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4,18

sur 1074 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
On se passerait bien d'être la "préférée" quand les faveurs sont violences et viols. C'est presque une chance de ne l'être pas. Mais voilà, ce n'est pas une chance non plus, parce que cette colère du père, toute la famille la partage. La mère semble faible, désabusée pour sauver ses filles ? La mère garde la tête hors de l'eau pour rester digne, et elle a ses secrets. Il paraît, en plus, que le silence des uns et des autres était d'époque. La fille va se construire (enfin va tenter !) contre cette enfance, sa sexualité, ses vies de couple. Elle a la rage, surtout quand elle lui ressemble : la toxicité du père rejaillit, fonde le mal-être. Ça donne une autre vie échouée parce "mauvaise terre, mauvaise graine" ; mauvaise graine qui donnerait un mauvais fruit pourri ? Si le sujet est largement écumé, le style ciselé, colérique, en fait un livre personnel qui évite les pleurnicheries. D'où, peut-être, tous ces prix littéraires obtenus, ce roman ayant eu de nombreuses... préférences.
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Dès les premières lignes le lecteur est happé par le récit de Jeanne. Nous sommes au coeur de la violence familiale. L'écriture est percutante, elle va droit à l'essentiel, le style est direct et sans ambage. Les petits riens qui apportent à l'enfant une lueur d'espoir et de tendresse lui insufflent l'énergie pour fuir cette atmosphère violente jusqu'à la terreur, mais aussi, étouffante. Les mots sonnent juste, collent à la psychologie du personnage de Jeanne. le moment où le père n'est plus qu'un vieillard pathétique est aussi très réussi. Les personnages secondaires sont tous croquées d'une belle façon. La région du Valais, elle aussi, est bien peinte, quoique indirectement, en intégrant par petites touches le vocabulaire local, les habitudes, les paysages, sans avoir besoin de longues descriptions.
Mais … je reste sur ma faim, car, il n'y a pas d'histoire, pas d'intrigue. Pourtant dans ce type d'histoire, même si aucune fin réelle n'existe ou n'est définitive, il y a des moments qui sont les bons pour stopper le récit (quitte à y revenir dans un autre ouvrage) de façon à ce qu'il fasse sens. La fin est un peu ouverte mais n'incite guère à croire à une suite très positive. Jeanne s'en est sorti par la force de son caractère et sa volonté, mais jamais elle n'a rencontré, enfant, le moindre adulte qui l'aide vraiment à se construire dans la résilience. Personnellement ça ne me gêne pas que Jeanne n'arrive pas à pardonner, parfois les faits sont impardonnables, mais, à défaut de pardonner, on peut essayer de comprendre, et Jeanne essaye, mais le livre s'achève sans que son père ne soit autre chose qu'une énigme, encore plus grande, puisqu'en plus, à la mort de sa femme, on réalise qu'il devait bien l'aimer ou tout au moins qu'il y avait en lui, très enfoui, une étincelle minuscule. La seule réconciliation de Jeanne, c'est avec sa vallée d'origine, mais c'est plus la découverte, comme elle le dit, de tout ce que ses parents auraient dû lui transmettre. Pour faire un roman il aurait fallu que Jeanne ait découvert quelques traces de l'histoire familiale de son père, mais là, rien. Et sa mère aussi reste une énigme. du coup c'est assez décevant malgré une écriture très remarquable et très fine.
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Décidément, la littérature suisse s'invite de plus en plus souvent
dans mes lectures. Voici une nouvelle auteure que je découvre sur un sujet bien rude et lourd : comment devenir, après avoir subi des violences familiales ? Si vous cherchez un feel good, je vous préviens il n'est pas ici. En revanche le roman est assez marquant. L'auteure parvient à s'immiscer dans les meandres de l'esprit de son héroïne. Ses réflexions et ses réactions sont tellement intimes et réalistes qu'on a l'impression que sa personnalité a été créée d'après des entretiens avec un psychologue. C'est dense et marquant de réaliser la blessure qu'elle se trimballe, qu'elle tente tour à tour de cacher, oublier, apprivoiser, sans jamais y parvenir vraiment. Toute sa vie est modelée par cela. Sa relation a sa famille, aux autres et ses relations amoureuses. La fêlure est immense. Va-t-elle réussir à la réparer avec l'amour des autres ? Comme le Kinstugi, cet art japonais qui transforme les fissures en veines précieuses? C'est tout je sujet du roman.
J'ai vraiment apprécié la justesse, la finesse, la rudesse et la détresse aussi.
Même si je n'ai complètement engagé mon empathie pourtant plutôt au-dessus de la moyenne. Pourquoi ? Aucune idée. C'est juste comme ça. Mais je salue la performance et serais ravie de lire un prochain ouvrage de cette auteure.

