Gaëlle JOSSE. Une longue patience.
Dans les années 1950, en Bretagne, Louis, seize ans, le fils d'Anne Quémeneur, ne rentre pas au domicile un soir d'avril. La veille, il s'est disputé et même battu avec son beau-père, Étienne, le pharmacien du village. Ce dernier a épousé Anne , il y a trois ou quatre ans lorsque la période de veuvage lui a paru satisfaisante. le couple a deux jeunes enfants, Gabriel trois quatre ans et Jeanne, deux ans. Yvon le Floch est mort le 5 octobre 1943, son bateau de pêche, le « Marie-Annick » a été coulé par la royal Air Force. Disparu avec ses compagnons en mer, pas de corps, pas de cercueil lors des obsèques dans la petite église. Il faut faire son deuil. Il faut vivre, survivre, revivre, il y a Louis le fils de Yvon et d'Anne.
Louis a disparu, Étienne part à sa recherche. Il arpente la petite ville, pas de trace du jeune garçon. Anna se rend à la capitainerie et là, stupeur, elle découvre que son enfant a embarqué le 16 avril sur le « Terra Nova », destination la Réunion. Il s'est engagé dans la marine marchande. Cruelle déception pour cette mère : elle a déjà perdu son mari, happé par les flots marins. Chaque jour, elle lui écrit une lettre, lui conte le repas qu'elle offrira à tous ceux qui viendront partager sa joie, lorsqu'il reviendra. Et
Gaëlle JOSSE nous décrit les mets qui seront préparés, cuits avec amour par cette mère qui pleure en silence le départ, l'absence de ce fils. Quand reviendra-t-i ? Elle lui envoie même ses courriers. Ceux-ci demeurent lettre morte. Chaque jour, Anna descend sur les rochers et guette le retour du bateau, ce vaisseau devant lui rendre son enfant. Elle scrute l'horizon, écoute, tend l'oreille pour percevoir une corne de brume annonçant l'arrivée imminente d'un cargo. Et tous les jours, elle se réfugie dans sa petite maison de pêcheur, son havre de paix qu'elle a quitté lorsqu'elle a épousé Étienne pour la grande demeure bourgeoise ... Tous les jours, quel que soit le temps, neige, pluie, elle guette, telle la vigie l'approche d'un navire marchand, celui où son fils vit, exerce maintenant sa profession.
Les années passent. Aucune réponse aux lettres d'amour de la mère à son fils. Gabriel et Jeanne grandissent à leur rythme, leur frère leur manque, ne serait-ce que pour placer l'étoile du sapin de noël. Étienne voit ses cheveux blanchirent. Anna, toujours aussi patiente va quotidiennement sur le « Trou du diable » et scrute l'horizon. mais que fait donc Anne dans sa patite maison tous les après midi?
Gaëlle JOSSE nous décrit la perte d'un enfant, la disparition d'un fils, suite à une violente dispute avec son beau-père. Un roman d'amour. de l'amour, de la haine, de l'humilité, de l'espoir. Un espoir déçu chaque jour. Et la fuite du temps…. Cette mère nous entraîne dans ses pas, elle nous narre son adolescence, les années de galère, la guerre, la mort brutale de son premier époux, le père de Louis, ses années de misère, sa renaissance avec son nouvel époux et la venue de ses deux trésors…. Mais rien ne peut apaiser sa douleur. Elle est meurtrie par la fuite, l'absence de son fils aîné. Malgré l'amour de Gabriel et Jeanne, la fidélité et l'amour d'Étienne, rien ne peut effacer la douleur qui la ronge nuit et jour, mois après mois, année après année. Merci Gaëlle pour ce beau roman témoignant de l'amour d'une mère et de la force, la volonté de cette dernière. Un beau portrait de femme, discrète, effacée mais résolue, fière, tenace, opiniâtre, déterminée, rayonnante…. Je recommande la lecture de ce beau récit, court mais concis.
( 20/09/2022).
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