J'ai lu de nombreux livres consacrés à ce fléau noir, et plus particulièrement, à cette grande peste bubo- septicémique venue du Levant apportée par le Grand Saint Antoine en 1720 qui dévasta toute la Provence jusqu'en 1723.
Cet ouvrage est particulièrement intéressant parce qu'il raconte l'édification de ce mur, conçu comme une barrière sanitaire pour tenter de protéger le Comtat Venaissin qui était alors terre pontificale. Cette muraille s'élève de Monieux ( à l'est de Carpentras) à la combe de Cabrières d'Avignon . Ce dispositif est complété par une série de barrières permettant le contrôle des voies principales. 500 hommes participent à cette construction, chaque communauté devant fournir un certain nombre d'hommes choisis parmi les artisans, vignerons, travailleurs de moins de 60 ans, ni chargés de famille ni fils uniques. Ces hommes viennent soit par bonne volonté, soit par tirage au sort, ils doivent apporter leurs propres outils. Ils sont payés 10 sols par jour.
Les séquelles de ces années funestes se feront sentir longtemps : 120 000 victimes , souffrances multiples , arrêt du commerce ruinant l'économie locale, suspension de grands travaux entrepris avant la peste (aqueduc de Carpentras) …
Cette frontière empierrée a été restaurée, réédifiée par une association «Pierre sèche en Vaucluse» qui a vocation de conserver le patrimoine de pierre sèche en tentant de le protéger, de le restaurer, de valoriser ces constructions (bancau, cabanes, aiguiers , enclos, bories …). Ces travaux ont été réalisés grâce à des chantiers (souvent de réinsertion) de jeunes au cours de plusieurs étés. Pour arriver à ces fins, il a fallu débroussailler la garrigue épineuse, récupérer les blocs éparpillés, déchausser certains murs pour retrouver la base, puis rempiler les pierre, une par une. Depuis, ce mur est régulièrement entretenu.
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Nous voyons souvent apparaître
Régner et naître
Trois grands dangers :
Le premier mal est pestilence ;
Le second est, en vérité
Grand défaut et stérilité
Des fruits et des biens de la terre,
Et le tiers est cruelle guerre.
(Olivier de la Haye 1348 -page 12)
Et ce serpent ruiné sans rien qui tienne ensemble ces écailles
Le long cheminement qui est ce qui reste d’une muraille
…
On a depuis belle lurette oublié ce qu’il délimite
Et que ce fut le grand terrain domanial de l’épidémie
…
Tu aimes ces contrées de peste entre la Durance et le Rhône
Ce pays sans eau, ces hauteurs où la peur avait fait son trône
Tu l’ouvres devant moi cet incunable plein de tragédies
De meurtres et de poison noir. Moi j’écoute ce que tu dis…)
(Aragon, Prose du bonheur d’Elsa page 7)
Les fléaux, en effet, sont une chose commune, mais on croit difficilement au fléaux lorsqu’ils vous tombent sur la tête. Il y a eu, dans le monde, autant de pestes que de guerres. Et pourtant pestes et guerres trouvent les gens toujours aussi dépourvus
(Albert Camus La peste 1947 page 17)
Lorsque l’agneau ouvrit le quatrième sceau, j’entendis la voix du quatrième vivant qui disait « viens » et je vis : voici un cheval verdâtre et celui qui le montait s’appelait la peste, l’enfer l’accompagnait » (Apocalypse selon Jean page 12)