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J'ai découvert ce livre grâce à une suite de hors série, dans le podcast « La Poudre » animé par Lauren Bastide (podcast que je vous conseille vivement en passant). Cette suite de hors série était consacrée aux sorcières.

Tituba est fille d'esclave et cette dernière va faire partie du procès des « sorcières de Salem », un épisode de l'histoire coloniale américaine. Nous sommes vers la fin du 17eme siècle et la logique coloniale conduit ces procès (comme dans la ville de Salem) à juger des femmes esclaves pour des actes considérés comme des outrages par les colons. La pendaison n'est plus une illusion et plusieurs d'entre elles seront pendues.

Maryse Condé conte l'histoire de Tituba, qui est l'une d'entre elles et qui très tôt dans sa vie cultive des connaissances transmises par sa mère esclave elle aussi. Cela va lui permettre d'aider ses pairs dans les plantations, de les soigner, de développer une empathie hors norme mais aussi d'entretenir un rapport à la mort tout particulier. Malheureusement, ces connaissances multiples la feront aussi passer pour une sorcière aux yeux des colons et on se rend compte rapidement que les difficultés vont se multiplier pour elle. C'est une lecture nécessaire qui mêle plusieurs sujets et qui questionne la place des femmes au XVIIe siècle dans la société esclavagiste de l'époque. On constate à plusieurs reprises que les discriminations envers les femmes viennent s'ajouter aux conditions de vie liées à l'esclavage et à la ségrégation raciale.

Maryse Condé rend hommage à Tituba en reconstituant un récit à la frontière entre la fiction et la réalité. C'est une vie qui est contée à travers une histoire puissante, un livre à découvrir et à faire découvrir.
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A la Barbade, la jeune Tituba - née du viol de sa mère par un marin anglais - est élevée par la vieille Man Yaya qui l'initie aux secrets et aux vertus des plantes, des potions, des onguents et des esprits. A la mort de la vieille femme, à quatorze ans, Tituba succombe aux charmes de John Indien, un esclave qu'elle finit par épouser. Vendus par la propriétaire de John, ils doivent suivre leur nouveau maître, le pasteur Samuel Parris à Boston, puis à Salem où le révérend a trouvé une cure. L'attitude fondamentaliste et rigorisme de l'homme d'église s'épanouit dans la communauté très religieuse de la petite ville mais bientôt l'hystérie s'immisce dans l'esprit de jeunes filles fragiles qui accusent d'autres femmes dont Tituba, de s'adonner à la sorcellerie et de pactiser avec le malin.

Maryse Condé mêle adroitement petite et grande Histoire en imaginant le destin de Tituba, une jeune esclave qui, par les aléas de transactions commerciales ou dettes, se retrouve vendue avec son mari à un pasteur. A Salem, la jeune femme se retrouve dans la tourmente de l'hystérie collective provoquée par le fondamentalisme religieux de la petite communauté, encouragée par l'ambiance de suspicion qui règne dans la communauté et favorisée par l'esprit rigide et bigot du pasteur Parris. Contraintes et sévices corporels sont pratiqués dans un obscurantisme religieux qui rappelle celui de l'inquisition catholique, mais perpétré, là, par les puritains protestants avec toujours autant de radicalisme. La jeune femme, après avoir connu l'esclavage, sera accusée d'être une des sorcières de Salem et il lui faudra toute son énergie pour échapper à la sentence réservée aux sorcières.
Moi, Tituba sorcière est une très beau portrait de femme, une biographie imaginée d'après quelques rares informations disponibles sur cette femme qui a réellement existé. Maryse Condé en fait une héroïne résiliente, intelligente et courageuse face à une société pétrie d'interdits et de violences.
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Dans cette histoire, Maryse Condé, grande autrice antillaise, prix Nobel de littérature alternatif en 2018, s'immisce dans les blancs de l'histoire pour raconter le destin d'une femme esclave au 17e siècle, qui va se retrouver dans une posture d'esclave à cause de l'amour d'un homme : jusqu'à ce que John Indien ne vienne lui déclarer sa flamme et ne l'épouse, Tituba vit tranquillement à l'écart du monde, dans une case, en causant avec ses "Invisibles", tous ses proches qui ont quitté la vie terrestre mais restent à ses côtés et la guident dans la vie.

