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Jeune fille naïve et assez quelconque, Catherine Sloper n'est pas de taille à résister bien longtemps aux avances du très séduisant Morris Townsend qui prétend l'épouser. Mais, suspectant ce par trop brillant soupirant de n'être qu'un vulgaire coureur de dot et d'héritage, son père, le Docteur Sloper, un riche et distingué veuf dont l'amour sans indulgence ni tendresse s'est toujours teinté de mépris pour cette fille si terne en comparaison de sa mère disparue, lui intime sans ménagement de rompre, sous peine de la déshériter. Après des années de soumission à la tyrannie et aux humiliations paternelles qui ont brisé sa confiance en elle, Catherine ose pour la première fois braver l'autorité du vieux despote. Elle réalise bientôt qu'il avait toutefois bien percé à jour son aventurier de fiancé...


Inspiré d'une histoire vraie, ce roman ne manque pas de cruauté. Dans ce New York de la fin du XIXe siècle où, comme le décrit aussi Edith Wharton, les anciennes et rigides valeurs aristocratiques héritées de la vieille Europe décadente se retrouvent peu à peu battues en brèche par le dynamisme d'une jeune Amérique encline au culte décomplexé de l'argent, s'affrontent deux mondes dont le plus égratigné par Henry James n'est pas forcément ici celui que l'on aurait pu escompter. Car, si, comme il n'en est guère fait mystère dès le début du roman, Townsend est bien un arriviste intéressé par un mariage d'argent, c'est bien plus encore le cynisme froid de l'implacable père et la frivolité stupide de la tante trop romantique, décidée à jouer les entremetteuses, qui occupent le coeur du récit avant de sceller le malheur de Catherine.


Cupidité égoïste d'un côté, orgueil méprisant et borné mais aussi inconséquence balourde de l'autre : la pauvre naïve qui croyait à l'intégrité et à l'amour tombe de haut lorsqu'elle réalise n'être finalement que le jouet des ambitions, des rivalités et des frustrations de tous, et que jamais, ni son prétendant, ni son père et sa tante, ne l'ont considérée et aimée pour elle-même. Se doute-t-on jamais de la gravité des blessures qui ont, un jour, décidé du sort de celles que l'on retrouve, bien des années plus tard, âgées et solitaires ?


La fine observation des comportements et des psychologies au sein de la société bourgeoise du XIXe siècle, aussi bien que l'art consommé de la narration et l'élégance de plume de l'écrivain, font de ce classique, par ailleurs chef d'oeuvre de cruauté, un incontournable coup de coeur.

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Véritable coup de coeur !

J'avais été tellement déçue par "Le tour d'écrou" que ce ne fut pas sans une certaine appréhension que j'entamai la lecture de "Washington Square" mais les deux romans n'ont finalement rien en commun si ce n'est leur auteur.

Auteur dont la maîtrise stylistique m'a totalement séduite, à sa façon de distiller dans sa narration un tel équilibre entre cynisme, humour et justesse, associé à une si profonde connaissance de la psychologie de ses quatre personnages principaux ; j'ai dévoré son récit avec un plaisir toujours croissant, jusqu'au dénouement.

***ALERTE SPOILERS***
New York, milieu du XIXème siècle.
Catherine, fille unique et héritière d'un médecin réputé, n'a pour principaux attraits que sa nature placide et la fortune colossale dont elle doit hériter. Aux yeux de la bonne société bourgeoise dont elle est issue, on ne peut la comparer à d'autres jolies figures dont les manières séduisantes attirent irrésistiblement les brillants futurs grands hommes de la cité en plein boom économique. Ainsi, quand un certain Mr Townsend déclare l'aimer à la folie, l'ingénue Catherine se laisse-t-elle convaincre qu'elle a en effet pu s'attacher par le seul charme de sa personnalité cette nature passionnée, le plus bel homme qu'elle ait jamais rencontré. Qu'il n'ait ni profession ni fortune ne semble guère peser dans la balance et pas une seconde elle n'admettrait avoir affaire à un coureur de dot sauf que son père est d'un avis totalement opposé ; partant de là, il mettra tout en oeuvre pour ruiner les chimères de sa fille sans souci de la blesser et les grandes espérances de son prétendant qu'il a parfaitement percé à jour.

