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sur 702 notes
Valentine Goby est passionnée de montagne et écrit beaucoup pour la jeunesse. Quand elle décide de faire découvrir à un petit parisien juif l'univers montagnard, cela donne un roman magique!

Magique oui, car l'émerveillement de Vadim, douze ans, est total. Et nous le partageons, tant l'écriture est belle, poétique, enfiévrée comme son excitation. Envoyé par sa mère dans les Alpes, officieusement parce qu'il est asthmatique mais surtout pour le préserver en tant que Juif ( l'histoire se déroule durant la seconde guerre mondiale), cette première fois avec la montagne le marquera à tout jamais, même s'il n'en connaitra que trois saisons, constituant les trois parties du roman. Trois couleurs: blanc, vert, jaune. Hiver, printemps, été. J'ai beaucoup aimé cette correspondance entre les mots et les couleurs, que Vadim établit secrètement. On pense aux couleurs voyelles de Rimbaud...

Au sein de cet univers si particulier , protecteur contre les menaces extérieures, Vadim va connaitre neuf mois initiatiques, qui le feront mûrir, connaitre l'amitié et l'amour, le manque aussi. Les descriptions sont peut-être parfois un peu longues mais on se laisse prendre par l'enthousiasme de Vadim, lors de ses découvertes de la faune, de la flore, et de l'évolution subtile de la montagne, au fil des saisons.

La fin s'avère frustrante mais porteuse d'espoir. Un roman émouvant, qui exalte l'observation minutieuse de la nature et nous plonge avec finesse dans les pensées d'un jeune garçon tombé en amour avec la montagne.Une bien belle escalade!
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En 1942 à Paris, s'appeler Vadim Pavlevitch n'est pas le meilleur des passeports, même si on a que 12 ans. Parce que l'amour est plus fort que l'égoïsme, la mère de Vadim l'envoie " soigner son asthme " à la montagne dans la vallée des ours. Vadim doit disparaître pour que naisse Vincent. Sans préparation, Vadim va donc se retrouver propulsé au pied de l'île haute, dans une nouvelle famille et dans une nouvelle peau. C'est la montagne qui va façonner Vincent,Blanche,Louis,Moinette etc aussi bien sûr. On pourrait presque penser que que c'est simple parce que Valentine Goby parvient à nous faire vivre l'émerveillement de Vincent face à ce nouvel univers,et que ce qui fait mal est en hibernation. Vincent vient au monde en hivers! Et il va vivre quatre saisons et milles premières découvertes avec Moinette et tous ceux qui l'entourent,partager des secrets précieux comme tous ceux de l'enfance,ressentir les premiers émois de l'adolescence. La neige crée un cocon qui protège du monde extérieur et surtout des allemands. Et puis le printemps et l'été arrivent, et l'automne...Les quatre saisons de Valentine Goby n'ont rien à envier à Vivaldi. Les notes ne sont pas apprivoisée mais elles se marient avec les senteurs, les couleurs, elles créent des tableaux naturalistes,impressionnistes et font côtoyer nostalgie et soif de vivre.
La minutie et le realisme des descriptions de l'auteure auraient pu faire de ce roman un texte contemplatif mais l'histoire de Vadim et la justesse des sentiments de l'enfance en font un roman bien plus vaste et touchant. C'est une lecture qui restera en moi très longtemps.
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En fuyant Paris, au motif qu'il est asthmatique, pour se réfugier à Vallorcine, un petit village situé dans la vallée de Chamonix-Mont-Blanc, au bord de la frontière Suisse, Vadim Pavlevitch est devenu Vincent. Pour la première fois, le jeune garçon âgé de douze ans découvre la montagne et ses paysages enneigés, constitués de pics, de monts et de crevasses. La sidération fait rapidement place à l'émerveillement. Aux côtés de Moinette, une gamine du cru âgée de dix ans, Vincent va peu à peu se familiariser avec ce monde nouveau dans lequel il faut s'en cesse trimer si l'on veut survivre, mais qui offre tant de richesses et de beautés que le labeur semble être un juste prix à payer.
Ainsi, dans cette petite vallée des Alpes, Vincent va passer de longs mois coupé du monde, protégé par l'hiver et par une nature qui a repris ses droits. Mais, le printemps arrive et la neige fond, découvrant les accès jusque là obstrués... La vallée s'ouvre progressivement à l'extérieur et Vincent voit dans cette ouverture une menace, comme une invitation lancée aux allemands…