Mais en nouant sa vie à celle de cet homme qui va se révéler bien peu courageux par la suite, Tituba entre au service d'une femme qui la revendra à un pasteur américain. Pour Tituba, c'est un choc de culture et de civilisation qu'elle va devoir affronter en quittant le monde créole et ses croyances pour découvrir l'Amérique ultra puritaine des colons : les cheveux doivent être cachés, on fait l'amour avec ses vêtements, la foi chrétienne est la seule qui puisse exister, et toute personne qui ne rentre pas dans ce cadre est forcément possédée par le Démon...

Au fil des pages, Maryse Condé prend la voix de Tituba pour relater cette vie de privation, de frustration mais aussi de pouvoir. Car Tituba est une sachante et avant tout une femme libre. Tituba sait soigner les maux du quotidien avec ce qui existe dans la nature. Elle croit à des forces supérieures différentes de celles de ces puritains, et pour toutes ces raisons, Tituba fascine et envoûte, Tituba est forcément une sorcière, Tituba doit mourir. Et si l'histoire de Tituba est marquée par le procès de Salem en 1692, là n'est pas l'enjeu du livre : on passe très vite sur ce qui va s'y dire et s'y nouer. L'important, l'essentiel de cette histoire est de démontrer comment les fantasmes ont pu se créer autour d'une femme qui avait du mal à concilier sa culture d'origine, ses croyances, avec l'injonction du puritanisme américain.

Si on peut relever certains anachronismes dans le récit de Maryse Condé, comme certains propos tenus par Hester, cette femme dont Tituba croise la route en prison, c'est avant tout l'histoire d'une femme puissante dans un monde tenu de main de maître par les hommes qui nous est racontée, l'histoire d'une femme qui s'oppose, qui sait, et qui en devient dangereuse. Si elle réussit, elle est coupable, si elle échoue, elle l'est également. Il n'y a pas d'autre destin pour Tituba que celui d'être pointée du doigt et soumise au bon vouloir de ceux qui se pensent plus puissants.
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Les vies s'enchevêtrent. Les peurs immémoriales et les vieilles tentations refont surface avec une violence dont Tituba et quelques autres seront les victimes expiatoires toutes désignées.
Un roman cruel et sardonique.
La toute jeune Tituba, fille de l'esclave Abena va devoir affronter très jeune la haine et la rancoeur des hommes et va devoir affronter et accepter dans sa chair et dans son âme la mise à mort de sa mère après qu'elle a voulu tuer son maître d'un coup de couteau. Nous sommes à la Barbade au XVII siècle. C'est de cet acte de haine que Tituba va devoir fuir et dans sa fuite elle va rencontrer une femme, Man Yaya qui va la prendre sous son aile et va devenir sa seconde mère. Elle va d'une part lui enseigner l'art de guérir avec les plantes et d'autre part elle va l'initier à une connaissance plus haute « le monde des morts » et comment communiquer avec eux. Man yaya n'est pas éternelle, elle va mourir et peu de temps après Tituba succombera au charme de John Indien. Elle le suivra malgré les mises en garde des esprits de sa mère et de Man yaya jusqu'à Boston puis au village de Salem où elle sera l'esclave d'un nouveau maître, le révérend Samuel Parris. Ce choix, de suivre John Indien va l'entraîner dans la tourmente du procès des sorcières de Salem.
La romancière Maryse Condé se délivre du poids d'une Afrique qu'elle porte dans son coeur et dans ses entrailles. Elle fait craquer tous les vernis pour nous donner un texte riche et amer. C'est un récit dur et sec comme cette terre ingrate de Salem. Crépitant de phrases sans fioritures, Tituba scintille de couleurs et charrie des mots, des images, des phrases sinueuses et sensuelles. Elle dévoile aussi une magie qui nous émerveille dans sa correspondance qu'elle a avec les esprits.
Mais ne nous égarons pas Tituba est une combattante et une résistante car « ceux d'entre nous qui ne sont pas venus au monde armés d'ergots et de crocs, partent perdants dans tous les combats.
Salem est une ville ténébreuse, une ville pieuvre, une ville puritaine, une ville piège car elle sera prise dans les mailles de ses filets. Ses habitants voient peu à peu en Tituba une sorcière. Elle est emprisonnée comme une sorcière dans une cellule sombre et insalubre. Elle la partage avec une jeune femme Hester. Malgré l'amitié d'Hester, la prison laissera à Tituba une impression ineffaçable.
Quelques mois plus tard Hester n'est plus. le coeur de Tituba se brise. Puis elle est employée dans les cuisines de la prison. Cuisiner présente des avantages certains car son esprit demeure libre. En 1693 on ouvre les portes des prisons et on déclare un pardon général. Sa joie la possède entièrement mais qui se soucie d'elle ? Un homme, un commerçant que l'on dit extrêmement riche qui est vraisemblablement en relation avec les Antilles, il symbolise ce que Tituba espère…. Un retour à la Barbade .
Non, décidément ce roman n'est pas désespéré. Une justice immanente s'y réfléchit. Après la prison de Salem une nouvelle vie commence pour elle, c'est ce qu'a voulu raconter Maryse Condé pour la réhabiliter et surtout pour l'arracher à l'oubli auquel elle a été condamnée.

