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EAN : 9782714310484
178 pages
José Corti (01/01/2011)
4/5   1 notes
Résumé :
Deux récits inspirés par une voix inconnue et des silhouettes qui se sont imposées à la poétesse.
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La dictée [chapitre intégral]

Les matins de semaine, je conduisais mon corps au bord de la rivière, espérant le laver, le soigner de son déjà trop lourd passé ; je le rangeais dans son étui après l’avoir soigneusement plié en quatre, comme ma mère m’avait appris, et retournais à mon école, y suivre la dictée du jour.

L’oiseau qui me considérait par la fenêtre et dont la dentition était parfaite avait l’air de souffrir mais je savais de source sûre que c’était pour m’induire en erreur. Quant au platane en trompe-l’oeil dont nous nous réjouissions naguère qu’il mît un frein à l’horizon et qu’il retînt le vide, il commençait à se défaire, à perdre de son jaune.

La séance s’achevait, la maîtresse se levait pour nous laisser partir. Ne restaient dans la classe que trois ouvreuses de dictionnaires, la dactylo et moi. Je n’osais pas. J’appuyai doucement ma main sur ma culotte, le jet fusa, épais et tiède. J’avais peur, juste un peu, juste assez.

Mais la maîtresse ne voyait rien, elle nous tournait le dos, pressée de terminer les bouts de craie qui lui restaient : elle n’aimait pas le gaspillage. Les trois ouvreuses, qui s’estimaient trop mal payées pour fréquenter quoique ce fût hormis les dictionnaires, se plaignaient de la faim et du froid. La dactylo était depuis longtemps montée sur le dada qui figurait au dépliant de son prochain voyage.

Le liquide, cependant, se répandait en vagues qui proliféraient jusqu’à battre l’estrade aux pieds de la maîtresse toujours distraite par sa tâche. J’espérais avoir plus de succès en entamant la phase deux, qui consistait à parsemer la mare de chrysanthèmes gros et blancs, appelés chrysostomes dans le langage des partants.

Je les sortis de mon manchon, ils étaient quinze, ouverts, les lèvres blêmes, le seizième avait froid, ses yeux en étaient bleus, il retourna à la fourrure. La maîtresseme cria, toujours de dos :
– Ava, il est grand temps que tu retournes à la rivière. Tu sais que nous te comprenons.
Elle ajouta «Nous t’attendrons », cette fois face à moi, son visage envahi des couleurs de ses craies avait l’air de flamber, il rayonnait d’une stupide autorité.
– Je reviens tout de suite, lui dis-je en arrêtant le flux, vous préviendrez qu’Ava est en dérangement. Petite Soeur et Cadette étaient devant la porte. Je pris leur main pour traverser et retourner à la maison.
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Vidéo de Marie Etienne
Marie ÉTIENNE — Entretien sur 'Anatolie' (France Culture, 1997) L'émission "Poésie sur parole", par Jean-Baptiste Para, diffusée le 31 mai 1997 sur France Culture. Présence : la poétesse en personne.
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