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4,13

sur 694 notes
J'ai lu cet essai semi autobiographique après avoir lu "En finir avec Eddy Bellegueule" puisque Edouard Louis dit avoir été bouleversé par cet ouvrage. Les deux hommes ont un peu le même parcours : homosexuels issus de milieux populaires, ils ont dû gagner leur indépendance et leur liberté grâce aux études et au prix d'un éloignement du milieu familial. Didier Eribon lui est revenu dans sa famille (d'où le titre), du moins près de sa mère, il est aussi beaucoup plus âgé qu'Edouard Louis (nés en 1953 et 1992). Son ouvrage est beaucoup plus théorique, sociologique, alors qu'Edouard Louis a choisi un registre plus littéraire.
Didier Eribon raconte son parcours de "transfuge de classe", son enfance dans un milieu ouvrier à Reims, ses études, ses difficultés à s'adapter à un nouveau milieu social, la découverte de son homosexualité. Cette première partie qui mêle autobiographie et réflexions sur la condition ouvrière, sur ses valeurs est celle qui m'a paru la plus intéressante. La deuxième partie moins personnelle est plus théorique, à la fois sur mai 68, le marxisme, les mouvements gays.
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Magnifique livre !
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Didier Eribon est un transfuge de classe. Ce qui signifie que grâce à l'école et ses brillantes études il a pu effectuer un passage d'une classe sociale dite défavorisée milieu de naissance ouvrier à un milieu dit intellectuel.
Sa trajectoire montre bien qu'il ne suffit pas toujours de briller scolairement et que malgré de bonnes notes à l'école si on ne bénéficie pas d'un bon réseau social, d'un solide capital social et financier, l'étudiant peut voir son diplôme dévalorisé. Bref, la méritocratie républicaine a tout de même bien fonctionné pour lui puisqu'il finit par enseigner à l'université de Berkeley aux Etats-Unis.
La seule chose qui me dérange c'est le rejet qu'il manifeste envers sa famille. D'ailleurs à ce propos, j'ai lu un article d'un jeune étudiant d'origine modeste qui a fréquenté Sciences Po. Lui aussi s'est retrouvé ballotté par deux univers ou comme l'huile et l'eau ne se mélangent pas. Par contre, sa force de caractère a été d'affirmer au milieu d'étudiants issus de la bourgeoisie qu'en aucun cas ses souvenirs d'enfance ne valaient rien ou étaient de moins bonne qualité que ceux de la bourgeoisie. Et qu'en bien même ses parents sont analphabètes cela n'enlève rien à la fierté que représente sa famille à ses yeux.
On peut "élever" à son tour ses parents. On peut à notre tour leur faire part de notre savoir pour les éclairer à notre tour. Ils peuvent eux aussi se nourrir de nos connaissances pour eux aussi s'épanouir dans leur vie.
Pourquoi les rejeter? Petit Didier Eribon a souffert de ses conditions de vie et maintenant devenus adultes il ne les fréquentent plus et n'éprouvent plus d'intérêt à leur égard. Il les rejettent à son tour et éprouve même de la honte pour dire d'où il vient.
Et bien j'ai envie de dire "Merde" à ceux qui ne m''apprécient pas pour ce que je suis mais pour ce que je représente. "Merde" à ceux qui critiquent mes parents parce qu'ils n'auraient pas les mêmes codes culturels qu'eux. "Merde" à ceux qui dénigrent ma famille! Voilà, j'aurai peut-être aimé que le livre se termine ainsi sur fond de revanche social.


