Après "la Vagabonde", voici le deuxième livre critiqué sur ce site (j'ai certainement lu d'autres livres de l'auteur dans ma jeunesse). Reçu pour mon anniversaire, (meilleur cadeau à m'offrir : un livre !), "
La chatte" est l'histoire de Saha, une chartreuse de 4 ans qui a été adoptée par Alain, jeune homme de 24 ans qui se prépare à épouser Camille, une jeune amie de la famille, pour qui il éprouve un sentiment de fierté étonnée plutôt qu'un amour véritable. Leur futur logement situé sur le terrain de la propriété d'Alain et sa mère étant encore en travaux, les époux s'installent provisoirement dans l'appartement d'un mai en voyage en périphérique est de Paris (on reconnait dans certaines descriptions le style des Buttes- Chaumont), laissant
la chatte à Neuilly dans la maison de la mère d'Alain. Lorsqu'Alain retrouve sa chatte, affamée et amaigrie après une nuit d'absence (exagération ou humour ?) il convainc sa femme de prendre avec eux
la chatte. Commence alors une vie ralentie pour Camille qui ne songe qu'à sortir ou voyager et qui s'impatiente de s'installer dans sa nouvelle maison. de son côté Alain se contente de cet arrangement pour le moins "spécial" : commencer sa nuit dans les bras de sa femme et la finir allongé sur un banc malcommode mais sur lequel peut vient se blottir sa bien-aimée Saha. Camille n'est pas dupe de ce petit manège et la folie la pousse un soir à balancer
la chatte du 9è étage..., qui voit sa chute ralentie grâce au store d'un appartement. Saha se sort de cette sentence pratiquement indemne, en revanche, Alain décide de se séparer de Camille.
Quel plaisir de plonger dans ce cours récit de presqu'un siècle (écrit en 1933) et pourtant si moderne ! Il y a de très belles (et longues) descriptions de la nature (le jardin, le ciel), du comportement de
la chatte (son ronronnement, ses dialogues invisibles avec le "maître", sa crainte de Camille, la "rapportée" à la famille). Cette nouvelle présente un drame sous-jacent mais aussi de l'humour (ou la causticité !), du moins c'est ce que j'ai ressenti et pourrait tout à fait se passer de nos jours, à part peut-être le fait qu'Alain ne semble pas avoir un métier très prenant et que Camille ne travaille pas.
Sous prétexte d'un couple qui va se séparer à cause d'un animal, Colette dénonce -à mes yeux- le (mé)fait des mariages "de convenance", la condition d'une femme reléguée à être un objet (de satisfaction) ou un décor (doit être jolie à regarder), la rébellion de cette dernière face à la passivité de son cher époux (je pense qu'elle l'aime plus que lui).