Dans ce court ouvrage, mais dense en terme de notions et concepts à assimiler,
Vivien Garcia nous dresse un historique de ce que nous appelons l'Intelligence Artificielle, mais aussi une analyse critique établie par ses concepteurs et des philosophes (l'auteur est lui-même philosophe et spécialiste des questions éthiques et politiques autour des nouvelles technologies).
Ainsi, nous apprenons que l'aventure de l'IA commence dans les années 50 avec la cybernétique, courant scientifique dont le mathématicien
Norbert Wiener est à l'origine. Mais pour lui, "le concept d'IA se développe autour d'une science du spectacle" (le Turc mécanique au XvIII e, le test de Turing).
L'expression Intelligence Artificielle apparaît en pleine guerre froide à l'initiative du mathématicien
John McCarthy, lors de l'atelier fondateur en 1956 à l'université de Darthmouth. Ce colloque influencera tous les travaux suivants sur l'IA.
S'ensuit toute une succession chronologique de descriptions du fonctionnment de ces technologies jusqu'à aujourd'hui, avec de nombreux concepts expliqués, souvent assez ardus pour des non initiés.
On découvre ainsi qu'il existe 3 types d'IA : symbolique (s'appuie sur la logique déductive, le code informatique, c'est l'ordinateur), connexionniste (principe de fonctionnement du cerveau, réseau de neurones connectés, deep learning, c'est la majeur partie des systèmes actuels), et générative (capable de créer du contenu textuel, graphique ou encore sonore, c'est chatgpt d'open ai, dall e., etc..).
L'entraînement des ces IA génératives repose sur des bases de données immenses. Certaines stockent une partie du web depuis 2008 et des bibliothèques d'ouvrages numérisés. Problèmes de droits d'auteur au passage. Ces systèmes sont très complexes, comptent des milliards de paramètres, et exigent d'énormes puissances de calcul et donc de ressources financières et énergétiques, ressources dont disposent les géants de l'industrie informatique.
Les IA, par leurs entraînements, se révèlent susceptibles de refléter différentes valeurs et conduire à des résultats inéquitables pouvant engendrer des discriminations. Ainsi on entend parler d'éthique de l'IA avec des normes, mais les notions mobilisées ne sont pas univoques. Andrew ng, de l'université de Stanford, specialiste du deep learning, réfute cette conclusion. Dans sa conception, ces IA construisent un "modèle du monde". Mais une conception du monde comme modèle rappelle les arguments de Hanna Arendt (politologue et philosophe), autour d'une pensée déconnectée de la réalité. Cependant, d'autres approches voient le jour comme privilégier la qualité des données d'entraînement plutôt que leur quantité ou établir des architectures de neurones plus efficaces pour certaines tâches. Mais l'IA continue d'enflammer les esprits avec les effets d'annonces autour de ses performances, et l'aliénation qu'elles engendrent.
Cet ouvrage est très intéressant et éclairant sur le fonctionnement des IA, quoique souvent complexe. le lexique en fin de volume est plus que nécessaire.
Merci à MassCritique et aux éditions payot-rivages pour l'envoi de ce livre.