Ici, le drame est remis à sa juste place, rejetant obstinément le romanesque, fidèle à son environnement social, rendu crédible par sa banalité même et néanmoins beau et touchant par sa simplicité, sa sincérité et la juste évocation de ses évolutions.

J'ai été complètement séduite par le tableau psychologique de cette jeune passion nourrie par les vanités et la sottise des uns et des autres. J'ai également aimé voir se construire New York et évoluer sa société dans un contexte qui bien qu'étant sensiblement antérieur n'a pas été sans m'évoquer celui des grands romans d'Edith Wharton.


Challenge ABC 2014 - 2015
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Un personnage omniscient nous raconte une histoire qui devait probablement se produire bien souvent dans le New York à la fin du XIXème siècle. Catherine, une jeune fille assez quelconque, ni belle, ni intelligente, sans conversation, sans amis, qui n'avait jamais été courtisée, seule héritière d'un médecin désormais veuf, naïve mais dotée d'un grand sens moral, est éblouie lors d'une soirée par Morris, un jeune homme beau parleur, enjôleur, sans situation ni fortune, mais surtout attiré par une vie facile que lui procurerait une dot. Elle vit avec une tante veuve qui joue les entremetteuses et son père, qui découvre rapidement les desseins du jeune séducteur et tente de déjouer ce mariage.

Les ressorts psychologiques sont décrits avec finesse dans ce roman plein d'ironie. Les quatre protagonistes campent sur leurs positions, ce qui n'empêche pas Henry James ne nous offrir un final inattendu.


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Né américain en 1843 à New-York, Henry James est mort naturalisé britannique en 1916 à Londres, où il s'était établi après avoir longuement voyagé entre l'Amérique et l'Europe. Issu d'une famille riche, cultivée et puritaine, Henry James a voué sa vie à la littérature. Fasciné par le mystère des choses et la complexité des êtres, il a coutume de laisser ses personnages, qu'il considère comme imprévisibles, tracer tous seuls leur destinée.

Son livre le plus connu, le tour d'écrou, que j'ai lu il y a longtemps, flirte avec le fantastique, un genre que je n'apprécie pas trop. L'oeuvre d'Henry James est suffisamment vaste pour offrir des opportunités de lectures plus traditionnelles

Washington Square, publié en 1880, est l'un de ses premiers romans. Inspiré par le travail De Balzac dans la Comédie Humaine, Henry James dépeint la société new-yorkaise dans une comédie dramatique de facture réaliste, mettant en scène quatre personnages principaux : une jeune femme à marier, son père, une tante intrigante et un prétendant. Qui sont-ils ?

Commençons par le prétendant, un très bel homme d'une trentaine d'années. Morris Townsend ne manque pas de charme, d'entregent, ni de confiance en lui. Les manières sont avenantes, le verbe facile. Mais sans fortune, ni situation, il pourrait n'avoir pour projet que d'épouser une jeune femme riche. C'est en tout cas ce que semble être son ambition.

Catherine Sloper est la fille d'un médecin prospère, renommé à New-York. A vingt-deux ans, elle vit avec son père dans une belle maison de Washington Square, un quartier chic et tranquille. Elle est l'expression typique de ce qu'on appelle un beau parti. Mais c'est une jeune femme au physique banal, à l'intelligence moyenne, à la conversation insipide. Plutôt naïve, timide et effacée, elle n'a jamais été courtisée. Elle est donc vulnérable.

Le Docteur Sloper est un homme de principe, hautement conscient de son statut, de ses valeurs et de sa fortune. Ayant perdu très tôt sa femme et un petit garçon, il ne lui reste que Catherine. Lucide, il ne se fait guère d'illusions sur les attraits physique et intellectuel de sa fille, à qui il a la fâcheuse habitude de toujours adresser la parole sur un ton ironique. Mais qu'un homme puisse tenter de la séduire pour ce qu'on appelle ses espérances, est une idée qui le révulse.