J'avais oublié à quel point Valentine Goby était une magicienne des mots! Pourtant, j'avais déjà été bouleversée par la puissance de son écriture à la lecture de Kinderzimmer il y a quelques années de ça… Ce talent s'exprime avec encore plus de certitude dans “L'île haute”, cette histoire lente, propice à la description et à la contemplation, qui avance au rythme des saisons et du climat. Finalement, on pourrait dire qu'il ne se passe pas grand chose dans cette intrigue qui se résume à l'acclimatation d'un petit parisien à un univers qui lui est totalement inconnu, mais qu'il lui est nécessaire d'apprivoiser car sa survie dépend de sa capacité à se fondre dans ce nouveau décor… le roman est donc extrêmement descriptif et tend à rendre compte d'un quotidien somme toute banal pour les gens du coin, mais qui prend une dimension nouvelle sous le regard neuf et naïf de Vincent.

Pour cela, Valentine Goby, grâce à une langue fouillée et incroyablement évocatrice, parvient à nous offrir une immersion totale dans cet univers montagnard, où la rudesse et l'entraide coexistent en permanence. Comme Vincent, on sent le froid vif et piquant sur la peau, on est grisé par les premières fois en skis, on ressent avec enchantement la densité des reliefs et la palette des couleurs, on s'émerveille d'un premier vêlage… J'ai bien souvent eu l'impression d'être dans la peau de Martin, ce berger aveugle, qui s'il ne voit pas, perçoit tout et n'a pas son pareil pour décrire ce qui l'entoure et pour nommer les choses… Cette magie des mots passe par la richesse de la langue et par le recours au patois. Tout est nommé, sans cesse, et c'est cette acquisition d'un langage nouveau qui va permettre à Vincent de se forger une nouvelle identité.

Mais, malgré ce rythme lent et contemplatif qui pourrait paraître un peu lisse, Valentine Goby parvient à toujours faire planer une tension au-dessus de la vallée… On sent L Histoire en marche se rapprocher de cette bulle jusqu'alors préservée de la violence des hommes et on ne cesse de redouter cette épée de Damoclès qui menace de frapper à tout instant… Un texte d'une grande puissance littéraire et évocatrice, qui peut ne pas plaire à tout le monde en raison de ses nombreuses descriptions mais qui a su m'attacher à ses personnages et m'entraîner, l'espace de quelques heures, dans son univers!
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Le nouveau roman de Valentine GOBY, « l'île haute » est à la hauteur de mes attentes. Ce qui me plaît chez cette autrice, c'est l'art de nous surprendre. C'est toujours différent.

J'ai découvert à travers les yeux de Vadim, Heu ! non, de Vincent, la montagne comme jamais. C'est une explosion de sensations, tout d'abord le froid, la neige, l'humidité, le souffle, l'air pur, les montagnes, et avec quel ravissement ! Vincent tentera de dessiner les paysages qu'il voit ou plutôt, ce qu'il en saisit et pour cela il remontera très loin dans le passé. Martin lui décrira ce qu'il perçoit, lui en tant qu'aveugle. Vincent s'imprégnera des sensations décrites par Martin. Cela se reflétera dans ses dessins qu'il garde précieusement. Ensuite, il passera au printemps, qu'il attend avec impatience, tout en l'imaginant, mais il se fait attendre... Il participera à toutes les tâches qu'on lui confiera, car il y a bien des corvées à accomplir à cette époque, pour vivre et survivre. Il veut être un Vallorcin.

Vincent va s'attacher à la famille qui l'accueille et surtout à Blanche. Et à Moinette et à OIga… Il va connaître ses premiers émois, en même temps que le printemps resplendit.

Il est loin d'oublier qui il est, loin de là. C'est ancré en lui, tapit quelque part, mais Chut... la montagne l'aidera à passer les obstacles et à grandir.

Avant de redevenir Vadim.

« [...] Il n'y a peut-être pas de plus beaux artistes que les enfants qui ont l'imagination comme outil premier pour modeler le réel. Oui, c'est ça, je pense, l'histoire d'un émerveillement. » Valentine Goby

Magistral. Une très belle rentrée littéraire…

Bon, c'est pas tout, j'ai d'autre livres qui m'attendent…
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Un enfant arrive en pleine nuit dans une gare de montagne sous la tempête de neige. Accompagné d'une nonne, il a quitté sa famille parisienne et est pris en charge par un autre homme qui va l'amener jusqu'à un hameau d'une vallée perdue des Alpes après une marche de nuit dans la neige. Quand Vincent / Vadim ouvre les yeux le lendemain matin, rien ne ressemble à ce qu'il a connu et tout un monde reste à découvrir : subjugué par les montagnes qui l'entourent il éprouve l'ivresse des premières fois.

