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1957. Une petite ville imaginaire, au plus profond du Sud américain, connaît soudain l'exode spontané de toute sa population noire, soit un tiers de ses habitants. Médusés, les blancs observent ce départ massif, déclenché semble-t-il par un certain Tucker Caliban, descendant d'un esclave demeuré dans la légende pour son incoercible refus de la soumission. Tandis que les souvenirs des temps anciens reviennent aux mémoires, chacun réagit en fonction de son vécu, de ses sensibilités politiques et raciales, de ses inquiétudes quant à l'avenir, avec violence pour la majorité, avec un certain bonheur pour quelques-uns, qui avaient un jour rêvé d'un monde plus juste et plus égalitaire entre les communautés noire et blanche.


Cette fable, écrite en 1962 par un Afro-américain, a évidemment une grande portée symbolique : alors que rien ni personne, pas même les organisations politiques noires, ne semblent alors capables de faire reculer la ségrégation raciale, cette histoire fait entendre un autre tambour, celui que chacun est libre d'écouter individuellement au fond de lui-même, pour oser sortir des rangs et agir spontanément, à la mesure de ses moyens. A partir d'un terrible constat d'échec collectif, l'auteur construit un formidable et magnifique message d'espoir, convaincu que le changement pourra venir des multiples petites initiatives individuelles, si modestes soit-elles : ce sont elles qui finiront par modifier la société.


Dotée par ailleurs de grandes qualités littéraires, à commencer par une puissance d'évocation toute cinématographique et un indéniable talent de conteur, cette oeuvre engagée appelle chacun à se comporter en homme libre, droit dans ses bottes et fidèle à lui-même, quand, autour, tout n'est qu'aliénation, raciale, ou autre d'ailleurs...

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Prenez un Etat imaginaire des Etats-Unis, coincé là tout en bas entre Alabama et Mississippi. Voilà, vous situez géographiquement.
Prenez un événement tout aussi imaginaire qui se déroule dans ce même Etat en 1957, à savoir le soudain départ de toute la population noire vers le nord, pour toujours. Vous situez maintenant l'époque et le contexte racial.
Observez alors le départ des "nègres" à travers le regard abasourdi des Blancs. Un exode sans crier gare, apparemment déclenché par les agissements insensés de Tucker Caliban, un jeune fermier noir qui, en quelques heures, épand du sel sur son champ, abat son cheval et sa vache, met le feu à sa maison et quitte les lieux sans mot dire, avec sa femme enceinte. Sous la véranda de l'épicerie locale, les Blancs assistent à ce départ massif, spontané et silencieux, et se perdent en conjectures. D'autres voix s'élèvent alors du passé pour poser les jalons d'une explication. Ce sont principalement celles de la famille (blanche) Willson, dont un membre a autrefois acheté l'Africain, ancêtre de Tucker, à un négrier. Jusqu'à ce jour de 1957, les Willson ont été liés aux Caliban. Après l'abolition de l'esclavage, ces derniers ont continué à travailler pour leurs anciens maîtres, jusqu'à ce que Tucker s'en détache définitivement en leur achetant un lopin de terre pour le cultiver pour son propre compte. On observe, sur quatre générations, un long processus d'émancipation, en suivant en parallèle les Willson de plus en plus progressistes au fil du temps, et les Caliban, passant de l'esclavage à la liberté, au fil de ce même temps. Mais cette liberté gagnée ne suffira pas à éviter le départ de Tucker, ni les regrets de Dewey Willson, qui aurait pu aider à faire progresser les esprits si seulement il y avait mis un peu plus d'engagement et de courage. Mais au final l'un reste sur place et l'autre avance, mettant en oeuvre sa propre conception de la liberté, hors de la politique et des mouvements pour les droits civiques.

Je dois avouer que ce roman m'a laissée perplexe. Remarqué à sa publication en 1962 pour l'originalité de son sujet (le point de vue des Blancs décrit par un Noir, en pleine ségrégation raciale), par la jeunesse de son auteur (un premier roman, en plus), propose-t-il une solution radicale au racisme, le départ des Noirs vers des régions plus libérales ? Pour moi, la raison de cet exode impulsif reste confuse. Plus clair est le message qui passe à travers les mots de Thoreau, en exergue : écouter et suivre la musique de notre propre tambour intérieur même (et surtout) si elle est différente de celle des autres.

