Vers la fin de sa vie,
Henri-Paul Eydoux, dont on connaissait déjà la série des volumes intitulée : Châteaux fantastiques, voulut isoler en une étude assez fouillée et très bien documentée, le "cas" des forteresses construites par les Croisés en Syrie, au Liban et en Terre Sainte, mais aussi en Arménie, vestiges d'une Chrétienté conquérante, mais dont les acquisitions territoriales furent menacées aussitôt que constituées. D'où le gigantisme architectural des forteresses de l'intérieur : la vastitude du Sahyun, édifié par une famille noble, mais fragile du côté de sa basse-cour, ce qui permit à Saladin de s'en emparer ; l'aspect colossal du Margat tout de basalte construit avec son magnifique donjon à chemise, bâti pour les Hospitaliers ; et l'incomparable château à double enceinte et à galerie gothique baptisé le Krak des Chevaliers et confié à la garde des mêmes chevaliers de l'Hôpital. Eydoux aborde tout : la question des influences orientales/occidentales dans l'évolution architecturale, la poliorcetique, la nécessité d'édifier de puissantes forteresses, presque dans la démesure, pour pallier un manque cruel de défenseurs dans les États latins ou francs d'Orient : royaume de Jérusalem, principauté d'Edesse, comté de Tripoli, et principauté d'Antioche, d'où la remise progressive de ces châteaux entre les mains des grands ordres de moines-soldats chargés de la sécurité des pèlerins : Hospitaliers, Templiers et Teutoniques.
L'histoire de ces châteaux se confond avec le sort des quatre États créés par les Croisés et tenus par ceux que l'on appela les "Poulains" puis par les générations d'occupants européens qui leur succédèrent entre 1099 et 1291. Cette date extrême marque la fin des dernières possessions franques au Levant, avec la perte de Saint-Jean d'Acre. Eydoux a fait en son temps un excellent travail, s'attachant aussi bien aux châteaux-frontières qu'aux petites forteresses qu'aux défenses côtières, renforcées après la Croisade manquée de Louis IX en Égypte.
La lecture de l'ouvrage est plaisante et instructive, comme toujours avec
Henri-Paul Eydoux.
Je n'ai qu'un regret, celui de n'avoir pas connu personnellement cet auteur dont les ouvrages m'ont servi de guides des années 1970 à nos jours, lorsque je faisais le tour de nos châteaux-forts et celui des forteresses des Croisés, sur les pas de
T.E. Lawrence.
François Sarindar, auteur de :
Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010).