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Waouh : « Moi Tituba, sorcière, noire de Salem ».

Cette histoire m'a tenue en haleine jusqu'à très tard dans la nuit.

Ces derniers jours je n'avais qu'une hâte, retrouver Tituba me contant son histoire !

Maryse Condé est une écrivaine hors pair.
Pas étonnant qu'elle ait reçu le Prix Nobel alternatif 2018 pour cet ouvrage !

Elle dira lors de la remise du prix :
« En France, je n'ai jamais eu le sentiment que l'on écoutait vraiment ce que j'avais à dire. Je suis habituée à être un peu marginalisée. Aussi, cela m'étonne que ce soit un pays tel que la Suède, un pays voisin de la France, qui estime que ce que je dis et ce que je suis est important. »

Ce livre contient tous les codes liés à la chasse aux sorcières et plus largement aux questions les plus profondes présentes dans les différentes formes de féminisme.

Ce livre relève du génie. Sincèrement.

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1692, lors du tristement célèbre procès de Salem, Tituba avoue ses actes de sorcellerie et dénonce d'autres femmes afin de garder la vie sauve. Sa peau est foncée, elle est jeune, esclave, née à la Barbade, malmenée et humiliée, échouée dans ce milieu puritain et raciste de Salem, où la femme est peu de chose et la religion écrase. Mais qui est Tituba ?
Dans ce roman où se mêlent étroitement réalité et fiction, Tituba est une voix. La voix d'une femme victime des Hommes, partagée entre l'amour et la liberté, l'humanité et le ressentiment, torturée par son envie de vengeance alors que ses dons de guérisseuse la poussent au contraire. La voix d'une femme différente, clairvoyante et profondément juste, digne et engagée, une femme forte au destin implacable, une femme que l'écrit réhabilite pour ne pas oublier ces périodes sombres et cruelles de l'Histoire.
De sa naissance  à ses premiers émois, de sa survie à son exil, de ses choix à ses regrets, de ses amours aux trahisons, de ses désirs, de ses espoirs à la réalité, de la violence à l'apaisement, de son regard lucide à sa résignation, de sa force à ses doutes, les mots sont ceux de Tituba, forts et vifs, sans concession tel le cheminement âpre de son existence.
Ce roman porté par une plume envoûtante est absolument passionnant
***
Pour poursuivre les découvertes sur cette triste période historique, une magnifique et très intéressante exposition est actuellement visible au Musée d'Orsay 
"Le Modèle Noir - de Géricault à Matisse " - 26 Mars au 21 Juillet 2019
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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Je découvre Maryse Condé avec ce titre. On peut dire qu'elle n'a pas volé son prix Nobel ! Sa plume est remarquable d'élégance. le récit est construit de manière très linéaire, façon 19e siècle. On y suit les mésaventures de Tituba, esclave à la Barbade, femme libre d'esprit malgré tout, et un peu sorcière. Bientôt vendue par son maître, elle embarque pour Salem aux Etats-Unis où elle sera bientôt prise dans tourmente de la chasse aux sorcières. Les mésaventures de Tituba se succèdent et dressent un portrait terrifiant de la condition d'esclave et de femme au XVIIe siècle. L'histoire s'inspire largement de faits réels, Tituba apparait d'ailleurs parmi la liste des sorcières citées dans les archives du procès de Salem que l'autrice a épluchées pour réaliser son roman. Avec Moi, Tituba sorcière, Maryse Condé, militante féministe et indépendantiste guadeloupéenne par ailleurs, nous conte la nécessaire histoire des vaincues... A lire absolument !
