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Dans les années 80, Cleo a treize ans et elle rêve d'échapper grâce à la danse à la banalité déprimante de la vie familiale. S'en sortir, vivre une autre vie : c'est justement ce que vient lui proposer Cathy, une femme d'un milieu manifestement plus chic qui l'a repérée à son cours de modern jazz...
Sur fond d'abus sexuels et de consentement (avec des mécanismes d'emprise et de culpabilité très bien décrits), Lola Lafon dresse ici un tableau convaincant sur les inégalités sociales. Il y a aussi cette petite musique du corps, ce corps féminin qui depuis des années échappe à bien des femmes, qui devrait être le synonyme du mouvement et qui en réalité bien souvent nous enferme. En ce sens, je crois qu'avoir pris la danse pour décor n'est pas anodin.
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Cléo a treize ans, Cléo est introvertie, Cléo s'ennuie, Cléo rêve de strass et de popularité, Cléo est naïve et influençable...
En ce milieu des années 80, Cléo ne sait pas dire non à Cathy, cette femme parfumée et étourdissante qui l'entraine à la sortie de la MJC, l'apprivoise et l'achète.
De dîners très spéciaux en castings deuxième classe, Cléo, danseuse de variété s'émancipe et construit sa vie mais garde au fond d'elle le poids ambigu du consentement et de la culpabilité. Autour du monde de la danse, Lola Lafon brode un roman fragmenté mais très bien construit, d'une belle écriture incisive et précise, sachant comme toujours fort bien recréer les atmosphères des lieux et des époques. le sujet est universel, il n'était pas nécessaire d'en faire un roman socialement militant. L'auteur montre par exemple une aigreur mal-placée à l'égard des " Béatrice", "Eugénie", "Domitille", des cours de danse classique, BCBG épargnées et interchangeables à ses yeux, coupables d'avoir eu des mères plus attentives et plus disponibles. Elle fait des émissions de variétés et des spectacles de cabaret l'objet du mépris des classes supérieures alors même que ces divertissements ont à cette époque, comme le cirque, toujours semblé rassembleurs et appréciés de catégories sociales très diverses (sauf d'une certaine presse se voulant intellectuelle). Seule cette analyse "sociale" réductrice du problème de l'exploitation des jeunes filles et des femmes en général tempère un peu mon avis sur ce roman par ailleurs très juste.
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Lola Lafon est une autrice, chanteuse, compositrice, féministe et libertaire française. Pour fuir le régime de Ceausescu, en Roumanie, Lola Lafon se réfugie en France. Après avoir étudié l'anglais à la Sorbonne, elle part comme jeune fille au pair à New-York où elle suit des cours de danse. de retour dans l'Hexagone, elle séjourne dans des squats.
Son dernier roman « Chavirer », paru en août 2020 a reçu :
- le prix du roman des étudiants France Culture – Télérama
- le prix Landerneau.
En 1984, Cléo, 13 ans rêve de faire carrière dans la danse. Malheureusement son existence modeste en banlieue parisienne ne lui permet pas d'accéder à ses rêves. Un jour, Cathy vient à son cours de danse et lui promet de réussir à faire financer ses études par la Fondation Galatée. Mais c'est un piège qui va se refermer sur elle et dans lequel elle va entraîner d'autres amies. Comment peut-on vivre avec ce souvenir ?
Même si ce récit a été imaginé par Lola Lafon, nous savons tous que les trafics sexuels avec de jeunes filles existent dans l'art et dans le sport. Cléo doit trouver sa place entre son statut de victime et son sentiment de culpabilité. On découvre la vie de Cléo à travers le regard de plusieurs personnes de son entourage.
L'éclatement de la narration et de la temporalité m'a un peu gênée. Ce roman est bouleversant et nous fait nous poser plein de questions en tant que parents.
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Je découvre Lola Lafon avec ce roman de la rentrée littéraire et c'est une véritable claque. le ton singulier et les chapitres courts maintiennent le lecteur dans le récit et j'ai été happé du début à la fin. L'auteure traite les mécanismes de prédation des hommes sur des adolescentes mais aussi la culpabilité subit par les femmes plus tard dans leurs vies (et les ambivalences pour elles qui vont avec).

