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4,08

sur 9945 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'ai lu le Voyage quand j'avais 20 ans et je viens de le relire 35 ans plus tard... Bon, ce n'est pas les mêmes sensations... A 20 ans, j'avais reçu un uppercut en pleine poire. D'ailleurs, pendant un bout de temps je n'ai rien pu lire d'autres que du Céline ou des livres se rapportant à cet auteur. C'est un peu comme les plats trop épicés. Toute nourriture qui suit paraît fade et insipide.
Il y a bien sûr le style. Non, Céline n'écrit pas " argot " ou " populaire ". Ce n'est pas seulement une transposition de l'oralité du petit peuple. Céline écrit d'abord du Céline... Il est l'inventeur d'une musique à part qui casse tout les codes stylistiques du roman en vigueur au début du XX ème siècle. C'est l'anti-Proust par excellence (qui soit dit en passant se prend une volée de bois vert dans un fameux passage du Voyage).

Prenons une page au hasard. " Autour de nos salles réservées venaient trotter les vieillards de l'hospice d'à côté en bonds inutiles et disjoints. " Voila, tout est dit. Céline, c'est une musique mais je dirais que c'est avant tout du cinéma en Technicolor. " En bonds inutiles et disjoints " : on les voit bien les vieillards, clopin-clopant, se mouvoir par à-coups erratiques.

Je peux comprendre qu'au bout de 600 pages, cette prose chargée commence à fatiguer. Céline ne peut pas décrire " simplement " les choses. Probablement parce que le but de Céline n'est pas de décrire les choses. Dans sa correspondance ou ses interviews c'est le même tintouin. Il n'y a guère que quelques lettres à sa fille ou l'un de ses petits-enfants où il écrit comme le commun des mortels.

Prenons un autre passage. Comment retranscrire la nature agressive de la Bragamance, colonie africaine dans laquelle vient s'échouer, Bardamu, le héros du livre ? " du soleil, cela est sûr, il y en avait, toujours le même, comme si on vous ouvrait une large chaudière toujours en pleine figure et puis, en dessous, encore du soleil et ces arbres insensés, et des allées encore, ces façons laitues épanouis comme des chênes et ces sortes de pissenlits dont il suffirait de trois ou quatre pour faire un beau marronnier ordinaire de chez nous. " Chez Céline, tout est démesure.

Que raconte le Voyage ? Avant tout l'expérience de la guerre, la Grande. Céline ne décrit pas les grandes boucheries des plaines des Flandres.
On est loin également des faits héroïques mis en image par l'Illustré National... Rien de tout ça. Ce qu'il évoque c'est d'abord la peur. La peur de mourir et l'absurdité de la guerre. " Aussi loin que je cherchais dans ma mémoire, je ne leur avais rien fait aux Allemands. J'avais toujours été bien aimable et bien poli avec eux. " On a souvent dit que le Voyage était un roman pacifiste. Je ne trouve pas. C'est d'abord l'évocation de la bêtise humaine dans toute son étendue. C'est à l'aune de l'expérience traumatisante de la Grande guerre que l'auteur nous conte les expériences de Bardamu en Afrique puis aux États-Unis et pour finir à La Garenne-Rancy en banlieue parisienne.

On dit aussi que Céline ne montre que la noirceur de l'humanité. Certes, le Voyage, ce n'est pas de la littérature feel good... Déprimé et anxieux s'abstenir ! Mais ce n'est pas que ça. L'Homme n'est pas que bête et minable. Il est surtout un pantin exploité par des forces qui le dépassent : les forces du pouvoir (on l'envoie se faire trouer sur des champs de bataille) et celles de l'argent (on l'exploite dans les usines Ford pour trois francs six sous). Mais rien n'est simple avec Céline. Il vomit sur le capitalisme et le bourgeois dans ses romans. Cependant, dans une lettre au critique d'art Elie Faure, voici ce qu'il écrit au sujet du prolétariat : " le malheur en tout ceci c'est qu'il n'y a pas de " peuple " au sens touchant où vous l'entendez, il n'y a que des exploiteurs et des exploités, et chaque exploité ne demande qu'à devenir exploiteur. [...] le prolétaire est un bourgeois qui n'a pas réussi. Rien de plus. Rien de moins. "

