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sur 155 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
«Quelle tristesse que Dieu ait donné une telle oreille à une femme», p 167

Un superbe portrait de femme avant tout,
une ode à la musique argentine et au tango aussi,
un roman sur l'immigration en Argentine au début du XXe siècle... à travers la vie de la jeune Leda qui quitte son Italie natale pleine d'espoir pour sa vie à venir.

En 1913 la condition de la femme est très limité: soumise à son père ou à son mari, juste bonne à nourrir les siens, faire le ménage et coudre les vêtements. Elle n'a même pas le droit d'apprendre à jouer d'un instrument de musique; ce serait une pure perte de temps puisqu'elle doit tout son temps à tenir la maison. La jeune Leda a pourtant très envie de jouer du violon comme son père et son grand-père. Elle s'entraîne en cachette.
A cette époque, de nombreux jeunes fuient la misère et espèrent gagner un monde nouveau et se construire leur vie rêvée en embarquant pour les Amériques. Un cousin de Leda, Dante, part en Argentine. Ils se font la promesse de s'y retrouver et se fiancent. Ils fuient tous les deux un passé lourd et un fardeau difficile à porter. Hélas lorsque Leda débarque enfin sur le sol argentin, Dante n'est plus. Seule, veuve, sans véritable ressource, elle va devoir composer avec la vie, tricher, mentir, se cacher pour s'en sortir. C'est le tango qui va lui permettre de se trouver, la musique qui va la sauver.
Peu à peu, à travers le parcours semé d'embûches de Leda, le lecteur entre en contact avec le monde de la nuit argentine rythmé par le tango qui se développe progressivement, se modifie, emporte les foules et entremêle parfois les passions.

Ce roman apparaît comme une véritable fresque historique à la découverte de Buenos Aires au début du XXe siècle. La vie des immigrés de différentes provenances, leurs conditions de travail et de survie, les épidémies qui déplacent les populations d'origines et permettent aux nouvelles de s'installer dans les quartiers de la Boca ou San Telmo, la progression du tango jusqu'à son apogée, alors que l'Europe entre en guerre et se déchire. C'est une époque de ruptures, de changements irréversibles, de tourmente.
La plume de Carolina de Robertis sait admirablement rendre ces sentiments multiples, divers, parfois opposés. Ce monde en profonde mutation qui souffre, se passionne, séduit, détruit aussi mais qui est la condition de milliers d'êtres qui ne demandent qu'à vivre.

Un roman à l'écriture fine et précise, au rythme bien structuré dans des parties distinctes, emprunt d'une grande sensualité, de générosité, de respect et de tolérance. Puisse-t-il contribuer à ouvrir un peu plus grand certains esprits...

