Eric Juillot nous livre dans cet essai une vision globale de la vie des poilus de la grande guerre en racontant l'histoire reconstituée de cinq jeunes soldats « morts pour la France » et enterrés au cimetière d'Epinal (ville d'origine de l'auteur).
Jules Calvet, né en 1892 dans l'Aveyron, agriculteur, mobilisé pendant son service militaire dans un régiment d'artillerie de campagne où il s'occupe des chevaux sur le front et mort un mois après le début des combats à 22 ans.
Maurice Roy, né en 1884, dans les Vosges au sein d'une famille bourgeoise, St Cyrien, mobilisé en tant que lieutenant d'un bataillon de chasseurs à pied, mort après trois semaines de combats à 30 ans.
Pierre Carbonel, né en 1884 à Paris, dans un milieu très modeste, mobilisé dans l'infanterie, mort après 11 mois de combats à 31 ans.
Mamadou Darémé, né en 1895 au Soudan Français (actuel Niger), agriculteur, mobilisé comme tirailleur Sénégalais, mort en 1917 d'une pneumonie à 22 ans.
Arsène Hut, né en 1890 dans les deux Sèvres, d'origine paysanne, combat un an en Albanie avant de revenir en France en 1916 comme caporal dans l'infanterie coloniale. C'est un excellent soldat cité à l'ordre de son régiment mais il meurt en juillet 1918.
Ces cinq hommes ont été choisis dans diverses unités de l'armée, de grades variés et apparaissent au final dans chacune des années du conflit nous permettant de voir l'évolution de l'armée (tactiques, développement de la puissance de feu) et du travail des hommes (terrassement et tranchées).
La façon de parler de l'évolution de ces hommes est assez originale car l'auteur s'est servi de documents d'état civil pour découvrir leurs origines et leur classe sociale ainsi que des JMO (journaux de marches et opérations) pour raconter leur période de guerre.
Partant de là il en a tiré un récit très fouillé en cinq chapitres décrivant pour chacun d'eux le déroulement complet de leur progression au sein de leurs différents bataillons jusqu'à leur décès à plus ou moins brève échéance.
Il n'y a ici rien de romancé pour nous faire partager la supposée vie de ces cinq hommes dans leur quotidien. Tout au plus l'auteur a-t-il lancé quelques hypothèses concernant leur état d'esprit face à l'idée de partir à la guerre et à leurs probables réactions face aux différentes situations dramatiques auxquelles ils ont été confrontés.
Il y a, par contre, pour chacun d'eux, une description détaillée de ce qu'ils ont vécu jour après jour dans cet enfer de feu et de sang.
La description de la composition structurelle de l'armée, des différentes tactiques de combat et de la géopolitique de l'époque peuvent quelquefois être un peu difficile à comprendre voire un peu rebutante pour un néophyte mais l'écriture est toutefois très fluide et on est malgré tout entraîné dans ces récits comme dans une aventure même si celle-ci nous prend aux tripes par sa violence et son inhumanité.