Alors qu'est ce qui reste dans ce jeu de massacre ? L'injustice de la maladie, celle qui touche les enfants, comme Bébert par exemple, le fils de la concierge, qui se fane sans protester. Alcide, personne altruiste, qui trime au fin fond de l'Afrique pour envoyer de l'argent à sa petite nièce orpheline. " Évidemment Alcide évoluait dans le sublime à son aise et pour ainsi dire familièrement, il tutoyait les anges, ce garçon, et il n'avait l'air de rien."
Molly, bien sûr, l'amoureuse américaine généreuse en argent et en amour.
Et dans un certain sens la mère Henrouille, septuagénaire pleine de vitalité, qui refuse catégoriquement de mourir.

Manifestement, au bout de la nuit célinienne, tout n'est pas noir.

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Embarquer dans le Voyage au bout de la nuit est une expérience unique. Immense roman de l'indicible et qui pourtant dit tout. Exploration du fond de l'âme qui nous renvoie au visage nos déséspoirs, nos lâchetés, nos abandons. Manifeste pessimiste, abysse de solitude qui fascine grâce au talent et à la clairvoyance de son auteur. Et puis c'est drôle, ça grince, et puis on aime nous les Français la regarder en face la terrible condition humaine.

Accrochés aux souliers de Bardamu comme on entre en galère, on traverse les continents sans bien savoir si on court après une illusion perdue ou si l'on fuit un désastre.

La guerre est une peste qui infiltre les esprits et marque au fer rouge le pauvre Ferdinand. Lui ne demande qu'à être un lâche, bien vivant. Il vomit l'héroïsme ambiant, abandon stupide au front et aveuglement abjecte à l'arrière. Ensuite, elle le pourchasse la guerre, toujours.

L'Afrique est un abime, une fièvre qui s'étale dans la crasse et la moiteur. Sans compassion, en quelques paragraphes, on abat le colonialisme, les rêves de fortune et la dignité.

Puis c'est l'Amérique, le monde moderne, l'avenir, la richesse à fleur de trottoirs, “la ville debout”. Et là encore la solitude et la misère. Mais en pire, parce s'y ajoute le mépris et l'indifférence. Après le colonialisme c'est le capitalisme qui nous écrase de sa lourdeur impitoyable.

On revient en France. Pourquoi continuer à ramper ailleurs que chez soi ? Bardamu il devient médecin, comme Céline, sans qu'on sache trop ce qui lui a pris. Il s'installe en Banlieue et après le monde c'est le cerveau des humains qu'il se met à disséquer. Et c'est pas beau ce qu'il en sort. Comptables de l'ennui, monstre égoïstes, assassins rongés par leurs désirs, partout de grands lâches qui s'accrochent à leur toute petites planches de survie.

Pourquoi est-on partagé entre le dégout et cette drôle de sensation que Céline nous révèle ce qu'il y a au fond de nous sans que l'on ose y regarder ?

Et puis il ya ce regard de côté, on est à la bonne distance. Dans la poisse et au dessus la mêlée. L'invention de cette langue qui empoigne son lecteur et l'accompagne quand il referme le livre. On serre les dents, on imagine, on pense et on sourit, souvent.
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Déja le titre ""voyage au bout dela nuit""
Céline Louis Ferdinand à fait publier cette oeuvre le 15 octobre 1932.,
pour la petite histoire c'est le titre d'une chanson
qui date de 1793 d'un officier de Napoléon pendant la bataiile de la Bérézina .donc il y a bien longtemps !