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Essai autobiographique. L'écrivain revient sur son enfance et son adolescence dans une famille modeste avec laquelle il ne se sentait pas en harmonie et dont il avait honte. réflexion très poussée sur les classes sociales, le vote, l'homosexualité, etc...
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Didier Eribon se heurte à l incompréhension de son milieu socio culturel qui ne conçoit pas que l on puisse être différent (homosexuel)
Cette rupture liée à la sortie par le haut ,il est universitaire ,de sa strate sociale l amène à en rechercher les causes aux plans psycho sociologique et économique .
Plus qu une introspection à voix haute , c est une analyse fine du glissement populaire vers le bas : au delà de cette limite vous ne serez entendu(compris ) et accepté que par une minorité .
On mesure depuis sa sortie l importance de cette fracture sociale si bien exposée dans cet opus. .
Un livre prémonitoire à mettre en parallèle avec la prose de Zemmour et consors .
Je l ai lu à sa sortie (né à Reims ! ) et rédige ces phrases de mémoire. INDISPENSABLE en ces temps de désarroi idéologique et moral.
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Didier Eribon est professeur universitaire de philo. Il se retourne sur son parcours à l'occasion d'une des rares visites chez sa mère: issu d'une famille prolétarienne et raciste, il se construira contre, pour échapper à tout déterminisme, afin d'assumer son homosexualité et son ambition d 'appartenir à une certaine élite intellectuelle.
Si les analyses qu'il fait des oeuvres de Foucault, Genet et autres m'ont paru manquant d'intérêt, ce qui concerne l'histoire familiale en revanche , est passionnante. On ressort bouleversé: faut-il penser contre son milieu pour se trouver?...
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Suite à la lecture de En finir avec Eddy Bellegueule , j'ai eu envie de lire le livre qui l'avait inspiré.
Il s'agit d'une autobiographie sociologique centrée autour des classes sociales et de l'homosexualité. L'auteur est issu d'un milieu ouvrier, il va faire des études, vivre en ville et découvrir son homosexualité.
La première moitié est très touchante et dure à la fois, il parle de la mort de son père pas vu depuis trente ans et de son historique familial, de sa mère en particulier.
Au milieu du livre, il nous parle de mai 68, de politique et là je décroche, mon intérêt pour l'intime et le particulier s'en trouve diminué. La dernière partie sur l'univers gay ne m'apprend rien de nouveau.
Au final un récit intéressant et bien documenté sur le changement de classe socio-culturelle de son auteur.
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C'est en écoutant Edouard Louis se référer à l'ouvrage de Didier Eribon que j'ai eu envie de lire Retour à Reims.
L'auteur, professeur de philosophie et de sciences sociales à l'université d'Amiens, évoque son milieu d'origine: la classe ouvrière. Au travers de son parcours personnel, Didier Eribon revient sur la honte sociale qui l' a habité pendant plus de trente ans et qui l'a conduit à couper les liens avec sa famille. Dans ce livre, à la fois témoignage intime et ouvrage théorique, l'auteur décrypte comment, par l'école, la politique, s'exerce la domination de classe. Il analyse les mécanismes bien rodés des déterminismes sociaux et leurs impacts sur les parcours individuels.
Pour ceux qui apprécient les travaux de Bourdieu ou la démarche introspective de
Annie Ernaux.
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Merci à Mariecesttout de m'avoir fait découvrir ce livre et il aurait en effet été bien dommage d'en rester à la honte d'Annie Ernaux. Dans la honte, le milieu est très modeste mais relativement soft et Annie Ernaux n'y dépasse pas le stade descriptif. Ici, le milieu d'origine de l'auteur relève plus d'une description à la Zola, et le rejet de Didier Eribon y est en outre accentué par son homosexualité, qui a été le révélateur initial de son besoin de distance avec le milieu de son enfance. L'intérêt de ce livre est que Didier Eribon ne se contente pas de décrire. Il analyse ses sentiments avec beaucoup de sincérité et sans complaisance pour lui même, et tente à partir de son expérience personnelle de théoriser la notion de classes sociales, son fondement et les conséquences qu'elle implique en terme d'éducation, d'égalité de chances et de choix politiques. On pourrait lui reprocher comme il le reproche lui même à Raymond Aron, qu'il déteste, une subjectivité liée à la condition particulière de sa propre famille, dont il considère comme acquis sa représentativité de la réalité du monde ouvrier, mais cette référence est clairement assumée et présente l'avantage d'être très démonstrative de son point de vue. Les exemples vécus font que cette démonstration sonne très juste. Les références à d'autres auteurs sont un autre intérêt de ce livre, qui incite à d'autres lectures sur le sujet. Un grand livre de sociologie, mentionne l'éditeur. Je confirme et en recommande vivement la lecture.
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C'est après la mort de son père, auquel il ne parlait plus depuis des années, que Didier Eribon est retourné à Reims.