Alors, faut-il le lire ? Oui. Et si vous voulez d'autres suggestions de littérature suisse, je vous recommande aussi l'excellent Joseph Incardona avec Les corps solides et La Soustraction des possibles.
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Bonjour les babeliophiles petit retour sur la lecture de ma nuit "SA PRÉFÉRÉE". Bien sur que l'histoire est horrible dure et difficile. Mais franchement lors de la sortie se ce livre je m'attendais à beaucoup mieux. Certains passages sont difficiles mais voilà....il me manque quelque chose et à chaque fois c'est pareil lorsque je lis ce genre de livre.Desole pour l'auteure mais comme je dis toujours ceci n'est que mon avis
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Chronique vidéo https://www.youtube.com/watch?v=giHdHe5fLlU

Dès le départ, je crois enfin avoir quelque chose entre les mains ; le style est intéressant, grossièrement taillé, comme si les phrases étaient encore déformées par la colère, que l'émotion n'avait pas été pleinement poncée— comme parfois, quand on est face à quelque chose de brutal et qu'on a une sorte de magma indistinct dans la tête, une bouillie d'émotions intraduisibles. Comme les enfants aussi, qui n'ont pas les mots pour exprimer ce qu'ils ressentent, et d'ailleurs, on ne sait pas l'âge de la narratrice, mais elle a un côté enfantin dans sa manière de parler, qui tout en subtilité montre qu'elle a un pied encore bloqué dans cette époque, que ça a comme cassé la courbe de croissance. le côté rustique peut-être aussi du cadre, qu'elle décrit simplement, avec juste un ou deux détails mais qui t'emporte quelque part. Là, juste en parlant d'un plat de chez elle, tu vois qu'elle prend le temps de te mettre dans l'ambiance, c'est ça la fameuse précision dont je parle, c'est pas forcément faire des paragraphes pour décrire absolument tout, mais juste une ou deux phrases qui te situe dans une histoire tangible, qui renforce l'illusion que cette histoire pourrait se produire ou s'est déjà produite.
Après, mon enthousiasme, certains chapitres dans lequel le style s'affadit me font me dire que c'est un livre inégal, avec de très beaux passages et d'autres moins forts, plus tièdes. Les passages dans son quotidien d'adulte, avec un style plus conventionnel comme si la narratrice grandissait en même temps qu'elle racontait l'histoire. Y a le côté brute quand la violence ressort, qui n'est pas forcément facile à mettre en scène (je trouve que Angot par exemple s'en sort mieux que Kouchner ou que Springora — dire les choses sans périphrase, forcer le lecteur à regarder la laideur dans les yeux) :
« Elle sait rien. Il me disait que c'était moi, que je l'excitais, que je faisais exprès. Mais je faisais pas exprès, je te jure. J'avais des seins. Il les adorait.
— Elle a dit ça : Il les adorait ».
J'aime bien d'ailleurs ce procédé qu'elle a parfois, de répéter ce qui vient de se dire, comme si son cerveau refusait d'accueillir l'information, qu'il fallait la répéter pour la concevoir. Et j'avais peur avant de le lire que ça aille trop dans le pathos, et au début, beaucoup de scènes me font redouter la lecture voyeuriste (je sais pas si on peut appeler ça comme ça, mais l'impression de lire un Nouveau détective), avec un surdosage de violence, mais on comprend que ce n'est qu'un dixième de ce qu'il est arrivé (et le fait de laisser des choses dans l'ombre donne du corps au texte, cette histoire, on y croit aussi pour ce qui s'y passe en dehors de l'histoire).

