Les mariages restaient encore le moyen privilégié pour mener l’étude sociologique que Juliette faisait de sa famille.
Ils réunissaient à eux seuls tous les spécimens de l’espèce, et permettaient selon la jeune femme d’établir un modèle familial universel. Du large panel d’individus présents au sein de sa tribu, on pouvait en effet remarquer plusieurs profils qui semblaient être communs à toutes…
Savoir lire cette presse était un art : cela nécessitait une certaine vivacité d’esprit, pour comprendre que les mannequins photographiés n’allaient pas à une soirée déguisée mais à un défilé de mode, et assez de recul, pour ne pas croire que la crevette était réellement un aliment réputé bénéfique pour éviter les cors au pied.
Mais la rubrique préférée de Juliette restait celle des tests de personnalité ; un tas de questions inutiles et sorties de nulle part dont les réponses proposées ne correspondaient jamais aux vôtres, mais qui vous expliquaient quand même à la fin tout ce que vous ignoriez sur vous.
C’était incroyable, il était resté exactement le même ! Avec ce petit air arrogant qui faisait enrager Juliette. Et le pire, c’était qu’il avait toujours le dernier mot ! Mais vas-y enfin, réponds-lui ! Voilà ce qu’elle s’était répété pendant toute sa scolarité. Rien à faire, elle était incapable de piquer là où ça faisait mal. Elle aurait mieux fait de travailler sa répartie ces dix dernières années, au lieu de bouffer du chocolat. Ce n’était certainement pas ses deux kilos en trop qui allaient rabattre le caquet à cet abruti.
Il y avait bien quelqu’un avec elle, et un homme qui plus est. Cela ne semblait troubler personne, et pourtant c’était bien vrai, Solène avait un frère. Et pas n’importe quel frère : Eric Costa !
LE mec qui l’avait emmerdée à peu près toute son adolescence ! Il était tellement arrogant et hautain – que tout le monde l’adorait naturellement (les jeunes ont un drôle de rapport à l’humain) – et qu’elle ne pouvait pas faire quoi que ce soit sans qu’il ne persifle !
Juliette n’écoutait plus. Ces discours larmoyants sur sa situation critique et son capital séduction en chute libre, elle les connaissait par cœur. À l’entendre, c’était tout juste si elle n’était pas déjà en pré-ménopause. Et les mariages successifs de ses cousins à peine sortis de l’adolescence n’arrangeaient rien aux angoisses de sa mère. Pas étonnant qu’elle les oublie, ils se fiançaient tous les quinze jours !