques phrases, il arrive à donner une profondeur à ses personnages malgrès le vide de leur quotidien...

Si je ne suis pas clair, lisez et faites vous votre propre avis ;-)
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Tranches de vies, pas toujours limpides, tant pour les personnages que pour le lecteur mais on se laisse finalement emporté sans déplaisir.
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Dans ses nouvelles, Raymond Carver réussit à faire vibrer le quotidien. Il conte la banalité mais qu'est-ce qu'il le fait bien !
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