De plus, le pathos, on sent que c'est pour elle important de s'en prémunir « Filmé, ça aurait filé la chiale à n'importe qui. Je ne suis pas n'importe qui […] ». Et c'est l'intelligence d'avoir choisi une héroïne tout en nuance, plutôt difficilement appréciable on pourrait dire — elle devient elle-même violente, trompe sa petite amie, elle n'a pas forcément le profil de la victime tel qu'on se l'imaginerait — qui prouve que les violences ont souvent été question d'héritage — pas systématiquement bien sûr, mais qu'en être conscient, c'est déjà une manière de les prévenir, mais montre aussi qu'il n'y a pas de profil parfait, qu'il n'y a pas qu'un chemin vers la guérison, ou la résilience, bien balisé, que même, quand ton enfance a été fracassée, y a peut-être même aucun chemin. Mais qu'elle ne vacille pas.
Et j'ai beaucoup aimé ces scènes qui mettent mal à l'aise, où elle joue avec la culpabilité du lecteur — on voit le père pathétique, et on se dit en même temps qu'elle que c'est un violeur, un homme violent, et en même temps, la vieillesse l'a rendu vulnérable et on a la fois pitié et de la colère, et c'est rare de reproduire un sentiment avec autant de justesse — cette tenaille qui l'empêche de pardonner, qui la défigure et renverse le système de violence pour un autre système de violence — on se retrouve avec un goût de sang, d'amertume.
Voilà donc une histoire qui m'a touchée, mais je ne sais pas comment elle va vieillir dans ma tête et dans le temps, je ne sais pas si elle possède les fameuses couches et surcouches dont je parlais dans ma vidéo sur Carole Fives, ces couches qui font qu'un livre n'est pas vampirisé à la première lecture — qu'on peut le relire et redécouvrir d'autres choses, d'autres dimensions au texte. Un côté unidimensionnel, que je pourrais d'ailleurs reprocher à tous les livres de la sélection pour l'instant (sauf peut-être Les Méditerranéennes, mais qui pour le coup présentait d'autres défauts). En tout cas, pour un premier roman, c'est une belle réussite, on sent tout le potentiel de l'autrice, et l'envie qu'il se déploie plus longtemps, que ce ton brute, à fleur de peau servent un récit plus ambitieux, pourquoi pas une fresque familiale sur plusieurs générations, je pense qu'elle a le talent.

Lien : https://www.youtube.com/watc..
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Difficile de mesurer l'impact de la maltraitance sur un adulte en devenir.

Jeanne vit dans une de ces familles où les coups sont quotidiens et où le père alcoolique fait figure de bourreau.

Dans son petit village du Valais Suisse, tout le monde sait mais personne ne dit rien, « on ne se mêle pas des affaires des autres ». Même le médecin semble ignorer le calvaire de ces deux fillettes et de leur mère.

Une souffrance au quotidien pour cette enfant qui regarde sa mère subir les pires sévices et qui ignore encore que sa soeur aînée sera abusée sexuellement à l'adolescence.

L'attachement de Jeanne à son Valais de naissance l'aide à trouver un peu de beauté dans sa vie détruite, mais on ne voit pas de résilience se profiler dans l'avenir de cette femme devenue adulte.

Comment se relever d'avoir vécu avec un père tyrannique et comment construire une vie normale sur ce tas de ruines qu'a été l'enfance ? Lorsque l'autrice fait dire à son personnage « Moi, je suis née morte », on sent que l'on est très loin d'une quelconque reconstruction.

Et là est toute la question de ce roman qui ne répond pas vraiment aux interrogations soulevées que sont les conséquences. La violence, certes ; l'homosexualité, peut-être ; le non-avenir, envisageable.

Un sujet difficile écrit dans un style incisif et poignant mais une surenchère de violence qui élude le pourquoi de ce livre. S'il y avait un message à saisir, je suis visiblement passée à côté.

Mon avis reste mitigé sur ce premier roman de Sarah Jollien-Fardel, certainement réaliste dans les faits mais que j'ai trouvé un peu opportuniste dans la forme et assez superficiel sur le fond.
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Je ne sais pas si j'ai aimé ou non.

C'est certainement un roman à lire. On ne parle
jamais assez de cette violence intra-familiale, des conséquences de ce quotidien si atroce qui change la personnalité des habitants d'une maison. Comment se construire enfant, puis jeune adulte lorsque l'on a connu que la peur, la colère, l'ignorance ?

Là où j'ai moins accroché c'est au style d'écriture. Je n'ai pas réussi à entrer dans l'histoire, ni de m'attendrir ou ressentir de l'empathie pour Jeanne le personnage principal. L'écriture froide m'a laissé distante et de marbre.
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J'ai écouté ce livre dans le cadre du Prix du Jury Audiolib. Je n'avais pas lu le résumé et l'idée que j'avais de l'histoire, juste en me basant sur le titre, est bien différente de la réalité !

J'ai apprécié la voix de la comédienne, totalement adaptée à cette histoire si forte et si dure. J'ai également beaucoup aimé la justesse de l'écriture de l'autrice.

