AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,57

sur 90 notes
5
6 avis
4
9 avis
3
5 avis
2
5 avis
1
1 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Kline est un détective qui a perdu sa main au cours d'une enquête. Tranchée net par le gentleman au hachoir. Il a cautérisé au plus vite, lui-même la plaie avec un réchaud dans le but de surprendre le tueur et ainsi l'achever, d'une balle dans l'oeil…
Pas le genre d'histoire qui reste insignifiante.
Et qui va attirer une secte : La Confrérie des Mutilés.

Kidnappé par les membres de la secte, il se voit octroyé de force, une mission complètement absurde : trouver un assassin au sein de la Confrérie, mais sans corps, sans lieu du crime, et dans l'interdiction formelle d'interroger les frères… Car la Communauté est hiérarchisée par le nombre d'amputation. Hors Kline n'est qu'un « un », puisqu'il ne lui manque que sa main. Et pour pouvoir avancer dans l'enquête, il faudrait au moins être un « quatre »…

1/Si vous connaissez un peu l'auteur, vous savez que le mormonisme occupe ses récits. Je vous synthétise grossièrement le mormonisme : un jour un mec très charismatique, Joseph Smith, se balade dans la forêt et rencontre un ange qui lui confie des plaques d'écritures saintes, lui permettant de rédiger le Livre des Mormons (une sorte de suite à La Bible, pour ceux qui arrivent aux States). Il aura au cours de sa vie, plusieurs contacts spirituels avec les hautes sphères déistes, notamment lorsqu'il se lassera de son épouse et qu'un ange lui annoncera qu'il doit se marier avec plusieurs femmes (bah voyons). Des branches différentes vont s'éloigner du mormonisme de base. Puis plus tard, s'installant dans l'Utah et pour des raisons politiques, ils vont devoir redevenir monogames. Mais la monogamie n'est pas du goût de tout le monde et d'autres branches extrémistes vont voir le jour.
J'ignore si Brian Evenson a été élevé par des extrémistes mormons, mais son personnage, Kline, va se retrouver bringuebalé d'une branche sectaire à une autre. La base du premier mouvement était que de perdre un membre, permettait de se rapprocher de Dieu. «Si la perte d'un membre nous rapproche de Dieu, ils pensaient l'approcher de plus près en multipliant les amputations. » C'est ainsi que la secte dévie dans l'exagération absurde et ridiculement douloureuse. La convoitise d'accéder au plus haut rang, va créer une hiérarchie au sein de la Communauté : plus vous avez de membres amputés, plus vous êtes au sommet. « La hiérarchie, les jugements portés contre les camarades ayant subi un nombre inférieur d'amputations, la servitude, la suffisance. »
Le sacrifice de soi, plus au sens propre qu'au figuré, n'est alors plus spirituel, mais motivé par le Pouvoir. Jeux de mains jeux de vilains. Notre protagoniste va devoir affronter l'horreur, les personnages se découpant de manière absolument consentante des bouts de leurs corps.
Consentants ?
Est-ce que justement, ce n'est pas le propre de la secte de nous faire croire que nous sommes consentants ?
Car la soumission au sein du groupe, fonde la course à la multiplication des amputations. Elle n'existait pas lorsque tous les membres étaient au même niveau spirituelle. La hiérarchie, que ce soit dans la religion ou les sectes, ne devraient pas exister, car nous sommes tous les agneaux de Dieu, au même niveau... Il ne devrait pas exister d'être supérieur en dehors du démiurge. La hiérarchie ce n'est pas spirituelle. Et en voulant atteindre le haut niveau, pouvons-nous alors parler de consentement? Voilà, à mon sens, la première symbolique du roman.

2/Lorsque nous sommes extérieurs à une religion ou une secte, nous sommes confrontés à l'ignorance et l'incompréhension la plus totale, qui institue ainsi la place du mouvement dans quelque chose que nous ne pouvons pas saisir, sans ressentir La Foi. La Foi ou l'Appel de Dieu. Et pourtant, les détenteurs de cette Foi mystérieuse peut rendre curieux. Cette curiosité est un piège. « La curiosité est vraiment quelque chose d'affreux, songeait-il. Comment peut-on s'empêcher d'avoir envie de savoir? » Cette curiosité elle concerne surtout ceux ou celles qui s'intéressent à la métaphysique. Et les communautés prosélytiques le savent, elles sont formées ainsi. (Je peux en témoigner, ayant assister pendant 3 ans, deux fois par semaine aux réunions dans le salle du Royaume des Témoins de Jéhovah). C'est encore plus hermétique pour ceux ou celles qui ne cherchent pas à savoir. Ces derniers ne seront pas la cible. Alors quand on est la cible, on entendra des phrases, tel que Kline l'entendra : « Quand vous aurez reçu l'Appel » qui pour les fanatiques est une évidence incontestable. Vous recevrez l'Appel, c'est certain. Et lorsque l'Appel de Dieu ne vient pas, et qu'un carnage est accompli, l'autre branche le voit comme un Elu. Celui qui doit éliminer les faux prophètes. Ne peut-il donc pas se sortir de ce cauchemar ? Non car il est difficile de sortir d'une secte. Et la bienveillance qui y règne, avec cette gentillesse à outrance, cette assurance de « protection », c'est quelque chose de très enivrant. La communauté protège, aide, soutiens, pourquoi donc vouloir en sortir ? Et si elle disait la Vérité ? Adopter la politique de la main tendue lorsqu'on n'a pas de main, quelle idée!
L'auteur utilisera en symbole d'incompréhension, quelque chose d'absolument révulsant : la mutilation pure et simple (dans la joie et la fête en plus).

