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3,59

sur 740 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Rentrée littéraire 2021 #40

Le titre annonce une tragédie biblique. le magnifique prologue, situé dans les temps préhistoriques précise les intentions de l'auteur à transporter le lecteur dans un récit mythologique à la portée universelle : un père, un fils, la nature, chasse, armes, accouplement, accouchement, et une certaine sauvagerie liée à la survie, autant de pistes explorées dans le monde contemporain.

Un père, un fils donc, une mère et un grand-père aussi, autant de figures archétypales, sans prénom, qui renvoient à la précaire condition humaine celle d'hier comme celle d'aujourd'hui. le père ressurgit dans la vie de son ancienne compagne et de son fils après plusieurs années de mystérieuse disparition. Il les entraine aux Roches, la maison à moitié en ruine dans laquelle il a grandi avec son propre père, complètement isolée en moyenne montagne.

Jean-Baptiste del Amo instaure d'emblée une ambiance lourde, proche du roman noir voire du thriller tellement le poids menaçant du père et de ses réelles intentions sourd et tend le récit, d'autant plus que la narration à la troisième personne adopte le point de vue de l'enfant qui devra trouver sa voie pour survivre à cet inquiétant géniteur.

Le thème de la transmission de la violence des pères aux fils est profondément exploré, subtilement, et explose lors d'un incroyable monologue du père hanté par son enfance sacrifiée au contact d'un patriarche oscillant entre folie, souffrance et violence. A cette logorrhée quasi hallucinée, répond le silence du fils comme une façon de résister à la parole du père et à la violence héréditaire du monde des adultes. le fatum antique se met en branle avec une fatalisme à la Zola de laquelle il semble difficile d'échapper, le tout sous le regard d'une nature omniprésente apportant une dimension panthéiste au drame qui se joue et menace d'emporter les personnages dans un mouvement vertigineux à travers le temps et l'espace.

L'auteur est un styliste. Ses phrases richement travaillées réjouissent par leur vocabulaire opulent et précis, gorgé d'adjectifs. Elles tendent à une solennité minérale qui fait cependant un peu écran à l'émotion. Certains passages peuvent basculer dans un esthétisme verbeux, notamment lors des évocations de la nature ( presque trop redondantes à mon goût ). Par contre, j'ai été totalement séduite par sa façon d'appréhender les personnages, chaque scène construite comme des tableaux, à l'image de celui d'Andrew Wyeth ( le Monde de Christina ), évoquée superbement dans le roman. Jean-Baptiste del Amo évite judicieusement toute approche psychologique pour se concentrer sur les corps, zoomant sur les détails, les gestes, les lumières afin de suggérer l'intériorité des personnages.

« Le père s'adosse au plan de travail, porte le pilon à ses lèvres retroussées sur de petites dents irrégulières, grisées par le tabac, une incisive à l'angle intérieur cassé. Il détache des filaments de muscle d'un mouvement latéral de mâchoire. Ses doigts et la commissure de ses lèvres sont luisants de graisse, du jus a coulé sur la tranche de sa main gauche, son poignet et son avant-bras, sans qu'il s'en aperçoive ou s'en préoccupe. Il déglutit, s'applique à ronger l'os, à déchirer les tendons, dessouder les cartilages qui craquent sous la pression des molaires, mastique l'extrémité du petit tibia pour en extraire la moelle, inspecte ce qu'il reste du pilon entre la pulpe huileuse de ses doigts. Enfin, il se tourne vers le plan de travail et laisse tomber l'os dans le plat, près de la carcasse. »

Un roman noir dont la beauté pessimiste éclabousse chaque ligne.
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Tragédie épouvantable, cette folle intrigue bénéficie d'une écriture superbe.

Introduite par une préface inspirée de Joseph-Henry Rosny, la préhistoire semble nous ramener à l'époque de la guerre du feu, aux côtés d'Eyrimah ou de Helgvor du fleuve bleu.