Ce livre est magique : magique la plume de l'auteure qui en quelques phrases nous fait sentir toute la détresse et toute l'étrangeté de cette arrivée en pleine nuit et en pleine montagne, de ces humains qui se relaient pour prendre en charge un jeune garçon qui a soudain dû quitter les siens et changer de prénom. Magique la capacité de Valentine Goby de créer tout un monde en quelques phrases, de nous faire ressentir sans grandiloquence ni effets inutiles à quel point voir pour la première fois les hautes montagnes peut être un choc, à quel point cette nature est belle, et comment toute tentative pour la représenter, par l'écrit, le dessin ou les récits est vouée à l'échec. Magique aussi la manière dont elle nous prend petit à petit dans sa trame et nous fait comprendre implicitement le contexte : la seconde guerre mondiale ne sera évoquée que bien plus loin dans le récit et pourtant dès les premières pages on peut deviner le secret de Vadim et tenter de reconstituer son histoire, ressentant ainsi toute l'étrangeté de la situation et échangeant un instant notre place de lecteur avec celle d'un jeune garçon perdu.

Ce roman n'avait a priori rien pour me plaire et pourtant je l'ai adoré, dévoré, j'en ai savouré chaque page. Je déteste généralement les romans trop contemplatifs, faits de grandes descriptions sans vraie intrigue, j'ai besoin que l'auteure raconte une "vraie" histoire avec une trame à laquelle je puisse m'attacher. Ajoutons que j'ai grandi dans les Alpes et pourtant toujours adoré la mer et l'océan (esprit de contradiction quand tu nous tiens !) et que je suis donc assez peu sensible à la beauté et à la magie de la montagne. Et bien malgré tout ce qui aurait dû me faire reposer ce livre, la magie a opéré et j'ai redécouvert ma région natale à travers les yeux d'un jeune parisien émerveillé par ce qui l'entoure ! Valentine Goby a l'art de rendre le moindre petit événement passionnant, de ferrer son lecteur et l'attacher définitivement aux personnages qu'elle décrit, à ces habitants d'un hameau perdu, où les conditions sont rudes, où l'été toujours trop court oblige à travailler nuit et jour. J'ai tourné les pages avec la même joie que Vincent à l'idée de découvrir ce qui allait maintenant arriver, j'ai éprouvé la même impatience à voir l'hiver céder sa place au printemps, à découvrir les surprises de l'été, les bêtes qu'on mène aux champs, les travaux agricoles. C'est tout un monde perdu qui revit sous nos yeux, fait de petits riens, de tâches qu'il faut mener à bout, d'humains qui tentent de survivre dans un environnement hostile. Et puis bien sûr le roman est allé crescendo avec une dernière partie bouleversante dans laquelle la guerre vue jusqu'ici comme une menace diffuse va soudainement rattraper Vincent et ceux qui l'accueillent. La fin est ouverte, laissant le lecteur espérer malgré tout ce qu'il sait de l'horreur de ces années noires, une très belle manière de conclure ce magnifique roman.

Alors si comme moi vous êtes un peu dubitatif à l'idée de lire un roman qui parle de la nature, un hommage aux montagnes que vous craignez de trouver ennuyeux, n'hésitez plus : L'île haute est beaucoup plus que ça et j'espère que vous vous y régalerez autant que moi. J'avais déjà quelques autres livres de Valentine Goby dans ma PAL mais je vais me dépêcher d'aller voir de plus près ce qu'elle a écrit en espérant dénicher d'autres pépites à la hauteur de ce roman !
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Vadim, un petit parisien de douze ans est envoyé par sa mère dans une famille de paysans vivant au pied du Mont-Blanc.
Pour deux raisons : soigner son asthme et surtout le protéger car on est en 1943 et la famille est juive.
Il devient Vincent.
La découverte de la montagne est un émerveillement.
L'enfant est très attentif aux formes , aux couleurs, aux mots, aux changements.
C'est un contemplatif d'une grande sensibilité.
Il observe tout avec enthousiasme.
Les longs mois d'hiver et de neige.
L'éveil du printemps.
L'es éléments de la nature, fleurs, arbres, animaux, ciel......
La nature rient une grande place dans ce roman.
Tout est parfaitement dépeint.
Encore une fois une belle écriture, encore une fois une belle histoire ;
mais encore une fois l'émotion passe difficilement.
Ça m'arrive fréquemment avec Valentine Goby.
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Vadim apprend des mots issus de la montagne qui l'emprisonne et lui offre une liberté à la fois. Peu à peu, respectant le souhait de parents de plus en plus lointains, il habite une nouvelle identité : Vincent. Et il grandit aussi au contact de son amie Moinette et de Sylvie qui l'a recueilli au sein de sa famille.
L'histoire se laisse happer par des paysages parlant d'eux-mêmes, tout en suivant le processus de survie de Vadim devenu Vincent, comme un enfant qui lâcherait sa chrysalide pour devenir adolescent.

