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sur 800 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Knut Hamsun a su se doter sans le vouloir d'un publicitaire hors-norme en la personne d'André Gide. Ce dernier, pas mauvais déjà pour nous faire percevoir les méandres tortueux de l'âme humaine, écrit pourtant qu'il ne connait pas plus doué que Knut Hamsun pour s'offrir une petite promenade au fond des psychismes malmenés :


« Ah ! combien toute notre littérature paraît, auprès d'un tel livre, raisonnable. Quels gouffres nous environnent de toutes parts, dont nous commençons seulement à entrevoir les profondeurs ! Notre culture méditerranéenne a dressé dans notre esprit des garde-fous, dont nous avons le plus grand mal à secouer enfin les barrières ; et c'est là ce qui permettait à La Bruyère d'écrire, il y a déjà deux siècles de cela : « Tout est dit ». Tandis que devant La Faim on est presque en droit de penser que, jusqu'à présent, presque rien n'est dit, au contraire, et que l'Homme reste à découvrir. »


Mais le temps a passé et La faim ne semble plus si chamboulante qu'elle avait pu le paraître pour Gide, Breton ou Mirbeau, qui en étaient de fervents admirateurs. D'ailleurs, dans le domaine du renouvellement littéraire, ceux-ci oeuvrèrent également de manière décisive et ouvrirent peut-être la voie à une lignée d'écrivains qui se chargèrent de contredire La Bruyère en nous faisant comprendre que tout n'a pas encore été dit –en tout cas pas dans toutes les formes décemment imaginables.


L'histoire de la faim s'apparente à la quantité des substances ingérées par son narrateur et se résume à peau de chagrin : journaliste sans poste fixe, l'argent ne suffit plus à subvenir à ses besoins et plutôt que d'accepter un poste qui ne convient ni à ses ambitions, ni à ses compétences, et plutôt que de recourir à une mendicité jugée humiliante, le narrateur préfère errer toute la journée dans les rues d'Oslo, gaspillant ainsi ses dernières forces dans l'espoir de faire surgir dans son esprit le papier qui lui rapportera enfin de l'argent et –qui sait ?- de la reconnaissance.


Qui a déjà essayé de vadrouiller au hasard des rues en se proposant de fixer son attention sur un seul sujet de réflexion sait combien il est difficile de ne pas se laisser perturber par les distractions extérieures et par la volatilité de sa concentration. Notre journaliste n'échappe pas à ce papillonnage et c'est à la lecture de ces pensées éparses que nous convie Knut Hamsun. Virginia Woolf popularisera ce type de narration un peu plus tard avec Mrs. Dalloway, ne parvenant toutefois pas à introduire cet élément perturbateur qui fera toute l'étrangeté du récit de Knut Hamsun : la faim.


La faim est représentée sous la forme d' « un essaim de petites bêtes malfaisantes [qui] avaient pénétré dans mon être intime et l'avaient évidé ». Oui mais jusqu'à quel point ? Au moment où le journaliste nous confie cette impression, sa personnalité –quoique déjà un peu bancale- reste encore stable et certaine. Au fil du temps, la fatigue, la famine et la solitude aidant, une déchéance de plus en plus profonde s'installera. Corps et âme ne sont pas séparés et la misère s'inscrit à plusieurs niveaux, dans la moindre résistance de la capacité physique et dans l'impossibilité de plus en plus tenace à mener une réflexion cohérente jusqu'au bout. Cercle vicieux d'abord motivé par la fierté qui empêchera finalement le journaliste d'accéder à toutes ses ambitions littéraires.