Puis l'histoire se hisse à l'altitude des romans de Pierre Pelot, aux Roches, où une mère et son fils sont confinés par un homme qui a « bricolé des bagnoles », s'est retrouvé à l'ombre, et retrouve un semblant de liberté.

Prisonnier de son passé familial, d'un pesant atavisme paternel, l'homme initie son fils de neuf ans au maniement d'un revolver, avant de découvrir que la femme est enceinte … d'un autre homme.

La famille plonge dans l'horreur quand l'orage découvre les Roches et que la grossesse arrive à son terme. le dernier acte de la tragédie laisse le lecteur abasourdi face à l'hypothèse d'une probable apocalypse.

Ce cauchemar pourrait heurter des lecteurs sensibles s'adresse donc à un public averti. Mais la violence du scénario ne peut masquer des anonymes finement peints par Jean-Baptiste del Amo et insèrés dans une faune et une flore magnifiées par une plume parfaitement maitrisée.

Un ouvrage admirable, effrayant, qui projette un éclairage glauque sur une situation familiale qui n'a, hélas, rien d'exceptionnelle.

PS : ma lecture de Méchamment dimanche
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Ce n'est pas la lecture de "le Fils de l'homme" qui remonte le moral. Ce roman est une pure tragédie, l'atmosphère est lourde et on comprend très vite que la lumière a peu de chances d'éclairer ce roman.
L'espoir est inexistant et la violence rôde inexorablement.
Jean-Baptiste del Amo dépeint un monde dur, cruel,violent où la reproduction de la violence met en exergue la violence de la reproduction.
Quant au style, qu'en dire ? les phrases sont longues, beaucoup de descriptions très détaillées, très réalistes cela peut par moment lasser et cela a été mon cas de temps en temps mais la force de l'histoire a pris le dessus.
J'ai pensé par moment à David Vann, la lourdeur du climat, le poids du silence menaçant.
C'est un roman d'une grande qualité mais exigeant.
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****

Au départ, ils étaient deux. Quelques temps plus tard, ils se retrouvèrent à trois. Sous le toit et les murs restreints d'une petite maison ouvrière. Au milieu des grands espaces des montagnes et des bois. Avec la visite d'un ami parfois, puis des oiseaux ou des chevaux sauvages. le père, la mère et le fils auront vécu d'amour, de violence, de tendresse et de peurs…

Jean-Baptiste del Amo commence son roman par nous rappeler que bien longtemps avant nous, des hommes et des femmes ont tracé leur chemin, avancer sur une route escarpée et difficile, laissant derrière eux les plus faibles. Et qu'ils ont ouvert la voie…

L'auteur nous raconte l'histoire d'une famille, d'une ville, d'une bande de copains. C'est l'amour fou, puis l'absence. C'est ce fils qui grandit, dans la tendresse et la bienveillance d'une mère. Puis un père qui revient, et les repères éclatent.

C'est alors la montée aux Roches. Cette petite bâtisse au milieu des montagnes, des sous-bois et des ruisseaux. C'est l'apprentissage d'un retour aux sources, aux essentiels, à la chaleur d'un feu, sous la puissance d'une tempête. le père répare. le fils explore. La mère s'impatiente. Des êtres ballotés par le vent, blessés, apeurés, en quête de reconnaissance.

Jean-Baptiste del Amo nous livre avec talent le sentiment de liberté que nous offrent ces grands espaces. L'oxygène et le souffle du vent. Mais il insuffle aussi l'angoisse de se savoir si petit, fragile et désarmé.
Une tragédie s'esquisse sous nos yeux, un drame se dessine. On le sent, on frissonne… et on courbe l'échine…
Lien : https://lire-et-vous.fr/2021..
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Le roman débute sur une scène surprenante : un groupe d'hommes femmes et enfants, qui progressent dans une nature, encore vierge, se nourrissant de produits de leurs chasses et de leurs pèche, à la sagaie ou à mains nues. Les plus solides les plus habiles, seuls survivront. On ne saura pas de quel moment de la préhistoire il s''agit, car là n'est pas le propos, seule compte la survie, l'entraide ainsi que le respect de la nature.

