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4,08

sur 10005 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Quand RChris m'a proposé de lire Céline en parallèle, pour lui une re-lecture,
Je me suis dis 500 pages de cet écrivain tant décrié pour son farouche antisémitisme, dont je ne connaissais que le nom et la sale réputation ...
Mais la curiosité l'a emporté,
Et j'ai bien fait.

Si vous lisez ceci et ne vous êtes pas encore plongé dans "l'ombre" de Céline, foncez !!!

Quel plaisir de lecture !

Quelle découverte !

Surprenant à chaque mot, chaque ligne, chaque page !

C'est souvent dérangeant ! grinçant ! puant ! sombre ! moche !

Mais quel style, quelle richesse, quel génie au bout de la plume !

Tellement désabusé mais si lucide.

La lumière est là !
Céline se chargera de la voiler de sombre ...

Avec ses réflexions, ses dialogues, ses soliloques il nous abreuve d'une truculence de mots impressionnants ; son regard acéré, sans concession, souligne tout de la pointe de son crayon.

Comme l'a dit "totom" dans sa courte chronique qui résume si bien ce livre :
"Il y a un avant et un après avoir lu ce livre".


"Voyage au bout de la nuit"

"Voyager, c'est bien utile, ça fait travailler l'imagination,
Tout le reste n'est que déceptions et fatigues. Notre voyage
à nous est entièrement imaginaire. Voilà sa force.

Il va de la vie à la mort. Hommes, bêtes, villes et choses,
tout est imaginé. C'est un roman, rien qu'une histoire fictive,
Littré le dit, qui ne se trompe jamais.

Et puis d'abord tout le monde peut en faire autant.
Il suffit de fermer les yeux.

C'est de l'autre côté de la vie. "
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Il en aura fait des voyages Bardamu. Il a vu la vie, l'amour qui vous pourchasse jusqu'à devenir insignifiant, l'âme qui se flétrit lentement sans qu'on s'y attende après de nombreux voyages, tout comme l'envie, et la lassitude que rien n'arrête, une lassitude des sentiments juste l'envie de ne plus rien faire de ne plus penser à rien de rester dans l'hébétude de sa condition et de ne plus jamais en sortir, en quelque sorte de voir sa vie pourrir comme un fruit trop mûr qu'on aurait trimballé ici et là, de continent en continent, un fruit rongé par les vers de la maladie, de la quinine, des puces et des hommes, ces assassins.

Bardamu se rend bien compte au final après tous ses voyages qu'on est mieux chez soi mais que chez soi ça empeste aussi à la fin et qu'au bout du compte ça craint de vieillir tout court et que la seule façon de s'en sortir de cette vie c'est de se laisser vivre et d'aimer encore et encore les jolies filles qu'on croise, faute de mieux.

Ce roman est une claque littéraire qui vous prend par derrière sans vous avertir. Céline vous raconte un voyage, qui sonne comme un prétexte pour disserter, et on le suit dans ses digressions sans s'en rendre compte, et il nous emmène loin, bien loin, nous donne un petit bout de la nuit. Dur d'en ressortir, de cette nuit.

L'écriture ne plaira pas à tout le monde, elle est grossièrement parfaite, c'est étrange dit comme ça mais c'est bien ce que j'ai ressenti en la lisant. le langage très familier, presque cru de Céline, peut dissimuler au départ la beauté de son écriture et sa maîtrise des tournures de phrase, inédites en leur genre.

Lisez cette oeuvre profondément, comme on plonge dans la vie.
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Super livre avec une immersion plaisante et vraiment compte tenu du titre , on lit cela comme un voyage.

Le style est plaisant et on ne s'ennuie que très rarement.

Céline est cynique et manie l'auto détestation à la perfection.

On retrouve de l humour noir à foison et des personnages avec une profondeur raisonnable .

je recommande vivement cette lecture .
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Ce n'est qu'avec une grande humilité qu'on peut essayer de prétendre à rendre compte de ce grand livre qui est au-delà de toutes nos capacités "à dire" ou "à résumer" qui ne seront de toute évidence que maladroites ou incomplètes.

On pourrait s'en tenir aux faits et pérégrinations d'un certain Ferdinand Bardamu, traumatisé de la violence inepte d'une première guerre mondiale, dégoûté du jeu social factice, de la grande comédie humaine ne rassemblant que des égarés et qui cherche à exister au fil de destinations, des colonies en Afrique noire, à New York, Chicago, dans la banlieue parisienne ou à Toulouse.