Merci aux éditions du Cherche-Midi pour ce cadeau et à Babelio de m'avoir invitée à cette Masse Critique spéciale! Je suis heureuse de cette découverte.
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« le tango est une pensée triste qui se danse » 
Il y a quelques semaines, j'ai connu une Cetta qui quittait son Italie natale en 1909 pour l'Amérique. Elle finira prostituée dans l'Upper East Side donnera naissance à Christmas pour un roman qui m'a emballé (voir « le gang des rêves »).
Et voici que Carolina de Robertis me présente une Leda qui quitte son Italie natale en 1913 pour l'Amérique. Elle aurait pu finir prostituée dans une pulperia de Buenos Aires. Elle fait un autre choix... Et son histoire m'a séduit aussi...
Je n'ai pas vu filer les 500 pages, emballées dans une couverture remarquable... Ce roman envoûtant est à la fois une peinture forte des bas-fonds de Buenos Aires, le récit de l'émancipation d'une jeune femme prête à tout pour vivre de sa passion et c'est enfin le roman du tango, qui évolue et quitte ses racines populaires, cesse de d'être la musique des exclus pour devenir une musique à la mode... Cette musique et cette danse qui fascine de par sa sensualité et son érotisme torride.
Les Dieux du tango c'est l'histoire de Leda qui quitte Naples et débarque à Buenos Aires où elle doit rejoindre son cousin et mari, Dante. Malheureusement, Dante vient de mourir. Refusant de repartir en Italie pour se retrouver à nouveau prisonnière de sa famille, Leda choisit de rester en se créant une nouvelle vie. Cette vie, ce sera la musique, le violon confié par son père la veille de son départ, et le tango. Mais cette vie-là, elle ne peut la vivre en tant que femme, elle va donc devenir un homme...
Sans doute inspirée du personnage réel de Billy Tipton  ( quelle histoire fascinante que celle de ce musicien de jazz dont on découvrit à sa mort qu'il était une femme), Carolina de Robertis, mêle à la mutation de cette musique nouvelle, cette transformation de Leda qui devient Dante, cette quête d'amour et de désir, cette sexualité qui se découvre ou s'éveille, cette ligne discontinue, frontière entre deux sexes, deux mondes...
Les Dieux du tango, c'est un magnifique roman palpitant, sensuel, dont les pages se tournent toutes seules. Un très beau récit, exaltant et riche de thèmes, d'interrogations, de symboles. Roman initiatique dans une Buenos Aires multi culturelle, c'est le roman de l'immigration italienne en Argentine, de l'exil, du pays natal à jamais perdu, mais surtout, en nous contant l'histoire du Tango, l'auteur nous parle avant tout de la place des femmes dans la société, avec une belle galerie de portraits féminins , de celle qui se soumet à celle qui s'émancipe. C'est le roman d'une femme qui trouve grâce à la musique les clés d'une porte intime secrète. Nombre de passages sont d'une beauté saisissante d'une sensualité incroyable, sur le tango, sur l'érotisme et le corps des femmes.

Un roman intense passionnant qui vibre de passion, dans lequel la mort et l'amour dansent un tango langoureux...

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« Elle pressait les cordes de son violon et cinquante jolies chevilles de femmes bougeaient en même temps, vingt-cinq adorables dos s'arquaient, vingt-cinq cuisses remontaient le long de jambes de pantalon. Ces corps se pressaient les uns contre les autres comme elle pressait le manche de son doux violon en les regardant depuis la scène. Serre la bien contre toi, compadre, pensait Dante.Glisse ta jambe entre les siennes, guide-la si habilement qu'elle croira que le mouvement vient d'elle, cale ta main dans le creux de ses son dos comme si c'était le siège de tous les plaisirs terrestres et je te donnerai ma musique. Nuit après nuit, ma musique te fera bouger, ma musique te guidera, ma musique, à travers toi, lui fera l'amour. »
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Ce roman est à l'image de cette musique et danse : envoûtant, sensuel, cruel parfois. Ouvrir ce livre et vous voilà transportés dans un autre monde, charmés par la douce plume de l'auteure, vous vous laisserez emporter dans les sillons de l'histoire du tango certes mais pas que.
Nous sommes en 1913 en Italie, un drame se joue avant même que le roman se poursuit, c'est déjà les prémices des amours avortés. Cora et Lena, cousines, amies presque soeurs dessinent le tableau d'une tragédie qui poursuivra Lena au-delà de l'océan. le paquebot qui l'emporte vers une autre vie, tout comme bien des centaines de congénères, espérant une terre d'accueil, accoste en Argentine. Sur le quai, devait l'attendre son mari sur papier, le frère de Cora donc son cousin. Hélas, Lena pensait débuter une nouvelle vie avec son mari, fonder une famille et pouvoir rêver à un avenir meilleur. Tout s'écroule quand l'ami de Dante vient lui annoncer le drame. Je ne peux hélas vous le révéler. Lena – Dante, une, deux personnes, parfois les deux.
Lena n'a rien, sauf son courage et un trésor inestimable : un violon et pas n'importe lequel celui du roi de Naples. Ce petit instrument va lui ouvrir une nouvelle route, vers une vie à l'opposé de ce qu'elle pensait vivre.