Ensuite, retour au présent avec un break qui emmène un homme, une femme et un enfant vers une contrée isolée, « Les roches ». Un silence de mort règne dans la voiture, ils n'échangeront pas dix mots, seulement quelques regards entre la mère et le fils. de surcroit, un arbre couché au milieu de la route les oblige à continuer à pied, courbés sous le poids des sacs à dos…

L'auteur alterne présent et passé, pour raconter l'histoire du père, sa longue disparition du milieu familial, sa brusque réapparition et son désir de « repartir à zéro » dans la ferme en ruines où il a vécu, enfant, avec son père.

Le récit est angoissant dès les premières pages, la violence monte en puissance, psychologique, physique… Jean-Baptiste del Amo a choisi de ne pas donner de nom aux personnages, ce sera le père, la mère et l'enfant. le père est pervers, psychopathe, jaloux, suspectant tout le monde notamment sa femme parce qu'elle a eu une vie alors qu'il était parti. Il refait l'histoire, et tente de monter le fils contre sa mère, en lui racontant des choses qu'il n'est pas en âge d'entendre, car il a neuf ans.

L'auteur tente de prouver, durant ce récit, que la violence est héréditaire : si le père est violent, le fils ne peut que l'être en gros, mais c'est loin d'être aussi simple, l'environnement, le formatage, participent aussi, il y a une répétition des scenarii de vie. La fin est dure, mais on la sent venir, de manière inéluctable…

L'écriture est très belle, les descriptions de la nature sont magnifiques, les réflexions sur la vie, le temps qui passe, sont intéressantes, ce qui permet d'aller au bout de l'histoire. Jean-Baptiste del Amo manie la langue d'une façon magistrale, ce qui me donne envie de le lire « Règne animal ».

Cette lecture a été difficile sur le plan émotionnel car je sentais très bien ce qui allait se passer, la mère étant enceinte, dans ce coin perdu, loin de toute civilisation et de tout médecin.

Un grand merci à Lecteurs.com et aux éditions Gallimard qui m'ont permis de découvrir ce roman qui a reçu le prix FNAC ainsi que la plume de son auteur…
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Une ville, quelque part.
Une femme et son fils de 9 ans voient resurgir dans leur vie le père, absent depuis de longues années. L'homme a décidé de les emmener avec lui dans la montagne, aux Roches, dans la maison où il a grandi auprès d'un patriarche vivant en reclus et aujourd'hui décédé.
Après "Règne animal", le nouveau roman de Jean-Baptiste del Amo met encore une fois en valeur le lien qui unit l'homme à la nature : une nature dense, imposante, envahissante. le père, le fils et la mère, tels les premiers êtres humains foulant une terre vierge, sont totalement absorbés par cette montagne dont les bruissements, les senteurs et les chuintements sont omniprésents. Les multiples vies qui y résident, de la simple larve à l'ours, révèlent combien au coeur de leur solitude profonde, le trio est entouré par de multiples existences. A leur côté, la nature est bel et bien l'autre personnage majeur de cette histoire aux airs de huis clos.
Le cadre est posé pour que débute ainsi ce récit aux allures de tragédie grecque où la filiation et la transmission, l'adultère et la folie en composent les thèmes principaux. Les parties consacrées au passé du père et de la mère nous font déambuler, à l'opposé de la nature montagneuse vibrante de vie, dans une ville morne et médiocre, un quartier ouvrier triste et pauvre, une fête foraine désolante. Deux lieux, deux visions différentes de l'existence. Pourtant, la montagne, malgré ses attraits, reste essentiellement menaçante et semble ensorceler le père qui se perd dans les méandres de sa colère originelle, celle héritée de son propre père. Il tente de la dompter mais ne fait que s'épuiser contre un colosse.
Les personnages demeurent énigmatiques et la tension est croissante. On se sent, nous aussi, dévorés par la montagne et c'est un point de non retour qui se rapproche inexorablement au fil des pages.
Jean-Baptiste del Amo nous prouve encore par son écriture exigeante et poétique qu'il peut emporter le lecteur dans un univers particulier. Si je n'ai pas été aussi séduite et impressionnée que par "Règne animal", " le fils de l'homme" révèle une nouvelle fois tout le talent de l'auteur et son goût pour les mots.