Les pensées et les fonctionnements des nombreux personnages autour de Cléo sont très bien retranscrits et cela favorise l'immersion dans le récit. C'est un livre qu'on a envie de relire pour réfléchir à des passages, à des réflexions. Un livre important à prêter autour de soi pour en discuter.

« …elle s'est fabriqué un lexique du silence. L'horizon est empoissonné. »

Au passage je vous conseille l'écoute de l'émission récente de Marie Richeux (Par les temps qui courent sur France Culture) où Lola Lafon est invitée. Cet entretien prolonge à merveille la lecture du roman.
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Ce roman est dans la lignée du livre « le Consentement » de Vanessa Springora qui fut pour moi un livre coup de poing.
Ici, l'histoire est imaginée par Lola Lafon, mais traite le même thème.
Lola Lafon a imaginé une fondation qui aurait pour but de distribuer des bourses à des jeunes filles méritantes pour les aider à réaliser leurs rêves ; une fois attirées et ferrées ces jeunes filles deviennent des proies. Enfermées dans un piège sexuel et sous emprise psychologique, la jeune fille victime va devenir à son tour complice en tant que rabatteuse. Puis viennent la honte, la culpabilité et le silence …
Victime ou coupable, oubli ou pardon ?
Ce livre à plusieurs voix retrace l'histoire de quelques-unes de ces jeunes et de leur entourage, du silence à la parole qui se libère enfin.
J'ai trouvé la fin très belle, ce n'est pas vraiment une fin mais plutôt une esquisse d'un pardon enfin donné et reçu, une main qui se tend, une voix qui s'élève. C'est une fin qui ressemble à une aurore.
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Il y a des livres qui surprennent, qui prennent au dépourvu, qui vous giflent et vous réveillent en attaquant juste là où vous ne l'attendiez pas. Chavirer m'a fait cet effet-là. Il était dans ma PAL depuis un bon bout de temps mais il a fallu une sorte de déclic pour me conduire à l'ouvrir. J'avais lu « banlieue », j'imaginais des barres de cités à la Kechiche. J'avais lu « viol » et « prostitution », je visualisais des tournantes dans des caves.
Dès les premières pages, j'ai compris que ce n'était pas ça du tout. Chavirer est un roman qui parle de ma génération, de mon univers. Ce que c'est d'être ado dans les années 80-90, d'avoir des rêves de grandeur qu'on veut réaliser à tout prix, d'être dégoûtée par l'inertie de ses parents dont la vie n'est ni totalement réussie ni totalement ratée. Les murs qu'on se prend par naïveté, par innocence, par incompréhension, parce que personne ne se soucie vraiment de nous protéger. La vitesse à laquelle tout bascule, la culpabilité, la honte que rien ne viendra soigner avant des décennies. le piège des classes moyennes qui prônent réussite et individualisme alors même que ça les conduit à leur perte face aux plus puissants qu'eux. le piège de la famille dont on assimile et reproduit les codes sans même en avoir conscience.

A 13 ans, Cléo rêve de devenir danseuse. Lorsque la belle et chic Cathy la « repère » pour candidater à une bourse des jeunes talents, elle est persuadée d'avoir enfin sa chance et plonge dans hésiter. Enfin vue, entendue, écoutée, prise en compte. Charmée par le regard de celles et ceux qui lui disent qu'elle est exceptionnelle, qu'elle a du talent, de la maturité, un avenir.
Évidemment, la fondation Galatée n'existe pas vraiment. Au fond d'elle, Cléo le comprend le jour où un homme de 50 ans lui impose des attouchements lors d'un « déjeuner ». Mais elle est déjà piégée. Dans l'espoir de ranimer ce rêve perdu, elle accepte de recruter d'autres jeunes filles pour la « fondation ».

La suite du roman prend la forme d'un puzzle, des morceaux éparpillés à l'image de Cléo que quelques minutes ont brisée à jamais, qui aura 13 ans toute sa vie. On la voit grandir à travers les yeux de ses amis, ses amants et amantes. Après #metoo les paroles se libèrent, l'espoir d'une rédemption pointe, fragile. Mais n'est-il pas trop tard pour Cléo ?

