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sur 229 notes
Bienvenue chez les ploucs. Dès les premières lignes, Jake Hinkson annonce la couleur. « N'allez pas dans l'Arkansas, me dit le propriétaire du cinéma à Kansas City. »
Les histoires sans lendemain, au mieux vous laissent de bons souvenirs ou, dans le pire des cas, hypothèquent sérieusement votre avenir et Billie Dixon ne va pas tarder à en faire l'expérience.
Texane venue tenter sa chance à Hollywood, elle aurait voulu faire une belle carrière de scénariste. Hélas, pour gagner sa vie elle fourgue des films de série B dans des cinémas paumés des Ozarks pour une boite de production miteuse. Eté 47, elle arrive au volant de sa vieille Mercury à Stock's Settlement et se rend très vite compte que si elle veut vendre quelques films, il va falloir composer avec le pasteur local, Obadiah Henshaw, un vétéran héros de guerre touché par la Grâce divine. Malheureusement pour les affaires de Billie le pasteur, qui voit Satan partout, ne souhaite aucune projection dans sa paroisse. Billie pourrait repartir avec ses films sous le bras, mais voilà, frère Obadiah est marié avec la belle Amberly, et cette dernière lui a tapé dans l'oeil. La vie de Billie Dixon vient de basculer.

En quelques pages, l'intrigue est posée. Le lecteur se frotte les mains devant ce qui s'annonce comme un hommage aux classiques du roman noir, à tous ces polars qui ont planté au milieu de nulle part un voyageur attirant, différent, sans attache, qui fait tache dans le patelin, tombe amoureux de la belle fille du coin mal mariée avec un type qui lui barre la route du bonheur. Sans lendemain est un bel hommage aux romans de James M. Cain. Dans les Ozarks - terre du néo-noir maintes fois arpentée par Woodrell- pour Billie Dixon, le facteur va sonner deux fois.

Le romancier Jake Hinkson a eu la bonne idée de redistribuer les rôles de ce trio fatal et de faire de Franck Chambers une femme libre qui porte pantalons et cheveux courts, et qui se fiche du regard des autres. Effrontée, cynique, intelligente et pleine d'humour, elle est déjà singulière à Hollywood: « Moins d'une semaine après mon arrivée à Los Angeles, j'avais rencontré une ouvrière aux cheveux courts qui m'avait emmenée au Well Well Club dans LaBrea. C'était un monde dont je n'avais jamais osé rêver. Des filles en jean et chemise à carreaux en train de danser avec des dames en jupe et chaussures à talons. Ce fut une période bénie pour moi. Je m'habillais comme Marlène Dietrich et couchais avec des secrétaires et des épouses de militaires. C'était amusant , mais cela ne durait jamais. Echapper aux descentes de police était assez pénible (…). »
Alors forcément dans l'Arkansas, elle ne va pas passer inaperçue et les pèquenauds ont toujours une sainte horreur de la différence. Amberly quant à elle est une Cora inoffensive et un peu nouille (pour rester polie), quant à Obadiah Henshaw , il campe un Nick Papadakis allumé de la Bible et complètement ravagé.

J'ai adoré Sans lendemain. Enfin un Gallmeister qui a pour héroïne une femme qui pourrait sortir d'un roman de Marc Behm, une Lucy de Et ne cherche pas à savoir, une Cora de La vierge de glace, une Edmonde de La reine de la nuit, une femme née trop tôt pour être heureuse, une effrontée marrante et lucide, sur elle, sur l'amour, sur Hollywood: « Dans cette ville, le moindre employé jusqu'au plus petit , le moindre figurant se voit comme un tombeur parce qu'il peut s'offrir sa part de chatte d'actrice en herbe. Les rêves vont mourir sur le canapé des castings, mais que peuvent-elles faire, ces filles, à part se mettre à genoux ou rentrer dans l'Arkansas? Pas une seule jolie fille ne s'est jamais pointée à Hollywood en priant pour finir avec la queue de Bob Hope dans la bouche, mais nombre d'entre elles ont connu ce destin là. »
Le rêve américain n'est pas fait pour les femmes, et Jake Hinkson le prouve avec plusieurs d'entre elles. Amberly, belle et éduquée, a cru toute sa vie que son salut viendrait des hommes et s'est retrouvée dans une impasse. L'adjointe du shérif, Lucy Harington, opiniâtre, et retorse, est une femme née au mauvais endroit, cantonnée dans un rôle d'assistante administrative alors qu'elle est plus intelligente que tous les cerveaux du patelin réunis.