Ce roman est coloré, chaleureux, et empli de courage par le personnage de Lena mais aussi de tous ces pauvres diables qui tentent l'aventure sur un continent hostile où il ne fait pas toujours bon d'être une femme.
Voici une autre corde à l'arc, l'auteure à travers le personnage de Cora, Lena, Rosa, Alma oui que des A, nous peint la condition féminine de cette époque, et comment Lena a su passer outre les barrages montés bien haut afin que la femme ne puisse accéder à la gloire et la réussite pour ne pas dire faire de l'ombre à l'homme.
C'est aussi, une façon de nous exposer l'homosexualité féminine, vous imaginez à cette époque où la femme n'était qu'une chose alors grand Dieu, deux femmes qui s'aiment c'est le bucher assuré. Quelques passages sur ces rencontres féminines, qui restent soft et n'entachent pas le sujet principal qui reste l'immigration, la naissance et la reconnaissance du Tango. Je ne suis pas une spécialiste du genre, mais j'ai par cette lecture enrichi mes connaissances sur le Tango, et je ne mets pas en doute la crédibilité de l'auteure, toute information est bonne à connaître, à chacun de vérifier son authenticité. Ça reste un roman avant tout, avec sa part de fiction, de rêve, et je dois dire que la belle complicité qui régnait dans l'orchestre que vous découvrirez en lisant ce livre, m'a fait frémir. L'auteure a su nous livrer la passion musicale, tout ce que la musique peut procurer à ceux qui la jouent et la vivent pleinement, on ne peut rester indifférent à cette grande dame, fut elle du tango, elle est immense et émouvante, elle vous possède entièrement vous emmenant loin très loin où plus rien n'existe que le rythme qui vous emporte. Les danseurs de tango l'ont bien compris, il suffit de les regarder tanguer, glisser, se cambrer, tournoyer, pour comprendre cette osmose qui règne entre la musique et ses musiciens, la musique et ses danseurs. Tout un monde qui ne s'ouvre pas à tous un peu comme la poésie, on est hermétique ou sensible. A chacun sa clé, à chacun sa chance, à chacun son univers.

Par ce roman, j'ai donc voyagé, dansé, frémi, j'ai beaucoup aimé le personnage de Lena, sa bravoure et sa détermination à conquérir son monde, braver les interdits, découvrir et explorer un univers qu'elle ignorait totalement comme beaucoup soit dit en passant. J'ai apprécié le côté historique et sociologique du récit, et j'ai également beaucoup aimé la plume de cette auteure que je ne connaissais pas.
De plus, le livre en tant que tel est très agréable bien que lourd, mais il a une chouette couverture, et l'intérieur est tout aussi beau… un beau livre qui me change des poches.

Pour cela, je dois tous mes plus chaleureux remerciements à Babelio qui m'a permis de pouvoir concourir à une masse critique privée, et mes plus vifs remerciements aux éditions Cherche midi qui m'a offert ce très beau roman dans les deux sens du terme.

Une très belle lecture pour un très beau livre pour mettre à l'honneur, la femme, la musique, le tango, et tous les êtres qui mettent en péril leur vie en quittant leur terre pour espérer rejoindre un bout de paradis tant rêvé.
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Le jour où Leda découvre le tango, la tarentelle de son Italie natale lui semble tout d'un coup bien fade. Cette musique la prend aux tripes, l'ensorcelle. Tous ses sens se réveillent et se mettent à bouillonner, comme sortis d'une longue léthargie.
Consécutivement au décès de son époux, un gréviste malchanceux tombé sous les balles de la police suite à une émeute sanglante, la jeune veuve devait quitter l'Argentine. Elle ne prendra jamais le bateau du retour, choisissant l'exil et ses périls pour vivre sa passion du tango. Un choix impossible et dangereux dans ce pays latin, où en 1913, la femme pauvre ne doit pas dépasser les limites de la cour du conventillo, et se contenter de travaux d'aiguilles si elle veut gagner quelques centavos. Renonçant à sa féminité, Leda endosse l'identité de son défunt mari. Désormais elle sera Dante, un jeune violoniste intrépide ne vivant que pour la musique. Interprète douée, elle jouera d'abord dans des bordels crasseux, finissant par être repérée par le leader d'un éclectique et talentueux trio mêlant bandonéon et violon. La formation musicale est bientôt rejointe par un pianiste et un contrebassiste. La réputation d'excellence de leur sextuor ne cessant de grandir, le groupe de musiciens finira par se produire dans les cabarets fréquentés par l'élite argentine.
Leda n'existe bientôt plus, totalement écrasée par la personnalité imposante de Dante. Elle vit comme un homme et en vient à penser comme un homme. Surfant avec le danger, vivant des mêmes excès et brûlant des mêmes passions, elle prend de plus en plus de libertés, oublieuse du risque de se faire démasquer et de se brûler les ailes...

