"Elle eut ce réflexe, de tendre la main vers eux, d'essayer quelque chose, mais."
S'il y a une phrase qui pouvait résumer le roman ce serait celle-là.
Elle, c'est Rose, psychologue mariée à un agent immobilier trop porté sur la bibine et maman de deux enfants, ado et pré-ado. Elle a une famille banale, pas trop inconfortable. Mais.
Eux, ce sont les migrants qui en pleine nuit sont sauvés par le personnel du paquebot de croisière sur lequel Rose et ses enfants passent quelques jours en Méditerranée. Parmi Eux, il y a Younès, un adolescent nigérien auquel Rose va donner le portable de son fils. Portable qui va devenir lien à la foi sacré et honni. Une fois rentrée à Paris avec ses enfants et au moment où la famille prépare le déménagement vers
le Pays basque natal de Rose, elle reçoit l'appel de Younès. Elle veut le revoir, le retrouver. Mais.
Et ce "mais" qui clôt brutalement la phrase, c'est tout un roman. Un roman fait de tergiversations, un roman qui n'arrive pas, à l'image de sa non-héroïne, à se décider, à choisir entre le passé et le présent, entre le Elle et le Je, entre le dialogue et la narration, entre la phrase courte (1 mot) et la phrase longue (14 virgules).
Partir, rester, revenir, quitter...
Faire, laisser faire...
Et au milieu, une question, centrale : Qu'est-ce qu'avoir un toit ? "Tout est là, dans habiter", dira le mari. Qu'est-ce qu'être chez soi ?
Pas de réponse. Une histoire. A laquelle j'aurais aimé adhérer complètement mais le choix d'une syntaxe froide, brève donne un rythme essoufflant, une urgence du récit qui m'a laissé en-dehors, extérieur aux dilemmes de cette Mère toute retournée par ce jeune migrant (une Mère à l'envers ?).
On soulignera toutefois l'intelligence de l'auteure de faire un roman qui ne soit ni misérabiliste, ni culpabilisant, ni moral.