Comme dans ses précédents romans l'écriture de Hinkson est rythmée, concise, sa plume incisive et ses personnages une nouvelle fois se fracassent sur le rêve américain. Adieu Billie, il fallait écouter le propriétaire du cinéma de Kansas City...et merci aux Editions Gallmeister pour ce roman reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique.
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Billie Dixon travaille depuis quelques mois chez les studios PRC. Sa mission : fournir en films les petits cinémas situés dans des bleds paumés. En somme, placer les merdes du studio aussi loin que possible. Billie devra donc se rendre dans les coins les plus reculés de l'Arkansas, du Missouri et du Tennessee. Première mission : Stock's Settlement dans l'Arkansas. Là, elle rencontre Claude Jeter, le propriétaire du cinéma quelque peu déserté. En effet, depuis la fin de la guerre, les gens n'ont plus un sou à mettre dans un billet de cinéma mais surtout le pasteur Obadia Henshaw a décrété que les films étaient l'oeuvre du Diable. Qu'importe, la jeune femme fait tout de même affaire avec Claude et compte bien rendre visite au pasteur. Une rencontre pour le moins inamicale puisque Billie se fait envoyer paître. Juste avant qu'elle ne quitte les lieux, elle croise la belle Amberly, l'épouse du pasteur, qui ne laisse pas insensible. Cette dernière lui donne rendez-vous le lendemain, lorsque son mari fera ses visites. Un rendez-vous qui risque bien de chambouler la petite vie de Billie...


Billie Dixon aime les femmes et collectionne les histoires sans lendemain. Jusqu'au jour où elle rencontre la belle et sensuelle Amberly Henshaw. Mais, voilà, Amberly, en tant qu'épouse du pasteur, est un peu comme le fruit défendu dans lequel, pourtant, la jeune femme va mordre. Il ne fait visiblement pas bon aimer les femmes en cette Amérique profonde de la fin des années 40. Et Billie va en faire l'amère expérience. Des néons d'Hollywood aux champs boueux de Stock's Settlement, Jake Hinkson nous plonge dans une ambiance un brin malsaine et électrique. Il dresse le portrait d'une femme éprise de liberté (fut-elle sexuelle ou non), cynique et rebelle. Autour d'elle, Amberly qui voit en elle comme une forme de libération ou encore Lucy Harrington, l'assistante du faux shérif, une femme posée et intelligente. Ce récit sombre et authentique, à l'intrigue rondement menée et aux moult rebondissements, se révèlera aussi beau que tragique.
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Lorsque Billie Dixon posa ses valoches emplies de bobines de films à fourguer au cinéma du coin dans ce trou perdu d'Arkansas que personnifie Stock's Settlement, elle n'imaginait pas le flot d'emmerdes incommensurable qu'elle allait s'agréger.
Nous non plus.

Sans Lendemain est un sublime portrait de femme.
De celles au caractère entier qui assument ce qu'elles sont, désirent et accomplissent.
Un esprit libre en totale opposition avec l'ordre établi et l'obscurantisme religieux.
En parlant d'obscurantisme, j'aperçois, au loin, le jovial prédicateur, frère Obadiah, flanqué de sa sublime épouse, Amberly.
De ce trio singulier devait naître des étincelles. Ce fut un véritable feu de forêt.

Lorsque le vin est tiré, il faut le boire.
Un adage auquel va se frotter Billie, dégustant le calice jusqu'à la lie.
Inéluctabilité du destin. Engrenage fatal.
Appelez ça comme vous voulez.
Ne subsiste qu'une femme aux abois condamnée à affabuler pour tromper la mort.