Ecrit dans un langage un peu argotique met en oeuvre le personnage principal Ferdinand Bardanu le narrateur qui est dans la pleine guerre de 1914.
Tout le monde s'en doute ,le thème répétitif de la trame est la critique haute et dure de la bétise ,que dis je!! de la nullité de la guerre qui apporte que pourriture et mort.
De l'ineptie meurtrière de ses supérieurs dans les tranchées.
Ce livre est une autobiographie de l'auteur (je pense ? les virtuose du français me le diront merci!!) et une vision plus précise sur les causes qui débouchent sur des guerres quelles que soient :
l'antinationalisme, anticapitaliste, anticolonialisme , en fait anti cons!!!!!!.
Ce sont ces reflexions qu'analyse Céline et qui nous les donne a disséquer .
C'est vrai qu'un pessimisme règne dans cette oeuvre . c'est un récit de désespéré!!
Mais bon !! longuement critiqué ,livre qui susssita des polémiques , moi je comprends ce que l'auteur à voulu nous faire entrevoir au travers d'une écriture ou le verbe plus que parfait est présent (jeu de mots !)
par l'emploi du ""je""
Céline ne veut pas se cacher et il affirme ce qu'il croit ,et j"adhère à ses dires.
Car à la guerre ce ne sont que des chairs qui volent et des hurlements qui vrillent les cerveaux ,avant les balles.
Ceux qui en survivent ressortent fous ,et sont internés,il en parle dans son livre le Ferdinand .
Dans " son oeuvre " Louis Ferdinand hurle la souffrance de la guerre, la méchanceté des hommes, 'hypocrisie bourgeoise et le sort ignoble des pauvres. Il rate hélas le Goncourt 1932 mais il s'en fou . Ce sera un illustre inconnu et , lui, il devra se contenter du Renaudot.
Tout le monde sait que Louis Ferdinand, est un grand auteur français du XXe siècle !…qui nous entraine dans un "Voyage initiatique au coeur de la réalité du Monde" .
Ce livre est un véritable "tourner les pages," je ne sais plus comment on appelle la façon d'aller vite dans la lecture ?
le style est fluide, parsemé de phrases qui font réfléchir.
Bon je ne vous dis plus rien , désolé d'avoir été si long mais ce livre sur le désespoir nous devons le lire et le relire . La fin m"a bouleversé, et oui ! .
Lisez le dans le calme sans vous énervez merci!!
Fabiolino
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Lu lorsque j'avais 20 ans (ça fait donc un long moment...), le Voyage ne m'a plus jamais vraiment quitté. C'est un roman fondateur par son style, par son déroulement et par sa puissance philosophique. On peut le récuser, on peut aussi buter sur cette écriture qui hurle, mais il n'en reste pas moins un ouvrage fondamental du XXeme siècle
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Le Voyage au Bout de la Nuit de Céline est absolument immense. En 500 pages on a l'impression d'avoir fait le tour du monde, tout en ayant ressenti le souffle très intime de Bardamu. le triangle qu'il effectue dans l'espace entre les différents continents qu'il traverse semble une véritable aventure. le personnage reste très passif, mais on ressent tout le chemin qu'il parcourt, enchaînant les situations peu glorieuses. Cette sensation provient du style de l'auteur. Qu'écrire sinon que c'est monumental. C'est une langue encore une fois très diverse. Elle expose toutes les situations à l'os, presque chirurgicalement. On ne prend jamais vraiment de recul sur les aventures. La psyché du personnage est entièrement dévoilée. On sent toute l'ironie que son existence implique. Toujours une véritable victime tragique de ce qui lui arrive. C'est un être passif, conscient de sa fragilité exposée dans ses moindres détails, avec la langue hyper précise et incarnée de Céline. Il est difficile de mettre des mots sur cet oeuvre qui absorbe, qui semble parfois trop grande.
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Je ne peux pas y ajouter une cinquième étoile mais c'est tout près. Un livre ou plutôt un "road-livre" au langage direct, franc et poignant. Les reflexions du protagoniste, la narration des situations qui se succèdent, le rythme trépidant, en font inmanquablement une oeuvre d'une grande valeur, une lecture à ne pas manquer
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Un livre commencé en 2023 et fini en 2024 car c'est à la fois un pavé et une écriture dense.

Je ne vais pas reprendre le discours sur l'antisémitisme de Céline et la séparation de l'artiste versus l'homme. Ce débat a été mené avec un tel brio par @Nastasia-B que c'est vain de le recommencer.

La seule chose que je puisse ajouter à ses propos est que ces 2 débats sont plus que jamais d'actualité avec ce qui se passe au Moyen Orient et la débâcle Depardieu, on voit que le monde ne change pas beaucoup.... et je sais que cela n'est pas comparable à l'attitude de Céline mais je parle, ici, du concept.

Bref, ces points mis de côté, cela fait des années que je souhaitais lire ce livre car il reste un monument de la littérature française. Je ne sais pas à quoi je m'attendais mais j'ai été surprise par le style, l'histoire, les personnages.

