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Lire Giono au printemps. Comme beaucoup d'autres avant moi, je prends la bêche, je retourne la terre et je lis du Giono. La terre sur les mains, la terre dans les pages. La solidité du papier et de l'outil réunis. le bruit et la fureur de chaque côté, qui grondent à l'horizon.

"Dessous les casques, on voyait luire les yeux des hommes jusqu'au fond de la troupe. ça semblait des pierres luisantes comme quand on découvre la lanterne devant toute l'assemblée des moutons." (111)

Fureurs du monde qui grondent, éclats qui s'abattent. Pas seulement sur les hommes, qui en sont les vecteurs, mais aussi sur les bêtes, les chemins, les arbres. La grande originalité de ce roman, c'est de nous parler de 14 à ras de terre. Bêtes et bipèdes mêlés dans la même boue, harcelés par les mêmes mouches, trempés par la même pluie. Matières qui se répandent dans un monde constamment vivant, plein de paix ou plein de guerre, toujours frémissant. Quoiqu'il arrive, toujours le vent souffle, toujours les saisons se succèdent, mais la tonalité du vécu humain peut être en plénitude ou en déchirement.

"Si j'étais la lampe, il pense, la lampe, l'arbre, cette table, la truie, je resterais. Si j'étais le chien, je resterais. Si j'étais le chien…" (83)

Les moment, les lieux, les paysages, l'avancée des troupes, les tranchées se mélangent en un brouillard de temps et d'espace. Désorientation, hébétude. Et le désir qui s'agite dans le ventre des femmes, comme une continuité. L'esprit axé sur la conscience de vie, Jean Giono dit tout du chaos, de la souffrance qu'il engendre et de la stabilité des liens avec l'environnement naturel.

"Un ronflement de douleur déborde de Jules, et Joseph est tellement lourd de sa pitié qu'il voudrait la vomir, s'en débarrasser, la vomir là au bord de la route, la laisser et s'en aller, mais plus endurer ce qu'il endure : cette force qui n'est plus qu'une petite eau perdue à lutter contre le mal des autres." (51)

Lien : http://versautrechose.fr/blo..
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Dans ce roman Giono met en évidence la douleur que la guerre apporte dans les campagnes. Malgré le manque d'hommes il faut labourer, moissonner, rentrer les récoltes, s'occuper des bêtes et se battre pour qu'elles ne soient pas réquisitionnées pour partir sur le front nourrir les soldats. Ces immenses efforts sont subis sur un fond d'angoisse permanent: angoisse de la mort du père, du mari ou du frère dans une désorganisation effroyable de la vie quotidienne. le front est loin et pourtant si proche dans cette hantise de la mauvaise nouvelle. Les hommes sur le front livrent une guerre qu'ils ne comprennent pas, face à des soldats allemands qui lors de moments de calme et de rencontre se révèlent être leurs semblables, qui comme eux soupirent après le retour au pays. Dans ce livre se révèle le génie littéraire de Giono qui sans décrire directement des épisodes de la vie dans les tranchées ou des assauts connus arrive à la matérialiser au yeux du lecteur avec une efficacité redoutable.
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Un des textes les plus crus, les plus proches de la réalité que j'ai lu, en tout cas dans les romans.
Son écriture est parfois déstabilisante car il utilise le parler des campagnes dans ses dialogues mais surtout parce qu'il utilise beaucoup l'ellipse et on a parfois du mal à s'y retrouver.
En tout cas, quelle pointure ! Giono se démarque du lot des écrivains qu'on lit habituellement.
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Roman paru en 1931, un des premiers publiés par l'auteur, consécutif à sa participation à la Grande Guerre, qui lui a permis de réaliser les atrocités subies sur le front et de consolider sa stature de pacifiste résolu.

On est en août 1914, village de Valensole, aujourd'hui dans les Alpes de Haute Provence. le roman voit au début le déferlement d'un immense troupeau d'ovins, conduit par Thomas, vieux berger, avec à leur tête un bélier blessé, saignant ; les bêtes paraissent éprouvées, beaucoup sont mortes, abandonnées au long de la route. Les bergers les plus jeunes ont été mobilisés. Thomas confie le bélier au papé pour qu'il le soigne.