Sans Lendemain est d'une force peu commune au déroulé imperturbable.
Un rouleau compresseur parfaitement maîtrisé à l'éloquence épurée.
Phrases courtes. Intensité maximale.
Portrait d'une Amérique pudibonde, archaïque et phallocrate qu'il ne fait pas bon titiller...
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-Où allez vous Melle Dixon ?
-En Arkansas.
-N'y allez pas
-Pourquoi?
-Passé ces montagnes , vous allez arriver chez les sauvages; des grenouilles de bénitier qui ne jurent que par la parole de Dieu, des campagnards arriérés qui n'auront que faire de vos bobines hollywoodiennes.
-Je n'ai pas peur , tout se passera bien.Merci quand même.

Mais tout ne va pas bien se passer pour notre représentante. Dès son arrivée au fin fond de l'Arkansas, le responsable du cinéma la met en garde contre l'homme le plus puissant du comté, le pasteur, revenu aveugle de la guerre.

Une histoire simple, linéaire. Une écriture simple, un destin simple. Et pourtant un livre attachant, faisant une belle part aux femmes dans une société où l'interprétation de la parole divine guide le quotidien.
Ici les femmes sont shérifs, représentantes dans le cinéma, rêvent d' Hollywood .
Au delà du destin de Billie (Melle Dixon), ce livre plante le décor de l' américaine puritaine de 1947 en Arkansas.
Les relations entre femmes sont au coeur de l'oeuvre et en constituent finalement le pole d'intérêt majeur, presqu'autant si ce n'est plus que le coté policier. On ne peut pas dire que le suspens soit insoutenable, loin de là.
Il n'empêche que ce livre , bien dans la lignée de ce que fait cette maison d'édition (sans le coté nature writing), nous plonge dans l'autre Amérique avec des personnages attachants, une histoire forte et bien racontée, sans fioriture.
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Ce n'est pas une surprise si le roman de Jake HINKSON » Sans lendemain » a reçu le Grand Prix de la Littérature Policière – Etrangère en 2018. Traduit de l'américain par Sophie Aslanides, ce roman noir addictif est publié en 2019 aux éditions Gallmeister. Jake HINKSON est originaire de l'Arkansas. Né en 1975, ce fils de prêcheur baptiste découvre en cachette à quatorze ans le roman policier. Les deux obsessions de ses jeunes années – la religion et le crime – l'habitent encore aujourd'hui. Il vit à Chicago, où il passe le plus clair de son temps à écrire et à fréquenter les salles de cinéma.
A la fin de la guerre, en 1947, les américains n'aspirent qu'à une chose : rêver d'un monde meilleur. Et pour se faire, Billie Dixon sillonne les routes pour tenter de vendre des films de seconde zone dans les bleds les plus paumés des Etats-Unis. Chargée de la distribution des Etats du Sud pour PRC depuis quelques semaines à peine, Billie réalise que les mentalités, quant à elles, n'ont pas vraiment évoluées, notamment lorsque le propriétaire du cinéma de Kansas City lui prédit des difficultés à venir…
p. 13 » – Vous devriez éviter l'Arkansas. Une fille seule dans ce coin-là, vous porriez bien avoir des ennuis […] Je vais vous dire, là-bas, c'est un autre monde, Billie. C'est là que le Midwest s'arrête et que le Sud commence, et elle n'est pas jolie la transition. «
Sans tenir compte des recommandations qui lui ont été faites, Billie arrive enfin dans l'Arkansas. Lorsqu'elle rencontre le propriétaire du cinéma, Claude Jeter, celui-ci lui explique qu'il ne serait pas contre le fait d'investir et de projeter de nouveaux films. Mais la difficulté serait de convaincre le pasteur du coin.
p. 22 : » – Mon problème numéro un, c'est l'homme d'Eglise qui vit de l'autre côté de la rivière, là-bas, qui a la plus grande église du coin ; il a décidé que les films étaient l'oeuvre du diable. «
Claude lui propose alors de rencontrer Obadiah Henshaw, le pasteur, pour tenter de lui proposer un accord financier, en échange de ne plus dissuader les habitants de se rendre au cinéma. Comprenant que cet accord est également dans son intérêt, Billie se rend chez le pasteur.
Lorsqu'elle rencontre le pasteur, elle est d'abord surprise de voir que l'homme est aveugle, blessé durant la guerre. Mais sa plus grande surprise est de faire la connaissance de la femme du pasteur : Amberly.
p. 49 : » – J'ai vu des choses d'une beauté fabuleuse, dis-je. Des hôtels en marbre, des piscines aussi grandes et bleues que le ciel. J'ai vu des millionnaires, des stars de cinéma et des mannequins, mais je n'ai jamais rien vu de plus beau que la femme qui se tient devant moi. «
Billie se voit invitée par cette dernière en l'absence de son mari. Ne sachant comment interpréter cette demande, Billie ne peut cacher son trouble.
p. 51 : » […] je ne connaissais que trop bien ce jeu-là. le flirt vain qui ne menait à rien. J'avais déjà vu ça. Certaines personnes aiment approcher au plus près de ce qu'elles désirent de manière à ressentir, ne serait-ce qu'un instant, la brûlure de sa concrétisation imminente, avant de faire machine arrière sans avoir été souillées par l'acte. «
Une troisième femme d'influence va tenir un rôle essentiel dans le déroulement de l'intrigue : Lucy Harington. Elle et son frère Eustace sont chargés de faire respecter la loi à Stock's Settlement. Or, le drame qui se prépare va faire interagir ces trois destins de femme.
» Sans lendemain « est un sublime polar, où les femmes ont une place essentielle dans un contexte qui ne leur en laisse guère ! Et c'est sur cette ambivalence que joue l'auteur tout au long du récit. Une belle découverte, mêlant des sujets ô combien toujours criant d'actualité…
Lien : https://missbook85.wordpress..
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Trois femmes nous emmènent vers l'Arkansas dans un noir voyage « sans lendemain » au lendemain de la guerre, en 1947 lorsque l'Amérique victorieuse soigne ses invalides en essayant de les oublier et rêve à un monde meilleur « made in Hollywood ».