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Tituba née a la barbade dans les années 1600, elle est esclave et accusée de sorcellerie à Salem.Trés belle histoire bien écrite .
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Lorsque j'ai terminé Moi, Tituba sorcière... je me suis sentie toute vide. Parce que je venais de lire un livre qui m'a vraiment beaucoup plu, que j'avais succombé à la plume de Maryse Condé, à ses mots pour parler de l'exil, de la souffrance, de l'esclavage. J'ai vibré avec Tituba, cette femme accusée de sorcellerie à une époque où les féminicides furent légion pour réprimer ces femmes qui différaient de la norme, ces femmes qu'on voulait contraindre et maîtriser par tous les moyens. Tituba, qui a, par ailleurs, réellement existé, mais dont L Histoire n'a pas daigné conserver plus ample détail que celui de son arrestation et son inculpation dans le procès de Salem. Mais du reste, pourquoi s'en soucier...? le racisme ordinaire de l'Histoire, telle qu'écrite par les dominants... Maryse Condé réhabilite sa mémoire, tout en prenant des libertés avec son histoire, puisqu'au final, celle-ci reste entachée d'ombre.
Par contre, j'ai tiqué sur l'emploi de concepts, mis dans la bouche de personnages du 17ème siècle, qui m'a semblé anachronique (féminisme et racisme). Mais c'est un détail. Parce que j'ai aimé la façon dont Maryse Condé a raconté son histoire, et au final, même l'implantation de réflexions sans doute contemporaines sert son récit, pour comprendre certainement des mécanismes d'exclusion, de haine et de violence qui ont pu s'exprimer en toute impunité à une époque donnée (mais que je ne crois pas entièrement révolue dans sa façon de considérer les personnes racisées). Elle met l'histoire en perspective également.

J'ai relevé ce passage (parmi tant d'autres, l'écriture, vraiment, m'a séduite !) :
"La Barbade !
Durant les périodes furieuses, puis hébétées de ma maladie, je n'y avais guère pensé, à ma terre natale. Mais une fois précisément recollés les morceaux de mon être, mon souvenir me réinvestissait.
Pourtant, les nouvelles que j'en avais n'étaient pas bonnes. La souffrance et l'humiliation y avaient planté leur empire à demeure. le vil troupeau des nègres ne cessait de faire tourner la roue du malheur. Broie, moulin, avec la canne, l'avant de mon bras et que mon sang colore le jus sucré !
Et ce n'était pas tout !
Chaque jour, d'autres îles autour d'elle étaient ouvertes à l'appétit des Blancs et j'apprenais que dans les colonies du Sud de l'Amérique, nos mains à présent tissaient de longs linceuls en coton."
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Roman envoûtant ou la réalité se mêle à la fiction.
Histoire belle et tragique. On parle d'esclavage, d'oppression, de croyance, de la place des femmes dans une époque ou la superstition, la cruauté et l'intolérance règne .
La bonté de Tituba, son amour pour ceux qui l'entoure, sa liberté ne suffiront pas à la protéger des hommes, de leurs peurs et de leurs envies. Mais elle incarne l'espoir et renaît de ses cendres (avec magie).
cette période de l'Histoire est finie mais avons nous vraiment appris ?
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