Mais la force du livre n'est pas dans le récit du hasard qui mène nos pas mais bien dans la façon de le dire, dans la capacité à peindre la pensée. On n'est pas en intimité avec Bardamu, on devient Bardamu. On pleure avec lui quand il est désemparé devant la typhoïde de Bébert, on partage son fatalisme d'être ici ou ailleurs, on regarde le monde nu avec ses yeux cinglants sans pudeur.

Si on ne comprend que tardivement le Misanthrope de Molière être un profond humaniste déçu des hommes, qui ne les déteste pas mais en fait les aime trop, Bardamu offrira incontestablement ce même écueil. Car s'il nous dit que "L'égoïsme des êtres qui furent mêlés à notre vie, quand on pense à eux, vieilli, se démontre indéniable, tel qu'il fut, c'est-à-dire en acier, en platine, et bien plus durable encore que le temps lui-même." (p210), il parvient pourtant à résumer la vie en quelques lignes qui montrent que la clé n'est pas la haine mais bien la peine - "On ne peut même plus la dissimuler sa peine, sa faillite, on finit par en avoir plein la figure de cette sale grimace qui met des 20 ans, des 30 ans et davantage à vous remonter enfin du ventre sur la face. C'est à cela que ça sert, à ça seulement, un homme, une grimace qu'il met toute une vie à se confectionner, et encore qu'il arrive même pas toujours à la terminer tellement qu'elle est lourde et compliquée, la grimace qu'il faudrait faire pour exprimer toute sa vraie âme sans rien en perdre."(p292)

Et on suit ainsi le voyage intérieur dans sa propre nuit décrivant de façon si simple la folie - " Un fou, ce n'est que les idées ordinaires d'un homme, mais bien enfermées dans une tête. le monde n'y passe pas à travers sa tête et ça suffit. Ça devient comme un lac sans rivière une tête fermée, une infection." (p416) - et là est sans doute toute la tragédie du personnage dont on partage l'absurde sentence de comprendre ce qui lui manque et d'en être incapable, d'être " un Ferdinand bien véritable auquel il manquait, ce qui ferait un homme plus grand que sa simple vie, l'amour de la vie des autres." (p496)

Ce n'est pas un livre, c'est comme un homme vivant qui vous parle en certifiant pourtant qu"autant pas se faire d'illusions, les gens n'ont rien à se dire, ils ne se parlent que de leurs peines à eux, chacun, c'est entendu. Chacun pour soi, la terre pour tous. Ils essaient de s'en débarrasser de leur peine sur l'autre au moment de l'amour mais alors ça ne marche pas et ils ont beau faire, ils la gardent tout entière leur peine et ils recommencent, ils essaient encore une fois de la placer" (p292)