Extrait:

"En relisant le beau texte de James Baldwin sur la mort de son père, une remarque m'a frappé. Il raconte qu'il avait repoussé le plus longtemps possible une visite à celui-ci,qu'il savait pourtant très malade. Et il commente: "J'avais dit à ma mère que c'était parce que je le haïssais. Mais ce n'était pas vrai. La vérité c'est que je l'avais haï et que je tenais à conserver cette haine. Je ne voulais pas voir la ruine qu'il était devenu: ce n'est pas une ruine que j'avais haïe."
Et plus frappante encore m'a paru l'explication qu'il propose: « J'imagine que l'une des raisons pour lesquelles les gens s'accrochent de manière si tenace à leurs haines, c'est qu'ils sentent bien que, une fois la haine disparue, ils se retrouveront confrontés à la douleur »
La douleur, ou plutôt, en ce qui me concerne- car l'extinction de la haine ne fit naître en moi aucune douleur- l'impérieuse obligation de m'interroger sur moi-même, l'irrépressible désir de remonter dans le temps afin de comprendre les raisons pour lesquelles il me fut si difficile d'avoir le moindre échange avec celui que, au fond, je n'ai guère connu. Quand j'essaie de réfléchir, je me dis que je ne sais pas grand-chose de mon père. Que pensait-il? Oui, que pensait-il du monde dans lequel il vivait? de lui-même? Et des autres? Comment percevait-il les choses de la vie? Les choses de sa vie?
Et notamment nos relations, de plus en plus tendues, puis de plus en plus distantes, puis notre absence de relations? Je fus stupéfait,il y a peu, d'apprendre que ,me voyant un jour dans une émission de télévision, il s'était mis à pleurer, submergé par l'émotion. Constater qu'un de ses fils avait atteint à ce qui représentait à ses yeux une réussite sociale à peine imaginable l'avait bouleversé. Il était prêt, lui que j'avais connu si homophobe, à braver le lendemain les regards des voisins et des habitants du village et même à défendre, en cas de besoin, ce qu'il considérait comme son honneur et celui de sa famille. Je présentais, ce soir là, mon livre, Réflexions sur la question gay et, redoutant les commentaires et les sarcasmes que cela pourrait déclencher il avait déclaré à ma mère: « Si quelqu'un me fait une remarque, je lui fous mon poing sur la gueule."

Familles, familles.. Beaucoup est dit dans ces lignes du début de ce très beau livre, mélange de récit autobiographique, d'essai sociologique et d'auto-analyse.
Car ce qui domine est la volonté de comprendre. Et de comprendre plusieurs choses passionnantes et qui nous concernent tous à un degré divers.

Alors que c'est l'homophobie existant et se manifestant en permanence à l'époque tant dans son milieu familial que scolaire qui l'a conduit à tout faire pour quitter ce milieu, il est passé d'une « honte »à une autre, en changeant radicalement de milieu social . Et il a longtemps et soigneusement caché ses origines ouvrières à ses nouvelles relations intellectuelles…

Je vais bien sûr peiner à expliquer les liens, mais ils sont très finement analysés dans ce récit qui se situe plusieurs niveaux, social, familial, scolaire et politique. Très intriqués bien sûr. Si j'avais quelque espoir que cela serve à quelque chose, je conseillerais cette lecture à notre ministre de l'Education,et à tous nos Enarques pendant que j'y suis, j'ai rarement lu quelque chose qui me parlait aussi bien de l'équilibre très fragile entre exclusion quasi annoncée du système , et chance donnée par le système scolaire( c'est la seule..) . Et pour un qui s'en sort, combien sombrent? Bourdieu en a parlé, bien sûr, mais pas avec cette sérénité et ce recul. Ils se connaissaient bien et il est beaucoup cité dans ce livre, ainsi que bien sûr aussi Foucault dont Eribon a écrit la biographie.

"Je pensais qu'on pouvait vivre sa vie à l'écart de sa famille et s'inventer soi-même en tournant le dos à son passé et à ceux qui l'avait peuplé."


C'est toute l'intelligence de ce récit de montrer, à partir d'un exemple personnel, qu'il n'est jamais trop tard pour percevoir qu'on ne s'affranchit jamais de l'injure ni de la honte, mais qu'il est impératif de comprendre comment on peut quelquefois les utiliser,je le laisse parler ( dans Citations!) Longuement, car il résume clairement, c'est un livre très clair qui parle de choses pourtant si complexes!
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