La femme de Hollywood, Billie Dixon, n'a pas connu son père et sa mère l'a abandonnée à sa grand mère pour la punir d'avoir engendré un tel fils … initiée aux plaisirs saphiques dans les bacs fonds de Los Angeles par des filles en manque d'hommes partis en guerre, Billie n'a pas réussi à faire carrière dans le cinéma, univers réservé aux « enfants de », et survit en distribuant des navets dans les états du Sud.

La femme du Missouri, Amberly Henshaw, a épousé Obadiah, héros de guerre aveugle et décoré. le pasteur Obadiah veille à la moralité de ses ouailles en les préservant du cinéma et tyrannise son épouse en veillant à sa conduite.

La femme de l'Arkansas, Lucy Harington, et son frère Eustace font respecter la loi et l'ordre à Stock's Settlement sous la gouverne des frères Picket dont Josiah procureur.

Quand Billie croise Amberly l'intrigue se noue, implacable enchainement qui de meurtre en meurtre conduira Billie dans les mailles de Lucy …

J'ai lu d'une traite ce roman bref, haletant, qui nous dépeint une époque où le maccarthysme couvait, alimenté par la dépravation d'Hollywwod dont les affaires Roman Polanski et Harvey Weinstein montrent la pérennité. Roman noir atypique par ses premiers rôles tous féminins dont Lucy Harington est finalement l'héroïne improbable et magnifique.

Un bon livre, écrit par un fils de pasteur, qui pourrait tout à fait se dérouler ici et maintenant. Gallmeister nous offre une fois encore de belles pages traduites sobrement par Sophie Aslanides.
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Originaire du Texas, Billie ne compte pas y moisir et, même si c'est une femme, même si nous ne sommes qu'en 1947, elle s'est présentée dans les studios de cinéma à Los Angeles, bien décidée à y proposer des scénarios intéressants. Après avoir visé les bonnes boîtes dans ce milieu sexiste bien fermé, elle s'est vite rabattue sur ce qu'ils appellent très poétiquement « les pissotières de Hollywood » où sont tournées des « merdes de série B ». Mais même là, personnes n'a besoin de nouveaux scénaristes. Elle accepte alors un poste qui consiste à sillonner les salles obscures des coins les plus paumés du Sud dont l'état de l'Arkansas. Un propriétaire de cinéma l'a mise en garde, c'est un coin à éviter pour une femme seule mais, déjà désabusée point de vue boulot, Billie ne pense pas qu'il puisse lui arriver pire. En ça, et c'est elle-même qui nous le dit, elle s'est trompée, terriblement, fatalement et inexorablement trompée.