Portrait d'une femme qui se veut affranchie de toutes contraintes en pays machiste, ce roman est un hymne à la liberté sous toutes ses formes. L'écriture de Carolina de Robertis est poétique, subtile et audacieuse, flirtant délicieusement entre légèreté et gravité. Choisissant la musique comme vecteur d'autonomie, l'auteure nous brosse le portrait d'un peuple issu de l'immigration qui cherche désespérément ses repères dans une société dominée par l'oligarchie. Alors que certains protagonistes de cette histoire vont se livrer à une lutte acharnée contre le patronat en se mobilisant dans l'action syndicale, d'autres se jetteront à corps perdu dans le tango pour oublier leurs désillusions. Cependant, tous leurs actes tendront vers le même but : l'envie de voir se concrétiser leur rêve d'une vie meilleure.
J'ai aimé l'immersion dans cette argentine multiculturelle et exotique, riche en couleurs et en saveurs, ainsi que la musicalité qui se dégageait de chaque ligne, transpirant à travers la plupart des personnages qui traversaient ce récit au chant mélodieux.
Si le tango ne se danse pas seul, certains bouquins se dévorent en revanche dans la plus stricte intimité, tel cet addictif pavé au tempo endiablé dont j'ai difficilement pu me détacher avant la dernière ligne !
Merci à Babelio et aux éditions du Cherche Midi pour cette savoureuse lecture.
Lien : http://leslecturesdisabello...
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Les Dieux du tango, ce sont des hommes, en ce début du vingtième-siècle où cette musique d'abord profondément populaire se développe, passe des quartiers pauvres aux cabarets chics en quelques années, s'enrichit de nouveaux instruments comme le piano ou la contrebasse, s'ouvre au chant, des hommes d'abord bien sûr (Carlos Gardel est adulé en Argentine). Dans ce roman-fleuve de Carolina de Robertis, une femme va entrer dans l'histoire du tango : Leda, fille pauvre venue d'Italie, immigrante parmi des milliers d'autres exilés, veuve avant de le savoir, va être accueillie dans un conventillo, une sorte d'habitat collectif où les Italiens pauvres s'entassent, s'entraident, où les femmes sont complètement dévouées aux hommes et dépendantes d'eux. C'est là qu'elle va apprendre à jouer du violon, secrètement ; c'est de là que, sur une inspiration instinctive, elle partira, habillée en homme, pour tenter sa chance dans les cafés où on joue le tango. Elle ne quittera pus jamais ses habits masculins et évoluera avec la musique, avec les hommes qui la jouent, mais aussi avec les femmes. Son secret cache aussi celui de sa cousine Cora, morte "folle" et que Leda n'a pas su sauver quand elle vivait encore à Alazzano.

Les Dieux du tango, c'est un magnifique roman palpitant, sensoriel, sensuel, dont les pages se tournent toutes seules. C'est le roman d'une femme qui vit à l'instinct parce qu'on ne lui a jamais donné les mots pour dire ses émotions mais qui trouve grâce à la musique les clés d'une certaine libération intime, Leda devenue Dante, d'une femme et de toutes les autres de cette époque, fortunées ou prostituées, toutes ou presque sous la coupe de leurs maris, de leurs frères, de leurs pères. C'est le roman du tango, bien sûr, qui évolue et quitte ses racines populaires pour devenir une musique à la mode. C'est le roman de l'immigration italienne en Argentine, de l'exil, du pays natal à jamais perdu. En toile de fond, l'évolution de l'Argentine et des pays voisins, pays d'émigration, d'anarchie et de dictature.