Mrs Penniman – Tante Alvinia – est la soeur du Docteur Sloper. Veuve et désargentée, elle a été prise en charge par son frère et est hébergée à Washington Square. Soucieuse de se montrer utile, elle se targue d'avoir contribué à l'éducation de Catherine, à laquelle elle est très attachée. Romantique frustrée, elle ne cesse de s'interposer entre Catherine et Morris, s'efforçant de manipuler secrètement leur romance, souvent maladroitement et à contretemps.

En dépit des longueurs et de la lenteur des actions, j'ai suivi avec plaisir et intérêt – comme au théâtre ! – l'intrigue qui se développe entre les quatre personnages, me demandant s'ils arriveraient à briser l'espèce de carapace de verre dans laquelle l'auteur a enfermé leur personnalité. Il aurait peut-être suffi qu'un seul y parvienne, pour bousculer la destinée à laquelle, sinon, Catherine et Morris ne pouvaient pas échapper.

Parfaitement traduit, le texte est d'une limpide pureté syntaxique et d'une grande précision lexicale. La lecture est fluide. Les petites particularités des personnages sont décrites avec subtilité, l'humour étant sous-jacent du début à la fin.

L'auteur a choisi de confier la narration à ce qu'on appellerait un « observateur omniscient », un personnage invisible qui n'intervient pas dans l'intrigue, mais qui assiste à toutes les scènes, qui connaît le passé de chaque personnage actif, entend leurs pensées, ressent leurs émotions et note leurs stratégies. le lecteur suit donc en direct les réactions de chacun.

Mais comme on l'a dit, les personnages d'Henry James restent imprévisibles et maîtres de leurs choix. le narrateur n'est qu'un observateur. Comme le lecteur.

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À New York, au milieu du 19e siècle, le docteur Sloper est un praticien reconnu et respecté. « Il aimait son travail et l'exercice d'un talent dont il était agréablement conscient. » (p. 17) Veuf assez jeune d'une épouse qu'il adorait, il a élevé leur fille Catherine avec l'aide de sa soeur, Mrs Penniman, dans sa superbe demeure de Washington Square. Rapidement, il comprend que son enfant n'est ni belle, ni particulièrement intelligente ou intéressante. « Je n'espère rien, se disait-il ; de sorte que si elle me réserve une surprise, ce sera un bénéfice net ; dans le cas contraire, je n'aurai rien perdu. » (p. 27) Catherine est une jeune fille douce, tendre, d'un calme exceptionnel et d'une banalité remarquable. C'est donc avec un étonnement mêlé de méfiance que le docteur Sloper constate l'intérêt que le jeune Mr Morris Townsend porte à Catherine. le prétendant traîne une vilaine réputation de dépensier et le docteur est convaincu qu'il n'en veut qu'à la fortune de sa fille.

Alors que le docteur Sloper tente de convaincre Catherine de se défier de Morris, Mrs Penniman encourage les jeunes amoureux dans leur passion. Catherine est rapidement éprise et elle porte à Mr Townsend une confiance aveugle. Les fiançailles sont conclues sans l'accord du père et Morris semble déterminé à épouser sa jeune amie. « Vous devez me dire que si votre père m'est tout à fait hostile, s'il interdit absolument notre mariage, vous me resterez fidèle. » (p. 90) Mais quand le docteur Sloper annonce qu'il privera sa fille de tout héritage si elle épouse celui qu'il considère comme un aventurier et un coureur de dot, quelle sera la réaction du fiancé ?

Henry James propose un roman qui pourrait être très classique : une jeune fille trompée par un fiancé indélicat et un père soucieux de l'avenir et des intérêts de son enfant. Mais à lire de plus près, ce n'est pas du tout le sujet. En premier lieu, le docteur Sloper est un tyran domestique qui s'assume : « Toutes les deux ont peur de moi, bien que je sois inoffensif. […] C'est précisément là-dessus que je fonde mon action, sur la terreur salutaire que j'inspire. » (p. 109) En outre, il se targue de connaître parfaitement la nature humaine et les motivations des gens qu'il côtoie. de sorte que s'il cherche à empêcher le mariage entre Catherine et Morris, ce n'est pas tant pour protéger sa fille que pour prouver qu'il avait percé à jour la vraie nature du jeune homme. Enfin, le docteur Sloper a une bien piètre opinion des femmes : seule son épouse était digne d'intérêt et il traite avec indifférence, voire mépris, sa soeur et sa fille. Il entend être respecté sous son toit et maîtriser les destinées des femmes dont il a la charge, aussi pénible la conçoit-il.