Chavirer est un roman puissant, intime. La danse y tient une place importante, avec ses paillettes, ses douleurs, ses jeux d'apparence et ses hiérarchies. La danse comme métaphore du sacrifice d'une vie et d'une génération, sur l'autel du spectacle et du plaisir des autres.
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La prose est élégante, seulement ce sujet, qui me semble à la mode, me dérange toujours. Trop de déferlement en littérature de femmes qui dévoilent leur passé de fillette qui voulait vivre de paillettes et ne trouveront qu'un traumatisme d'abus sexuels. Une construction originale qui passe d'un personnage à l'autre mais que, parfois, on n'en comprend pas bien l'apparition, mais qu'il faut insérer pour faire un vrai roman : juif, lesbienne, mère de famille dans le besoin, etc... Aucune ligne n'entre dans le cerveau de ces prédateurs et surtout sur la rabatteuse. Donc, avis mitigé.
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Chléo a 13 ans dans les années 80, elle habite à Fontenay, dans la banlieue est de Paris et a grandi au sein d'une famille aimante de la classe moyenne. Chléo a un rêve : devenir danseuse professionnelle ; pas danseuses classique, non cela est réservé aux Domitille et autres Clarisse qu'elle a croisées dans un cours une année durant, mais danseuse de modern jazz, découvert à la MJC du coin. Quand Cathy, "plus belle qu'une mère et plus fascinante qu'une copine" se présente à la sortie de son cours de modern Jazz pour lui proposer de postuler à une bourse d'études de la Fondation Galatée, qui soutient "les adolescentes avec des projets exceptionnels", Cléo n'hésite pas une seconde, "prête à sauter toutes les cases du jeu".Et le jeu va s'avérer dangereux et dégradant.... encore plus lorsque Chléo, pour sauver sa peau, va accepter de devenir rabatteuse à son tour.
La narration, qui procède par sauts temporels et ellipses, est redoutablement efficace : elle place le lecteur pendant toute la 1° partie dans la situation d'un spectateur impuissant de tragédie : le lecteur pressent en effet très bien ce qui se cache derrière cette soi-disant fondation Galatée, mais il ne peut prévenir Cléo, il ne peut l'empêcher de se jeter dans la gueule du loup...comme tout personnage de tragédie, donc, Chléo inspire de l'empathie, de la pitié, aurait dit Aristote, jamais de jugement , même lorsqu'elle entraîne la jeune Betty , 12 ans, dans les Enfers, d'autant plus que Chléo va désormais vivre dans la honte et la culpabilité. D'autre part, la narration se distingue par son absence totale de complaisance envers les faits de pédophilie, évoqués le plus souvent par allusion,
Mais au delà de l'évocation d'un réseau pédophile, de ses conséquences à très long terme, sur les jeunes victimes , il y a aussi l'évocation de toute une époque et d 'un milieu : la classe moyenne dans les années 80, que Lola Lafon a vraiment l'art d'encapsuler de façon totalement vraisemblable. Elle écrit ainsi un roman politique, qui dépeint cruellement une sorte de résignation de classe. Elément central de ce roman, le corps est présenté comme un enjeu politique : corps abusé, fantasmé, martyrisé, instrumentalisé, corps qui dit la souffrance, la douleur, sans être entendu par les autres personnages, qui gravitent autour de ces danseuses et parfois pourtant spécialistes : kiné, habilleuses, amis, amant-e-s.... Ces personnages «  secondaires » font souvent l'objet de beaux portraits, c'est une des nombreuses qualités de ce très beau roman , à recommander vivement.