3/J'ai beaucoup de mal à saisir le rapport de Brian Evenson avec l'amputation. Dans son roman immobilité, le protagoniste n'est pas amputé mais il ne peut clairement pas utiliser ses jambes. Dans Baby Leg, on subit des expériences douteuses sur les corps et cette femme qui a une jambe de bébé à la place de sa vraie jambe, et maintenant celui-ci. Mais son génie d'écriture rend certaine situation très drôle. Les dialogues absurdes n'ont rien à envier à Samuel Becket et la banalisation des amputations donnent l'impression que l'auteur joue avec monsieur Patate. Même si j'avoue que les premiers passages m'ont donné la nausée, la répétition de l'horreur grandguignolesque finit par rendre ses scènes horribles à la limite de la comédie. Et lorsque le protagoniste se balade avec une tête ensanglantée, et qu'il se pose des questions sur son inhumanité, nous nous rendons compte que nous avons perdu la nôtre puisque nous ne sommes pas horrifiés par la situation. C'est très fort.

C'est mon quatrième roman de Evenson, et je dois avouer que je suis accro.
Commenter  J’apprécie          10321
Après avoir perdu une main, Kline, un détective privé, se retrouve plongé au sein d'une société de mutilés volontaires où l'on attend de lui qu'il résolve un meurtre. Il doit gagner la confiance des membres de cette étrange secte. le degré d'amputation détermine l'accès à certaines personnes et informations. Jusqu'où sera-t-il prêt à aller pour découvrir l'insoutenable vérité ?
Brian Evenson nous plonge encore une fois au coeur de la folie. Plus exactement au coeur de la rencontre entre la folie de son héros et la folie institutionnelle. Ici celle d'une secte qui voit la mutilation volontaire comme un acte de rapprochement avec Dieu. Oui je sais ça glace le sang.
 La maîtrise du récit d''Evenson évite la complaisance. La concision de son écriture dans la description de scènes très violentes permet de garder de la distance et de tomber dans le voyeurisme malsain.  Il arrive même que l'absurde des situations nous face sourire voire rire. L'auteur nous offre une nouvelle fois un texte qui dérange, une texte que l'on pourrait qualifié de dingue tant la Folie affleure à tous les niveau. L'auteur n'a pas froid aux yeux. Il va jusqu'au bout de son propos. Brian Evenson est sans conteste un très grand auteur et pas qu'à mes yeux !
Une écriture au scalpel qui ne laisse pas indifférent. Nous faisons passer de l'angoisse à l'horreur mais heureusement l'auteur manie l'humour avec un tranchant certain.
Dans la lignée de Poe et de Borges, une prose incisive au service d'un récit dérangeant, où rivalisent humour noir et banalité de l'horreur.
Un ovni à découvrir.
Lien : https://collectifpolar.wordp..
Commenter  J’apprécie          110
La mutilation rituelle et obsessionnelle comme choix de religion et de vie. Décapant.

Désormais sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/05/23/note-de-lecture-la-confrerie-des-mutiles-brian-evenson/
Commenter  J’apprécie          30
Bienvenue dans un monde où ce qui compte est ce qui ne se voit pas. Un monde de mutilés où les plus puissants se débarrassent de leur chair, de leur enveloppe corporelle afin de développer leur moi intérieur. Entre humour noir et horreur, voici un livre tout en métaphores à lire au second degrés. Excellent!
Commenter  J’apprécie          20
--> 2eme lecture de Brian Evenson.
(1ere lecture Baby leg, petite nouvelle rafraîchissente et complètement déjanté)
On suit les messantures, toujours WTF, de Kline inspecteur mutilés de la main à qui il va arriver une drôle d'histoire avec une secte de mutilés qui vont l'employer pour enquêter sur un soit disant meutre. Mais tous sa n'est qu'une façade afin de l'intégrer à la secte, qui le glorifie et le voit comme un avant-gardiste car lorsque que kline à était mutilé il s'est auto-cotérisé son moignon.
Cette fameuse cette secte marche par échelon plus on est amputé plus on est à haut échelon. (8/9/10/12 amputation)
Je vous passe certains détails pour pas tous vous raconter.
Mais par la suite il va rencontrer une seconde secte tout aussi étrange et tout aussi mutilé "Les Paul", car oui il s'appelle tous Paul et ils sont tous mutilé de la même manière.
Un roman WTF, un auteur très très prometteur, une vraie bonne surprise. Hâte de continuer ma découverte de cet auteur avec ces autres livres.
Je recommande ++++++
Commenter  J’apprécie          10
Extrait (suite en lien) :