Mrs Penniman est une entremetteuse écervelée et niaisement romantique. La veuve est un des éléments majeurs du malheur de sa nièce, mais elle n'en prend jamais conscience et ne cesse de soupirer après le beau prétendant. À l'opposé de ce tempérament de midinette, Catherine est dotée d'un étonnant caractère : elle est toujours d'humeur égale, ignorante des passions et des éclats. Elle respecte véritablement son père et ne souhaite aucunement le contrarier. Mais on la découvre opiniâtre, fermement résolue à attendre son bonheur. En outre, quand elle comprend la véritable nature des sentiments que lui porte son père, elle cesse d'attendre quoi que ce soit de lui et se constitue une vie intime, certes solitaire, mais parfaitement solide.

Le narrateur se présente comme le biographe de Catherine Sloper. Il prend régulièrement la parole et s'adresse au lecteur en toute familiarité. Même s'il diffère les révélations, il ne laisse aucun espoir quant à l'issue de la romance entre la jeune fille et Mr Townsend. le ton primesautier qu'il emploie pour relater les longues et malheureuses fiançailles de Catherine et Morris dissimule à peine un cynisme profond envers la bonne société new-yorkaise. Henry James, comme Edith Wharton, est très habile à faire la critique des personnages et des caractères d'une bourgeoisie trop pénétrée de sa propre importance. Et c'est avec un délice sadique que le lecteur assiste à des passions de salon qui dévastent les âmes et les existences.
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Je crois que dans les sociétés d'hier et probablement d'aujourd'hui encore, le sujet de ce livre est somme toute bien banal : une fille dépourvue de tout charme et de toute beauté se fait courtiser pour sa confortable richesse convoitée par un arriviste, fainéant et beau-parleur, dont les uniques efforts qu'il est prêt à déployer sont ceux de passer outre les inflexibles réticences d'un père qui ne veut pas céder sa fille, ni sa fortune à un bluffeur de première.
Ce n'est donc pas spécialement l'intrigue qui nous porte dans cette lecture et pourtant, elle captive tout de même, par ces petites avancées qu'opère chacun des personnages pour tenter de faire valoir leurs désirs et leurs opinions.

Sur cette scène Henry James nous présente tout d'abord le docteur Sloper, un médecin émérite qui a fait un mariage d'amour lui ayant apporté aussi la fortune. Mais son bonheur fut bien éphémère. Il a perdu son fils puis sa femme peu de temps après la naissance de sa fille Catherine. Son orgueil ne cesse alors d'être blessé car, à défaut d'être belle, il désirerait au moins que sa fille soit intelligente mais sa déception en ce domaine est cuisante. Selon son opinion très tranchée, sa fille n'a pas de cervelle et son amour aveugle envers le beau Morris Townsend ne viendra qu'appuyer son cruel avis.
Catherine nous apparaît donc comme une jeune femme robuste mais terne, effacée et docile, dont son père n'a aucune fierté. Elle lui voue pourtant une affection sans bornes, l'aime profondément et n'aspire qu'à lui plaire. Son dilemme, ne pas renoncer à son amour et ne pas devoir lutter contre son père, n'en sera que plus douloureux.
Les dialogues père-fille deviennent de plus en plus cinglants, les réflexions du docteur, directes et pleines de sarcasmes ponctuent tous ses échanges avec Catherine, avec l'infatigable Morris Townsend mais aussi avec sa soeur Lavinia Penniman. Car Mrs. Penniman vient compléter ce quatuor saisissant. Lorsque Catherine avait une dizaine d'années, elle est venue s'installer à Washington Square pour, selon la belle expression du docteur Sloper « avoir à ses côtés un autre exemplaire de ce sexe très imparfait. » La tante, éprise de romanesque, se complait dans ce petit drame sentimental et, pleine de maladresse, se démène pour mener à bien ce mariage et nous apparaît alors comme une vraie dinde.