En partenariat avec les Editions Delcourt grâce au Picabo River Book Club.
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Il y a des thèmes sur lesquels on pourrait croire avoir tout vu, ou plutôt, tout lu. La ségrégation aux États-Unis en est un, à en juger par les oeuvres de (liste non exhaustive…) William Faulkner, Harper Lee, Paul Beatty, Carson McCullers, Toni Morrison, Joël Norst, Richard Powers ou encore Greg Iles.

Paru en 1962 aux États-Unis, mais aujourd'hui seulement en version française, Un autre tambour de William Melvin Kelley -traduit par Lisa Rosenbaum- trouve cependant toute sa place dans cette histoire (toujours en cours…) de la lutte pour l'égalité raciale en Amérique. L'originalité du récit, l'angle choisi pour le relater mais aussi la force de l'écriture de Kelley en font un grand livre, étonnamment mâture pour un jeune auteur de 24 ans.

Un autre tambour est une fable ou un conte, qui voit l'ensemble de la population noire de Sutton, une petite ville imaginaire du « deep south » des États-Unis, quitter en masse la ville ; du jour au lendemain ; dans un même et incompréhensible élan ; sous les yeux médusés et incrédules des spectateurs blancs. « Get up, stand up… » aurait dit Bob, mais à Sutton, celui qui s'est levé, c'est Tucker Caliban, probablement et paradoxalement le noir qui semblait le plus « intégré » à la population blanche de Sutton.

Cette fable, Kelley prend le parti de nous la raconter via le prisme de cette population blanche, d'abord comme au spectacle, puis frappée d'incompréhension pour un phénomène qui la dépasse. À cette incompréhension, il oppose la longue maturation de cette volonté de libération de la population noire. À travers le récit de la vie locale sur trois générations et les témoignages de ses habitants, cette maturation prend sens pour le lecteur qui en saisit peu à peu les origines et la cohérence.

Un autre tambour, c'est aussi un roman engagé, comparant la destinée de David Willson, qui aurait pu changer les choses et le cours de sa vie par la même occasion, à celle de Tucker Caliban, qui a mis en oeuvre les conditions du changement. L'histoire du résigné et de ses regrets, face à celui qui ose suivre la petite musique que lui seul entend, porteuse d'espoirs et de fierté. Ensemble, tout aurait pourtant été plus simple, plus rapide, plus prometteur…

« Quand un homme ne marche pas du même pas que ses compagnons, c'est peut-être parce qu'il entend battre un autre tambour. » À l'invitation de Thoreau, William Melvin Kelley nous appelle avec force à suivre la petite musique différente des autres tambours. Un livre marquant et bigrement réussi !
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Quelle finesse d'analyse, quel style maitrisé, quelle acuité, quel talent Monsieur William Melvin Kelley !

Un autre tambour est son premier livre, écrit à seulement 24 ans, et il y a de quoi rester béat d'admiration devant tant de maturité sur la compréhension de la nature humaine. Sans manichéisme et tout en subtilité il nous fait voir au travers du regard de ses personnages - des Blancs - pourquoi Tucker, un jeune fermier noir, anéantit tout : ses bêtes, ses champs et sa maison pour quitter Sutton, petite ville du Sud profond où sévit toujours en 1957 une ségrégation raciale nauséabonde et ancrée comme étant dans l'ordre des choses. Tucker bouleversera cet "ordre" et sèmera avec lui le départ de tous les Noirs et les questions de tous les Blancs qui pensent pouvoir très bien se passer d'eux...

J'ai pris énormément de plaisir à lire Un autre tambour qui est un kaléidoscope d'une histoire polyphonique.
Une histoire qui est aussi l'Histoire de la question raciale des Etats-Unis où liberté et dignité n'étaient pas accordées à ceux qui pourtant ont érigé ce pays. Un pays qui n'a jamais accordé de place à ses propres citoyens noirs, considérés non comme des étrangers, mais pis, déconsidérés jusqu'à n'être que des Nègres. Et comme le disait James Baldwin "Si je ne suis pas un nègre, ici, et que vous l'avez inventé, alors vous devez trouver pourquoi. Et l'avenir du pays dépend de cela, de si oui ou non le pays est capable de se poser cette question."
Et ce livre fait précisément écho à cette question.
Question tristement actuelle. Encore.

