Lorsque j'ai terminé
Moi, Tituba sorcière... je me suis sentie toute vide. Parce que je venais de lire un livre qui m'a vraiment beaucoup plu, que j'avais succombé à la plume de
Maryse Condé, à ses mots pour parler de l'exil, de la souffrance, de l'esclavage. J'ai vibré avec Tituba, cette femme accusée de sorcellerie à une époque où les féminicides furent légion pour réprimer ces femmes qui différaient de la norme, ces femmes qu'on voulait contraindre et maîtriser par tous les moyens. Tituba, qui a, par ailleurs, réellement existé, mais dont
L Histoire n'a pas daigné conserver plus ample détail que celui de son arrestation et son inculpation dans le procès de Salem. Mais du reste, pourquoi s'en soucier...? le racisme ordinaire de l'Histoire, telle qu'écrite par les dominants...
Maryse Condé réhabilite sa mémoire, tout en prenant des libertés avec son histoire, puisqu'au final, celle-ci reste entachée d'ombre.
Par contre, j'ai tiqué sur l'emploi de concepts, mis dans la bouche de personnages du 17ème siècle, qui m'a semblé anachronique (féminisme et racisme). Mais c'est un détail. Parce que j'ai aimé la façon dont
Maryse Condé a raconté son histoire, et au final, même l'implantation de réflexions sans doute contemporaines sert son récit, pour comprendre certainement des mécanismes d'exclusion, de haine et de violence qui ont pu s'exprimer en toute impunité à une époque donnée (mais que je ne crois pas entièrement révolue dans sa façon de considérer les personnes racisées). Elle met l'histoire en perspective également.
J'ai relevé ce passage (parmi tant d'autres, l'écriture, vraiment, m'a séduite !) :
"La Barbade !
Durant les périodes furieuses, puis hébétées de ma maladie, je n'y avais guère pensé, à ma terre natale. Mais une fois précisément recollés les morceaux de mon être, mon souvenir me réinvestissait.
Pourtant, les nouvelles que j'en avais n'étaient pas bonnes. La souffrance et l'humiliation y avaient planté leur empire à demeure. le vil troupeau des nègres ne cessait de faire tourner la roue du malheur. Broie, moulin, avec la canne, l'avant de mon bras et que mon sang colore le jus sucré !
Et ce n'était pas tout !
Chaque jour, d'autres îles autour d'elle étaient ouvertes à l'appétit des Blancs et j'apprenais que dans les colonies du Sud de l'Amérique, nos mains à présent tissaient de longs linceuls en coton."