Une belle lecture, tant par l'apprentissage de la montagne et de la vie, que par le témoignage sur le sentiment de danger vécu par les exilés de la seconde guerre mondiale.
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D'emblée subjuguée par la richesse de la plume de Valentine Goby, j'ai lu ce sublime, majestueux roman initiatique en mode lecture lente et contemplative, car impossible pour moi de le quitter trop vite.  Je voulais m'imprégner des mots-flocons qui virevoltaient devant mes yeux, comme la neige qui rythme les longs hivers de Vallorcine. 
Asthmatique sévère depuis la naissance, Vincent, 12 ans, rejoint Vallorcine, un village haut perché sur un replat des Alpes, isolé six mois par an, coupé du reste du monde par de longs et rudes hivers, des mètres de neige recouvrant et engloutissant presque tout. 
C'est avec des yeux émerveillés que ce courageux petit d'homme parisien s'éloigne de sa famille pour être confié au bon air de la montagne.  Il est accueilli comme un fils au sein d'une famille qui va lui apprendre la rude et malgré tout belle vie des montagnards.   
Omniprésente la montagne, au rythme des saisons ; 
Omniprésente la montagne, son infinie variété de paysages ; 
Omniprésente la montagne, ses milliers de couleurs chatoyantes ; 
Omniprésente la montagne, son âpreté, sa générosité ; 
Omniprésente la montagne, sa faune, sa flore ; 
Omniprésente la montagne liquide, la montagne rocheuse ; 
Omniprésente la montagne silencieuse ou bruissante des chants d'oiseaux, des cris d'animaux, des eaux qui cascadent, du vent qui tournoie ; 
Omniprésente la montagne, ses habitants travailleurs, généreux et solidaires ; 
Omniprésente la montagne, ses odeurs de terre, de pins, de bruyères, de bêtes ; 
Omniprésente la montagne, son doux soleil, son froid de glace, son blizzard piquant, son brouillard aveuglant. 
Les mots aux infinies nuances de Valentine Goby sont les yeux de Vincent admirant les paysages fluctuant au gré des saisons, évoluant et grandissant dans cette somptueuse nature.  Sa poésie et sa richesse m'ont envoûtée et transportée sur cette île haute. 
Si vous aimez les romans-paysages, cette lecture vous comblera. Elle est aussi peuplée d'enfants, de femmes et d'hommes attachants.
Ce livre rejoint désormais ceux que je relirai sans l'ombre d'un doute.
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Quand Vadim/Vincent découvre au matin le paysage qui se déploie devant lui, il n'en croie pas ses yeux .. Les yeux écarquillés, il est fasciné et ébloui. C'est l'hiver , c'est la première saison qu'il va passer à Vallorcine. Qu'il lui semble loin le parc des Batignolles !! D'émerveillement en émerveillement Vincent, puisque c'est ainsi qu'il s'appelle à présent , va aller de découverte en découverte, d'apprentissage en apprentissage sous la férule attentive de Moinette, une gamine de dix ans pense t'il du haut de ses douze ans.
Et puis nous voilà à sa suite découvrant le dur labeur quotidien pour survivre dans le froid, l'isolement et le réconfort d'un sourire . Les jours passent , le printemps se fait attendre mais quand il est là qu'il est beau . Vient enfin l'été la saison jaune où chacun sait quoi faire, comment le faire. du matin au soir chacun s'active . Et Vincent enregistre, note les sons les couleurs et admire toujours et encore sa Montagne, les Aiguilles rouges, son île Haute ..
Voilà je referme ce roman émerveillée. Valentine Goby nous raconte Vadim/Vincent et nous l'écoutons. Les pages se savourent, les mots deviennent sons, les sons des couleurs . j'ai pris mon temps , tout mon temps pour savourer ma lecture.
Vincent /Vadim , Vadim/Vincent : la vie a fait que Vadim est allé se refaire une santé à la Montagne pour soigner son asthme, Vadim a laissé Vincent passer devant lui , découvrir le monde, apprendre , aimer à nouveau . le gamin est devenu adolescent et Vincent a du céder la place à Vadim pour continuer sa route. Il ne connaitra pas l'automne à Vallorcine
Nous sommes en août 1943 .
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Blanc, vert, jaune, ce ne sont pas les couleurs d'un drapeau, ni celles d'une équipe de football, mais les titres des trois grands chapitres du roman de Valentine Goby.

