La chronologie de ce recueil mérite attention. La première partie, Dago Red, sortie en 1940aux USA, est constituée de nouvelles publiées dans différentes revues à partir de 1932. Ces nouvelles sont donc écrites en même temps que la trilogie
Bandini, même plutôt antérieures.
La seconde partie, sobrement intitulée Nouvelles ultérieures, a été écrite et publiée entre 1940 et 1985, année de publications. En fait, ce sont essentiellement des nouvelles des années 40-50, les années hollywoodiennes de Fante. « Helen, ta beauté est pour moi » a notamment une histoire particulière (merci à la biographie de Stephen Cooper …) et typique de cette époque où
John Fante va voir sa notoriété grimper en flèche. Il fait 50 projets en même temps, la moitié capotent, il gagne beaucoup d'argent, le dépense comme un forcené et l'ambiance nostalgique et intimiste des nouvelles de Dago Red est forcément réduite dans ces nouvelles postérieures.
Personnellement, j'ai trouvé que Dago Red, si on y retrouve avec régal l'atmosphère et le talent de la trilogie
Bandini, n'apporte pas grand-chose aux publications précédentes. Comme la plupart du temps avec des nouvelles (sauf
Maupassant ou
Stefan Zweig évidemment…), le niveau est inégal et si j'ai pu lire qu'Une femme pour Dino Rossi est une des plus réussies, je l'ai trouvé trop proche de
Bandini pour vraiment ressentir le choc des romans. Mention spéciale pour moi à L'odyssée du Rital et à Foyer, doux foyer, l'une à cause d'une phrase de fin bouleversante, l'autre pour le style d'écriture qui m‘a pris aux tripes.
La seconde partie est moins talentueuse mais plus intéressante quand elle s'éloigne de ce qu'on a déjà lu dans les romans. Les 4 premières ouvelles sont des histoires de famille à nouveau et d'école catholique comme on en a déjà lu. Par contre, dans « le rêveur », et plus encore « Helen… », Fante n'y parle pas de son enfance et, s'il exploite certaines parties de sa vie, c'est au profit d'une oeuvre de fiction. « Helen » est une nouvelle très dure sur la misère sentimentale des émigrés philippins et leur rêve de retourner au pays avec la « femme américaine »… qu'ils ne trouvent que moyennant paiement dans des taxis-girls professionnelles. le racisme, l'exploitation éhontée et les rêves de l'immigré américain ne sont pas cette fois centré sur le rital, et l'on envisage un élargissement du champ du discours chez Fante… qui n'aura (malheureusement ?) pas de suite, l'auteur revenant dans les publications suivantes à l'immigré italien, à sa relation avec son père, sa mère, la religion, etc
En résumé, c'est un livre très agréable à lire, on le dévore facilement, un régal mais j'ai eu en grande partie la sensation de lire de nouveaux chapitres de la trilogie
Bandini (hormis 2 des Nouvelles Ultérieures).