« J'ai en moi mille pages de cauchemars en réserve , celui de la
guerre tient naturellement la tête » écrit Céline à Joseph Garcin en 1930.
« J'ai attrapé la
Guerre dans ma tête » .
« Je sentais de la vie qu'il en restait encore beaucoup en dedans , qui se défendait pour ainsi dire » .
Quelques extraits des 250 feuillets réunis ici et retranscrits , édités à priori , ils auraient été écrits en 1934 , soit deux ans après le Renaudot attribué au Voyage, mais surtout vingt - ans après son expérience du front et des tranchées ,en 1914, qui lui valut de graves blessures .
Je dois dire que c'est mon premier Céline .
On trouve ,au début Ferdinand.dans les Flandres ,au milieu des cadavres de ses compagnons d'infortune .
Nous suivons la convalescence du brigadier Ferdinand depuis le moment où , gravement blessé il reprend conscience sur le champ de bataille, jusqu'à son départ pour Londres, .
À l'hôpital de Peurdu - sur - la lys , objet de toutes les attentions d'une infirmière entreprenante , Ferdinand , s'étant lié avec Bébert , nommé Cascade plus tard, trompe la mort , s'affranchit du destin promis jusqu'alors.
Cru , crépusculaire , féroce , gouailleur, truculent, imagé , ce livre aujourd'hui publié nous offre son lot inédit de formules imparables, portraits à vif , incisifs , scènes traumatiques , nihilistes , dans un monde en plein chaos « dans l'abattoir international en folie » .
C'est un récit entre oeuvre imaginaire et récit autobiographique .
Une sacré prise de conscience , une brutale désillusion apparaît dans une lumière des plus crues, , vingt ans après le passé « toujours saoul d'oubli » reste vivant , à jamais inoubliable.
Céline exprime son angoisse , son horreur de la
Guerre et de la mort .
Il est revenu du front mutilé dans sa chair et son esprit comme tous les anciens combattants de la grande
guerre, sauf que eux ,n' en parlaient pas —- mutiques —- intimement persuadé par ailleurs , du « plus jamais ça » .
La langue est outrancière, répétitive, argotique, orale , aux mots abrasifs , injurieux, vulgarité et imperfections, , images d'une crudité inimaginables .
Il sait utiliser des expressions qui « claquent » , résonnent dans une langue très populaire …torturée, ponctuée de gros mots , parfois traversée de rares et bouleversants accès de tendresse. .…
Voilà une expérience peu commune à l'originalité linguistique déconcertante qui peut fasciner , en tout cas ne jamais laisser un lecteur indifférent !
Tout dans ce récit curieux respire la douleur , la cruauté , la mort :
Odeurs d'urine, de matières fécales , plaies putrides, odeurs âcres de transpiration, écoeurantes de vomi, « des petits morceaux d'horreur » , la
guerre qui « pue » ,qui « pue » .
C'est frontal, direct , vie et mort , souffrance , sexe, peur, amour/ haine / …..
Une expérience de lecture chaotique , inédite , énorme! .
Un livre que j'hésitais à lire ….
Mais seul Celine a écrit sur la grande
guerre de cette manière , si « explosive » , pour cela , il faut , peut être , le lire ….
Mais ce n'est que mon avis , bien sûr , comme toujours .
« C'est énorme la vie quand même .On se perd partout » .