C'est dans un décor impressionnant, «  un squelette de paysage », que l'enfant de 12 ans débarque à Chamonix pour rejoindre sa famille d'accueil ( en 1943). Mais après les heures de train, il faut encore traverser un tunnel à pied ( pour dépasser l'avalanche). «  le noir les aspire », « une frange de stalactites » les dominent.

Dépaysement total , fascination devant la Montagne, Les Aiguilles rouges, un décor imposant qu'il ne cesse de contempler. Valentine Goby le décrit avec un tel brio, que le lecteur est à son tour hypnotisé par cette immensité de blanc. Blanc d'où se détachent les boules rouges du sorbier : «  fruits d'églantiers comme des bonbons givrés, drupes du sorbier des oiseleurs surmontés de hauts chignons de neige… ».

On s'étonne au début du changement de nom du garçon: Vadim doit se glisser dans la peau de Vincent Dorselles, au point qu'il répète son nom d'adoption. Mais ne dévoilons rien. Observons son adaptation chez ces inconnus qui l'accueillent, un couple de fermiers bienveillant. ( Blanche et Albert).
On suit le parcours initiatique au fil des saisons , les multiples surprises de ce jeune garçon asthmatique. Il nous émeut à associer Chamonix avec les gâteaux éponymes.
Tout est nouveau pour lui : depuis la brique pour chauffer le lit, les animaux de la ferme, jusqu'au cabanon en guise de WC.

On devine son attachement à sa famille par son rituel du soir : embrasser le médaillon qui contient les portraits de ses parents et de son frère.

Une fillette de 10 ans, Moinette, se charge de l'initier aux gestes essentiels du quotidien, aux tâches à effectuer dans la ferme. Il l'imite. Il apprend à sevrer un veau. Il se laisse apprivoiser, lui,«  le garçon-vampire », l'urbain, le « monchu ». Il s'approprie un nouveau vocabulaire : « malotte »,  «  cousse », «  vrêt », «  pèle », « veillon »… Son champ lexical se trouve enrichi, tout comme celui du lecteur !

Moinette est sous le charme de sa voix mélodieuse. Elle abuse de son innocence, lui ferait gober n'importe quoi ! Par contre il trouve délicieuse, l'endive, qu'elle lui fait goûter, tout étonné de constater que l'on puisse faire pousser «  ces petits obus blancs aux pointes jaunes jaune pâle » dans une cave ! de même il se régale de la fricassée croustillante de cuisses de grenouilles, pourtant réticent à accompagner Moinette dans cette « mission nourricière ». Louis, le papy, lui fait découvrir le gaillet, aux goûts de citron… A ses côtés, il laboure, étale le fumier.

On assiste à son éveil à la sensualité… née de son contact avec Blanche quand elle le maintient contre elle lors de son apprentissage à skier. Comme il est troublé d'avoir aussi entrevu son corps dénudé. !
Moinette a conçu un refuge à l'écart sur l'île haute juste pour elle et Vincent, mais ce dernier est plus aimanté par une autre jeune fille, Olga.
Les corps masculins ne le laissent pas indifférent, quand ceux-ci se dénudent à la belle saison, lors des travaux des champs.


