Pas d'Erlendur dans ce roman d'
Arnaldur Indridason. Les faits se déroulent pendant la seconde guerre mondiale. Les anglais, puis les américains font de cette île une base arrière. Jeunes filles et jeunes femmes se retrouvent avec insouciance, calcul, amour, dans « la situation » (joli mot pour parler des relations amoureuses avec les occupants).
C'est d'ailleurs ce qui arrive à Véra, l'amie d'Eyvindur, représentant de commerce, qui a déserté le domicile pour un soldat anglais. Ce même Eyvindur est retrouvé mort, tué d'une balle dans la tête, dans l'appartement d'un certain Félix Lunder. Pourquoi cet homme, piètre représentant, fade, effacé, sans consistance a-t-il été tué ? Crime de la jalousie ? Rien n'a été volé. Pourquoi le signe « SS » sur le front ? Fait-il partie des sympathisants du régime nazi ? Erreur sur la personne ?
Flovent, le seul enquêteur de la police criminelle s'Islande, ex-stagiaire à Scotland Yard, et Thorson, l'Islandais né au Canada, désigné comme enquêteur par les militaires parce qu'il est bilingue.
Les deux hommes sont chargés de l'enquête. Quasi sans expériences ils vont devoir louvoyer entre militaires, civils, américains, anglais, islandais. Heureusement, l'entente entre eux est très bonne, pas de coups bas. Leur méconnaissance du métier leur donne la liberté de fouiner sans arrière-pensées, chercher dans les expériences du docteur Rudolf Lunder, sympathisant nazi, remettre l'ouvrage sur le métier autant de fois qu'il le faut.
Avec son art consommé de l'intrigue,
Arnaldur Indridason nous conduit, de fausse piste en suspects-non-suspects, vers la preuve, le suspect, le mort manqué. Une enquête policière lente, méticuleuse, sans téléphone portable ni courrier électronique (ça fait du bien !).
Ce que j'ai aimé, en plus de l'intrigue policière, c'est la description de l'Islande pauvre, rurale occupée par des soldats fier-à-bras, en pays conquis qui n'ont que mépris pour les islandais, sauf pour leurs femmes et leurs filles. Les islandaises rêvent de se faire épouser par ces soldats, quitter leur île et aller vivre en Angleterre ou aux USA.
« Elle a dit que c'est nettement mieux d'en dégoter un comme ça plutôt qu'un Islandais. Elle était sacrément contente quand elle les a vus arriver… je veux sire, les soldats… et elle passait son temps à sortir avec ses copines. Elles s'amusaient tout le temps »
« Des bouteilles d'alcool et des cigarettes encombraient les tables. L'une des gamines (quinze ans environ), toute débraillée, était assise sur les genoux d'un matelot. L'autre était allongée sur une couchette, les jambes nues sous sa robe légère, et fumaient une cigarette. Deux des hommes étaient torse nu, le troisième portait un maillot de corps. le plus âgé devait avoir environ cinquante ans. »
En lisant ce polar, j'ai repensé au livre de
Svava Jakobsdottir « un locataire » qui se situe juste après la guerre, l'Islande est encore occupée par les américains.
J'attends avec impatience la parution, en octobre prochain, du second tome de cette trilogie et ainsi, passer une nouvelle nuit blanche. Pour patienter, je pense que j'irai retrouver ce cher Erlendur, histoire de respirer l'air frais d'Islande.
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