AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,76

sur 1022 notes
Voilà, ça c'est ce que j'appelle de la Littérature. Un écrit qui a du souffle, de l'ambition, de l'intelligence, de l'imagination, du vocabulaire, du style. Qui engendre toute une gamme de sensations : émotion, agacement, rire, malaise, admiration et même suspense. Et qui ne prend pas le lecteur pour un c…
Ouf, n'en jetez plus, me direz-vous, c'est bien trop pour un seul homme, ou un seul livre. Difficile à croire qu'on trouvera tout cela dans Les Corrections, quand on sait que la trame consiste banalement à nous parler d'une famille banale, issue banalement de la classe moyenne supérieure d'une non moins banale ville du Midwest américain. Et pourtant…
Or donc, dans la famille Lambert, je demande les parents, al et Enid, vieillissant dans leur maison encombrée par une accumulation de 40 ans de choses inutiles et/ou inutilisables. Al, le patriarche, glisse dangereusement sur la pente de Parkinson et de la démence sénile. Lui qui n'a jamais su exprimer ses sentiments, le voilà prisonnier d'un corps et d'un esprit défaillants. Enid, sa femme souvent insupportable de morale bêtifiante et obsessionnellement attachée à sauvegarder les apparences, est tout aussi obsédée par l'idée de réunir une dernière fois la famille pour Noël.
J'appelle ensuite la jeune génération, guère plus brillante : Gary, Chip et Denise, la quarantaine aujourd'hui, se sont empressés de fuir le foyer étouffant pour éviter de reproduire les erreurs des parents, coupables de n'avoir su créer un cadre familial harmonieux et aimant. Mais les « corrections » voulues par les rejetons ne s'avèrent pas plus efficaces. Chip, professeur d'université raté et viré, s'embarque dans d'improbables tribulations « magouillantes » en Lituanie. Gary, dont on pourrait croire qu'il a « réussi sa vie » et est le seul être sensé de la famille, a si peur de sombrer dans la dépression qu'il en devient paranoïaque. Denise, la petite dernière, jamais à court d'idées de recettes pour le restaurant gastronomique dont elle est le chef, se trouve bien dépourvue quand il s'agit de savoir qui elle est vraiment.
Et ça se chamaille, ça s'engueule, ça se critique (ouvertement ou non, peu importe, pourvu que les voisins n'en sachent rien), ça se déteste, ça s'entraide, ça se laisse tomber, enfin bref, ça s'aime même si ça ne s'en rend pas compte. Une famille formidable ? Que nenni, on est loin de la vision idyllique. Au contraire, la plume est trempée dans un cynisme vitriolé plutôt que dans le coulis de guimauve. L'analyse est réaliste, brassant les thèmes des relations familiales principalement, mais aussi du capitalisme, de la vieillesse, de la maladie et des conventions sociales, alternant humour corrosif à la hache (ahh, les conversations téléphoniques entre Gary et sa mère…les déboires de Chip…), effroi distillé au bistouri glacé (les délires d'al font froid dans le dos), et en fin de compte et entre les lignes, compassion distribuée à la petite cuillère.
Alors oui, ce roman « mesure » 700 pages. Mais pour une fois, qualité rime avec quantité, malgré certaines longueurs. Mais attention, ce n'est pas un pavé « facile ». L'auteur est exigeant, il n'est pas du genre à enchaîner les romans commerciaux insipides vendus au rayon lecture du supermarché. Je reste admirative devant tant de talent : intelligence d'écriture, envolées littéraires, sens de la formule, saut passé/présent en deux mots sans rendre le récit chaotique. Il faut passer l'obstacle des premières pages déroutantes, s'accrocher parfois, ne pas renoncer car le jeu en vaut la chandelle : un grand roman par un grand auteur.
Les esprits chagrins trouveront ce roman prétentieux, indigeste ou déprimant. Moi je remercie Monsieur Franzen de tirer la littérature – et les lecteurs – vers le haut.
Commenter  J’apprécie          1207
Connaissez vous Jonathan Franzen ? Non ! dommage
Connaissez vous " les corrections" et la famille Lambert ? Re-non ! re-dommage
La spécialité de Jonathan Franzen c'est la famille, mais plutôt une famille qui part en vrille.
Prenez par exemple les Lambert, une famille qui aurait pu voter Trump en 2016, une famille du middle west comme tant d'autre.
Chez les Lambert il y a le père, Alfred, ingénieur à la retraite des chemins de fer. Il est plutôt taiseux Alfred, sa retraite il l'a passe dans son garage entre ses inventions et son fauteuil bleu qu'il quitte de moins en moins depuis qu'il a la maladie de Parkinson.
Enid la mère au foyer, celle qui fait tourner la maison. Enid est une femme d'un autre temps avec des idées biens arrêtées comme " pas de relation sexuelle avant le mariage". Son obsession, les fêtes de noël.
Pour l'instant le model familial à la sauce aigre douce de Franzen est à peu près normal, il y aurait peut-être quelques " corrections" à faire. La famille c'est comme une mécanique bien huilée, on peut entendre le doux ronronnement du moteur. Sauf qu'au moindre grain de sable la mécanique se grippe. Je vais vous présenter les grains de sables, les enfants Lambert.
Gary est le fils ainé, le chouchou de sa maman, son travail est d'acheter et vendre des actions boursières. Marié à Caroline et père de trois garçons.
Gary est matérialiste normal pour quelqu'un qui travaille dans la finance.
Il est plutôt fier de sa réussite sociale, il se croit indispensable, voudrait régenter son monde mais ne maitrise rien, surtout pas sa femme qui le mène par le bout du nez.
Chip le deuxième fils est le contraire de Gary, il manque d'assurance, comme si le frère ainé avait tiré la couverture à soi.
Ce professeur d'économie, licencié de l'université où il enseignait à des rêves d'écrivains.
Et pour finir je vous présente Denise, chef cuisinier dans un restaurant gastronomique de Philadelphie ou plutôt était car Denise a été licenciée pour faute grave.
Jonathan Franzen ne prend pas de gants, comme à son habitude il égratigne, il sait de façon habile rendre ses personnages agaçants voir insupportables. Avec " Les corrections " l'auteur de "Freedom" et de " Purity" nous renvoie à nous même et à nos travers. Un grand roman comme les écrivains américains savent le faire.
Commenter  J’apprécie          989
L'analyse de la famille dysfonctionnelle, sujet battu et rebattu, trouve dans Les corrections les voies de l'excellence.

