J'ai découvert
Mieko Kawakami l'année dernière grâce à la lecture de son roman : “
De toutes les nuits les amants”, qui a été un véritable coup de coeur pour moi, car il est écrit et traduit avec beaucoup de finesse,il est très délicat, l'atmosphère est particulière et les personnages principaux sont attachants, et la manière de tisser les liens entre eux m'avait fait me sentir proche d'eux.
“
Seins et Oeufs”c'est l'histoire de trois femmes Japonaises, nées à des générations différentes, entrain de traverser les âges. Ce sont des femmes de la même famille.
Il y a Makiko, 39 ans, maman solo, qui travaille durement comme hôtesse dans un bar, elle est obsédée par l'idée de se refaire les seins.
C'est la mère de Midoriko, qui a 12 ans et que nous découvrons plus intimement dans son journal intime, ce qui, comme nous pouvons nous y attendre, donnera des répliques plutôt cinglantes à ce texte. Midoriko a une particularité, elle ne s'exprime plus à l'oral.
Puis il y a Natsu, la petite-soeur de Makiko, de 10 ans sa cadette, qui va accueillir le duo mère-fille dans son appartement à Tokyo, le temps de quelques jours.
Comment va se passer la cohabitation entre ses trois femmes? Que vont-elles se raconter? Comment vont-elles parvenir à s'influencer? Dans quelle mesure? Elles s'observeront et de ses observations naîtront des questions, des prises de conscience, des acceptations?
La féminité naissante et vacillante sera au centre de ce huis clos.
Jusqu'où la plus jeune s'enfermera dans son mutisme?
Jusqu'où la plus âgée (si jeune encore), trafiquera son corps? le fait-elle pour elle? Pour les hommes? Pour la société?
Quel sera le rôle de la soeur cadette Natsu?
Mon avis :
Avec l'alternance entre le journal intime de Midoriko et les dialogues entre les deux soeurs, ce court texte est bien pêchu, bien rythmé et profond.
Sans cette forme, le sujet certe m'aurait intéressé, mais il lui aurait manqué quelque chose. Une énergie bien féminine, vive et percutante.
J'ai aimé cette histoire où l'évolution de la féminité est le sujet central. le rapport à son corps, ce corps qui se métamorphose, qui passe les saisons (je repense au livre que j'ai lu hier, Nagori, la nostalgie de la saison qui vient de nous quitter).
Ces femmes sont donc dans leur nagori.
Le corps changeant de Midoriko et cette abjection à vouloir grandir,un passage très violent pour elle. Et sa mère, qui veut, à l'aube de ses 40 ans, se prouver à elle-même qu'elle peut encore avoir une emprise sur son corps, qu'il peut s'embellir encore et surtout d'un point de vu psychologique qu'elle garde le contrôle sur lui, en pouvant le modifier selon son envie. Se plaire.
Natsu, la soeur cadette, est là pour emmagasiner les réflexions de chacunes, temporiser, amener la réflexion. Elle est très intéressante pour la progression du récit puisqu'elle se situe entre les 2 âges.
Même si ce récit était court (108 pages ), j'ai pu m'attacher et saisir rapidement chaque personnage. J'ai beaucoup aimé cette lecture et je vous la recommande vivement.