Henry James nous fait donc observer en profondeur les jugements et les pensées des uns et des autres en nous offrant une admirable analyse psychologique de chacun. La plus belle évolution, qui ne peut qu'attirer notre pitié, se fera chez Catherine, l'héritière malmenée dont les yeux vont s'ouvrir sur le véritable caractère de son père. L'auteur n'a pas hésité à doter ce père intransigeant d'une dureté non détournée qui attire immanquablement notre aversion.
Les paroles frappent, autant le lecteur que la pauvre Catherine, et les blessures se forment.

Ce roman, d'une construction précise et affutée laisse peu d'échappatoires à notre malheureuse héroïne victime de son héritage. Dans ce quartier huppé de New York, avec sa magnifique narration, Henry James y exacerbe ironiquement les sentiments et les caractères de cette petite société bourgeoise du XIXe.
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Entre ce roman, considéré comme de la première période du grand écrivain, et la nouvelle L'élève que j'ai lu d'une seule traite juste avant, quelle différence d'approche, et pourtant, seuls 11 ans les séparent.
Personnellement, je préfère le non-dit, le cours énigmatique, l'inquiétante étrangeté que l'on trouve dans la nouvelle, (comme c'est le cas de beaucoup d'autres, telles le tour d'écrou).

Ici la narration est claire, brillante, incisive ; les chapitres sont courts et construits autour d'une seule péripétie de l'intrigue.
Une intrigue simple, mais qui donne la part belle aux analyses des caractères.
Mais, à part la jeune Catherine Sloper, que l'on peut considérer comme physiquement quelconque et niaise, mais que pour ma part, je considère comme la seule personne « normale » du roman, une femme simple, bonne (mais pas c….., je trouve), tous les autres protagonistes sont antipathiques, voire totalement affreux.

Il y a le père d'abord, le Docteur Sloper, un père tyrannique et sans coeur, qui n'a pas supporté la mort de sa femme juste après la naissance de sa fille, qui ne la retrouve pas dans sa fille, dont il méprise l'absence de beauté et d'esprit, tout en affirmant l'aimer. Médecin très riche, veuf d'une femme d'une grande fortune, il va veiller de façon obstinée, presque maladive, à ce que sa fille ne tombe dans les mains d'un capteur d'héritage. Et ce n'est pas joli, joli.

Il y a sa soeur Lavinia, que le Docteur Sloper héberge dans sa grande maison de Washington Square depuis la mort de son époux, une intrigante incorrigible, une entremetteuse malsaine, dont les manigances autour de sa nièce Catherine, seront toujours néfastes.

Il y a enfin ce Morris Townsend, beau jeune homme brillant et plein d'entregent, qui va séduire Catherine, mais dont le Docteur Sloper va tout de suite sentir le coureur de dot, et dont l'enquête qu'il va mener va rapidement lui confirmer que le prétendant est un égoïste, un paresseux, un homme sans scrupules.

Tout le roman va décrire les manoeuvres cruelles, sans pitié, d'un père manipulateur, en vue de convaincre sa fille de ne pas épouser ni fréquenter ce Morris, celles pleines de mensonge, de calcul, de pression psychologique et de rage du jeune homme auprès de Catherine, et enfin celles, ambiguës et perverses, de la tante Lavinia dont la fausseté de jugement fera aussi beaucoup de dégâts.

Au milieu de tout cela, la pauvre Catherine va d'abord s'éprendre follement de Morris Townsend, mais se trouver écartelée entre l'amour pour ce dernier et la fidélité à un père qu'elle adore mais qu'elle craint.
Et finalement sa simplicité de coeur, sa placidité, sauront la guider pour affronter l'épreuve de la trahison, et, une fois les yeux ouverts, se détacher de tout, son père compris.