La complexité des relations entre les membres d'une famille et leur rapport au monde y sont décortiqués avec une précision et une pertinence formidables. Maladie, vieillesse, ambition, sexualité, amour, tout ce qui participe de la vie ordinaire des Lambert, américains moyens, est scruté avec une qualité dans l'observation qui lui confère une vraie valeur et une portée plus générale. Car chacun peut se retrouver dans ce roman ironique et cinglant, tendre et émouvant, d'une veine exceptionnelle.
A lire sans faute.
Commenter  J’apprécie          750
Une famille moyenne dans une ville moyenne décortiquée par la plume brillante de l'auteur, c'est du plaisir à l'état pur. Il y a l'odeur du vieux dans la maison familiale avec Alfred, le père, qui glisse doucement mais sûrement dans la démence sénile avec toutes les conséquences hygiéniques qui vont avec la maladie. Nous sommes avec lui dans son cerveau avec ses réactions, ses peurs, ses problèmes pour bouger correctement, plus de notions d'espace, de temps, mieux qu'un film d'horreur. Enid la mère, me fait beaucoup penser à la mienne, passe son temps à tout cacher, surtout le courrier, accumule objets inutiles et souvenirs. Inutile de lui demander, elle ne sait plus où les objets et le courrier sont rangés. Elle essaye de sauver les apparences, nie la maladie de son mari, ne pense qu'à faire des croisières, à fêter le prochain Noël dans sa maison avec tous ses enfants, n'écoute rien, n'en fait qu'à sa tête, adore faire culpabiliser ses enfants pour obtenir ce qu'elle veut, du grand art d'une mère loin d'être parfaite et très énervante. Les trois enfants ont quitté dès que possible ce foyer, chacun avec son fardeau, ses obsessions et surtout le désir de ne pas devenir comme les parents. Gary l'aîné, le plus clairvoyant, mais se battant avec ses propres démons, essayant de sauver sa propre famille du naufrage conjugal. Chip, brillant mais autodestructeur se mettant dans toutes les situations délicates comme si la normalité le rapprochait trop de sa famille. Denise, la petite dernière, peut être la plus stable, un appartement, un métier, mais des sentiments amoureux indécis. Si vous n'avez jamais lu du Jonathan Franzen, lancez-vous, c'est dérangeant, brillant et jouissif.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
Commenter  J’apprécie          512
Un grand roman américain que Les corrections ! L'auteur Jonathan Franzen nous présente la famille Lambert, en apparence bien ordinaire, qui vaut bien n'importe laquelle. Il fait même davantage : il la dissèque sous toutes ses coutures, révélant au grand jour un drame cruel et dérangeant mais ô combien fascinant. Au grand bonheur des lecteurs qui auront la patience et le courage de traverser ces quelques 700 pages.