Merci à Babelio et aux éditions Gallimard pour leur confiance.
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Une qualité d'écriture irréprochable : bonne syntaxe, pas de bavardages inutiles, mais était-ce vraiment nécessaire d'alterner le présent et le passé proche ? le narrateur est un enfant, ce qui amplifie la complexité du genre humain. Il a 9 ans quand un homme se présente à lui comme son père. Cet homme qui n'a pas réglé son problème avec son père avec qui il vivait là-haut isolé. Il va reproduire le même schéma avec son fils et sa femme... Une atmosphère à la David Vann portée par une écriture toute en finesse.
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Ça commence mollement, on s'ennuie presque, mais le décalage est dès lors saisissant avec la seconde moitié de ce roman lorsque le père commence à s'imposer : il réapparaît auprès de sa famille après six années d'absence : pourquoi ? JB del Amo créé au fil des pages une tension grandissante, et on se dit "ça va mal finir cette histoire" ; on hésite presque à tourner les pages par peur, mais pas par curiosité ! Huis clos sombre face à une nature généreuse. Est-ce cette forêt, les Roches, qui rend fou ? le mal passe-t-il de père en fils ? s'agit-il d'atavisme ? le malheur se transmet-il ? il y en a des questions : en tout cas, il m'a eu ! et, la réponse est au moins le Prix Roman 2021 remporté par cette plume précieuse (ça faisait longtemps que je n'avais cherché des mots dans un dictionnaire).
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Huis-clos étouffant qui oppose la nature à la ville, le sous-bois musqué aux rues grises du quartier ouvrier, le fils de l'homme suit les traces des tragédies d'hier et d'aujourd'hui – la fatalité transmise d'un père à sa descendance, le déterminisme social, la rancoeur, la folie. Les phrases amples de Jean-Baptiste del Amo peignent la lumière, esquissent de véritables tableaux où chaque détail aura son importance. Ce roman d'atmosphère, lent et contemplatif, est un exemple de nature-writing à la française, un roman rural noir qui se déploie sous une chape de plomb (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/09/06/le-fils-de-lhomme-jean-baptiste-del-amo/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Haine ancestrale.

La mère et le fils ont été emmenés aux Roches par le père. Ce séjour, qui devait être temporaire, semble de plus en plus définitif au fur à mesure que le père sombre dans la folie.

Lecture marquante. Dès le début le ton est donné. Ça sera âpre et violent. le prologue se situe à la préhistoire. Survivre, survivre et encore survivre quoi qu'il arrive. La fin du prologue est tout aussi abrupte. Nous voilà brutalement de retour à notre époque. Mais le mot d'ordre sera toujours le même: survivre.

L'auteur excelle pour poser une ambiance. Celle-ci est déjà oppressante au début mais deviens de plus en plus étouffante au fil du récit. Les cinquante dernières pages sont un condensé d'angoisse et de terreur. La nature y joue une grande part. Elle n'est pas hospitalière. Elle ne tolère pas les humains, ceux-ci resteront toujours des intrus.

Le postulat de l'auteur est également intéressant quoique légèrement caricatural par moment: une haine ancestrale lie père et fils. le père aura beau essayer de modeler le fils à son image, ce processus sera toujours teinté d'échec. le père reproduira toujours les erreurs de la génération précédente, ce qui entraînera systématiquement la haine du fils. La conclusion abrupte de ce roman en est l'illustration.

En somme je ne suis pas déçue du voyage. Je me pencherais sur les autres romans de l'auteur.
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