Voyage au bout de la nuit est un voyage initiatique. Il commence par une discussion dans un café et se finit dans un asile. le héros Ferdinand Bardamu est clairement inspiré de la vie de l'auteur. Soldat pendant la première guerre mondiale, médecin… C'est une sorte de road-movie avant l'heure. Mais un road-movie de la pauvreté qui explore les facettes les plus pauvres de ce monde. le personnage principal est raciste, homophobe, sexiste et anti-capitaliste. Mais il est également sans concession vis-à-vis de lui-même.

Céline a un style bien à lui. C'est entre l'argot et le langage parlé. C'est simple et efficace. Et parmi toute cette misère, il y a parfois des moments d'humour mais aussi des moments où j'ai dû arrêter ma lecture car tant de noirceur, cela devient désespérant. Cela restera une découverte étonnante.


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Il faut lire le Voyage au bout de la nuit de Céline, qui nous transmet sa vision du monde et de l'Homme à travers le personnage de Bardamu.
Louis-Ferdinand Céline a inventé une langue, une nouvelle façon d'écrire.
Ce livre a marqué ma vie de lecteur.
Le seul défaut de ce livre est d'avoir été écrit par Céline...
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Je l'ai lu trois fois, c'est à mon avis le meilleur roman de la littérature française du XXe siècle, un véritable chef-d'oeuvre. L'un des aspects remarquables du livre est le langage qui peut surprendre la nature humaine, en utilisant une langue familier, parfois cru, et le recours au monologue intérieur pour dévoiler les pensées intenses et les émotions. Au fil des pages, Céline explore le contraste entre l'idéalisme et la réalité, entre l'espoir et la désillusion.

Le roman "Voyage au bout de la nuit" est une lecture provocante et captivante pour ceux qui s'intéressent à la littérature qui explore les sombres profondeurs de l'existence humaine.

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Content d'avoir lu ce roman qui compte dans la littérature française. Je connais l'aura sulfureuse qui plane sur Céline mais je l'ai lu sans aucun aprioris sur l'auteur car je me fout de sa réputation et de ses idées. C'est l'oeuvre qui m'intéresse. Je n'ai de toute façon rien trouvé de réellement choquant en matière de mysoginie, de racisme, antisemisme ou autre. Et ne rien trouver de "réellement choquant" ne veut pas dire tout trouver normal. C'est à dire qu'il faut accepter qu'un personnage soit immoral ou amoral dès lors qu'on nous raconte juste une histoire et que le but n'est pas de nous convaincre d'être ainsi. C'est un roman, donc ça donne à lire les pensées et comportements d'un personnage de fiction. Tout est permis (ou devrait l'être). Ce ne serait pas la même chose s'il s'agissait d'un essai où l'auteur donne sa pensée réelle. Là la condamnation peut être acceptée s'il y a lieu.
Pour en revenir à l'oeuvre, ce que j'y ai vu c'est un jeune homme qui paraît être tout à fait normal au départ, et qui change radicalement après son expérience de la guerre. En fait j'y vois un grand traumatisé de guerre qui bascule même par moments dans la folie. Et qui traînera cette "blessure" tout le reste de sa vie. D'où sa vision du monde et des hommes totalement désabusée. Ce sentiment que l'homme ne donne et n'est jamais rien de bon. D'où son attitude très spectatrice, sans grandes émotions. Ce sentiments de "à quoi bon" perpétuel. L'homme à toujours été dans la fange et ne s'en sortira jamais alors pourquoi intervenir, pourquoi essayer quoi que ce soit ? Pour moi tout ça est le résultat de son traumatisme guerrier. On le voit aussi à sa façon de voir régulièrement les gens comme de la pourriture sur pied, de la chair morte. En fait pour lui les gens sont plus des morts en sursis que des vivants. Voire des déjà morts qui ne le savent pas encore.
C'est assez déprimant comme roman mais ça fait réfléchir.
Et cette façon particulière d'écrire comme le personnage pense ou parle, c'est une belle technique. Ça m'a rappelé le style d'emile Ajar dans " L'angoisse du roi Salomon". Et ce côté spectateur désabusé du personnage m'a rappelé aussi "L'étranger" de Camus.
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