Alfred Lambert, le patriarche, est un ingénieur-retraité d'une petite compagnie ferroviaire du Midwest américain. Un homme simple, foncièrement honnête mais surtout vieillissant, à la santé physique et mentale vacillantes, déclinantes. Cet homme malade, obstiné, qui n'en fait qu'à sa tête, se terre au sous-sol où il passe ses journées sur son vieux fauteuil laid. Sa femme Enid semble plus sympathique au premier abord. Mais elle dérange avec son insistance à vouloir sauver les apparences, à se mêler de tout et de rien, à picorer, à juger les gens selon ses valeurs d'un autre temps, figées, immuables. Et que dire de son obstination, de son obsession à vouloir rassembler tout son petit monde pour Noël sans le demander directement.

Puis il y a les enfants. Ils sont trois et ils ont fui leur petite ville de St. Jude (ou bien le nid familial ?). L'ainé, Gary, occupe une position enviable dans une boite de la Caroline du Nord. Marié, père de trois garçon, il a crée sa propre famille, parce que c'était la chose à faire. Mais il n'est pas nécessairement heureux, il lutte contre la dépression et cède devant les exigences de son épouse capricieuse. Aussi, il ne pense qu'à l'argent, le nouveau dieu des temps modernes. Il ne souhaite surtout pas finir comme son frère cadet, Chip. Ce dernier a été viré de son emploi de professeur d'université et survie grâce à des piges dans des journaux à New York. Il rêve de devenir écrivain mais ne subit que des revers et des déboires. Puis il y a Denise, plus stable en apparence, qui vit à Philadelphie. Après un mariage raté et un flirt avec le lesbianisme, elle concentre ses énergies à trouver des recettes pour son nouveau restaurant gastronomique (elle est chef) et à concilier tout le monde.

À eux cinq, les membres de cette famille dysfonctionnelle représentent différentes facettes de l'Amérique. Je crois que tout le monde peut s'identitifer à un des personnages, ou du moins y reconnaître quelqu'un de sa connaissance. Dans son roman, Franzen dresse un portrait impitoyable de cette classe moyenne supérieure, fait une critique sociale. Et c'est très réussi. Les Lambert sont autant victimes du sort (du destin) que des choix personnels qu'ils font. Ils se débattent dans un chaos dont ils sont à moitié responsables. Combien de fois ai-je lancé aux personnages (dans ma tête, bien sur) : « Fais pas ça ! Non ! » Inutilement, cela va de soi. Après tout, les Lambert sont tellement crédibles, complets, complexes. Ils sont humains !

Les corrections permet d'explorer des thèmes universels comme la vieillesse (et tout ce qu'elle entraine : déchéance, sénélité, sort réservé aux personnes âgées), la famille, l'argent, la quête de soi, etc. La vie tout court. Qui peut se vanter de ne pas se sentir concerté ? Et Franzen parvient nous interpeler encore davantage grâce à son style, qui mélange habilement humour (corrosif, cynique ou décapant, selon chacun) et intelligence. Il n'est pas moralisateur du tout, il ne s'appitoie pas sur les malheurs des Lambert comme tant d'autres l'auraient fait. Non, il ne fait que dérouler sous les yeux des lecteurs, avec un réalisme incroyable, leur histoire. Elle semble d'abord ordinaire et ennuyeuse (elle l'est un peu par moments, je pense à toutes pages sur les recherches et spéculations financières de Gary), mais elle se révèle compliquée, dure, éprouvante. Il faut s'y habituer, et ce, dès les premières pages. D'autant plus que l'auteur ne laisse que très peu de place à l'imagination. Tout y est décrit, raconté avec une froide précision. Bref, un ncontournable de la littérature américaine moderne, selon moi.
Commenter  J’apprécie          410
Ce confinement m'aura permis de me lancer (enfin !) à la découverte de Jonathan Franzen, dont les romans hantent ma bibliothèque depuis des années. Un pavé que celui-ci, par son nombre de pages, sa densité narrative et l'exigence du style.