A l'école, son maître est son allié, il l'initie à la pratique du ski. Quand l'instituteur présente Vincent, originaire de Paris, cela lui permet de parler de la capitale et de sonder les élèves sur leurs connaissances. Paris « est une autre planète » pour Moinette !
La première lettre de sa mère fait le lien avec la capitale, «  les phrases nouent des guirlandes molles autour des épaules du garçon », toutefois il n'est pas pressé de répondre à la lettre de sa maman malgré l'incitation pressante de Blanche .
Quand il convoque le souvenir de la figure maternelle, elle devient un prénom, Sophie, comme si une distance s'était installée entre eux.
De plus, «  Paris, c'est Vadim, quelque fois un regard en arrière peut te changer en pierre ». Il convoquera de nouveau Paris pour répondre aux questions d'Olga et endosse alors le rôle de «  Prince Vincent Dorselles des Batignolles » !


Sa rencontre avec l'aveugle Martin est une autre source d'enseignement. On sait combien les sens d'un mal voyant sont exacerbés. Vincent découvre l'écriture braille que Martin a apprise dans un institut pour aveugles. Il s'attache à son chien Whisky, joue avec lui, se couche même contre son flanc.
Avide de savoir, il lui réclame des listes de mots dont il se gargarise : pour la forêt, pour la montagne, pour la vallée, pour ce qu'il y a sous la neige.
Toutefois, il sera confronté à une expression énigmatique : « le col est ouvert », avant d'apprendre que Blanche a été emmenée en luge à l'hôpital pour y accoucher.


Dans le premier chapitre Blanc, le froid nous transperce mais l'écrivaine réussit , par sa plume poétique, à transmettre au lecteur l'émerveillement de Vincent devant la beauté de la nature. On imagine «  les pampilles de glace qui frangent les bords des fenêtres ».

Le printemps arrivant moins vite , la neige résiste, Vincent convoque les couleurs de cette saison à Paris. Il continue à enquiller « les premières fois ». Pour Vadim, c'est le vert tendre, les jonquilles au pied des platanes ou sa première taupe ...
La nature, il a appris à l'appréhender par la peau, comme un aveugle. Egalement par les narines ( odeurs des conifères, de soupe, de gâteau de pommes de terre et de poires...), les oreilles ( cliquetis d'insectes, pépiements d'oiseaux, borborygmes du torrent, le son des clarines…) et par les papilles ( amertume du pissenlit).
Vincent connaît ses premiers émois amoureux avec les baisers d'Olga, dont «  la langue avait un goût de chanterelles » ! C'est alors qu'une « faim neuve lui a foré l'abdomen ». le voilà confronté à la jalousie de Moinette . Va-t-il réussir à se rabibocher avec celle qu'il a snobée ?


Vincent se retrouve entre hommes depuis l'hospitalisation de Blanche, son inquiétude va crescendo, ponctuée par une litanie de «  Elle n'est pas rentrée quand...».
Le mystère de son absence s'épaissit. le bébé existe-t-il ? Il voudrait que la nature reverdissante , que les champs saturés de fleurs attendent le retour de Blanche.

Très vite, le jaune accapare le paysage. «  On sent monter l'odeur de cire qui annonce les journées chaudes ». Vincent découvre avec stupeur le phénomène des « gazés », ce que le maître nomme «  nymphose ». Les anciens y voient un châtiment du ciel, ce que l'instituteur réfute.
Les nouvelles de sa mère, Sophie Pavlevitch, se font rares. Il se sent orphelin, quand le maître leur fait fabriquer un objet pour la fête des mères. Et il se sent toujours un étranger.

Lorsqu'il accompagne l'abbé Payot, ils tutoient la frontière suisse. Vincent prend conscience du mot, remarquant une ligne de barbelés. La franchira-t-il ?

Grâce aux bribes distillées avec parcimonie, ( pour contexte, la disparition de familles Juives) , on reconstitue les informations sur celle de Vadim. Dans l'almanach de 1942, qu'il consulte avant de dormir , sont consignés les multiples travaux effectués. En marge du calendrier, on note une référence à la rafle du Vél d'Hiv du 18 juillet.



Valentine Goby signe un roman multi sensoriel, traversé d'une explosion de couleurs, plein d'empathie pour son héros qui doit s'adapter à sa nouvelle identité et apprivoiser les paysages de Haute Savoie. On retrouve les constantes de l'écrivaine : le corps, le handicap, la solidarité. Son écriture cinématographique incarne les mouvements des protagonistes ( travelling, plongée, contre-plongée…).
Sa plume poétique, ses comparaisons « gourmandes » tissent des paysages dignes de grands peintres comme «  Friedrich ». Paysages d'une beauté époustouflante.


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