L'introduction nous met vite dans le bain ; on sait d'emblée que l'on va évoluer dans le brouillard épais des souvenirs étouffés par la douleur, dans le brouillard réel des Fjords de l'Est de l'Islande, dans le froid des deuils à faire, dans le noir des nuits sans fin.
Depuis de nombreuses années Erlendur hante les ruines de ce que fut sa maison d'enfance en quête, sans se l'avouer clairement, de son petit frère disparu, alors que tous deux n'étaient que des enfants.
Il se croit responsable de cette mort et le petit corps n'a jamais été retrouvé de sorte que le travail de deuil ne peut se faire et butte inlassablement sans atteindre son terme.
Mais cette fois, Boas, chasseur de renard, va devenir le déclencheur involontaire du processus salvateur.
Boas lui conte une autre disparition, celle de Matthildur, survenue dans des circonstances similaires il y a fort longtemps et sans qu'elle ne soit jamais retrouvée.. Cette absence va servir de support à une enquête informelle de notre policier en vacance. Erlendur va croiser le destin d'Ezra, autre âme en souffrance, autre coeur en quête du deuil de sa bien aimée.
Car là l'esprit d'Erlendur est libre de fouiller à sa guise, sans peur d'éveiller des fantômes trop intimes. Et il va s'acharner et trouver, traçant ainsi la voie sur laquelle va pouvoir s'engager Ezra afin de trouver le repos de son âme.
Tracer cette voie va lui permettre, à lui aussi de suivre la sienne, parallèle mais différente qui apaisera enfin ses propres remords et le conduira vers un petit repos de l'âme.
Et je jubile ! Figurez-vous que je suis tombé sur ce roman vraiment par hasard sans absolument pas savoir de quoi il retournait ni surtout où il se passait et encore moins qui était
Arnaldur Indriðason.
Le plus curieux de l'histoire c'est que cette année, après plus de 40 ans d'envie je vais enfin aller en Islande ! Aussitôt me revient cette superbe citation d'
Andrés Neuman relevée par notre amie Babeliaute Claracambry.
« Je me demande si, sans forcément en avoir conscience, on ne va pas vers les livres dont a besoin. Ou si les livres eux-mêmes, qui sont des êtres intelligents, ne détectent pas leurs lecteurs et ne se font pas remarquer d'eux »
Moi qui suis un amoureux fanatique de l'Ecosse, lisant
Arnaldur Indriðason je m'imprègne de la sauvagerie de l'Islande de l'authenticité de ses habitants et je trépigne !
Bref assez parlé de ma petite personne ! Mais tout de même ! Cette phrase qui résonne !
L'âme de ces livres qui nous font des signes !....
Petit résumé si vous le souhaitez:
Un policier, Erlendur, en vacance revient sur les lieux où il vécu enfant, où il vécu un drame.
Il parcourt la lande de la région des fjords de l'Est de l'Islande, il campe dans les ruines de ce qui fut la maison familiale.
Il cherche, sans se l'avouer, son petit frère Bergur mort au cours d'une terrible tempête alors qu'ils accompagnaient tous deux leur père à la recherche de moutons égarés.
Alors qu'il hante cette ruine, un chasseur de renard, Boas, raconte à Erlendur une autre disparition ; celle de Matthildur, il y a 60 ans, au cour d'une autre terrible tempête.
le roman est celui de ces deux quêtes. A force d'une ténacité incroyable, Erlendur va finir par retrouver Matthildur et reconstituer sa disparition ; il va retrouver également quelques ossements, probablement ceux de son frère, trimbalés par un renard ou un oiseau à travers la lande et les montagnes.il fera de ces ossements les reliques de son frère et accomplira ainsi, de nombreuse années après le drame, une ébauche de deuil.
Parallèlement, la découverte du squelette de Matthildur, va permettre à un vieillard d'enfin trouver un semblant de repos à travers sa propre ébauche de deuil.