C'est une histoire bien cruelle dans un milieu bourgeois bien comme il faut, une analyse psychologique acérée et sans concession, mais j'ai trouvé ce roman plutôt conventionnel et d'une certaine affectation.
Et pour reprendre cette phrase mainte fois répétée de Proust, « chaque lecteur est, quand il lit, le propre lecteur de soi-même, etc… », je suis content d'avoir lu ce roman, mais ce n'est pas ma « tasse de thé » (même avec une madeleine!). C'est la part incontournable de subjectivité à laquelle on ne peut échapper quand on fait la critique d'un livre.
Dernière remarque. le roman est un écrit à la manière d'une biographie de Catherine Sloper, et le narrateur se permet de donner son avis sur l'histoire, ce qui m'est apparu fort artificiel.
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Washington Square, New York, les années 1830. Toute une stratégie se joue entre quatre personnages: un jeune homme désargenté et inconstant s'intéresse à la jeune Catherine, ni vraiment belle ni vraiment charmante, mais douce, réfléchie, respectueuse et surtout future héritière d'une somme colossale. Son père, le docteur Sloper, n'est pas dupe de cet intérêt, contrairement à sa fille, et refuse catégoriquement de donner sa main à cet individu, menaçant de déshériter sa fille au grand dam du prétendant, alors que la soeur du docteur, veuve depuis plusieurs années et vivant sous son toit, décide de prendre en main le jeune couple pour que cette alliance ait lieu.
Les agissements des quatre personnages nous sont dépeints d'une écriture chirurgicale qui laisse peu de place au sentimentalisme et qui va-et-vient avec grâce dans les pensées de l'un et de l'autre au point que le lecteur doive par lui-même faire ses suppositions entre le jeu du personnage et ses pensées réelles.
Comme avec Maupassant, les personnages sont disséqués non sans une certaine ironie.
Bien que le milieu dans lequel ils évoluent s'inscrive vraiment au coeur du XIXème siècle - familles bourgeoises, mariages arrangés, fortunes à hériter - le style lui-même est résolument moderne, ce que j'ai beaucoup aimé.
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Comment éloigner un suceur de fortune d'héritière de sa fille d'une naïveté extrême et en même temps étouffer l'influence pesante de sa soeur veuve qui s'entremet naïvement dans les relations entre Catherine et Morris? Il n'y a qu'une seule solution c'est de gagner toute la confiance de sa fille et de se faire idolâtrer par elle...

Cela va marcher puisque Catherine n'acceptera jamais de se marier sans le consentement de son père et en aucune manière, malgré tous les efforts fournis, Mrs Penniman ne réussira jamais à influencer l'indécision de Cathérine. Cela ira même loin au point où Catherine choisit d'être une vieille fille même après la mort de son père...

Malgré les longueurs qui étendent les émotions comme un ressort qui s'étire, on a l'impression par moment que l'histoire n'avance pas, c'est un livre bon à découvrir!
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Lu dans l' édition numérique du domaine public.
Après le tour d'écrou, lu depuis bien des ans, j'ai dévoré Washington Square en friandise littéraire de ce XIXe siècle des écrivains de qualité.
L'histoire new-yorkaise, contée par Henry James m'était connue au travers de ses adaptations tant théâtrale que cinématographique.
Dans une écriture et une traduction aussi limpides que précises, Henry James décortique au scalpel l'âme et les états d'âme des personnages d'une pièce magnifiquement jouée.
Tout concourt à faire souffrir Catherine, héroïne hiératique d'un conte moral et légèrement cruel:
-Son père, qui mésestime et méprise sa fille puisque celle-ci ne sera jamais
sa digne continuation.
-Sa tante, veuve écervelée et entremetteuse, qui pousse Morris Towsend à
séduire Catherine.
-Morris, surtout avide de mettre la main sur l'héritage de Catherine après le décès du docteur.
... Chacun s'agrippant qui à ses préjugés, qui à ses chimères, qui à son espoir.
il y a, sans nul doute, une inspiration balzacienne chez Henry James dans cette douce fatalité d'une danse qui va son pas vers la mort du pèré, le célibat définitif de Catherine et le retour honteux et perdu de Morris.
Et la tante? C'est cette parente qui ne semble jamais vieillir, jamais touchée par les stigmates de son inconséquente stupidité.
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