J'ai lu ce livre presque sans m'arrêter de respirer. J'ai été bouleversé par l'écriture, la densité de la réflexion et la précision des émotions. C'est un livre puissant, surement l'un des textes les plus forts et les plus intéressants que j'ai lu sur la perte d'un parent, se faisant l'écho de questions que nous portons tous en chacun de nous: d'où venons-nous? Quelles sont ces histoires qui nous précèdent et dont nous sommes les dépositaires maladroits?
La voix de l'autrice est tenace, courageuse, elle mène l'enquête sur les traces que cet homme, son père, a laissé derrière lui à travers des objets, des anecdotes, des légendes. Elle ne s'épargne rien,
tout est vrai, rien n'est arrangé, amoindri ou romancé.
Les dialogues retranscrits sont passionnants, et l'on se prend à imaginer les voix qui portent les phrases, les hésitations, les silences, comme sur une scène de théâtre. Chose assez rare, j'ai eu l'impression de lire non pas le récit d'une seule personne mais le roman d'une famille. Je croyais lire un livre exclusivement sur le deuil et la recherche des
fantômes, mais c'est beaucoup plus que ça en réalité, c'est une photographie qui creuse et enracine fermement une famille dans une époque, une terre, un milieu social. Une démarche à la
Sophie Calle et une envergure littéraire des romans familiaux russes. Un grand, grand livre.