Anne aurait pu mâcher ces mots, avant d'écrire à son fils, ses très longues missives, qui ponctuent le récit de
Gaëlle Josse, en forme d'ossature à "
Une Longue Impatience".
Sa bouche, son dos, ses yeux, se sont dilués dans les tempêtes d'avril,
les bourrasques de norois ont tout emporté,
ce sont les vent qui ont fermé ses livres de classe.
Louis, l'enfant, mon fils s'est tu ce 15 avril.
Il ne me reste que son absence,
et un éternel "hiver, une blessure, une plaie, un tourment",
un creux, au coeur de ma vie, un vide de coeur.
Les nuits ont avalé mes jours,
les jours flottaient en attendant la nuit.
L'angoisse me porte,
je ne trouve "rien pour m'aider à accélérer le passage des jours,
à escalader les nuits, à compter les mois".
Tu étais une absence tu es mon interminable attente,
une impatience plus douloureuse encore, les yeux fixés à l'horizon des flots.
Remonter le temps,
ma honte d'avoir permis, d'espérer sans relâche.
Il m'avait promis,
le geste de trop et tout a basculé.
Je ne sais plus que longer les murs,
suivre la crête des vagues,
ne pas savoir encore de quel côté tomber.
Gaëlle Josse, raconte Anne, sa vie, ses espoirs et ses remords, une vie rendue chaotique par un père incapable d'aimer Louis, Anne minée par son manque de lucidité, une confession qui forme l'essentiel d'
Une Longue Impatience.
Gaëlle signe là un portrait à la lisière de la vie, un portrait poignant d'une femme, Anne, quand sa famille devient un brouillard quelle ne sait plus dissiper.
Louis seul, son premier fils, l'habite encore, Anne imagine une fête magnifique pour son retour, et beaucoup d'autres liesses, mais l'impatience ronge plus que l'absence, l'espoir naît et se retire chaque jour épuisant ses nuits.
Le douloureux portrait d'une mère, de celles qui attendaient le retour de leur homme pendant la grande guerre.
Ce livre et une nuit interminable, une vie s'est comme ancrée dans le noir.
Une magnifique réflexion sur la fragilité de nos vies.