Je suis sortie de ma zone de confort. Ce n'est pas un coup de coeur mais j'ai apprécié les nombreuses émotions transmises par l'autrice. On ne reste pas insensible à cette histoire qui m'a beaucoup remuée.
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Sa Préférée est un récit qui évoque la violence familiale et conjugale et la difficulté des victimes à se construire psychiquement. Au fil de la lecture et en refermant ce livre, deux questions perdurent : pourquoi cette violence ? Pourquoi rester avec son bourreau, surtout quand on a des enfants ? Seules les personnes concernées peuvent répondre car les réponses sont multiples et appartiennent à chacun. Mais bien souvent, les parents répètent la violence qu'ils ont subie sur leurs enfants ou leur conjoint, comme c'est le cas de Jeanne dans Sa Préférée qui finit par frapper sa compagne. Dans la littérature moderne, beaucoup d'auteurs ont pu témoigner de cette violence : Nan Aurousseau, dans Quartier Charogne, Yann Moix, dans Orléans, Annie Ernaux dans La Honte ou encore Christiane F. dans Moi, Christiane F. Dans la série romanesque L'Amie Prodigieuse, Eléna Ferrante retrace la violence ordinaire de son quartier de Naples où les enfants sont tabassés à coups de poings et de ceinturon, les mères prennent des gnons et pour la plupart de ces femmes, cette violence contribue au caractère virile de leur homme, le chef de famille dont elles sont fières et sur qui l'on peut compter. Dans Sa Préférée, l'auteur montre la lutte de la narratrice qui essaie, pendant des années de se reconstruire et de découvrir sa propre personnalité sans, hélas jamais y parvenir, malgré tout l'amour qu'elle peut échanger : la colère et le ressentiment sont insurmontables et ne lui permettent pas l'accès à la clairvoyance, sa personnalité éclatée est irréparable. Dans les autres oeuvres citées, les auteurs-narrateurs réussissent à se reconstruire par l'écriture avant, pour certains, d'être passés par une forme d'auto-destruction : la prison, la drogue, la prostitution, le rejet total d'une famille étouffante et meurtrière.
Je n'ai rien trouvé de plus dans ce roman que ce qui a été déjà exploité dans d'autres oeuvres littéraires ou cinématographiques mais ce livre a sans doute le mérite de montrer que cette violence est malheureusement universelle. Aussi, ce récit a la qualité de rester humble et de ne chercher ni le misérabilisme ni le sensationnel.
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Sordide. C'est le mot qui me vient à l'esprit pour qualifier ce roman que j'ai lu d'une traite en me demandant tout au long du récit jusqu'où irait la descente aux enfers.
Ce récit nous propulse dans le Valais, canton aux valeurs traditionnelles ancrées et aux villages pittoresques perchés aux flancs escarpés des alpes suisses, dans une famille ostracisée en périphérie de village où chaque jour la violence conjugale et la maltraitance explosent.
Jeanne, une des filles, la narratrice, nous oblige à regarder. A ne pas détourner les yeux. A ne pas se boucher les oreilles. Elle nous montre à marche forcée le calvaire vécu par les trois femmes de ce foyer à la merci d'un père (et mari) malade mental alcoolique et pervers.
Les mots sont âpres, les scènes sont décrites sans fard, plongeant le lecteur dans un univers vertigineux de noirceur. Lorsqu'on reprend pied dans la civilisation, c'est au côté d'une Jeanne fracassée qui peine à s'émanciper de son enfance et à se construire en tant qu'adulte dans un monde dont elle ne possède aucun code. Ce qui la tient debout, c'est sa colère. Mais peut-on construire une vie affective stable sur un champ de mines ?
Ce texte est un uppercut. Il nous assomme par la brutalité des réalités qui nous sont révélées. On ne peut s'empêcher d'éprouver du dégoût, de la honte, de la colère avec la révélation des souffrances imposées à cette famille sans que la collectivité jamais ne réagisse.
Mais comment sortir la tête de l'eau? L'auteure qui semble à jamais prisonnière de ses démons ne le dit pas. Elle nous entraîne jusqu'au bout dans ses échecs; l'horizon reste bouché, le ciel crépusculaire.
Et nous lecteurs, on referme ce roman avec un goût amer à la bouche et le sentiment peu agréable d'avoir servi de déversoir.
Une évaluation sur 5 est ici clairement trop peu nuancée : 4 pour la force du témoignage, 3 pour la construction et le style linéaires sans grande originalité, 2 pour le plaisir de lecture, faible, et surtout 1 pour le sentiment de vide, d'absence de sens et d'impuissance qu'on en retire.




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