La description de l'état de famine est plus clinique que psychologique. le ton auquel recourt Knut Hamsun est simple et clair. Il nous donne l'impression d'une observation médicale et pourtant, pas une page ne se passe sans que le journaliste ne nous fasse parvenir un listage précis des sentiments et des pensées qui le traversent. Même au faîte de la famine, le journaliste ne nous semblera finalement pas si dérangé qu'il essaie bien de nous le faire croire. Ce caractère continuellement raisonné du discours, bien que permettant une lecture fluide et jamais désagréable, constitue cependant la caractéristique qui ne nous permet pas de suivre André Gide jusqu'au bout de son engouement. Non, Knut Hamsun n'est pas allé se promener jusqu'aux abysses de la psyché humaine : il nous a permis d'en mesurer la profondeur et d'en apercevoir la noirceur, mais au moment de plonger, il s'agrippe aux rebords de la raison. Son discours n'est qu'un écho des dangers auxquels a échappé son personnage. Il en reste, cependant, une velléité d'écriture certainement rare pour un roman publié en 1890.
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Knut Hamsun ( Pedersen dans le roman ) parle des affres de la faim, de sa souffrance, de sa pauvreté et de la déchéance qui le menace !
Il y a deux aspects importants dans ce soliloque :
***la part clinique liée au jeûne : les crampes, les nausées la nervosité, les étourdissements, les vomissements après l'ingestion d'eau, de salive ou d'aliments et les troubles intellectuels, physiques, psychologiques .
Il est obligé de manger des copeaux, la viande d'un os donné par le boucher pour un chien !
*** l'aspect pathologique : car Kurt est orgueilleux, fier , ne supporte pas son état de pauvreté et, quand il a quelques couronnes : il les donne aux autres, il est heureux d'écrire des articles pour un journal mais il passe sans cesse de l'exaltation au doute, de la joie ou aux larmes ! Il questionne Dieu avant ou après ses actes pour savoir s'ils sont dignes ou pas. Il refuse la charité en inventant des mensonges, refuse l'amour d'une demoiselle réelle ou imaginaire ?
On peut se demander s'il avait des prédispositions à la " folie" ou, si c'est sa lutte contre la faim qui a altéré ses facultés mentales et, si c'est cette introspection permanente qui a alimenté son autodestruction !
Comme le dit André Gide en préface : on a des larmes plein les doigts, plein le coeur..
Kurt Hamsun est considéré comme le "Dostoïevsky " norvégien, et a obtenu le prix Nobel de littérature en 1920...
L.C thématique d'octobre 2021 : Cap au Nord.
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J'avais noté une référence : « Victoria » de Knut Hamsun, comme il était absent des rayons de la bibliothèque, j'ai emprunté « La faim » du même auteur.
Dans un premier temps, j'ai ressenti de l'enthousiasme à découvrir cette plume qui excelle à rendre compte des états d'âme d'un homme en perte de repères, sans abri et la faim au ventre.
Ensuite, j'ai ressenti une certaine lassitude, l'impression de tourner en rond, tout comme le personnage.
J'ai quand même continué ma lecture.
Après ce passage à vide, j'ai de nouveau éprouvé de la curiosité : « Comment cela va-t-il se terminer ? » et suis finalement arrivée assez vite au terme de cette lecture.
Une très belle plume, un ton particulier, un brin de Kafka ; je pense renouveler l'expérience.
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Cela m'a beaucoup rappelé les premiers romans de Gogol et Dostoïevski : un personnage principal errant sans fin dans la ville, des monologues fébriles et toutes sortes de délires. Dans ce cas, Hamsun a choisi de se concentrer sur la faim permanente de son "homme-sans-nom", un écrivain sans le sou qui tente de survivre au jour le jour et qui est extrêmement inventif en matière d'argent et de nourriture. Je n'appellerais pas cela vraiment naturaliste (la fin laisse ouverte la possibilité du salut), mais vous ne devenez pas joyeux par la faim rongeante du personnage principal. J'ai l'impression que Hamsun a également pris en compte une lecture symbolique : la soif de l'homme pour la reconnaissance et plus encore. Et cela, bien sûr, le rapproche encore plus de Dostoïevski.
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Publié en 1890, La faim est un court roman dans lequel le narrateur erre dans Oslo, la faim au ventre - sensation universelle -, preuve de sa pauvreté et de son inconstance. Jeune journaliste, le narrateur vit chichement et est régulièrement assailli par la faim, laquelle entraine des divagations d'ordre intellectuel qui peuvent se révéler utiles pour son métier. Mais peu à peu, le narrateur glisser dans une folie dont la faim n'est que la cause la plus immédiate, mais qui est causée véritablement par un mal-être social profond.
Le roman, semi-autobiographique, plonge ainsi au plus profond de l'âme humaine.
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On sait tous pourquoi on ouvre ce roman : ça parle de la famine. Et pour vous surprendre : j'ai trouvé que la sensation de Faim n'était pas au premier plan du livre.