Et Bardamu est si vivant qu'il se confond avec Céline et qu'il nous apparaît ainsi comme une tentative ultime de partage pour quelqu'un pourtant qui n'y croit plus et on s'en retrouve touché et profondément ému. Ce livre est à la fois une démonstration de l'espoir déçu en l'humanité, un retrait du monde et la preuve qu'il ne faut pas s'y résoudre, il est comme un désespoir qui s'offre, des bras qui se tendent de ne plus savoir aimer.
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Je n'ai pas encore lu l'inédit de Céline, et cela m'a donné envie de parler du Voyage. Et surtout de l'auteur.
Le livre d'abord. On en a tout dit. Disons-le et répétons-le, c'est un des grands livres du vingtième siècle. On ne le résumera pas, tout le monde sait plus ou moins de quoi il s'agit, et d'ailleurs l'odyssée de Bardamu parmi les horreurs du temps n'est pas resumable, sauf peut-être en reprenant l'épigraphe : Notre vie est un voyage Dans la brume où loin ne luit " Et bien sûr il y a le style, la "petite musique " comme il disait.
Donc,oui, c'est un chef d'oeuvre. le chef-d'oeuvre de son auteur. D'autant qu'à part ça il n'y a pas grand chose. Déjà Mort à crédit marque une baisse de tension. Et puis rien.
Enfin, si. Il y les pamphlets. Et la question classique : comment l'homme du Voyage a-t-il pu écrire les Pamphlets ?
Mais si la vraie question, c'était : comment l'homme des Pamphlets a-t-il pu écrire le Voyage ? Comme s'emploie à le montrer Pierre-André Taguieff dans "Céline, la race, le Juif" c'est en effet l'antisémitisme des pamphlets qui exprime la nature profonde de l'auteur, qui a toujours été cet homme-la, qu'il est vain de vouloir excuser en évoquant un antisémitisme fantasmé comme l'ont fait certains. Et le reste de l'oeuvre ?'Dans une émission de radio de la fin des années 50, Céline a fait cette confidence surprenante : après Mort à crédit, il n'avait plus grand chose à dire. Et puis sont survenues ses péripéties et ses errances. Alors autant s'en servir !
Quant au résultat, à part quelques méchancetés réjouissantes sur le petit monde de la collaboration en exil à Singmaringen dans D'un château l'autre..
Mais bien sûr c'est un moment de l'histoire littéraire et de l'histoire tout court. Et il faut même rééditer les Pamphlets. La censure est toujours une mauvaise idée et de toute façon on les trouve comme on veut sur le Net.
Et une édition critique, comme celles des Décombres parue il y a quelques années chez Bouquins, serait bienvenue. Même si les lecteurs habituels des Pamphlets ne la liront sans doute pas
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Voila ! Je viens de refermer Voyage au bout de la nuit et je peux déjà dire que ce roman restera un bon moment dans ma mémoire. J'avoue avoir eu un peu de mal à entrer dans cette histoire. Bardamu n'est pas un personnage sympathique et sa vision du monde est assez démoralisante. Pourtant, bien aidé par le style inimitable de l'auteur, on suit les aventures de Ferdinand qui traverse le monde, la guerre et la misère avec son regard brut, pessimiste et parfois cynique mais aussi d'une très grande lucidité sur la nature humaine. Un très grand roman tout simplement.
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Lettre de Céline à Gaston Gallimard (1932)

Monsieur,

Je vous remets mon manuscrit du Voyage au bout de la nuit (5 ans de boulot).
Je vous serais particulièrement obligé de me faire savoir le plus tôt possible si vous êtes désireux de l'éditer et dans quelles conditions. Vous me demandez de vous donner un résumé de ce livre. C'est un bizarre effort en vérité auquel vous me soumettez et jamais je n'y avais encore songé.

C'est le moment me direz-vous. Je ne sais trop pourquoi mais je m'y sens tout à fait inhabile. (Un peu l'impression des plongeurs au cinéma qu'on voit rejaillir de l'eau jusqu'à l'estacade…) Je vais m'y essayer toutefois, mais sans manières. Je ne crois pas que mon résumé vous donnera grand goût pour l'ouvrage.

En fait ce « Voyage au Bout de la nuit » est un récit romancé, dans une forme assez singulière et dont je ne vois pas beaucoup d'exemples dans la littérature en général. Je ne l'ai pas voulu ainsi. C'est ainsi. Il s'agit d'une manière de symphonie littéraire, émotive, plutôt que d'un véritable roman.

L'écueil du genre c'est l'ennui. Je ne crois pas que mon machin soit ennuyeux.

Au point de vue émotif ce récit est assez voisin de ce qu'on obtient ou devrait obtenir avec de la musique.

Cela se tient sans cesse aux confins des émotions et des mots, des représentations précises, sauf aux moments d'accents, eux impitoyablement précis. D'où quantité de diversions qui entrent peu à peu dans le thème et le font chanter finalement comme en composition musicale. Tout cela demeure fort prétentieux et mieux que ridicule si le travail est raté. À vous d'en juger. Pour moi c'est réussi.

C'est ainsi que je sens les gens et les choses. Tant pis pour eux. L'intrigue est à la fois complexe et simplette. Elle appartient aussi au genre Opéra. (Ce n'est pas une référence !) C'est de la grande fresque, du populisme lyrique, du communisme avec une âme, coquin donc, vivant. le récit commence Place Clichy, au début de la guerre, et finit quinze ans plus tard à la fête de Clichy. 700 pages de voyages à travers le monde, les hommes et la nuit, et l'amour, l'amour surtout que je traque, abîme, et qui ressort de là, pénible, dégonflé, vaincu…

Du crime, du délire, du dostoïevskysme, il y a de tout dans mon machin, pour s'instruire et pour s'amuser. […] Je ne voudrais pour rien au monde que ce sujet me soye soufflé. C'est du pain pour un siècle entier de littérature. C'est le prix Goncourt 1932 dans un fauteuil pour l'Heureux éditeur qui saura retenir cette oeuvre sans pareille, ce moment capital de la nature humaine… Avec mes meilleurs sentiments

Louis-Ferdinand Céline
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Ecce Homo!

