À Washington, comme dans la plupart des capitales politiques, l’image dépassait la substance. Milliardaire, à la tête du département d’État pendant quatre ans sous l’ancien président, Rice était devenue l’actionnaire principale du New York Times. Dans un éditorial qui avait le parfum d’une possible candidature aux prochaines présidentielles, Rice accusait l’actuel président républicain Dexter Travis de népotisme. Le programme de satellites tueurs, gelé par l’ancien président démocrate, serait relancé par Travis s’il était réélu. Après enquête, Margaret Rice avait découvert que Dexter Junior, le fils unique de Travis, serait nommé au conseil d’administration de Norton Aircraft Enterprises, le principal constructeur.
Qui voulait la mort de James Sullivan ? Pourquoi se débarrasser d’un sénateur en utilisant un virus inconnu alors qu’on pouvait simplement lui tirer dessus ?
Sullivan et Kaplan, qu’avaient-ils en commun ? Vraisemblablement rien, juste un délire de son imagination. Qu’intentionnellement on ait cherché à « fabriquer » un virus de cette nature pour se débarrasser d’un sénateur et d’un producteur de cinéma semblait absurde. Un programme pareil exigeait des centaines de millions de dollars, et des généticiens en liste pour un prix Nobel.
Les cocktails chimiques demeuraient sans effet. Les tests sanguins révélaient un effondrement du taux des lymphocytes T4, cibles du virus HIV dans l’organisme.
James Sullivan, qui avait 59 ans, souffrait aussi d’une encéphalite secondaire, l’éventuelle réaction d’un système immunitaire défectueux qui au lieu d’attaquer l’agent infectieux ciblait les cellules saines du cerveau.
Les tests HIV sur le sang de James Sullivan étaient négatifs sur les virus du groupe M, mais non concluants sur les virus du groupe O.
Un test HIV dont le résultat n’était ni positif ni négatif était appelé non concluant. Une personne dont le test était non concluant était éventuellement dans la fenêtre d’infection s’il avait subi une exposition récente.
Après des années de sacrifices, Bradley termine des études d’ingénieur dans une obscure université d’État. Il a fait des ménages, été garçon de salle, jardinier, laveur de voitures, souvent tout à la fois, ramassant de maigres salaires pour survivre et payer ses études. Il a tenu bon, ruminant une vengeance qu’il croit ne jamais venir.