J'avais découvert
Valentine Goby grâce à la médiathèque de Conflans Sainte Honorine. Eh oui, on en fait des rencontres dans les médiathèques !!! Vous excuserez cette page de pub bien méritée.
J'avais adoré
Kinderzimmer absolument terrible et bouleversant.
Alors après les camps, je me suis embarquée confiante dans ce paquebot.
Il est encore question de la liberté et ses frontières. Là c'est la maladie qui entrave la liberté, démantèle une famille, ruine les espoirs et les économies.
Odile et Paulot sont doués pour le bonheur, mais pas très organisés au niveau trésorerie. Ils dépensent pour faire vivre leur famille, dépanner, faire plaisir, amuser. Ils pensent avoir le monde en ami. Leur village en famille.
Ils sont le centre du village avec le bistrot. Ils sont la joie, les soucis qui s'allègent, les mains qui tendent, les pieds qui dansent.
Demain, on verra bien. Mais demain n'est pas rose. Quand la tuberculose s'en mêle, la ronde enchantée qu'ils avaient fait danser autour d'eux se délite. Les temps difficiles et la peur du bacille écument de manière drastique les amis, tari les économies. La famille abandonne le centre de la scène et se met en retrait, cherche de nouvelles manières de subsister. Car en ces 30 glorieuses, pas de cotisation sociale. Les soins coutent cher. le sana dure longtemps, et les proches des tubards sont presque aussi pestiférés que les tubards eux-mêmes.
Il parait pourtant tellement loin le moment où la tuberculose faisait tant de morts. C'était avant le vaccin...Je vous épargne le débat qui secoue les foules en pleine épidémie Covid sur vaccin ou pas vaccin...mais ce roman donne à réfléchir...
Je ferme la parenthèse.
Au milieu de cet effondrement, Mathilde passe l'adolescence. Tour à tour forte et faible. Parfois dans un dénuement et une solitude extrêmes. Avec pour seul moteur : l'amour de ses parents. Un amour absolu, qui est sa liberté mais aussi sa croix. C'est une expérience terrible, une responsabilité écrasante quand si jeune on devient les parents de ses parents. Une grande fierté d'être adulte, mais une grande douleur de ne pas avoir la légèreté d'une vie normale.
Le process rigide et inhumain de l'assistance publique, l'indifférence des proches est aussi pointé du doigt. Ces proches qui s'éloignent de Mathilde et ses parents, comme si le malheur était contagieux, et qui reviendront ensuite, quand la crise sera passée en disant avec un sourire mielleux et compatissant "oh mais on ne savait pas que tu aurais eu besoin d'aide !"
C'est un beau livre.
Petit bémol : il est aussi traité en sujet annexe, de l'Algérie et la France à la période la plus noire de leurs relations. C'est intéressant sur le fond, mais je n'ai pas trouvé d'intérêt à l'ajout de ce thème. Sauf peut-être pour donner de la perspective à la vie de l'héroïne. Mais cela ne m'a pas convaincue.
Alors, faut-il le lire ? Oui. Pour la belle écriture fluide de
Valentine Goby et aussi pour ne pas oublier d'être proche de nos proches dans les coups durs.