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Le peintre d'éventail" est un roman d'initiation qui fleure bon le Japon, à tel point que la ligne d'écriture finit par se confondre avec ce pays.
Construit avec des chapitres ciselés, la première partie s'attache à suivre le parcours de Matabei, de son arrivée dans la pension de Dame Hison à son initiation et à sa découverte de l'art de peindre les éventails : "Peindre un éventail, n'était-ce pas ramener sagement l'art à du vent ?", de son apprentissage discret auprès de maître Osaki qui lui permettra de se pardonner ce passé qu'il fuyait : "Matabei savait maintenant que les vrais maîtres vivent et meurent ignorés et qu'on ne pouvait espérer plus belle équité en ce monde.".
Cette première partie est essentiellement contemplative mais très belle, elle regorge de détails sur la Nature et l'Etre humain, à travers les personnages qui peuplent la pension de Dame Hison et viennent y trouver refuge, un havre de paix ou une cachette pour des amours sans doute interdits.
Mais il y a également beaucoup de poésie dans ce récit à travers les quelques haïkus qui ponctuent le récit ainsi que par l'Art déployé à travers les éventails ou encore le jardin, à l'image que chacun peut se faire du jardin à la japonaise.
La deuxième partie, quant à elle, est un déchaînement de la Nature, une rupture de l'équilibre et de cette impression de Paradis qui se dégageait de la première.
Le lecteur est projeté au coeur d'événements qui ne sont pas sans rappeler ceux vécus récemment par ce pays.
Mais ce récit laisse planer le doute sur son intemporalité, tout comme le lecteur s'interroge par moment si le pays dont il est question n'est pas imaginaire, et c'est justement ce qui en fait sa force et sa beauté.
D'autant plus que ce n'est pas Matabei qui se raconte directement, mais c'est par la voix de Xu Hi-Han, ancien marmiton de la pension de Dame Hison devenu depuis un savant lettré, que ce formidable personnage est présenté au lecteur : "Matabei n'avait rien d'un homme ordinaire, de ceux qui vous jugent et se regorgent; il donnait l'impression de se défendre d'une profonde distraction, comme un funambule en plein vertige à qui on demanderait l'heure exacte.".
Au final, il reste que loin d'être le jardin du Zen, la pension de Dame Hison et son jardin ont plutôt été le cadre de déchirements et de passions, un tsunami d'émotions humaines lui-même balayé par la force destructrice et ravageuse de la Nature.
Ainsi va la Vie.
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Le peintre d'éventail" de
Hubert Haddad est une puissante évocation du Japon qui subjugue par sa beauté sublime et sa maîtrise, une lecture et un auteur qui ne peuvent laisser indifférents ainsi qu'une vision exaltante du Japon.
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