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Lola Lafon narre ici une histoire à travers les âges, croise les regards, brosse des portraits patinés dans le temps, des portraits de femmes abîmées dans l'enfance, porteuses de honte, de blessures crasses. Elle ne s'attarde sur rien, n'alourdit pas le sordide qui est dit mais qui n'a nul besoin de promotion, ne fouille pas le désespoir, ne scrute pas les failles, les symptômes, ne creuse pas davantage les travées qui courent dans les souterrains du terreau familial pour comprendre….Et pourtant, en quelques phrases, nous sommes projetés dans le quotidien d'une famille modeste, dans une cour de collège où une nuée d'adolescents grouille et tremble de ne pas savoir comment exister ; dans un studio au milieu d'une chorégraphie de corps endurés, endurants ; dans les coulisses d'un music hall au coeur des froufrous, plumes, strass et nudités….En quelques phrases, nous ressentons l'emprise refermer son piège sur les toutes jeunes filles animées par le rêve, le rêve qui seul les tient hors de l'eau, le rêve qui va devenir appât des perversités adultes. En quelques phrases, nous accompagnons la frêle Cléo, évanescente, naïve puis insaisissable, proie du silence qui emprisonne et qui coupe à la racine les élans vitaux nécessaires pour grandir. Cléo grandira mais en clandestine, dissociée donc étrange aux yeux de tous. Elle échappe à défaut de s'échapper du gouffre qui grossit en elle. Les rencontres amicales, professionnelles, amoureuses qui égrainent son parcours témoignent et ainsi étoffent son portrait, ajoutant des couleurs, des demi-teintes, des accros…Comment peut-on évoluer, faire une vie sans que jamais, ou pendant longtemps, personne n'arrête, ne stoppe la mécanique du déni destructeur, de la culpabilité infondée, malgré les manettes déposées dans les mains de la poupée manipulée, de la culpabilité fourbe et reine toute puissante au contrôle de tout ce qui anime, agit, aime.
Lola Lafon évite les écueils du tranchant, de la vision manichéenne, d'une colère qui aurait sa place mais qui effraie, essouffle le quidam. (Colère nécessaire pour dire un Non, un Je mais quelle est la place ensuite pour le débat et la réflexion à mener, faire société et préserver l'acte de nommer ? Impossible de ne pas penser au roman de Gabrielle Tuloup, Sauf que ce n'étaient que des enfants ici.)
Lola Lafon n'accorde que très peu de lignes aux responsables, ni en les diabolisant ni en les justifiant : juste ils sont et ils font. Seule la rabatteuse a un prénom car l'affectif est son arme, et happer, ferrer par le biais de la reconnaissance dont on a tous besoin pour se sentir vivant signe le mode de capture. L'auteure n'élude pas la souffrance mais à la façon de beaucoup de ces personnes à jamais marquées, elle empreinte la voix/ la voie de la sobriété, de la dignité, signes d'honneur ? D'une solitude surtout.
Cléo, Betty…sont des ombres qui évoluent au milieu de nous ; on compose avec leurs contours, on s'en contente. Heureusement certains verront plus loin, un peu, dépasseront la ligne floutée de la silhouette, un peu ; mais combien il est difficile d'approcher le centre et l'ouvrir à la lumière.
Lola Lafon ne décortique rien pour démontrer le réseau criminel, la vulnérabilité, les failles des victimes. Et c'est là selon moi toute la brillance de son écriture car derrière une simplicité apparente d'une fiction fluide à lire, se tapit, se faufile l'essence de qui nous sommes (Cléo, Betty, amis, proches, ex, collègues, voisins…) et que nous reconnaissons immédiatement car les mots se logent en nous. Ni tout noir, ni tout blanc ; jamais héroïques mais plus courageux qu'on ne croit ; culpabilisés de se sentir vulnérables ; éduqués souvent pour se taire, étouffer le soi ; reliés les uns aux autres, qu'on le veuille ou non on se construit contre ou avec ; dans une quête infinie d'amour et d'affection, donc de sécurité….Que tout a son revers, que tout peut basculer en son envers, le tout est de ne pas tomber ; tanguer, chavirer peut-être mais ne pas s'effondrer et revenir droit, à son endroit, debout.
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Roman remarquable, rythmé, construit à partir des différents témoins du parcours de vie d'une danseuse qui a été abusée (dans tous les sens du terme) à 13 ans. Victime ou bourreau ? Au fil des années, on voit Cléo se battre avec son corps et sa conscience.
Ce roman traite avec beaucoup d'humanité de sujets graves : pédophilie, image du corps des femmes, lutte des classes, ... On peut en avoir différents prismes de lecture : psychologique, sociologique, philosophique, politique, historique.
Sans que cela soit poussif, ce roman nous fait réfléchir. À mettre entre les mains de tous, dès l'adolescence, pour débusquer la pute qui est en chacun d'entre nous : "ces hontes minuscules, de consentir journellement à renforcer ce qu'on dénonce".
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