Cette histoire passionnante a été inspirée à Carolina de Robertis (qui a elle-même des racines argentines) par de vraies aventures de tangueros. Elle s'est bien sûr centrée sur son personnage principal mais elle nous brosse aussi des portraits vibrants de personnages secondaires, de soirées langoureuses et de nuits fiévreuses. Cela a pour moi été une vraie évasion littéraire.

Un tout grand merci à Babelio et à l'éditeur pour l'envoi de ce livre !
Lien : http://desmotsetdesnotes.wor..
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Dès les premières pages de ce très gros livre, Carolina de Robertis nous mène sur la piste, enlacés à cette histoire étrange et magnifique de Leda, devenue Dante . Au cours des pages, nous sommes danseurs et musiciens, l'auteure sait faire vibrer les mots comme l'archet d'un violon, et palpiter la chair au rythme du tango. En ce début de XXème siècle, à Buenos Aires, il ne fait pas bon être une jeune fille de 17 ans, seule de surcroît... Mais Leda possède un violon, et beaucoup de volonté. Un roman passionnant, passionné, sensuel, comme un tango!
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"Les dieux du tango" de Carolina de Robertis est une pure merveille. de la littérature blanche de grande qualité. L'histoire commence en 1913 avec l'arrivée de Leda en Argentine à Buenos Aires. Elle croit y retrouver son mari mais celui-ci est mort. À partir de là elle va tenter de survivre.
Ainsi parallèlement à l'histoire du tango, l'auteur nous conte la vie d'une femme exceptionnelle : Leda!

L'intrigue virevolte à la façon d'un violon. Les 543 pages glissent comme des danseurs sur un parquet d'une salle de bal enivrante. Il y a du rythme dans ce roman. Les certitudes y volent en éclat. J'en suis encore bouleversée, renversée par l'écho du violon de Leda.

Beaucoup de sujets sont abordés sans lasser le lecteur. L'auteure est une bonne narratrice et la traduction de l'anglais (Etats-Unis) par Eva Monteilhet a su me séduire.

J'ai été émue par l'histoire de ces immigrants dont fait partie Leda. J'ai compris les affres du déracinement. Ce livre est un hymne à la tolérance alors que les problèmes migratoires sont au coeur de l'actualité.

"Combien de secrets entraient clandestinement, ce jour-là, dans le Nouveau Monde ? Elle regarda vers le dock, sous l'auvent de bois d'où lui parvenaient les rumeurs d'une foule réunie.[...] L'auvent ne portait aucun signe distinctif mais il lui semblait qu'on aurait dû y mettre une pancarte "Dernier espoir". C'était bien cela pour un si grand nombre d'entre eux. On le voyait sur leurs visages marqués par la faim. Pour quelle autre raison seraient-ils venus ?

J'ai eu l'impression de saisir les couleurs et de sentir les odeurs de l'Italie et de Buenos Aires. Carolina de Robertis est une virtuose de la sensualité.

Elle nous donne une définition du désespoir et de la résilience. Leda, son personnage principal, est à la fois forte et apeurée car elle cache un secret !


"Avoir faim de nouveau.
Elle ne parvenait pas à voir plus loin que cela."

Leda a soif de liberté. Elle n'hésite pas à prendre des risques pour l'obtenir même si des regrets peuplent ses nuits. Heureusement, elle a sa musique, son violon et l'amour du tango. Elle a le malheur d'être une femme dans un monde dur à l'égards du "sexe faible". À sa façon, elle va s'affranchir des carcans d'une société patriarcale. J'ai suivi l'histoire de cette musique et de cette danse grâce aux précisions du récit. J'ai regardé le tango naître dans la tête et le corps de Leda. J'ai compris l'importance de la musique pour se sortir d'une vie sordide.