Après avoir traversé les Ozarks, elle atterrit à Stock's Settlement et trouve sans peine le cinéma Eureka ; pas de film à l'affiche, une odeur de vieux cigare, un climatiseur en panne et un gérant talonné par son coq. Et surtout, un problème de taille pour le propriétaire, les films sont l'oeuvre du diable selon le pasteur qui semble avoir une emprise incontestée sur la communauté, d'où une totale désertion des salles de projection.
Billie, pleine d'assurance et sous-estimant le fanatisme de ce prédicateur qui a vu la lumière de Dieu après avoir perdu la vue à la guerre, s'engage à le convaincre qu'elle est là pour offrir des films culturellement édifiants pour les habitants de ce petit bled perdu.
Mais, le polar noir prenant l'ascendant sur cette petite mise en bouche amenant notre héroïne sur les lieux d'où tout va déraper, Amberly, l'épouse de ce pasteur qu'il ne faut pas prendre à la légère, rentre en scène et enflamme notre narratrice tombée sous le charme de cette femme « vraiment canon ».

Sans lendemain est un roman noir épuré mais implacable, il se déroule tel un scénario que Billie aurait pu vendre à l'un des studios de cinéma où elle désirait travailler. Quelques descriptions brèves mais efficaces donnent les images des routes tortueuses des Ozarks, de l'église, d'un bar enfumé, d'un motel, de la boue rouge qui fera déraper le devenir de Billie. L'essentiel se concentrera dans les dialogues et les faits et gestes de notre narratrice qui feront défiler le temps nécessaire, soit trois saisons de l'année 1947, pour faire basculer quelques destins perdus dans l'Arkansas.
Le pasteur, personnage assez glaçant et paranoïaque, est là pour nous apprendre le salaire du péché et l'auteur, par trois portraits féminins, nous montre la place, ou plus précisément l'absence de place de la femme dans la société américaine d'après-guerre. Sur ce dernier point, Jake Hinkson nous en offre deux remarquables expressions, l'une dans la désillusion professionnelle de Billie et l'autre dans le fait que le poste de shérif de cette bourgade est tenu par Eustace, un homme massif mais sans cervelle, alors que c'est sa soeur, femme remarquablement intelligente, qui remplit ce rôle sans qu'il ne soit dit que c'est une femme le shérif de la ville !

Ce petit roman s'avale très vite, les rôles sont bien joués, sans excès, sans fioritures inutiles et le scénario glisse tout naturellement dans le noir jusqu'au final, sans aucun retour possible. Un classique du genre qui nous promène dans l'Arkansas où il ne fallait surtout pas mettre les pieds !
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Devinette : Quel est le point commun entre Hollywood et Stock's Settlement, bled paumé de l'Arkansas ?
Réponse : Billie Dixon.
Partie vers StarStruck Town en l'an de grâce 1947 avec quelques scénars sous le bras à destination des Samuel Goldwyn et autres David O. Selznick qui, sans surprise, les refusent et ne voulant pas finir comme Elizabeth Short quelques mois plus tôt, Billie accepte le poste mirifique de distributrice de nanars dans les coins les plus reculés de l'Amérique profonde, là où les cinémas ne peuvent pas se permettre d'acheter les blockbusters à l'affiche, comme c'est le cas à Stock's Settlement. Enfin quand ce comté reculé passait encore des films, ce qui n'est plus trop d'actualité depuis qu'un fervent pasteur, fraîchement installé dans le coin et voyant dans le cinéma l'oeuvre du Diable, a réussi à faire interdire ce sacrilège sur pellicule. Dommage pour Billie qui comptait bien larguer ses bobines de séries Z mais qu'importe, pas question de lâcher l'affaire trop rapidement, après tout, suffit de convaincre ce traîneur de goupillon que les films qu'elle apporte ne sont pas autre chose que des divertissements familiaux de bonne tenue.
Mission pas si compliquée sur le papier mais qui va perdre beaucoup de son importance avec l'entrée en scène de la femme du pasteur, joli petit lot dont Billie s'entiche immédiatement. A partir de là, le béguin va prendre les commandes et semer les graines de folie qui feront allégrement franchir la ligne jaune à notre amoureuse transie.