La pérégrination pitoyable de Ferdinand Bardamu, malheureux médecin de seconde zone français, au coeur d'une société abominable en cruauté multiforme: Grande Guerre déstructurante, colonialisme décadent, capitalisme exploiteur, pauvreté banlieusarde, relations humaines perfides et mesquines... le tout porté par un langage cru mais riche, argotique mais soutenu... Quelle claque!
L'Enfer se lit, l'Enfer se comprend, l'Enfer c'est notre monde!
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J'ai lu ce livre il y a près de 40 ans, lors de mon adolescence... et il résonne encore en moi aujourd'hui...
A l'époque, je reprenais dans un carnet les citations qui me sautaient aux yeux au grès des lectures. Des petits bouts de romans, ici où là, des phrases dont l'intelligence ou la poésie me touchaient, me questionnaient.
Cela m'est vite devenu impossible à la lecteur de ce livre : chaque page une nouvelle pépite d'écriture me sautait aux yeux : il m'aurait fallu recopier des pages entière, des centaines, empêchant jusqu'à la lecture...
De tous les événements, les rencontres qui ont construit celui que je suis devenu, ce roman à une place à part, il fait partie de ma vie, il fait partie de moi.

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Le jardin après Céline.
On laisse ici de côté tout ce qu'il y a de discutable dans l'oeuvre de Céline pour s'intéresser à son entreprise de destruction des illusions qui non seulement jalonnent toute existence, mais en formatent la plupart.
Au sortir du « Voyage au bout de la nuit », le lecteur se trouve acculé à cette question décisive et lancinante, capable de déstabiliser les meilleures volontés : « à quoi bon ? » C'est une question qu'on peut chercher à éviter en se barricadant dans des certitudes en plomb ou en or, mais qui nous rattrape tôt ou tard lorsque cesse l'étourdissante agitation et que tombent les masques sociaux.
C'est idiot pourtant. L'herbe pousse et cela lui suffit. Si elle est empêché de pousser, jusqu'à se dessécher, elle flétrit, se décompose, et ce qu'il en reste sera recyclé. Et cela suffit. Si je pense et si j'écris (je suis en train de le faire), dans le but de partager les idées qui se sont formées en moi, et que cela n'intéresse personne, en tout cas personne à ma connaissance, « à quoi bon » ? Si je plante des tomates plus qu'il n'en faut mais que je ne trouve personne à qui en donner, « à quoi bon » ?
C'est idiot pourtant. Rien ne m'oblige à poursuivre des buts qui ne dépendent pas de moi, comme d'écrire ou cultiver pour d'autres. Si j'écris ou cultive des tomates en abondance parce que j'aime le faire, et que j'aime le faire parce que je le fais naturellement, poussé par ma nature, cédant à son élan, alors, comme les fruits de l'arbre dont la plupart des graines ne donneront pas de nouvel arbre, je pousse, et cela me suffit. Si j'en suis empêché, je serai recyclé, et cela suffit.
Je vis, donc je suis la vie. Quelle merveilleuse certitude que de participer à la vie, quels que soient les jugements que je porte sur la quantité et la qualité de ce qu'elle me donne. Elle ne peut pas ne rien me donner : maintenant que j'en fais partie, c'est trop tard.
Je peux certes légitimement souhaiter recevoir plus ; désirer être entouré d'amis, vivre dans la douceur, un monde meilleur, etc. Je peux croire, à tort ou à raison, que je le mérite. Mais « à quoi bon » ? J'ai reçu quelque chose, je fais partie de la vie, la vie est ma patrie ; et j'y ai un jardin, et j'y suis un jardin.
Quels que soient les jugements que je porte sur la quantité et la qualité de ce jardin, j'en suis l'heureux jardinier. Si je jardine, comme je peux, comme j'apprends, comme la vie m'y pousse, cela suffit.
Il y a un sourire, il y a une joie, les voilà : si je jardine, le jardin croît, les fleurs éclosent, les fruits sont là, la vie recycle ; je ne sais pas comment, mais elle recyclera, nul doute à ce sujet, cela suffit.
J'ai, je suis un jardin.
Il faut cultiver son jardin.
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