"Ne t'inquiète pas. On a tous l'odeur de notre gagne-pain collée à la peau ici, que ce soit le métal, le tanin, le pain ou la merde. Si tu travailles avec moi, je te jure qu'un jour tu pourras quitter l'usine et tu ne sentiras plus que la musique."

Quand j'ai lu "Les dieux du tango", j'ai ressenti la même faim que tous les protagonistes. Une belle aventure que ce livre ! Plongez dans la foison de personnages et dans l'univers musical d'un grand écrivain. Quant à moi, je vais vite prendre quelques leçons de tango!

Lien : http://delphlabibliovore.blo..
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Avec ce roman, j'ai voyagé, dansé, frémi, rêvé et appris aussi.
J'ai beaucoup aimé le personnage de Lena, sa bravoure et sa détermination à conquérir son monde, braver les interdits, découvrir et explorer un univers qu'elle ignorait totalement .
J'ai apprécié le côté historique et sociologique du récit, et j'ai également beaucoup aimé la façon d'écrire de cette auteure.
Mon premier coup de coeur de 2018.
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e referme à regret ce magnifique et bouleversant livre de Carolina de Robertis.
Je vais avoir du mal à mettre des mots sur ma chronique tant ce roman m'a émue, m'a portée, lascivement, langoureusement comme le tango.

Nous suivons Leda, jeune fille de 17 ans, elle s'apprête à embarquer pour Buenos Aires afin de retrouver son mari Dante. Époux qu'elle n'a jamais vu. Quand elle arrive après cet interminable voyage Dante est mort, assassiné par un policer. C'est le début du mouvement anarchiste en Argentine.
Leda n'a plus rien, juste le violon de son père qu'il lui a remis comme cadeau de mariage pour Dante.
Elle qui a toujours rêvé de pouvoir jouer du violon n'en a jamais eu le droit, les femmes, ça coud, ça fait la vaisselle, ça s'occupe de la famille il n'y a pas de place pour les loisirs.
C'est une passion brûlante qui dévore Leda. Elle n'en touchera mot a personne.

Seule dans un pays inconnu elle va devoir faire preuve de courage, elle ne veut pas retourner en Italie, dans son petit village des Pouilles. Leda a soif de liberté.
Liberté oui, mais nous sommes en 1920, les femmes n'ont pas ce droit.
Notre héroïne trouvera un moyen de s'émanciper du joug des hommes.

Ce livre est un hymne à la femme, à travers Leda et ses pérégrinations dans Buenos Aires et ses conventillos, fait entendre la voix, l'histoire de nombreuses femmes.
Fausta, Carmen, Mamicita, Rosa, Francesca, La Strega, Palmira, Alma etc. Leurs espoirs déchus, leurs luttes dans ce pays qui n'est pas le leur.
La misère, tant d'hommes et si peu de femmes, elles ne peuvent pas travailler à l'usine. Il ne leur reste que peu de choix.
C'est aussi un hymne au tango et à la musique, du tout premier tango amené par les esclaves africains avec les percussions jusque dans les années 1950 en pleine ascension avec une femme au chant.
Du tango interdit dans la bonne société et finalement accueilli par le monde entier.
C'est aussi l'histoire, à travers cette danse, de la transmission entre générations : comment une danse, un instrument, une histoire, une anecdote se transmettent de génération en génération sans tomber dans l'oubli. Ils évoluent, mais ils sont toujours présents.
Carolina de Robertis nous montre aussi ce pan de l'histoire qui m'était complètement inconnu, l'Argentine vue comme la tour de Babel pour tous ces immigrés surtout italiens, mais aussi sud-africains, russe.
Un melting pot de nationalités qui ne parle la même langue, mais qui ils ont tous cet espoir de réussir, si ce n'est pas pour eux c'est pour leurs familles restées au pays
À travers les hommes, elle nous raconte l'immigration massive, le nationalisme qui monte doucement.
La terre promise n'est pas celle qu'ils croyaient, la misère est présente, tous luttent pour conserver leur racine, ils sont nostalgiques de leur Italie, qu'ils soient du nord ou du sud, ici c'est la ville, pas de verdure, mais de la pollution et du bruit tout le temps dans cette métropole qui ne dort jamais.