En lisant les passages ou Hamsun parle concrètement de la Faim : il ne fait aucun doute qu'elle a fait partie de ses tourments à une époque de sa vie.
Cependant, soit parce que je manque d'empathie, soit parce que le livre manque de descriptions, je n'ai pas ressenti la sensation de privation, du vide et de flottements d'un jeûne forcé.

Je m'explique. Il y a bien quelques passages où le récit est ponctué de gargouillements, où les boyaux du protagoniste se tordent ; mais, ça n'en fait pas l'essentiel du livre.
Je trouve que le récit s'articule, plus particulièrement, autour de la sensation d'urgence. D'ailleurs, toute l'histoire part dans ce sens ; on ne reprend pas son souffle avant la fin des 160 pages.

Quand je lis ce genre de livre, je m'attends à ressentir certaines sensations. Des auteurs, par l'écriture, me provoquent soit : du dégoût, de la peur, de l'envie… et “La faim” rien. Je crois que je m'attendais à un livre plus sensoriel.
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J'ai lu ce livre il y a longtemps en redoutant une lecture difficile. La déchéance et la souffrance de cet écrivain qui erre dans son histoire et dans sa livre et qui a très prosaïquement faim jusqu'à la fin... impressionnant et merveilleuses écriture et traduction
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Ce roman très particulier laisse comme un goût amer en bouche après lecture, mais également la certitude qu'il ne se laissera pas oublier de sitôt. Un roman étrange qui n'a aucune intrigue précise, puisque son unique sujet en est la faim qui torture jour après jour le malheureux héros de cette histoire, écrivain qui tente de survivre grâce aux quelques malheureuses piges que le rédacteur en chef du journal local veut bien accepter.

L'argent qu'il reçoit alors lui permet de se nourrir et de se loger, mais cela ne dure jamais bien longtemps et l'errance et la disette forment à nouveau son quotidien. Alors la faim le dévore, ainsi que les troubles physiques et intellectuels qu'elle provoque. Cette faim qui l'affaiblit petit à petit, mais qui ne semble jamais porter atteinte à sa fierté et à son honnêteté, qui demeurent intactes malgré toutes les diversités. Une fierté teintée d'orgueil, qui le pousse parfois à refuser l'aumône qui pourrait le sauver. Une honnêteté qui l'oblige à donner le peu d'argent dont il dispose, parce que cet argent lui semble mal acquis.

(...)
Lien : http://tassedethe.unblog.fr
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Ce n'est pas un roman ( autobiographie ? ) facile à lire, ce long monologue !
Le cerveau de cet homme, dans lequel je suis, par la force des mots, me semble dérangé.
Il n'a pas un comportement rationnel, il est caractériel, se met en colère sans raison, regrette, bref, il est difficile à suivre.
Est-il comme ça de naissance, ou est-ce la Faim qui l'a rendu comme ça ?
En tout cas, quand je dirai : « J'ai faim », je saurai dorénavant que cela n'a rien à voir avec la vraie faim, celle où le corps, manquant de tout, lâche tous les organes, même l'estomac.
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Ce récit a eu une influence considérable sur des écrivains comme Gide, Céline, John Fante. Il s'agit d'un récit autobiographique situé dans les années 1890 et qui décrit les errements d'un jeune homme dans la ville de Cristina (Oslo) où il souffre de la faim. Il tente de survivre, trouve de temps en temps à placer quelques articles. Il souffre de la faim et de ses conséquences physiques et psychiques (hallucinations). Il passe de l'euphorie à l'abattement total, de la dépression, des pleurs au rire et à l'enthousiasme.
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