Jake Hinkson nous offre avec Billie Dixon un éclatant premier rôle féminin à une époque où la domination masculine était la norme et où la pensée même de la remettre en cause vous aurait valu un aller simple pour le service à fondus le plus proche. Anti-héroïne typique, un peu torturée, pas mal insoumise et que les mauvais choix et la malchance vont mener au point de non-retour, Billie traine à sa suite une belle brochette de personnages n'ayant pas grand chose à lui envier : un shérif aussi baraqué qu'il est attardé affublé de son assistante de soeur qui présente exactement le profil inverse, un pasteur bataillard qui trouve la foi le jour où il perd la vue, une femme de pasteur qui a fait de la manipulation sa première langue vivante etc., tous à leur manière nous offrent un Gallmeister noir, efficace et savoureux et, si le postulat de départ paraît plutôt tiré par les cheveux, la suite nous embarque dans un polar rythmé, sans temps morts et qui n'est pas sans rappeler avec une certaine jubilation les classiques du film noir, du Facteur sonne toujours deux fois à Pushover, en passant par le fabuleux Assurance sur la Mort... un vrai bon moment de lecture.
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Vous avez aimé L'enfer de Church Street ? Alors vous allez adorer Sans lendemain de Jake Hinkson - traduit par Sophie Aslanides - qui continue d'explorer les mêmes thèmes.

Chahutée par une vie qui n'a pas été simple, Billie Dixon a eu sa part de rêve holliwoodien. À défaut d'être actrice, elle parcourt le midwest américain pour tenter d'y caser les films de série B d'un studio de rang Z dans les cinémas des petits villages perdus. Cela la mène à Stock's Settlement, un trou perdu de l'Arkansas, au pied des Ozarks. Un bled où elle aurait mieux fait de ne jamais mettre les pieds.

Car pour convaincre Claude le projectionniste local de lui prendre quelques bobines à projeter, elle va devoir se colleter à Obadiah Henshaw, le pasteur local pour qui le cinéma n'est rien de moins que l'avant-garde du satanisme. Ce qui va l'amener à rencontrer sa femme et à en tomber amoureuse, avant d'être entraînée dans une cavale sans espoir dont la fin ne pourra être que noire.

On retrouve dans Sans lendemain les thèmes déjà lus chez Hinkson : l'Arkansas et ses paysages sauvages bien sûr, le cinéma, mais aussi la religion, omniprésente autant qu'ambigüe, dans cette Amérique de l'après-guerre qui se cherche un lendemain auquel tous ses fils et ses filles ne peuvent malheureusement pas prétendre. Une Amérique tartuffe, pseudo-puritaine, où l'alcool, les femmes en pantalon et le cinéma sont des cibles faciles pour incarner le mal et s'auto-persuader que l'on est toujours dans le camps du bien.

L'auteur dresse avec Billie un beau portait de femme, apparemment forte mais tellement seule depuis toujours, attendant en vain son âme soeur, prête à se lancer dans toute aventure professionnelle ou amoureuse, même si elle sait au fond d'elle-même que ce sera sans lendemain.

Billie se révèle rapidement attachante et particulièrement touchante dans les phases de dialogues intimes avec Amberly et Lucy, superbement rédigées avec des mots simples mais justes où sourd l'émotion.

Et enfin, un beau roman noir de meurtre et de cavale qui, noir oblige, ne peut bien se finir. Une réussite !
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William Dixon, dite Billie, est une jeune femme qui a l'habitude de collectionner les conquêtes féminines mais en séduisant Amberly, la plus belle femme qu'elle ait jamais vue, elle ne se doute pas un instant du pétrin dans lequel elle va se fourrer. Alors qu'elle s'imagine avoir une relation sans conséquence, la situation va vite dégénérer ….
C'est un roman que je n'ai pas su lâcher avant de connaître la fin. Plus l'intrigue avance, plus elle laisse présager le pire et j'ai frémi autant d'horreur que d'impatience devant l'enchaînement des événements qui transforment la vie de Billie en un véritable cauchemar. J'ai adoré !
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