"Le géant oublié de la littérature américaine" peut-on lire sur la couverture. Et pour une fois il ne s'agit pas d'un vain effet d'annonce.
William Melvin Kelley est un grand écrivain à découvrir, assurément.
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UN AUTRE TAMBOUR de William Melvin Kelley
Traduit par Lisa Rosenbaum

Éditions Delcourt

UN AUTRE TAMBOUR a été publié pour la première fois en 1962 aux USA puis, après avoir fait scandale, il est tombé aux oubliettes... Mais tel le phénix qui resurgit de ses cendres, il a été réédité en 2019 par les génialissimes éditions Delcourt.

L'histoire se déroule en 1957 dans un état fictif du sud des états-unis. Tucker Caliban, descendant d'un esclave rebelle, quitte la ville après avoir volontairement détruit la totalité de ses biens. Ce départ sert d'exemple à toute la population noire qui partira à son tour en laissant les blancs s'interroger sur l'énigme de cet exode massif.

L'originalité de ce livre est d'être raconté uniquement par les personnages blancs qui assistent à cette "migration". Des blancs bien incapables de comprendre ce soudain refus des afro-américains de continuer à vivre dans des conditions de subordination.
Voilà donc ce qui choqua tant le lecteur blanc et "bien pensant" américain lors de la parution initiale de ce roman : comment un auteur d'origine africaine osait-il penser à la place des blancs ? Car c'est bien connu, ce qui est permis aux blancs est interdit aux auteurs dont la peau est plus foncée... intolérance quand tu nous tient !

Pour en revenir au phénix, un de ses pouvoirs est de lire dans le coeur des hommes et de débusquer ceux dont les intentions sont impures... Et c'est bien ce que fait William Melvin Kelley en décrivant une Amérique blanche qui tient fermement à sa (soi-disant) supériorité morale blanche et sur ce qui en découle : l'hostilité raciale ! Mais il attire également notre attention sur le lien entre l'oppression et la bigoterie.

Ce livre nous propose une étude sans faille de la psyché sud-américaine blanche à l'aube du mouvement des droits civiques et il délivre un message très négatif sur l'évolution des mentalités. 60 ans plus tard, il est toujours d'actualité et, comme c'est un grand livre intemporel, on peut parfaitement le transposer à d'autres crises bien réelles d'aujourd'hui.

Pour en finir avec le phénix, son origine remonterait à l'Egypte antique et serait liée au dieu solaire Râ... Râ étant représenté par un faucon surmonté d'un disque solaire. Et si ce n'est pas un soleil couchant que l'on retrouve sur la couverture, qu'est-ce que c'est ?

UN AUTRE TAMBOUR de William Melvin kelley est un livre essentiel qu'il faut absolument avoir lu au moins une fois dans sa vie.

Je remercie les éditions Delcourt ainsi que le Picabo River Book Club pour cette lecture.
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1964 : Civil Rights Act sont signés en juillet
1962: William Melvin Kinley , noir américain, signe et publie son premier roman Un autre tambour , il a 24 ans
1957: un village (fictif)de l'Extrême sud des Etats-Unis," bordé au nord par le Tennessee, à l'est par l'Alabama, au sud parle Golfe du Mexique, à l'ouest par le Mississippi"c'est ainsi que l'auteur nous situe Sutton à quelques kilomètres du port de New Marsails, sur le golfe du Mexique.
Des blancs sous la véranda de Thomason regardent incrédules défiler tous les noirs de la ville, une valise ou un baluchon à la main ils attendent le bus et quittent la ville...
Pourquoi à cet instant précis ce mouvement d'exode a t'il commencé? Qui a pris la décision? qui a décidé pour lui entrainant les autres ? ...
Un roman surprenant, écrit il y a bientôt 60 ans, par un jeune auteur afro-américain qui choisit de laisser la parole aux blancs , ce sont eux qui racontent, qui essaient de comprendre, pour certains ce sera l'occasion d'une remise en question , pour d'autres l'occasion "ultime""de perdurer dans leurs convictions.
Un roman intemporel à découvrir.
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William Melvin Kelley a écrit le livre : « Un autre tambour » (« A Different Drummer »), en 1962 (aux États-Unis) - a tout juste 23 ans.