Les personnages appartiennent à deux familles : autour du vieux père, Jérôme, Joseph son fils, sa femme Sylvia et sa jeune soeur Madeleine. La deuxième famille comprend le papé, Delphine et leur fils Olivier, fiancé à Madeleine. Les hommes sont des paysans, petits cultivateurs et éleveurs, les femmes remplacent les jeunes quand ils partent au front.
À part, Burle, vieux berger, révolté intégral et isolé, incarne les pensées de l'auteur par son rejet de guerre et son exaltation de la vie, source de bonheur et de plaisir par le travail qu'elle permet. Il n'a pas eu d'enfants et en souffre, même s'il accuse les autres d'envoyer les leurs au combat mortel.

L'auteur alterne les récits des hommes partis au front et de ceux - femmes et vieillards - restés dans les fermes. Joseph et Olivier d'un côté, exposés à tous les dangers du combat, Julia et Madeleine de l'autre, sous le même toit, anxieuses dans l'attente de nouvelles de leurs hommes. La guerre est dans tous les esprits, avec la crainte de la mort et le réconfort à la pensée de l'être aimé.

Au front Joseph, parti le premier, veille sur deux blessés dans l'attente d'un voiture-ambulance qui ne viendra pas. Il réconforte Jules agonisant, lui promettant de lui faire goûter la confiture de noix de sa ferme.
Au village, a lieu une veillée “à corps absent“ en l'honneur d'Arthur, mort au combat, tandis qu'Olivier s'apprête à partir. Il retrouve Joseph, blessé à un bras. Alors qu'en reconnaissance il essuie une pluie d'obus, Olivier participe à une attaque responsable de la mort de deux de ses proches : l'un a été broyé par une bombe, l'autre, Regotaz, l'amoureux des arbres, n'a plus de visage.
À la ferme, la vie se poursuit, dans l'attente d'une lettre, dans l'évocation de leur bonheur passé pour les deux femmes, dans la honte de batifoler pour Julia dont les sens s'enflamment vite et qui ne saura pas attendre le retour de son mari qu'elle trompera avec un déserteur. Elle venait d'apprendre que Joseph avait été amputé de son bras droit. Lui revient à la ferme, retrouve les siens.
Après une permission grâce à laquelle il revoit Madeleine, Olivier retourne au front : une sorte de routine qui favorise les cauchemars lui fait revoir son ami Regotaz qui lui rappelle un passé récent et heureux, tandis que son capitaine se met à parler seul.
Madeleine est enceinte et, après une tentative pour le “faire passer“ avec l'aide de Julia, elle décide de le garder.
Olivier apprend la nouvelle par une lettre de Julia, alors que se déroule la bataille du Mont Kemmel. Extenué, au milieu des balles, des morts, des attaques allemandes, lui et son camarade La Poule finissent par s'enfuir. Dans sa retraite, Olivier combat une truie qui dévorait le cadavre d'un enfant.
Olivier est de retour chez lui. Madeleine mettra au monde un garçon en présence de Thomas le berger : c'est “l'espérance“.

Qu'a voulu signifier Jean Giono avec le titre de son livre « Le grand troupeau » ? le déferlement des ovins, leur descente prématurée des alpages en ce mois d'août 14 ? Ou le départ massif des recrues, jeunes gens envoyés à l'abattoir de la guerre ? Il joue probablement sur l'analogie entre les deux phénomènes, sur une métaphore liant l'homme, chair vivante, qui a perdu sa liberté et son individualité, et l'animal, symbole de la nature, mais tout autant capable de souffrir.

Giono n'en a pas fini avec son exploration d'un côté du Mal, de la destruction, de la guerre, qu'il condamne, de l'autre de la vie à la campagne, âpre, rude, nécessaire. Son style, concis, volontiers elliptique, sa subtilité parfois opaque ou équivoque, sa poésie, sa légèreté dans la description des faits qu'il effleure, même concrets, même macabres, le caractérisent. de même que le parler des paysans, qui cumulent les expressions régionales, orales, simples, familières, avec leur langage réaliste, plein de fautes de français, leurs propos sans but défini, sans prolongement, ronds comme le temps qui se répète, les saisons, la Terre, une certaine fatalité, la vie en quelque sorte.
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Le roman de Jean Giono sur la Première Guerre Mondiale, tout au long de laquelle il est resté mobilisé, participant à toutes les batailles les plus meurtrières et en revenant forcené de pacifisme. Son oeuvre n'en parlera quasiment pas en dehors de cela.