"L'argentine encourageait l'immigration. Ils voulaient des travailleurs."

C'est aussi un roman bouleversant et très émouvant sur l'amour entre deux femmes. Inimaginable à l'époque. Et même pire, susceptible d'emprisonnement.

Un roman complet, on y parle amour, histoire, musique, on entend l'espagnol, l'italien, on traverse Buenos Aires, l'Uruguay, Naples. Posez vos valises et embarquez dans le livre de Carolina, je ne peux que le conseiller.

Il plaira plus aux femmes qu'aux hommes, mais en tout cas chez moi il m'a complètement emportée.
J'ai eu une chanson de tango dans la tête tout au long de ma lecture. C'est un roman féministe, mais sans être trop revendicateur. Il est beau et juste. Il ouvre les yeux sur la condition de la femme, leurs aspirations devant toujours être tuent, elles ne peuvent se réaliser sans mari, une fois mariée c'est lui qui décide.

La plume de l'auteure est poétique, descriptive vous entendez les notes, les sons ; vous sentez les épices et la saleté régnante dans ces bas quartiers de Buenos Aires. Elle est emplie de respect et tolérance. Elle donne un rythme au récit , chaque personnage que nous croisons est un narrateur qui sonne juste, qu'il ait 80 ans ou 15 ans, Carolina de Robertis vous fait entrer dans leur histoire avec facilité.

Les personnages sont tous attachants, chacun ayant « voix au chapitre » tour à tour narrateur en plein milieu des chapitres chaque protagoniste nous raconte leur enfance jusqu'à comment et pourquoi ils sont arrivés là, leur vie actuelle et pourtant la lecture est fluide tout au long du livre.
J'ai adoré Santiago, j'ai été bouleversée quand j'ai compris l'histoire de Cora, la cousine de Leda, son âme soeur comme elle le dit. Il y a aussi Nestore, El Loro, Joacquim, Arturo, etc.
Leda, notre héroïne, une femme très en avance sur son temps, depuis toute jeune elle aspire à la liberté, liberté de corps et d'esprit.
Vraiment, je n'ai aucun reproche à donner à ce livre que j'ai aimé de la première à la dernière page. La fin est belle malgré sa tristesse.


La vie tout entière de Leda vous est racontée de ses 17 ans à sa mort, c'est la tango qu'on apprend à travers elle, mais aussi l'histoire de l'Amérique du Sud, de la Seconde Guerre mondiale qui fait rage en Europe, de Juan et Evita Perõn, la guérilla révolutionnaire en Uruguay jusqu'au décès de Martin Luther King.


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Ce magnifique roman raconte le destin d'une jeune italienne de la région de Naples, Leda, dont le fiancé, Dante, est parti de l'autre côté de l'Atlantique, en Argentine dans l'espoir d'y trouver de quoi gagner sa vie. Un jour Leda reçoit une lettre lui demandant de partir rejoindre son promis mais avant de s'embarquer elle doit se marier comme cela est la coutume. Elle emporte avec elle un violon, celui du "roi de Naples", dit-on, que son père lui a confié car, il sait qu'elle a une passion pour cet instrument. A l'arrivée à Buenos Aires, elle apprend que Dante est mort. La vie bascule alors pour elle.
J'ai été happé par cette histoire qui raconte la vie de ces exilés en terre argentine, la danse, la musique et tout particulièrement le tango, cette musique qui fera le tour du monde et ne cesse de se renouveler. C'est magnifiquement écrit avec une sensualité omni-présente mais jamais excessive, laissant aussi la place à la révolte, la camaraderie, la jalousie, la solitude, la nostalgie, l'amour et le deuil. Très beau personnage que cette Léda-Dante dont la quête de l'identité (pas seulement sexuelle) est le fil rouge de ce récit, mené de bout en bout par l'auteur avec une superbe maîtrise de la narration.
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