Longtemps oublié, le livre a été redécouvert 55 ans plus tard par la jounaliste américaine influente Katryn Schulz qui a inspiré le bandeau de son journal « New Yorker » "Le géant oublié de la littérature américaine » "

Fort de ce slogan choc, on trouve enfin en France dans une version « relue et actualisé , et publié en France par les Éditions Delcourt en 2019.

le récit raconte l''histoire de Tucker Caliban, celle de ses Ancêtres, le récit de son départ, le récit d'une bourgade dépeuplée de tous ses habitants Noirs du jour au lendemain

Une fable terrible racontée par le regard de la population blanche, un livre choc mature et profond sur un si jeune auteur.. à redécouvrir sans l'once d'une hésitation !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Péter un plomb, décider d'effacer toute trace de son existence et partir : voilà la décision d'un jeune fermier noir dans le deep south imaginaire de l'auteur. Ce départ mènera à l'exode spontané de toute la population noire de la ville, laissant les blancs spectateurs désabusés d'une société ségrégationniste désormais dépourvu de couleur. Un récit de 1962 politiquement visionnaire pour son époque.
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"Roman novateur pour l'époque, autant par sa forme, dépassant les limites d'un récit réaliste, que par son fond, retracer l'histoire d'une communauté opprimée, en creux, à travers les voix des oppresseurs, il avait été encensé à sa sortie aux États-Unis avant de sombrer dans l'oubli. Si dans l'introduction à la réédition anglaise, on peut lire que «beaucoup de lecteurs blancs ne voulaient pas d'un écrivain noir qui leur dise ce qu'ils pensaient », il n'en reste pas moins que William Melvin Kelley, acclamé par les militants des droits civiques en 1962, a disparu de lui-même, refusant de vivre dans un pays qui avait assassiné coup sur coup Malcom X, Martin Luther King et John Kennedy. (...) L'auteur n'est plus, donc. Il n'a pas assisté à la réhabilitation de son oeuvre. Reste son roman choral déclinant les teintes de l'oppression, aussi bien sous les formes de la haine, de la cupidité et de la colère que de celles de l'incompréhension, du renoncement, de la mauvaise conscience et du désespoir, qui a suivi l'abolition de l'esclavage. Reste une ode magistrale à la rébellion."
Kits Hilaire (Extrait) in DM
Lien : https://doublemarge.com/un-a..
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On redécouvre, enfin c'est mon cas, William Melvin Kelley (1937-2017). le géant oublié des lettres américaines, écrit 10-18, grande maison du livre s'il en est, qui m'a fait connaitre bien des talents. Après Jazz à l'âme, chroniqué il y a peu, voici Un autre tambour, le premier roman de Kelley (1962). Les deux titres font référence à la musique, mais aussi à 'action, le tambour ayant une consonnance guerrière. Et ces deux beaux romans battent en effet au rythme des pulsations, comme un quartet de jazz, allant à l'essentiel. J'ai pensé au cinéma de John Cassavetes.

Dans une ville du Sud, ce sud de Faulkner, de Caldwell, de Flannery O'Connor, sur lequel on a déjà tant lu, en juin 1957, Tucker, jeune fermier noir, empoisonne sa propre terre, abat son bétail et brûle sa maison. A sa suite toute la population noire quitte la ville. Les blancs de la véranda, réunis comme tous les jours, n'en croient pas meurs yeux. Faut-il se réjouir de cet exode? A travers quelques personnages, notamment la famille Willson, les aristocrates descendants dun général de la Confédération, Kelley nous plonge dans quelques dizaines d'années de cetet histoire du Sud, si douloureux, victime de tant d'incompréhension.

On y rencontre pourtant pas mal de bonnes volontés. Une amitié entre un noir et un blanc y est esquissée, battue en brèche par le climat en ces années cinquante. Kelley écrit comme dans une mouvance Richard Wright ou James Baldwin, écrivains "politiques" réfugiés en France un certain temps.Lui-même a quitté l'Amérique assez longtemps, vécu à Paris et Rome, s'est établi un moment en Jamaïque. Cependant Un autre tambour n'est pas un livre pamphlet et s'apparente plutôt à une fable où Tucker Caliban, descendant d'esclave, devient celui par qui le scandale arrive. le roman évite le manichéisme, souvent une plaie dans ce genre d'ouvrages.Tucker agit, silencieux, avec un air de Bartleby, le scribe d'Herman Melville, qui préférerait ne pas le faire. C'est assez impressionnant, Tucker décidant, un jour, de cesser le travail de la terre. Go North Young Man.

le livre doit son titre à une très belle citation de Thoreau. Si un homme ne marche pas au pas de ses camarades, c'est qu'il entend le son d'un autre tambour. Une phrase qui sonne comme une ébauche de liberté, une majesté.

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