A la différence de la plupart des autres grands romans qui traitent de ce conflit Giono ne se concentre pas uniquement sur le quotidien des soldats mais décrit autant la réalité des souffrances au front que celles des familles restées à l'arrière, femmes, vieux et enfants. Il bascule ainsi continuellement des uns aux autres dans un jeu de miroirs, par des courtes et nombreuses scènes successives qui tissent une histoire du conflit vu des hommes.

Un texte fort dont l'approche peut cependant être rendue assez difficile au départ par le style de langue utilisé, auquel il faut s'acclimater.
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"Le grand troupeau" déçoit. Il commence bien mais s'essouffle très vite. L'idée de base qui est de montrer en parallèle les malheurs des hommes (ou les combattants) et celles des femmes (ou les civiles) pendant la première grande guerre mondiale est excellente mais les personnages sont peu accrocheurs et l'intrigue est trop prévisible.
Les deux premiers chapitres sont de loin les meilleurs. Parce que la majorité des bergers sont pris par l'armée on manque de main-d'oeuvre pour surveiller les moutons dans leurs pâturages. Les vieux qui restent n'ont pas de choix que de mener leur troupeau à l'abattoir. Les pauvres bêtes souffrent de faim et de peur. Elles font pitié quand elles font leur chemin à travers les villages paysans. En temps de guerre, l'homme remplit très mal sa mission de régner "sur tout animal qui se meut sur la terre". le métaphore est bon mais Giono le laisse tomber.
Les personnages ne sont ni lucides ni intéressantes. Les événements avancent lentement. Les soldats ont peur de mourir. Les femmes s'épuisent à faire le travail des hommes sur leurs terres. Une adolescente enceinte pense à s'avorter parce qu'elle a peur que son fiancé va mourir sur le champs de bataille. "Le grand troupeau" est bien intentionné mais très ennuyant. Il reflète très bien son époque mais ce n'est pas de la grande littérature.
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Voila de nombreuses annees que je n'avais pas lu du Giono. Une nouvelle fois, son ecriture vous gagne, berce, transperce. Quelle connerie la guerre mais quelle beaute ce livre ndD!! le livre ne vous lache pas. La poesie est la malgre une histoire dure et crue. Les scenes restent ancrees dans mon crane, c'est un carnage, l'imagerie est riche, les scenes sont comme des tableaux aux multiples couches auxquelles l'auteur nous ramene irremediablement. L'homme victime de l'homme. le passage du troupeau dans le village au tout debut de l'histoire est un grand moment de la litterature francaise.
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4 étoiles pour la qualité de la littérature, des descriptions très organiques. Jean Giono aime les métaphores, les odeurs, le toucher.
Les odeurs sont épaisses et coulent comme des rivières, les mitrailleuses ont des griffes et des crocs qui dévorent les ventres mous.
Il y a quelque chose de très charnel dans ce roman. Les femmes, les ventres charnus ou béants, la terre, les plaies, les moutons, la boue fraîche contre les visages. Caresses ou agressions, le toucher est omniprésent.
On ne voit pas la guerre, on ne voit pas les Cévennes, juste des détails, à la loupe. Cet homme qui halète dans un trou d'obus ; cette femme qui fauche les blés sous le soleil écrasant. La transpiration, glacée ou brûlante, sur leurs fronts.

Comme toujours avec Jean Giono, c'est très beau, très organique (c'est le mot), poignant.

Une étoile en moins pour
- la forme : un détail d'écriture qui m'a laissée perplexe : une variation entre présent et passé de manière aléatoire
- le fond : je n'ai pas très bien compris la fin.

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Livre qui eut un grand succès paru en 1931. Jean Giono a fait la guerre et en est ressorti avec des convictions pacifistes renforcées.
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Un réquisitoire contre la guerre rempli de poésie............
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