La place qu'elle réclame, c'est celle d'une science autonome. Cette science a un objet qui lui est propre : la réalité sociale qu'elle proclame intelligible, et irréductible à toute autre réalité voisine. Elle comporte une méthode d'explication qui également lui est propre, qui convient seule à son objet et qui n'est ni la méthode psychologique ni même la méthode historique au sens ordinaire de ce mot. Elle comprend des sciences particulières telles que l'étude sociologique des phénomènes moraux, juridiques, religieux, etc.
La vie sociale partout où elle existe d'une manière durable tend inévitablement à prendre une forme définie et à s'organiser et le droit n'est autre chose que cette organisation même dans ce qu'elle a de plus stable et de plus précis. La vie générale de la société ne peut s'étendre sur un point sans que la vie juridique s'y étende en même temps et dans le même rapport. Nous pouvons donc être certains de trouver reflétées dans le droit toutes les variétés essentielles de la solidarité sociale
L'ensemble des croyances et des sentiments communs à la moyenne des membres d'une même société forme un système déterminé qui a sa vie propre; on peut l'appeler la conscience collective ou commune. Sans doute, elle n'a pas pour substrat un organe unique; elle est, par définition, diffuse dans toute l'étendue de la société; mais elle n'en a pas moins des caractères spécifiques qui en font une réalité distincte. En effet, elle est indépendante des conditions particulières où les individus se trouvent placés ; ils passent, et elle reste. Elle est la même au nord et au midi, dans les grandes villes et dans les petites, dans les différentes professions. De même, elle ne change pas à chaque génération, mais elle relie au contraire les unes aux autres les générations successives. Elle est donc tout autre chose que les consciences particulières, quoiqu'elle ne soit réalisée que chez des individus.