Kill Kline. Brian Evenson, La confrérie des mutilés.
Kline est chez lui. Il déprime depuis plusieurs jours dans son fauteuil sans parvenir à se résoudre à sortir, ne serait-ce que pour se ravitailler. Il faut dire que Kline vient de perdre sa main droite. La manière dont les choses se sont passées ont été traumatisantes : après s'être fait trancher la main par un dangereux tueur, le “Gentleman au hachoir”, Kline s'est lui-même cautérisé la plaie sur un réchaud à gaz et, profitant de la stupéfaction de son bourreau, il s'est retourné pour lui tirer une balle dans l'oeil, de la main gauche. Pour se dédommager, Kline est reparti avec plusieurs milliers de dollars volés au Gentleman. Néanmoins, l'argent ne remplace pas une main.
Comme dans de nombreux textes de Kafka, il n'y aura aucune explication sur ce qui précède ce fait. Nous ne saurons rien du passé de Kline, rien de cette mission qui lui a coûté la main, rien de ses relations ambiguës avec le “Gentleman au hachoir” dont on apprendra seulement, au hasard d'une remarque, qu'elles étaient suffisamment fortes pour qu'ils aient l'habitude de fréquenter ensemble des boîtes de strip-tease. Et alors que personne ne sait comment les événements se sont déroulés – aucun détail n'ayant été fourni à la presse – Kline reçoit un appel de téléphonique de deux hommes parfaitement informés sur les circonstances du drame, l'un à la voix grave, l'autre à la voix chuintante qui, après lui avoir démontré toute leur admiration pour son auto-cautérisation, lui enjoignent de les rejoindre pour mener une enquête. Face aux refus obstinés de Kline à leurs multiples appels téléphoniques, les deux hommes finissent par se déplacer pour emmener Kline de force. Ces deux hommes, Gous et Ramse, de par leur attitude grotesque, sympathique et menaçante à la fois ne sont pas sans rappeler les Assistants chargés de veiller sur K. (tiens, tiens…) dans le Château de Kafka. Gous et Ramse apprennent à Kline qu'ils appartiennent à un groupe religieux : la Confrérie des Mutilés. Gous n'est qu'un novice, il ne lui manque qu'une main. Ramse, dont Gous démonte les prothèses sous les yeux ébahis de Kline, est plus haut dans la hiérarchie, un Huit, parce qu'il est amputé des deux mains, d'une oreille et de cinq doigts de pied. La hiérarchie religieuse s'établit en effet au nombre d'amputations. Dans la voiture qui les mène à la propriété de la Confrérie, il y a d'ailleurs à ce sujet un drôle et sinistre débat théologique entre Gous et Ramse qui n'est pas sans rappeler les obsessions d'un Beckett pour les précisions mathématiques les plus absurdes :

« Gous opina. Il souleva son moignon, se tourna vers Kline.
“Ça, ça vaut un, dit-il. J'aurais pu conserver la main, enlever les doigts un à un et je serais un Quatre aujourd'hui. Cinq sans le pouce.”
Ils attendaient une réaction de la part de Kline.
“Ça ne semble pas très équitable, risqua-t-il.
– Non, mais qu'est-ce qui a le plus d'impact ?reprit Ramse. Un homme qui perd ses doigts ou un homme qui perd sa main ?”
Kline ignorait s'il était censé répondre.
“Je voudrais descendre de voiture, dit-il.
– Il y a Huit et Huit, fit Ramse en négociant un tournant. Personnellement, je suis partisan d'un système prenant en compte amputations mineures et majeures ; selon ce système, je serais un 2/3.
– Je préférerais prendre en compte le poids. Moi je dis : pesez l'organe amputé !
– D'accord, mais sang compris ou pas ? Et puis, cela ne risque-t-il pas de favoriser les plus corpulents ?
– Il faut établir un barème. Des pénalités, des handicaps. »
Lien : http://bartlebylesyeuxouvert..
Commenter  J’apprécie          10


Lecteurs (194) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (6 - polars et thrillers )

Roger-Jon Ellory : " **** le silence"

seul
profond
terrible
intense

20 questions
2871 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , thriller , romans policiers et polarsCréer un quiz sur ce livre

{* *}