Mais diable ! C'est de la littérature, et de la bonne ! Contemporain et intemporel, il réexplore la famille dysfonctionnelle : la mère insupportablement tyrannique (victimaire, culpabilisante, manipulatrice), le patriarche bourru et obtus, les trois enfants - le financier névrosé, là chef cuisinière en dérive et l'intellectuel oisif. de cette trame d'un classicisme apparemment paresseux, Franzen tire une épopée sans âge, dans le temps long de l'exploration intime de la famille et de chacun de ses membres. Les personnages sont d'une incroyable épaisseur et forcent empathie, dérision, ironie et agacement à partir de petits riens, filés et déliés avec jubilation. Et intelligence.

Un (très) long moment de lecture dont on ne veut pas sortir.
Commenter  J’apprécie          353
Qu'elles soient pour ou contre, certaines critiques postées ici sont d'une telle qualité qu'il est difficile de passer derrière!

J'ose quand même quelques lignes pour témoigner de mon très, très grand enthousiasme pour Franzen, découvert il y a deux ans, et en particulier pour ces "Corrections". Cela faisait longtemps que je n'avais pas lu quelque chose d'aussi talentueux et cela fait du bien.

Certes, c'est un peu long, et aussi un peu prétentieux par moment (Mr Franzen cachera mieux son gros melon dix ans plus tard dans "Freedom")

Il n'empêche que cette radiographie minutieuse, sans concession mais profondément empathique d'une famille de la middle class du Midwest américain est un vrai bonheur de lecture.
Beaucoup d'intelligence et d'humour dans l'écriture, un regard d'entomologiste sur la société américaine, un soin extrèmement précieux porté à chaque personnage : je me suis régalée.
Commenter  J’apprécie          330
Mordant, cynique, cet instantané familial lauréat du National Book Award fait de Jonathan Franzen l'un des plus grands satiristes américains. Sans la formuler en tant que tel, il soumet au lecteur cette hypothèse : et si les enfants n'étaient là que pour corriger la vie de leurs parents ? L'entièreté de son roman donne corps à ce postulat, crée des échos entre les générations et porte un regard sans fard sur les relations au sein d'un foyer (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/10/23/les-corrections-jonathan-franzen/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          280
Tout d'abord, même si j'ai adoré ce livre, j'en ai trouvé la lecture assez éprouvante pour deux raisons: les personnages d'Enid, Caroline (ignobles garces manipulatrices) et Gary (imbuvable) et l'angoisse que m'inspirent les maladies neurodégénératives.
L'histoire de la famille Lambert traite de plusieurs thèmes: la famille et ses non-dits, la vieillesse et ses drames, l'ambition et les rapports à l'argent,...
J'ai dû m'accrocher au début, mais une fois passés les déboires de Chip avec son étudiante, le livre s'est lu tout seul. Quel régal, que cette chronique familiale! J'ai aimé suivre ces humains à moitié (ou complètement) paumés dans leurs combats quotidiens contre les ennuis dans lesquels ils se sont fourrés en suivant les uns, leur coeur, les autres, leur (dé)raison.
Je conseillerais ce livre avec un avertissement: accrochez-vous, même si la lecture est ardue, il en vaut la peine!
Commenter  J’apprécie          242
ça c'est un roman! un vrai, un bon, un passionnant, un de ceux qu'on ne quitte pas (un peu lourd dans le sac, mais peu importe), un récit formidablement écrit, un roman qui reste en mémoire. Et pourtant, l'intrigue ne fait pas dans l'originalité: Enid souhaite, désire, veut, exige de réunir ses enfants pour Noël. C'est tout? Euh... oui, c'est tout. Mais le génie de Franzen est là justement, dans l'art de choisir sur la photo l'insignifiant détail, de repérer le défaut attachant et la qualité exaspérante (ce n'est qu'une question de point de vue), de mettre le doigt sur les mesquineries, les ressentiments, les petites manipulations sans importance, les compromis, les enchaînements inévitables. Ses personnages sont attachants mais odieux (ou l'inverse), ambitieux mais mesquins, honnêtes mais corruptibles, brillants mais ils échouent dans leur carrière: ils sont vivants. Et dans un roman, c'est le bonheur.
Commenter  J’apprécie          180




Lecteurs (2772) Voir plus



Quiz Voir plus

Dead or Alive ?

Harlan Coben

Alive (vivant)
Dead (mort)

20 questions
1821 lecteurs ont répondu
Thèmes : auteur américain , littérature américaine , états-unisCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..