« Mon père est mort parce qu'il buvait trop. Six ans auparavant, ma mère était morte parce qu'elle buvait trop. Il fut un temps où moi-même je buvais trop. Les chiens ne font pas des chats ». Ainsi commence
Féroces, récit autobiographique dans lequel
Robert Goolrick nous livre son enfance, ses secrets de famille, son mal-être.
Il nous raconte surtout ses parents, à propos desquels un de leurs amis a écrit un jour : « Quand j'ai rencontré ces gens, j'ai d'abord trouvé qu'ils étaient beaux et brillants, et leur maison, magique. Puis j'ai commencé à les trouver ordinaires puis, pour finir, pitoyables ».
Entre diners mondains et cocktails, M. et Mme
Goolrick donnent en effet l'image d'un couple idéal : « Tout était question de perfection. Mon père et ma mère présentaient une image parfaite, celle d'un jeune couple heureux, spirituel et charmant, éperdument amoureux, et qui ne faisait rien d'autres que s'amuser ». En privé pourtant, tout se fissure : M.
Goolrick n'a jamais rien accompli et noie sa déception dans l'alcool ; Mme
Goolrick est froide, souvent cruelle et s'ennuie à mourir dans son rôle de mère au foyer.
"Il m'est presque impossible d'exprimer combien je les haïssais" explique
Goolrick, qui passera pourtant sa vie à chercher leur approbation et leur amour sans jamais les obtenir, jusqu'à se haïr lui-même.
Ecrite en deux mois dans un but de catharsis, cette autobiographie est magnifique et déchirante. C'est difficile, sans l'avoir lu, de mesurer à quel point
Robert Goolrick, par son style d'une beauté incroyable, sa justesse de ton, une structure remarquable et comme sortie tout droit de ses tripes, parvient à nous raconter la destruction d'un enfant par ses propres parents. Sans pathos ni gratuité, Robert signe là un roman magistral, à lire absolument.
« (…) J'ai passé ma vie entière, à en parcourir, des kilomètres à pied, à chercher une chose ou une autre, LA chose qui ferait la différence entre ce que j'étais et ce que je voulais être. (…) Quelque chose qui viendrait apaiser la terrible beauté et l'inconsolable tristesse de la vie.
Je ne l'ai jamais trouvé. Je ne cesserai jamais de le chercher ».